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Biocapteurs : Le vivant mesure la toxicité globale

04 novembre 2018 Paru dans le N°415 à la page 157 ( mots)
Rédigé par : Jacques-olivier BARUCH

Contrairement à une analyse chimique qui mesure un seul paramètre, l’utilisation d’êtres vivants permet d’alerter sur une possible pollution, même multifactorielle. Les biocapteurs ont l’avenir devant eux.

Finie la multitude d’analyses chimiques pour déterminer la toxicité d’une eau, qu’elle soit brute, usée ou potable ? Et va-t-on enfin mesurer le degré de toxicité des micropolluants dont l’action néfaste provient de leur concomitance ? C’est possible au vu du nombre de laboratoires qui mettent au point ou commercialisent ce qu’on appelle des biocapteurs ou des bioessais. 

Mais dabord, qu’est-ce qu’un biocapteur ? « Il existe des définitions très précises et très techniques de ce qu’est un biocapteur, explique Olivier Sibourg chez Enoveo. Malgré cela, on constate que l’on place beaucoup de choses sous l’égide du biocapteur. On estime par exemple que dès lors que l’on utilise le milieu vivant, on travaille sur un biocapteur. Cela n’est pas forcément inexact, mais il faut être très précis sur le sens des mots biodétecteurs, bioindicateurs ou biocapteurs et définir avec précision ce qu’ils recouvrent exactement ».

Le biocapteur NODE associe un biocapteur microbien développé par Enoveo avec une technologie d’automate autonome communicant développée par Hydreka.

Un marché prometteur mais encore en devenir

L’idée d’utiliser des organismes vivants n’est pas nouvelle. Depuis 1962, les tests de glycémie sont réalisés grâce à des systèmes alliant une enzyme, la glucose oxydase, qui convertit le glucose en acide gluconique, et un transducteur qui mesure cette oxydation ampérométriquement. Mais dans le domaine de l’environnement, le marché est bien plus jeune. Pour les mesures de toxicité de l’eau, le principe est le même, avec parfois des mesures optiques ou sonores. Ce n’est plus un paramètre qui doit être mesuré, mais une multitude à effets souvent additionnels ainsi que de possibles effets cocktails. « Plutôt que de mesurer un ou plusieurs paramètres, les biocapteurs permettent de connaître les effets de l'ensemble des perturbateurs sur le vivant, résume Gregory Lemkine, président du Laboratoire Watchfrog. C’est bien plus efficace ». « Bien que le marché ne soit pas encore mature, nous le surveillons attentivement », ajoute-t-il.
L’intérêt des industriels comme des pouvoirs publics est effectivement palpable. Dans la filière eau, au ministère de l’Economie et des finances, des aides pour s’équiper de biocapteurs sont désormais envisagées. La nouvelle directive européenne sur l’eau dont la discussion va débuter l’année prochaine pour une sortie en 2020 ou 2021, intégrera ces biocapteurs pour mesurer la toxicité des eaux. Même constat chez Enoveo qui a développé, en partenariat avec Hydreka, le biocapteur NODE qui associe un biocapteur microbien avec automate autonome communicant doté d’une intelligence embarquée : « Les nombreux acteurs avec lesquels nous avons travaillé en phase de développement ont d’emblée manifesté un intérêt immédiat, souligne Olivier Sibourg. Aujourd’hui, alors que les déploiements se succèdent à un rythme important, cet intérêt se confirme aussi bien au sein des agences de l’eau que de la part des grands acteurs du secteur ».
Même si le marché n’est qu’embryonnaire, 66 biocapteurs étaient commercialisés dans le monde en 2014, selon une étude parue dans Trends in analytical chemistry. Ce ne sont plus des enzymes qui subissent les perturbations dues à la toxicité du milieu, mais des êtres à part entière, soit monocellulaires comme les bactéries, soit multicellulaires comme les poissons, les amphibiens ou les crustacés. Chacun a ses avantages… et ses inconvénients. Tout dépend du ou des paramètre(s) à mesurer et de l’application dans laquelle le biocapteur doit s’insérer.

Biocapteurs : une grande diversité, Comment les classifier ?

Une première possibilité consiste à les classer en fonction du milieu vivant sur lequel ils reposent. Les êtres vivants les plus simples sont les bactéries. C’est sur les bactéries que reposent par exemple le toximètre en ligne TOXcontrol version iTOX de la société néerlandaise MicroLan représentée par Bionef ou les nouveaux biocapteurs NODE développés par Enoveo en partenariat avec Hydreka. Mais c’est leur seul point commun. Alors que le toximètre en ligne TOXcontrol version iTOX fonctionne selon l’émission de luminescence de bactéries naturelles cultivées en continu, NODE mesure un signal électrique émis par des bactéries provenant directement du milieu aquatique à surveiller. Et leurs différences ne s’arrêtent pas là.
Vue du toximètre en ligne TOXcontrol version iTOX commercialisé par Bionef.

