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L’ACTIFLO® Bio un outil multilames pour les usines d’assainissement lors des épisodes orageux

04 juillet 2023 Paru dans le N°463 à la page 72 ( mots)
Rédigé par : Philippe SAUVIGNET de Veolia en, Béatrice HOUSSAIS de VEOLIA EAU et Eric BARBIER de VEOLIA EAU

De plus en plus de pays se voient faire face à des pluies diluviennes qui viennent affecter le bon fonctionnement des stations d’épuration. Ce type d’événements pluvieux peut engendrer des impacts environnementaux désastreux sur les rejets des usines d’assainissement. En effet les stations ne sont pas toutes équipées pour faire face à des débits excessifs, c’est pourquoi il est nécessaire d’introduire de nouveaux procédés capables de gérer de tels pointes de pollution.

INTRODUCTION

Lors d’épisode pluvieux intense et brusque, le débit d’eau à l’entrée d’une station dépasse la capacité de cette dernière, ce qui engendre un non-respect des normes de rejet dû aux infiltrations et aux afflux pendant les orages. En effet, les stations n’étant pas équipées pour supporter un débit plus élevé que le débit de pointe, cela engendre des problèmes de charge hydraulique sur la station en perturbant le procédé biologique ou en provoquant la sortie des solides des clarificateurs.

La solution habituelle pour faire face à des débits de pointe plus importants consiste à augmenter la capacité des stations d’épuration en y ajoutant des unités de traitement primaire et secondaire ou en construisant des bassins de rétention. Cependant, cette expansion nécessite des investissements considérables, tout d’abord, car les procédés biologiques ont une capacité maximale limitée, de plus de nombreuses installations sont contraintes par l’espace disponible sur place et enfin, car si on considère la durée limitée du traitement, ces options ont des coûts de construction et d’exploitation très importants. 

Pour relever ces défis, l’ACTIFLO® Bio a été développé comme une solution rentable de traitement par temps de pluie. Ce procédé à haut débit combine le traitement biologique avec la floculation améliorée par microsable ACTIFLO®. Il permet une élimination très efficace des solides en suspension ainsi qu’une réduction significative des demandes biologiques en oxygène (DBO). L’ACTIFLO® Bio peut être mis en œuvre dans les installations de traitement des eaux usées existantes avec des modifications minimales, offrant ainsi une solution efficace pour éliminer les matières en suspension (MES) et répondre aux exigences de traitement pour la DBO et les MES lors des épisodes pluvieux entraînant un débit important.

PRINCIPE DU TRAITEMENT PAR ACTIFLO® BIO

Le procédé ACTIFLO® Bio (figure 1) est composé dans un premier temps d’un traitement biologique qui se produit dans un bassin de pré-contact, c’est le cœur du traitement biologique. Une partie des boues activées recirculées de l’usine existante et des boues épaissies issues du procédé de clarification ACTIFLO® sont rejetées dans ce bassin (voir figure 2). Le principe du traitement s’effectue à partir de ces boues activées recirculées qui contiennent une population active de micro-organismes bénéfiques ayant la capacité d’absorber la demande biologique en oxygène soluble (DBO soluble) présente dans l’eau de procédé. En effet, lorsque les boues activées recirculées entrent en contact avec de l’eau provenant d’une source externe, c’est-à-dire des eaux usées brutes, les micro-organismes absorbent la DBO et la stockent pour être utilisé sous forme de nourriture et de source de nutriments dans des conditions aérobies à une température donnée. 

Le taux d’absorption de la DBO dépend alors du temps de contact des boues activées recirculées avec les eaux usées brutes, et plus il y a de micro-organismes en contact avec ces eaux plus la quantité de DBO soluble absorbée est importante. La concentration de solides en suspension dans la liqueur mixte est utilisée pour mesurer la concentration des boues activées recirculées. La mesure de la liqueur mixte permet notamment d’évaluer l’efficacité d’un procédé de traitement puisque des concentrations adéquates en liqueur mixte (ou en boues activées recirculées) fournissent une activité microbienne suffisante pour dégrader la matière organique. C’est également un procédé qui permet un démarrage rapide pendant les événements météorologiques humides puisqu’il utilise le mélange liquide provenant du procédé de boues activées issus de l’usine même. Il est par ailleurs possible de dimensionner le procédé de contact biologique dans diverses conditions grâce à l’expression cinétique donnée par Jimenez et al. (2005) : 

Avec : r : Débit de floculation (mg/L.min) 

k : Constante du premier ordre de floculation (L/mg.min) 

C : Concentration de particule dans le surnageant après 30 min de décantation (mg/L) 

a : Concentration résiduel de particules (mg/L) 

X: Concentration de liqueur mixte (mg/L)

Ce bassin est ensuite suivi d’un clarificateur ACTIFLO® à haut débit dans lequel un coagulant (en général du sel de fer ou d’aluminium) est ajouté aux eaux sortant du bassin biologique avant de s’écouler dans un bassin de coagulation permettant la déstabilisation des particules colloïdales. L’eau coagulée s’écoule par la suite dans un bassin d’injection où du microsable et du polymère sont ajoutés. Grâce à la grande surface du microsable, ce dernier agit comme un lest, ce qui permet d’accélérer la décantation. Les matières en suspension sont déstabilisées et liées aux particules de microsable à l’aide de ponts polymères. Les particules lestées s’agglomèrent en plus gros floc possédant une densité plus élevée. 

