En une quinzaine d’années, le marché de la surveillance de la qualité de l’eau dans les milieux naturels a connu une évolution importante, rendant désormais possible le suivi en ligne en continu. Cette évolution revêt plusieurs facettes?: le développement des technologies optiques et des biocapteurs, l’optimisation de la consommation énergétique, le déploiement des communications sans fil, etc.
L ’eau est essentielle pour tous les êtres vivants, mais on n’en oublierait presque qu’il ne s’agit pas d’une ressource inépuisable. L’accélération des événements récents liés au changement climatique, tels que des périodes de sécheresse de plus en plus longues en France, les gigantesques feux de forêts au Canada, les inondations en Grèce ou en Libye nous rappelle que la préservation de l’eau sur Terre revêt une importance capitale. Mais encore faut-il bien connaître l’état des ressources disponibles. «Cela a forcément des conséquences sur la qualité de l’eau potable, mais on est, aujourd’hui, encore plus focalisé sur les besoins en volume, c’est-à-dire la manière de faire pour économiser l’eau, que sur l’impact sur sa qualité», constate Séverine Goulette, Marketing Manager chez Aqualabo.
Pour Goulven Prud’Homme, responsable service commercial chez NKE Instrumentation, «s’il y a bien une attention portée à la réduction de l’impact sur l’environnement, en particulier depuis trois ans et l’apparition du Covid-19, la réglementation reste, quand même, le principal argument décisionnaire pour l’acquisition et la mise en place d’équipements de surveillance du milieu naturel. Et, surtout, les amendes qui peuvent être appliquées en cas de non-respect de ces réglementations». Les réglementations en vigueur viennent, notamment, de la «loi sur l’Eau» dans des projets d’installations, d’ouvrages, travaux et activités (IOTA) et de directives européennes transposées dans chaque pays. «Si les acteurs concernés vont très peu au-delà de ce qui est décrit dans les réglementations, c’est parce que les contrôles demandés sont très souvent des mesures ponctuelles, par prélèvement puis analyse dans des laboratoires, publics ou privés, accrédités par le ministère», précise Camille Triffaux, BU leader Environmental Expertise chez Hydreka.
«Les ressources proviennent du milieu naturel et évoluent donc en fonction des changements qu’il peut subir. Les procédés de traitement de l’eau potable ont été dimensionnés par rapport à la qualité d’eau de l’époque de leur mise en œuvre. Mais les ressources évoluant, l’efficacité des procédés n’est plus forcément optimale. Avec la sécheresse de l’année dernière – la diminution significative du niveau des cours d’eau révèle une pollution déjà présente, mais jusque-là plus “diluée” – , tous les acteurs qui ne l’avaient pas encore fait se sont mis à contrôler l’eau brute en entrée de leurs stations d’eau potable, en plus de la surveillance en sortie. Soit pour arrêter le captage, soit pour mélanger plusieurs sources, soit pour abattre les matières organiques», explique Guillaume Schneider, Sales Manager de Swan Instruments d’analyse France.
En plus de l’optimisation de leurs procédés existants, les industriels peuvent
être intéressés par la réutilisation des
eaux usées, ce que l’on désigne par le
concept de «reuse». Séverine Goulette
(Aqualabo) identifie, enfin, une autre raison à la demande de systèmes de surveillance: «Il s’agit de mener des études
dans le but de disposer d’une meilleure
connaissance de la qualité des eaux sur
les bassins versants, des eaux côtières et
de mer. Les résultats de ces campagnes de
mesure permettent d’alimenter des bases
d’informations pour les ostréiculteurs, les
exploitants des ports, etc.»
UN « PACKAGE » DE PARAMÈTRES DEMANDÉS
Quand on parle de surveillance du milieu
naturel, il est pertinent de s’intéresser
aux paramètres réellement suivis. Pour
Camille Triffaux (Hydreka), «la liste peut
être très longue, mais elle dépend surtout de l’usage dont il est question. Avec
l’eau potable, les paramètres demandés
sont le COT, qui est un indicateur de
pollution global des cours d’eau, l’azote
et le phosphore. Pour les eaux usées, ce
sont la DBO5 (paramètre réglementaire
le plus suivi pour la qualité de l’eau des
rivières), la DCO (autre indicateur de pollution global), l’azote et le phosphore.»