Le grand avantage du toximètre en ligne TOXcontrol version iTOX est qu'il respecte la norme de la mesure microTOX mondialement reconnue pour les laboratoires d'analyse. Ce toximètre en ligne convient bien à la surveillance de la qualité des eaux de rivières : Il est notamment utilisé pour surveiller les eaux du Danube, du Rhin, de la Marne, de la Loire et du Rhône. Mais il trouve également de nombreuses applications en eaux souterraines et usées.

Le biocapteur NODE repose sur une logique différente. Il associe un biocapteur microbien autonome en énergie développé par Enoveo avec une technologie d’automate autonome intelligent et communicant développée par Hydreka. « La particularité de ce capteur, c’est qu’il repose sur des bactéries qui proviennent du milieu que l’on veut surveiller, explique Olivier Sibourg chez Enoveo. Ce n’est pas une espèce de bactéries que l’on développe en laboratoire. Si l’on souhaite surveiller une nappe phréatique, on prélèvera l’ensemble des bactéries indigènes au sein même de cette nappe et on développera le capteur sur la base de ces communautés microbiennes qui sont capables de corriger ou de suivre les modifications du milieu dans lequel elles vivent depuis toujours. Même principe si l’on travaille sur un réseau d’assainissement ou une station d’épuration. C’est donc un capteur dimensionné et fabriqué pour mesurer très précisément l’environnement dans lequel il va être positionné ». Le signal émis est directement corrélé à l’activité des microorganismes présents à la surface des électrodes. Les variations de charge organique se traduisent par une variation de l’activité des microorganismes et donc par l’augmentation ou la diminution, en temps réel, de l’intensité du signal électrique émis par le biocapteur. Le capteur est donc capable de fournir une mesure équivalente à la DBO5 en quelques minutes ce qui va permettre à l’exploitant d’une station d’épuration biologique, par exemple, de gérer la consommation d’énergie en asservissant l’aération à la charge entrante. Dans le cas de l’apparition d’un composé toxique, l’activité des bactéries diminue ou cesse, se traduisant par une chute immédiate du signal électrique ce qui permet de diagnostiquer la toxicité d’un effluent vis-à-vis d’un milieu.
L'InSiTox est un appareil dédié à la biosurveillance 24h/24 directement installé chez l’utilisateur et mis en œuvre par ses soins en autonomie totale, du fait notamment de sa conception empreinte de robustesse, de simplicité d'usage et d'opérationnalité. L'appareil est ainsi prévu pour un usage en autodiagnostic, autocontrôle, c'est à dire pour des applications en surveillance de la ressource, lutte contre les actes malveillants, mesure d'efficacité process, indicateur qualité en amélioration continue tant dans un contexte eau douce qu'eau marine.

A ce biocapteur est associé un automate autonome intelligent et communiquant développé par Hydreka. « Il embarque un mini-système d’exploitation, ce qui permet de traiter l’information localement et de créer des applications, explique Philippe Jolivet, Directeur Général d’Hydreka. Demain, il sera possible de développée des approches multiparamétriques en intégrant d’autres paramètres en corrélation avec le biocapteur pour disposer d’un monitoring encore plus précis et encore plus proche de l’état du milieu ». La gamme de biocapteurs NODE ne nécessitant pas d’électricité pour son fonctionnement, ils peuvent être installés de manière autonome ou être intégrés à des systèmes existants. Le faible encombrement et le poids inférieur à 2 kg, permettent d’envisager un large domaine d’applications. Que ce soit du monitoring temps réel d’effluents industriels ou urbains, la surveillance de nappes phréatiques, de la caractérisation de dysfonctionnement de procédés, de la gestion de pollutions accidentelles dans des délais très courts ou encore de quantifier, qualifier la dynamique des flux de milieux aquatiques.

InSiTox, conçu et fabriqué par Tronico VigiCell repose quant à lui sur l’exploitation non pas de une mais de trois souches bactériennes naturellement bioluminescentes simultanément, Aliivibrio fisheri, Vibrio harveyi et Photobacterium leiognathi. Ce toximètre permet une mesure de la toxicité in situ, par tout opérateur en délivrant un résultat en deux heures.
Le Fluotox excite les algues avec une source lumineuse constante à 500 Hz (dans le bleu), puis capte et traite la fluorescence émise. Cet appareil peut détecter la toxicité des herbicides comme l’atrazine à des teneurs faibles de l’ordre du ppb.