Les flocs peuvent alors décanter plus rapidement dans le décanteur lamellaire. L’eau est extraite par surverse et la boue, constituée de flocs lestés, est pompée vers un hydrocyclone afin de séparer les boues du microsable par force centrifuge. Le microsable est alors réutilisé dans le bassin d’injection tandis que les boues sont soit extraites soit redirigées dans le bassin de boues activées (voir figure 2). Les boues activées recirculées provenant du procédé biologique principal sont combinées aux eaux usées brutes qui ont été auparavant dégrillées/tamisées généralement avec une maille de 3 à 6 mm selon le débit de l’installation. L’avantage d’un tel procédé est de réduire le temps de séjour hydraulique ainsi que la concentration des particules en suspension de la liqueur mixte par rapport aux bassins d’aérations classiques, mais aussi d’avoir une emprise réduite grâce à ce court temps de séjour ainsi que ses taux de charges surfaciques élevées.

EXPLOITATION D’ESSAIS PROTOTYPES 

• Station d’épuration de Fort Smith, Arizona, États-Unis [1] 

Afin d’étudier les performances du ACTIFLO® Bio, une étude sur la STEP de Fort Smith a été menée, STEP possédant déjà un système ACTIFLO® d’une capacité de 117348 m³/j dont le flux excédentaire lors de période de pluies était déversé dans un bassin de rétention. Cependant, un problème se posait lorsque ces périodes de pluies s’établissaient sur de longues périodes. C’est pourquoi cet essai a été mené. L’installation mise en œuvre est similaire à celle de la figure 2, à la différence que les boues en excès provenant de l’ACTIFLO® étaient immédiatement évacuées. (voir figure 3) 

L’installation utilisée possédait une capacité de 4500 m³/h et de 108.000 m³/jour et les paramètres utilisés pour étudier son fonctionnement sont réunis dans le tableau 1. À partir de ces paramètres et de la turbidité mesurée, il est alors possible d’étudier la concentration de la liqueur mixte en fonction du rendement d’élimination des MES, de la DCO soluble (dû aux matières carbonées potentiellement présente dans les eaux usées), de la DBO ainsi que de la DBO soluble. Les résultats sont présentés dans les figures 4, 5, 6 et 7. On peut alors reporter les valeurs de rendement d’élimination pour une concentration en liqueur mixte de 800mg/L qui semble être la concentration la plus efficace pour chaque paramètre. (voir tableau 2) Seule l’efficacité de traitement des MES n’est pas maximale même si elle est tout de même de 87%. Il est également possible d’étudier l’effet du temps d’aération dans le bassin de contact sur l’élimination de chaque contaminant tout en maintenant des concentrations de liqueur mixte identiques dans les deux cas (voir Figure 7). 

Le procédé ACTIFLO® Bio montre alors des efficacités d’élimination plus élevées pour tous les paramètres à l’exception des matières en suspension (MES), qui sont similaires dans les deux cas, lorsque des temps d’aération plus longs (30 minutes) sont utilisés. • Résultats de tests effectués dans une STEP [2]

Ci-après, les résultats d’une seconde étude (site A) mettant en avant l’impact du temps de contact du bassin de précontact (figure 2) ainsi que de la concentration en liqueur mixte sur l’élimination des MES, de la DCO et de la DBO, à l’aide d’un procédé similaire à celui présenté figure 2. 

Les cinétiques d’abattement de la DBO, DCO et MES sont liées à la concentration de la liqueur mixte. Par exemple, avec des concentrations de 500 mg/L, plus de 60 minutes sont nécessaires pour atteindre le plateau alors que des concentrations d’environ 2000 mg/L prendront 25-30 minutes. À des concentrations en liqueur mixte d’environ 2000 mg/l, seuls les MES nécessitent des temps de contact légèrement plus courts, 15-20 min contre 25-30 min. • Station d’épuration de Fourth Creek à Knoxville, Tennessee, États-Unis [3] Le procédé ACTIFLO® Bio a également été utilisé dans une station d’épuration à Fourth Creek aux États-Unis en utilisant du sel de fer (100-150mg/L de Fe) pour le coagulant, du microsable MB80 de taille effective comprise entre 130 μm et 150 μm et le polymère anionique Hydrex 6112 (2,5-4 mg/L). 