L’instrumentation du milieu naturel
est le domaine de spécialistes bien
connus comme Anael, Bionef, Burkert,
Endress+Hauser, Ijinus, Krohne, Nivus,
Paratronic, S::can, Swan, Vega, VorteX.io ou Xylem pour ne citer qu’eux.
Parmi les autres paramètres demandés, on trouve également le pH, le redox, la température, la conductivité électrique, l’oxygène dissous ce dernier donne une image de l’état écologique du milieu et la turbidité. «La mesure de turbidité est le paramètre le plus classique. Quand on s’intéresse à l’origine des sources, la mesure de conductivité électrique est alors demandée. Chaque source a une conductivité électrique donnée et c’est une valeur très stable dans le temps, tant que la source est alimentée de la même façon. Si ce paramètre change, cela signifie peutêtre que la source subit un changement géologique dans le terrain, avec une origine d’alimentation différente et, donc, un risque de pollution», explique Alexandre Huchon, directeur commercial d’EFS.
Il peut être également pertinent de rechercher des hydrocarbures, des nitrates, ammonium et fluors (par exemple, en Bretagne) et d’autres polluants spécifiques, les métaux lourds, ainsi que la chlorophylle, la phycocyanine, les perturbateurs endocriniens, les médicaments, les micro-plastiques, la bactériologie (coliformes, escherichiacoli…), les cyanobactéries. «Les paramètres à suivre ne sont pas forcément si bien définis que ça dans la réglementation. Ils sont liés au milieu qu’on souhaite surveiller: les problématiques sont différentes entre l’estuaire de la Loire et un lac au milieu de la France. Et tous les organismes n’ont pas les mêmes objectifs», constate Goulven Prud’Homme (NKE Instrumentation).
Pour la surveillance multiparamétrique, incluant les algues bleu-vert, appelées aussi cyanobactéries, SDEC recommande toujours ses sondes Aquatroll qui offrent des temps de réponse très rapide grâce aux 6 ports de capteurs interchangeables dont le capteur de température qui utilise une thermistance étendue RDO®. Instruments et controls, qui aborde outre le secteur de l’eau, les domaines de l’oil & gaz, la chimie, la parapharmacie et l’industrie au sens large notamment, offre dans ce cas tout un panel d’outils permettant d’effectuer le monitoring du milieu. Il ne faut pas oublier non plus l’aspect quantitatif, qui est, lui aussi, réglementé. «Les acteurs tels que Vigicrues et autres services de l’État, les aménageurs tels que la Compagnie nationale du Rhône (CNR) et la Compagnie d’aménagement des coteaux de Gascogne, EDF, des collectivités locales, etc. doivent quantifier les débits d’eau dans les milieux naturels.
Nous leur proposons des solutions de mesure de niveau, reposant sur une technologie de capteurs : radar (aérien), des sondes piézométriques (immersion), caméra. Grâce à la bancarisation des données des capteurs sur nos centrales d’acquisition, les acteurs peuvent par la suite avec des relations haut-débit connaitre les débits. Les mêmes clients peuvent avoir besoin de connaître les précipeuritatiture», décrit Joan Petringer, directeur commercial Hydrologie et cycle de l’eau, responsable DOM-TOM de Paratronic.
Pour la gestion des crues, Vega recommande son Vegapuls Air qui offre une
complète autonomie grâce au panneau solaire et au système central en
mode SAAS qui alerte en cas de risque
d’inondation.
Le suivi de l’environnement est une
des spécialités pour laquelle Bionef est
reconnu avec notamment ses sondes de
turbidité, O2
, algues, COT, DCO optiques,
et hydrocarbures. «Pour la surveillance
des cyanobactéries, l’AlgaeTorch est la
seule aussi fiable et biologiquement représentative car nous mesurons via l’activité
des algues présentes. Et nous pouvons également quantifier le phytobenthos qui de
plus en plus est source de problème sanitaires» assure Yves Primault, CEO Bionef.
