Les bacs à graisses doivent être régulièrement entretenus, conformément à la réglementation. Leur contenu est donc pompé périodiquement (fréquence de quelques semaines à quelques mois) par des entreprises de vidange. Le vidangeur doit alors trouver une solution pour se débarrasser de ces déchets liquides.
Le problème est donc posé : « comment éliminer ces eaux graisseuses ? ».
Il est bien connu des grandes agglomérations : en Ile-de-France, pour une population de 10 millions d’habitants, le volume de déchets provenant des bacs à graisses de restauration collective est estimé à 100 tonnes/jour, qui sont composées en moyenne de 10 % de graisse (surnageant), 10 % de boue (décantation) et 80 % d’eau polluée.
Actuellement, les vidanges de bacs à graisses sont éliminées de diverses façons :
— dans les décharges contrôlées : celles-ci n’acceptant que des déchets pelletables, les graisses doivent donc subir un traitement préalable ;
— les stations d’épuration : les vidanges de bacs à graisses sont dépotées dans des réservoirs destinés à recevoir les matières de vidange provenant des fosses d’aisances. Ce mélange est envoyé en tête de station en faibles quantités. Toutefois, la quasi-totalité des stations refusent les graisses ;
— l’épandage agricole : l’effluent graisseux est mélangé en faible quantité (environ 10 %) aux matières de vidange. L’épandage est limité à des zones bien précises et n’est possible que pendant quelques périodes de l’année ;
— le dépotage sauvage : ce n’est malheureusement, bien souvent, que cette solution interdite qui est la seule possible.
Pour apporter une solution à ce problème, le département « Recherche » de S.O.A.F., puis le département « Développement » de C.S.A., ont conçu et réalisé un prototype pilote d’une chaîne de traitement et d’élimination des vidanges de bacs à graisses. L’objectif prioritaire est de séparer la graisse de l’eau, afin d’obtenir un rejet acceptable à l’égout, en évitant ainsi les graves perturbations évoquées ci-dessus, puis de conditionner les graisses pour leur élimination en décharge, en incinération, ou en recyclage par affinage. La conception de l’installation permet d’atteindre cet objectif.
L’unité pilote a fait l’objet d’essais comparatifs, en grandeur industrielle, en octobre 1986, sous l’égide de l’A.N.R.E.D. et du conseil général de l’Ile-de-France.
L’excellence des résultats a permis de programmer la construction d’une unité dans la région nantaise, où la filière d’élimination comporte l’incinération des graisses, mélangées aux ordures ménagères.
Conception de l’unité
Elle fonctionne suivant le schéma représenté sur la figure ci-contre, qui comporte six sous-ensembles :
— une cuve de stockage permettant un dépotage de 4 camions de 8 m³ par heure ;
— une pompe-transfert donnant un débit constant à l’effluent, comportant un dispositif de gavage et qui est protégée par un piège à corps lourds et un dégrilleur ;
— un traitement primaire dans lequel l’effluent est soumis à une flottation qui oblige les graisses à remonter en surface, où elles sont raclées automatiquement et dirigées vers une goulotte ;
— un traitement secondaire assuré par séparateur-décolloïdeur, permettant d’affiner le rejet d’eau à l’égout. Ce rejet, dans certains cas particuliers, peut subir un traitement tertiaire physico-chimique en trois phases ;
— une réception des graisses ; le conditionnement des graisses est réalisé en fonction de plusieurs facteurs :
— la teneur en graisse des eaux graisseuses,
— les volumes journaliers de l’effluent dépoté,
— la filière d’élimination des graisses (incinération, décharge...) ;
Les solutions peuvent être au choix :
— une mise en conteneurs, automatique ou manuelle, ou le dépôt dans un autre réceptacle incorporé dans le procédé ;
— les servitudes : elles comportent une passerelle sur tous les ouvrages, une potence de manutention et une armoire électrique.
Ce dispositif de base peut être complété par les diverses adjonctions suivantes :
— un système d’automatisation de l’unité, comportant :
— identification du vidangeur qui autorise le dépotage par l’ouverture de la vanne ;
— le comptage des volumes dépotés ;
— le démarrage et l’arrêt de l’installation ;
— le déplacement des conteneurs devant la goulotte ;
[Photo : Schéma de principe du procédé.]
- — l'alarme en cas de mise hors service ;
- — un traitement tertiaire chimique ;
- — un poste de relèvement des eaux d’égouttures et de lavage vers la cuve de stockage ;
- — des cuves en acier inoxydable ;
- — des couvertures de cuves ;
- — un local pour abriter l’unité, avec équipement sanitaire pour le personnel.
Fonctionnement de l’unité
Il comprend les opérations énumérées ci-après :
- — branchement des flexibles (DN 100) entre le camion de vidange et la tuyauterie du réservoir de stockage ;
- — ouverture de la vanne (V1) de la tuyauterie de dépotage ;
- — le camion est en dépotage, la cuve de stockage se remplit ;
- — l'exploitant met en route :
- — la pompe-transfert (elle s’arrêtera automatiquement sur le niveau bas du réservoir),
- — l’unité de flottation,
- — le raclage (arrêt manuel ou programmé) ;
- — le traitement tertiaire chimique éventuel est asservi à la pompe de transfert.
Le traitement est alors en cours : la graisse est évacuée vers la goulotte et l'eau s’évacue à l’égout.
Le traitement cesse (avec retard) quand la pompe de transfert s’arrête.
La surveillance humaine se limite au remplissage des réceptacles de graisses, à leur manutention et stockage avec, éventuellement, acheminement vers la filière d’élimination.
Les autres interventions manuelles concernent le nettoyage (piège à corps lourds, dégrilleur) et le soutirage des boues.
Caractéristiques et performances de l’unité
- — dimensions hors tout : 12 m x 4 m x hauteur de 4,5 m ;
- — masse totale en charge : 50 tonnes ;
- — conduite de l’unité : une personne ;
- — branchements : eau-électricité (380 V - 30 KVA) égout EU ;
- — performances :
- — capacité de traitement : 20 m³/h, d’où un volume utile de 150 m³/jour,
- — qualité de l'eau rejetée à l’égout : teneur en graisse inférieure à 250 mg/l. Le cas échéant, cette teneur peut être abaissée par le traitement physico-chimique,
- — qualité de la graisse : la teneur en eau des graisses est inférieure à 35 %,
- — abattements : MES > 90 % — DBO > 75 % — DCO > 75 %.
Conclusion
Pour un investissement raisonnable et une exploitation économique, ce procédé, par son efficacité, apporte une solution au problème de l’élimination des « graisses domestiques » que doivent résoudre les grandes agglomérations.
Il devrait permettre de doter les villes de plus de 100 000 habitants d’une ou de plusieurs unités appropriées, et ainsi, les aider à protéger leur environnement d’une source de pollution particulièrement néfaste...