Les algues, dont l’utilisation la plus connue est commercialisée sous le nom de Fluotox sont également exploitées. Il a été conçu par Aspect Service Environnement pour Arnatronic. Comme pour le système AlgaeTox BBE distribué par Bionef, cet appareil est basé sur le principe de la fluorescence. Cette émission lumineuse est en effet représentative de l’activité photosynthétique des algues, car les herbicides bloquent la photosynthèse. L’énergie solaire reçue se transforme alors en chaleur et en rayonnement de fluorescence. L’amplitude de ce rayonnement indique le taux d’inhibition photosynthétique de la plante. Le Fluotox excite les algues avec une source lumineuse constante à 500 Hz (dans le bleu), puis capte et traite la fluorescence émise. Cet appareil peut détecter la toxicité des herbicides comme l’atrazine à des teneurs faibles de l’ordre du ppb (parties par billion). Il coûte environ 25.000 euros à l’achat et son fonctionnement mensuel coûte environ 200 euros puisqu’il faut renouveler les algues une fois par mois (entretien 2h). Les algues sont envoyées par la poste et peuvent être conservées 6 mois au réfrigérateur.

De récents développements permettent d’utiliser Truitel sur de l’eau chlorée, par exemple en sortie d’usine ou sur le réseau, pour protéger des établissements sensibles alimentés en eau potable, par exemple.

Pour les puces d’eau, les daphnies, utilisé dans le DTox II que commercialise Bionef, c’est le comportement des animaux qui donne la mesure. Celle-ci s’effectue dans une chambre que l’eau parcourt de façon continue. Cette chambre est observée par une caméra CCD dont les images des daphnies sont évaluées en ligne afin d’analyser les changements de vitesse, de hauteur de nage, de situation ou d'angles de déplacement. Ce n’est que si plus de deux des mesures simultanées montrent des valeurs inhabituelles, que le toximètre Daphnies DTox II déclenchera une alarme.

En analyse différée, les gammares, espèces de crevettes d'eau douce, sont transplantés par Biomae à l'aide de cages directement dans le milieu récepteur. Les réponses biologiques des individus exposés sont comparées aux valeurs de référence obtenues à partir de la population source utilisée (Gammaref®). Cette population de référence est élevée dans des bassins à côté de Lyon. Ils ont la capacité de bioaccumuler les micropolluants, ce qui permet de les tracer dans le milieu récepteur mais sont aussi sensibles à la présence de micropolluants présents en mélange complexe, ce qui se traduit par l'apparition d'effets précoces mesurés à l'aide de marqueurs de toxicité. Comme le décrit le Guide européen issus de la Directive cadre sur l’eau d’août 2013, « l’encagement d’invertébré est une solution pertinente pour répondre aux besoins de suivi dans le biote ».
Le Laboratoire Watchfrog a développé des tests sur une technologie normée (NF T90-716 1 et 2) pour mesurer, par fluorescence, les effets des perturbateurs endocriniens sur des larves d’amphibiens ou de poissons. La solution de biosurveillance sur site FrogBox permet une mesure en continu avec un relevé toutes les 3 heures.

La société norvégienne Imari avait mis au point Biota Guard, un système reposant sur des moules car, en conditions normales, une moule reste ouverte 70 à 80 % du temps pour prélever l’oxygène du milieu nécessaire à sa respiration, ainsi que les particules de phytoplancton en suspension qui lui servent de nourriture. Mais quand cette eau est de mauvaise qualité, on observe chez l’animal un mouvement d’hyperactivité ou des fermetures plus longues des valves dues à l’irritation des muqueuses. Cette réactivité peut être traduite en signal. C’est aussi sur ce principe qu’est construit le Musselmonitor de la Néerlandaise Aqua Dect. Avec au choix, les espèces d’eau douce Dreissena polymorpha et Unio pictorum ou les espèces marines Mytilus edulis. Tout dépend du paramètre à mesurer. Par exemple les espèces d’eau douce seront plus sensibles au toluène, tandis que l’espèce marine sera plus réactive à la présence de sulfate de cuivre. Reste que la commercialisation de ces deux appareils s’avère ardue. « Du fait de cette difficulté, nous avons arrêté de vendre le Biota Guard en attendant un marché plus propice », regrette Berit Lunde Heltne, responsable des ventes d’Imari SA.