Au sein du groupe Claire, Ijinus propose
son capteur de niveau LNR basé sur la
technologie radar qui offre l’avantage
de combiner dans un seul module un
capteur et un logger.
LES TECHNOLOGIES OPTIQUES PRÉDOMINENT
Les fabricants de systèmes de surveillance de l’eau dans les milieux naturels ont à leur disposition différentes techniques de mesure. On retrouve également les sondes électrochimiques classiques pour les mesures de pH et de conductivité électrique par exemple. «L’inconvénient avec les sondes de pH réside dans le fait qu’elles doivent être étalonnées tous les mois, pare que le référentiel se pollue, entraînant la dérive de la mesure. Cela peut vite devenir contraignant pour les utilisateurs», indique Alexandre Huchon (EFS). Il met en avant un autre type de technologies: «Pour la mesure du chlore dans une plage comprise entre 0,1 et 0,5 mg/l, nous avons développé un lab-on-chip, ou laboratoire sur puce. L’un de ses principaux avantages est la consommation de quantités extrêmement faibles d’eau (jusqu’à 20 l par an) et de réactifs. Ce concept ouvre une multitude d’applications possibles.»
C’est ce genre d’inconvénients qui a contribué à l’essor des techniques de mesure optiques. A commencer par le coefficient d’absorption spectrale (CAS), évalué à une longueur d’onde de 254 nm, pour évaluer la quantité de matière organique. «Nous utilisons la mesure de l’absorption UV à 254 nm pour suivre la charge en matière organique dans un échantillon d’eau potable ou d’eaux usées. La mesure est effectuée en dynamique: au fur et à mesure du remplissage de la cuvette, plusieurs points de mesure sont faits et la valeur d’absorbance la plus représentative est retenue. Il s’agit d’une mesure bien moins chère et bien plus simple à l’exploitation, si ce n’est une corrélation à faire, qu’un COTmètre», affirme Guillaume Schneider (Swan Instruments d’analyse France).
La méthode CAS 254 nm permet ainsi de déterminer des paramètres liés à la matière organique, tels que le COT, la DBO et la DCO. Les nitrates peuvent également être mesurés dans l’UV. «Il est possible soit de travailler sur une seule longueur d’onde, soit de balayer un domaine spectral compris entre 200 et 320 nm. En plus d’obtenir des calculs de concentration plus fins, via des méthodes de déconvolution, le multiparamètre UV permet de mesurer des nitrates, qui absorbent autour de 205 nm et que l’on ne verrait pas à 254 nm», ajoute Séverine Goulette (Aqualabo). S::can propose la technologie UV-Visible, sonde immergeable qui permet de mesurer en continu et simultanément plusieurs paramètres sur les eaux de surface et de source, sans réactif et avec un coût d’exploitation quasiment nul.
Le spectro::lyser de s::can surveille déjà la qualité des eaux de plusieurs fleuves tels que le Rhin, La Seine, La Durance, La Marne et surveille de nombreuses eaux de source. «Nous sommes leader mondial pour la technologie par spectrométrie UV-visible et venons de commercialiser la dernière génération de spectromètre intelligent comptatible Io:Tool:» affirme Philippe Marinot, directeur général.s::can France. «Nous proposons des sondes UV/visible, qui couvrent l’ensemble du spectre UV-Visible de 200 à 750 nm, grâce à une très bonne résolution du capteur optique nous pouvons intégrer un très grand nombre de longueurs d’ondes. Des algorithmes de calcul performants vont convertir l’empreinte spectrale en mg/l de COT, nitrates, turbidité, chlorophyl, etc en tenant compte des interférents potentiels tel que la turbidité par exemple. De plus la sonde permet d’enregistrer l’empreinte spectrale à chaque mesure pour une approche plus scientifique».