De la même manière, lors des deux autres études, les concentrations en MES, DBO et DBO soluble ont été suivies. Ainsi la figure 11 montre l’évolution de l’efficacité d’élimination des MES en fonction de la dose de coagulant considéré dans ce cas comme le paramètre régissant l’efficacité de la coagulation/ floculation. On retrouve une élimination moyenne de 94%. Les résultats montrent dans un premier temps que l’élimination de la DBO particulaire dépend du taux de capture des MES lors de la coagulation/floculation, et donc des concentrations en coagulant et en polymère. Dans un deuxième temps, il est possible de déduire de ces résultats que l’élimination de la DBO soluble dépend du taux de liqueur mixte. 

Au cours de l’étude, la caractérisation des fractions de la DBO montre que la capacité à atteindre de manière cohérente le taux cible d’élimination de la DBO totale dépend principalement de l’absorption de la DBO soluble pour une concentration adéquate en liqueur mixte. Ces trois études permettent de montrer qu’avec une quantité en liqueur mixte adéquate et un temps de contact approprié, il est facile d’atteindre les exigences demandées. Il est cependant intéressant de souligner que la conception d’un tel procédé biologique à haut débit est très spécifique à chaque cas.

CONCLUSION ET PERSPECTIVES

Les stations d’épurations doivent de plus en plus faire face à des pluies diluviennes qui viennent affecter leur bon fonctionnement. Ce type d’événements pluvieux peut engendrer des impacts environnementaux désastreux sur les rejets au milieu naturel. En effet, les stations ne sont pas toutes équipées pour faire face à des débits excessifs, c’est pourquoi il est nécessaire d’introduire de nouveaux procédés capables de gérer de tels pointes de pollution. Le procédé par contact biologique combiné à la clarification lestée, ACTIFLO® Bio est une technologie qui s’avère être particulièrement efficace par temps de pluies (orages) afin d’éliminer les MES, la DCO ainsi que la DBO. L’avantage de ce procédé est qu’il vient utiliser un mélange de boues activées et d’eau usée provenant de l’installation même, ce qui facilite grandement sa mise en route lors d’épisodes pluvieux. Typiquement, ce procédé permet de réduire le phosphore, 60 à 80% de la DBO soluble et 85 à 90% de la DBO totale. Il nécessite la mise en œuvre d’un bassin de contact dans lequel s’effectue le mélange, les débits excédentaires de pointe détournés avec les boues activées recirculées de l’usine, ce qui facilite l’absorption de la DBO par la liqueur mixte. La réglementation nord américaine sur les eaux d’orages nécessitant le traitement de la pollution carbonée soluble a permis de convertir de nombreuses installations ACTIFLO® en système ACTIFLO® Bio. 

Il est donc assez facile d’installation dans les stations d’épuration et entraîne peu de modifications sur site, cela confère un intérêt économique ainsi qu’un rendement plus élevé en termes de capacité de l’usine. Il est par ailleurs possible de prédire l’efficacité du procédé en déterminant l’impact de la concentration en liqueur mixte en fonction du temps de contact et du rendement d’élimination des matières en suspension, de la demande chimique en oxygène ou encore de la demande biologique en oxygène. Fort de plus de 30 ans d’expérience et plus d’un millier de références de par le monde, le procédé de décantation lestée Actiflo® peut servir à d’autres applications dans l’industrie, mais aussi pour le traitement des eaux résiduaires, en particulier pour l’élimination du phosphore. La démarche de Veolia est de proposer à ses clients des solutions d’ensemble les plus flexibles possibles, en recherchant autant que faire se peut les conditions de fonctionnement les plus optimales. Il n’y a pas de solution absolue, mais autant de cas particuliers que de projets auxquels Veolia est apte à répondre par le biais des procédés dont elle dispose. L’ACTIFLO® Bio est une technologie désormais mature avec de nombreuses références en Amérique du Nord. Il paraît à présent pertinent de considérer ce dernier pour le marché européen et français en particulier. En effet, en lien avec les effets de plus en plus prégnants du changement climatique sur les STEU, il convient à présent non seulement de limiter les rejets de volumes excédentaires, mais aussi de limiter les flux de pollution soluble associés. La solution technique adoptée il y a plus de vingt ans aux USA qui s’appuie sur la technologie du floc lesté avec un pré-contact biologique doit être considérée avec attention compte tenu des nombreux avantages qu’elle procure aussi bien sur les aspects investissements que sur sa souplesse et facilité de mise en œuvre. De surcroît, les retours d’expérience nord américain ont permis à Veolia d’acquérir un savoir-faire intéressant dans le pilotage et l’automatisation de ces installations en temps réel, ce qui reste un atout majeur pour une adaptation de ces installations à des phénomènes brutaux et notoirement difficiles à prédire.


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