Le Laboratoire Watchfrog, de son côté, a développé des tests sur une technologie normée (NF T90-716 1 et 2) pour mesurer, par fluorescence, les effets des perturbateurs endocriniens sur des larves d’amphibiens ou de poissons. La solution de biosurveillance sur site FrogBox permet une mesure en continu avec un relevé toutes les 3 heures. Outre les campagnes de biosurveillance permanentes ou saisonnières, « nous proposons également des tests pour cartographier l’ensemble d’un bassin-versant pour identifier les sources de contaminations, ajoute Gregory Lemkine. L’utilisation de larves aquatiques présente un double avantage : une solution éthique qui mesure la qualité physiologique de l’eau et permet de valider l’efficacité des traitements et des actions correctives. Nos tests biologiques permettent de lever les doutes sur l’impact des micropolluants et démontrer que des stations d’épuration, bien que conçues pour traiter la pollution organique, sont souvent très efficaces pour traiter cette pollution chimique ».
Couple de gammares observés à la loupe binoculaire.

Et puis il y a le sommet de la pyramide du vivant aquatique, l’utilisation des poissons. Le plus ancien et le plus commercialisé est le Truitel de la gamme Truitosem de Cifec. « C’est une station d’alerte placée quelques kilomètres en amont de la station d’eau », explique Marc Lambert chez Cifec.

Les vairons ou les truitelles sont placés dans un aquarium de 200 litres mis à température. Ils baignent dans un champ ultrasonore mesuré en bout d’aquarium.
Comme pour les daphnies, c’est la modification de comportement des poissons qui est analysée. L’écho renvoyé par les poissons dépend en effet de leur activité. Point fort du dispositif, sa sensibilité, très large puisqu’elle dépend du choix du poisson utilisé et des réglages du détecteur. De récents développements permettent d’utiliser Truitel sur de l’eau chlorée, par exemple en sortie d’usine ou sur le réseau, pour protéger des établissements sensibles alimentés en eau potable, par exemple.

Avec son Gymnotox, un biocapteur à large spectre de polluants, AquaMS a quant à elle jeté son dévolu sur des poissons originaires des eaux douces d’Amérique du Sud, Apteronotus albifrons, dont l’activité électrique est facilement mesurable. Il faut les changer tous les 15 jours quand ils deviennent trop gros.

C’est pourquoi AquaMS livre, en même temps que son aquarium de mesure, un vivier alimenté par des spécimens vendus pour les aquariophiles. Contrairement au Truitel dont le principe de détection repose le comportement des poissons, le Gymnotox se base sur la réaction biologique du poisson qui est très sensible aux changements physico-chimiques du milieu dans lequel il évolue.

Cette sensibilité se traduit par une modification de la fréquence des décharges électriques du poisson. Ces perturbations reflètent son métabolisme et témoignent des variations de qualité du milieu. Pour détecter la pollution, il s’agit donc d’identifier toute anomalie dans sa régularité coutumière. C’est ce que fait le Gymnotox. Pour plus de fiabilité, il intègre un double circuit de surveillance et assure une mesure toute les dix secondes sur un signal acquis en continu.

Les vairons de Cifec sont plus répandus. « Ils servent d’appât aux pécheurs de brochet, poursuit Marc Lambert. Notre fournisseur breton peut donc en envoyer sous 24 heures pour un coût de 100 euros pour 100 vairons ». La limite de cette utilisation de poissons, comme des bivalves, est leur très grande sensibilité à la température et à la turbidité. « L’évolution de la forme et de la fréquence du signal électrique généré par le poisson est dépendante des caractéristiques physico-chimiques de l’eau dans laquelle évolue l’Apteronotus, explique Nicolas Vaudois chez AquaMS. C’est pourquoi l’une des principales actions du Gymnotox est de réguler la température au dixième de degré près, avec une chauffe lente et progressive de l’eau pour ne pas modifier d’autres paramètres que nous souhaitons mesurer. Le poisson vit alors dans une eau à 25 °C, stabilisée, où son signal électrique est analysé en continu. L’introduction dans les bacs de vie d’une concentration en pesticides, ou en hydrocarbures par exemple, même très légère de l’ordre de quelques dizaines de microgrammes, se reflète aussitôt sur le signal électrique. Le module de calcul compare en continu les valeurs du signal généré par rapport à celles enregistrées à l’introduction du poisson pendant la phase de calibration au démarrage. Cette action est conduite automatiquement par le Gymnotox ». Une dizaine de Gymnotox sont installés en France contre environ 200 Truitel.

Un biocapteur, oui mais pour quoi faire ?