Directement immergeables dans le milieu, le nettoyage des fenêtres de mesures des sondes se fait automatiquement par autobrosse, aucune opération de maintenance n’est nécessaire fait remarquer Philippe Marinot. «Nous avons environ 13.000 sondes installées à travers le monde, et les retours d’expériences démontrent la précision du système et sa fiabilité». Des technologies sont également mises en œuvre pour les mesures d’oxygène dissous et de turbidité. «La contrainte la plus importante était de trouver un matériau réagissant à l’oxygène dissous suite à l’apport d’énergie et qui pouvait être fixé sur un support», rappelle Séverine Goulette. «Une bonne sonde oxygène optique est un excellent révélateur de qualité du milieu. Notre nouvelle sonde interfacable avec tous les systèmes de supervions directement (modbus), APHOX-S-O2 dispose d’un canal optique automatiquement compensé en température par la thermistance NTC interne. Ce qui lui permet d’offrir une haute précision et des temps de réponse rapides» assure Yves Primault.
Pour la mesure de turbidité, la méthode optique utilisée est celle de la néphélométrie à 90° (ISO 7027-1:2016). «Nous utilisons les technologies optiques depuis une quinzaine d’années pour l’oxygène dissous, la turbidité et tous les éléments qui fluorescent (chlorophylle, phycocyanine, hydrocarbures)» poursuit Goulven Prud’Homme (NKE Instrumentation). Pour les mesures de bactériologie, la surveillance de l’activité enzymatique, avec des réactifs, s’appuie sur des technologies de mesure de la fluorescence. Chez Proteus Instruments, la sonde multiparamètre Proteus permet de mesurer en temps réel la DBO, la DCO, le COT et les coliformes autant des rivières, des lacs, des eaux souterraines que des sources d’eau potable et les eaux de baignade.
Installée dans le monde
entier, elle surveille les eaux du Gange,
la rivière Chicago, les docks de Swansea
ou bien les côtes du Sud de l’Angleterre.
Spécialiste en la matière, Bionef propose trois analyseurs à différentes longueurs d’onde de la marque BBE. Les
fluorimètres en ligne autonomes Algae
Guard et AOA, qui déterminent simultanément la teneur en chlorophylle selon
les classes d’algues vertes, bleues-vertes,
brunes (diatomées et dinoflagellés) et
cryptophytes, et le Phycosens qui mesure
en sus et en simultanée la Phycocyanine
libérée par les cellules de caynobactéries.
UNE MAINTENANCE RÉDUITE AU STRICT MAXIMUM
D’autres fabricants proposent également des solutions basées sur des technologies optiques depuis une vingtaine d’années. «Nos systèmes de mesure de la turbidité se différencient des produits concurrents par l’absence de contact des émetteur et récepteur avec l’eau. Cela se traduit par la disparition de l’encrassement et, donc, de la dérive de mesure. Le sans-contact représente donc un bénéfice important en termes de coût d’exploitation sur des eaux chargées», explique Guillaume Schneider (Swan Instruments d’analyse France). Les fabricants ont un défi de taille à relever pour mettre en place des suivis en ligne en continu dans des milieux naturels.
Il est en effet compliqué et onéreux
de faire déplacer (très) souvent des personnels en pleine montagne ou en rase
campagne pour effectuer l’étalonnage ou
la maintenance de systèmes de surveillance. C’était le cas de la méthode galvanique pour la mesure d’oxygène dissous,
qui faisait intervenir des consommables
(électrolyte, membranes). Et c’est le cas
encore, notamment, des sondes de pH,
qui requièrent le remplissage de l’électrolyte KCl et un ré-étalonnage très fréquents. Les technologies optiques, elles,
permettent de réduire au maximum les
interventions humaines.
«On retrouve, même avec les méthodes
optiques, des systèmes auto-nettoyants
afin d’espacer les interventions et de
garantir une longévité de la mesure la plus
longue possible. Lorsque l’on travaille dans
le milieu naturel, les mesures peuvent être
perturbées par les organismes qui y vivent
(biofilms, attaques d’animaux). Et nous
préconisons des solutions en titane pour les
milieux salins et océaniques, afin d’éviter
la corrosion des sondes», ajoute Goulven
Prud’Homme (NKE Instrumentation).
LES CAPTEURS BASÉS SUR LE VIVANT SE MULTIPLIENT
Depuis quelques années est apparue une nouvelle catégorie de capteurs mesurant la qualité de l’eau: il s’agit de capteurs reposant sur le vivant, et mettant également des technologies optiques. A l’instar du biocapteur d’Hydreka, entité du groupe Halma le biocapteur a été développé par Enoveo qui a été rachetée en 2019 par Hydreka, après plusieurs années de partenariat avec Hydreka. «Notre biocapteur mesure l’activité des bactéries, qui est directement proportionnelle à la pollution dans l’effluent, sous forme d’un signal électrique. En présence de matière organique biodégradable, les bactéries réagissent et fournissent un signal électrique plus élevé. Si les bactéries sont stressées par un polluant, leur activité et, donc, le signal électrique, diminuent», explique Camille Triffaux (Hydreka).
«Le point fort de la technologie Node réside dans le fait que nous utilisons les bactéries indigènes présentes dans le milieux à surveiller. Nous observons leur comportement, directement liés aux variations de la charge organique ou à la présence d’un choc toxique. La caractérisation du type de bactéries est réalisé dans une deuxième phase par prélèvements et analyses laboratoire», précise Korentin Jolivet, responsable Marketing & Communication chez Hydreka. D’autres solutions existent sur le marché, mettant en œuvre des protéines, des insectes ou des poissons, associés à une détection optique, par exemple.
C’est le cas de Biomae, Cifec, Microbia Environnement, Watchfrog notamment pour lesquels ces dispositifs sentinelles constituent des bonnes réponses à la mesure de l’effet cocktail des micropolluants. Basés sur une technologie de reconnaissance génétique, les biocapteurs CARLA® développés par Microbia Environnement ciblent une molécule d’ARN à l’intérieur des cellules de cyanobactéries, qui est un marqueur d’activité. Grâce à un test colorimétrique rapide (<3 h), qui se fait en laboratoire, il est possible de rendre un résultat d’analyse en moins de 24 h, de répéter les analyses à haute fréquence, et ce pour plusieurs échantillons en simultané, et ainsi suivre en quasi temps réel la dynamique de la population microbienne, sa capacité de prolifération mais aussi son déclin. Le signal est traduit en niveau de toxicité potentielle grâce à des classes de risque telles une prédiction «météo» de la qualité de l’eau.
«L’innovation repose sur la mise à disposition d’une technologie moléculaire puissante, mise au point après 15 années de R&D, bien mieux adaptée que les méthodes existantes pour surveiller des microorganismes aquatiques, qui peuvent «bloomer» en quelques jours, voire quelques heures. Intégrés dans des programmes de surveillance stratégiques selon les usages de l’eau baignade, activités récréatives, prise d’eau potable, aquaculture. Depuis 2019, Microbia Environnement déploie en routine ces biocapteurs pour la surveillance des cyanobactéries sur des site récréatifs (pour le comité départemental 66), le long du fleuve Lez qui traverse l’agglomération montpelliéraine (pour Veolia et Montpellier Méditerranée Métropole, 34), dans des usines de potabilisation et sur le canal d’irrigation Bas Rhône Languedoc / Philippe Lamour (BRL, 30)» explique Sandra Lagauzère, responsable projets R&D et développement commercial.
Les biocapteurs présentent toutefois
quelques limitations. Certaines solutions représentent encore des budgets
plus importants que ceux des solutions
de mesure classiques. Il s’agit également
de mesures en ligne semi-continues,
puisqu’elles requièrent une prise d’échantillon et l’ajout de réactifs pour induire les
réactions. «Et il existe quelques référentiels, notamment sur les enzymes utilisées,
mais on doit bien souvent recourir à une
corrélation. Ce sont néanmoins des techniques qui commencent à se déployer sur
le terrain», constate Séverine Goulette
(Aqualabo). «Il n’y a pas de limitation
pour le biocapteur Node, fait remarquer
Korentin Jolivet. La technologie fournit sa
propre énergie et permet de mesurer en
ligne et en continu l’activité bactérienne».