Potentiellement, les avantages liés à l’utilisation d’un biocapteur sont nombreux. « Sur le principe, en substituant à la recherche d’un polluant une observation de ses effets sur le vivant, on élargit considérablement le spectre des substances nocives détectables en allant bien au delà de ce que peut réaliser une analyse physico-chimique », comme le résume Laurent Paulic, directeur des études de Tronico Vigicell (groupe Alcen).
Pour autant, les biocapteurs ne s’opposent pas aux autres méthodes analytiques, bien au contraire. D’abord parce qu’ils ne se situent pas d’emblée dans le cadre d’une approche réglementaire ou normée. « L’objectif de NODE, capable de fournir un équivalent DBO5 en 5 minutes, n’est bien évidemment pas de fournir un résultat à une Dreal qui aura toujours besoin d’un laboratoire accrédité Cofrac, explique par exemple Olivier Sibourg chez Enoveo. Ce que l’on cherche à faire, c’est apporter des éléments concrets en temps réel pour améliorer le pilotage d’un process ».

Dans cet esprit, le biocapteur s’insère dans une chaîne analytique diversifiée pour la compléter et tenter de dépasser le paradigme qui consiste trop souvent à exploiter, a posteriori, des résultats fournis par un analyseur en cas de problème. « Le biocapteur de demain devra être couplé avec des outils de gestions courante, avec des capteurs traditionnels et des intelligences artificielles au sein de systèmes autonomes qui seront capables d’aider l’exploitant à anticiper les problèmes tout en l’aidant à optimiser ces process », estime Philippe Jolivet chez Hydreka.

Mais d’autres questions se posent comme par exemple celles liées à la précision de la mesure ou à son coût. Ces derniers sont très variables et doivent bien évidement être rapportés à l’application à laquelle ils se rattachent. La version de base de Truitel est venue à 7.900 euros, mais des options peuvent s’avérer nécessaires. Il sera d’environ 15.000 euros pour la prochaine version de Gymnotox (2019) dont l’encombrement général et l’espace de vie des poissons sont grandement optimisés et améliorés, ainsi que le système de chauffe et son accessibilité.
La question des coûts reste difficile à appréhender. « Est-ce que l’exploitant veut acheter un capteur ? une information ? un diagnostic ? un service ? » s’interroge par exemple Olivier Sibourg chez Enoveo.
Pour répondre à la plupart des attentes et favoriser un déploiement important, Watchfrog propose, pour sa FrogBox, des forfaits vente ou location, selon l’usage qui en est fait.
De même, Enoveo et Hydreka ont opté pour une approche diversifiée associant achat, location et prestation de service permettant au client une meilleure compréhension du process mais aussi une aide à la décision.
Le Gymnotox se base sur la réaction biologique du poisson qui est très sensible aux changements physico-chimiques du milieu dans lequel il évolue. Cette sensibilité se traduit par une modification de la fréquence des décharges électriques du poisson. Ces perturbations reflètent son métabolisme et témoignent des variations de qualité du milieu.

Les déploiements de NODE sont facilités par un coût relativement attractif et une maintenance quasi-nulle qui séduit les exploitants. Car même si les techniques ne s’opposent pas, elles se comparent !

« Une station d’alerte représente un investissement de plusieurs centaines de milliers d’euros alors qu’un biocapteur ne nécessite que quelques dizaines de kiloeuros. Avec les mêmes moyens financiers, on peut déployer bien plus de biocapteurs et disposer ainsi d’une meilleure compréhension de ce qui se passe sur le terrain, résume Olivier Sibourg. Pour un budget de 900 à 1.000 euros par mois, vous avez accès à l’ensemble des données alors qu’une sonde physico-chimique coûte plusieurs dizaines de milliers d’euros sans même parler de son installation et de tout ce qui relève de la maintenance ».
Car la maintenance est un autre point sensible pour de nombreux exploitants. Les biocapteurs NODE qui fonctionnement depuis un peu plus d’un an sur les réseaux d’assainissement du Grand Lyon ne nécessitent pas de maintenance particulière.
« Quant à ceux testés en stations d’épuration, leur maintenance est bien plus légère que celle liées aux capteurs traditionnels », précise Olivier Sibourg.
Finalement, les limites des biocapteurs tiendraient surtout à la méconnaissance de ceux qui pourraient les utiliser. « Il ne viendrait jamais à l’esprit d’un utilisateur d’attendre d’un double décimètre qu’il lui donne la température d’une eau s’il le plonge dedans, regrette Laurent Paulic chez Tronico Vigicell (groupe Alcen). Malheureusement, dans le cas des biocapteurs, c’est encore une attitude courante ». Il va falloir que les mentalités évoluent ! 


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