DES SOLUTIONS DE SUIVI COMPLÈTEMENT AUTONOMES
L’autonomie des systèmes de surveillance en continu de la qualité de l’eau ne se résume pas à la réduction significative de la maintenance et de l’étalonnage. Elle concerne également, surtout, l’autonomie énergétique de l’ensemble de la chaîne de mesure, depuis le capteur jusqu’à la transmission de données. Tous les fabricants travaillent sur l’optimisation de l’électronique embarquée dans leurs systèmes, voire sur l’optimisation de leur fonctionnement. «Nos solutions affichent des consommations de moins de 20 Watts, ce qui est compatible avec l’utilisation de batteries. Il suffit aux personnels de changer les batteries lors de leur ronde toutes les deux semaines, voire d’alimenter les batteries par des panneaux photovoltaïques», Guillaume Schneider (Swan Instruments d’analyse France).
«En plus d’utiliser des batteries alcalines du marché, ce qui assure un approvisionnement facile pour les clients, les micro-contrôleurs embarqués dans nos solutions dorment profondément entre deux mesures et ne se réveillent que pendant la quinzaine de secondes nécessaire à la mesure. Nous travaillons par ailleurs sur la récupération d’énergie par de la chaleur, mais il faut que l’application s’y prête», poursuit Alexandre Huchon (EFS). Quant à la remontée des mesures, elle peut se faire soit via un enregistreur lui aussi autonome, dans le cas d’immersion des sondes ou d’installation dans des zones blanches, soit via des communications sans fil. Cela peut prendre la forme de sondes communicantes ou d’équipements (enregistreurs ou sondes) reliés en filaire à un système de transmission sans fil (passerelle).
«Nos stations d’acquisition AQUACJ / LNS ont la possibilité d’utiliser plusieurs protocoles de communication: Modbus, 2G, 3G, 4G [et aussi LTE-M et NB-IoT, NDR] et, LoRaWAN et Sigfox, communications par fibre optique ou par satellitaire (Iridium), etc. Avec le déploiement des constellations de nanosatellites, les transmissions Internet par satellite sont possibles par tout dans le monde et devraient se démocratiser dans les années à venir pour l’envoi de petits paquets de données, c’est pour cela que nous avons conçu des stations d’acquisition modulables et évolutives», prévoit Joan Petringer (Paratronic). Sur ce marché, l’opérateur de réseau IoT suédois Netmore, via sa filiale française, ambitionne de se positionner sur les marchés de l’eau au travers d’une offre complète de services LoRaWAN.
Pour les
eaux de surface, Ijinus recommande son
capteur enregistreur physico-chimique
qui offre la possibilité de connecter plusieurs sondes de qualité de l’eau en toute autonomie avec la possibilité de l’allonger
grâce au pack batterie. Et sur les cours
d’eau, la bouée mono-paramètre GSM qui
intègre à la fois un enregistreur et une
sonde interchangeable selon le type de
mesure souhaité (pH, Oxygène dissous,
Turbidité, conductivité) et peut être facilement installée par une seule personne.
Toutes les briques technologiques sont
donc déjà disponibles ou en cours de
développement pour permettre aux
acteurs de mettre en place une surveillance en ligne en continu de la qualité
de l’eau, que ce soit pour une campagne
de mesures ponctuelle ou un suivi permanent. Et la liste des acteurs intéressés
s’allonge: aux services de l’État (Dreal,
Vigicrues…), aux collectivités locales, aux
exploitants, aux industriels, aux aménageurs, à EDF, etc. s’ajoutent encore les
entreprises du BTP intervenant à proximité d’un cours d’eau, les exploitants des
zones activités portuaires.