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Le traitement des lixiviats, une affaire de spécialistes

30 septembre 2022 Paru dans le N°454 à la page 65 ( mots)
Rédigé par : Patrick PHILIPON

Très chargés en polluants, variables d’un site à l’autre, voire d’une saison à l’autre, les lixiviats de décharges réclament des traitements particuliers avant le rejet des eaux traitées au milieu naturel. La question des sites fermés – mais toujours polluants – devient de plus en plus d’actualité.

Il pleut sur les décharges… Soumis aux intempéries, ou simplement à l’écoulement de l’eau initialement contenue dans les déchets, les centres d’enfouissement technique (CET) produisent un «jus» particulièrement chargé en polluants. Il n’est évidemment pas question de le rejeter sans traitement au milieu naturel. Des sociétés spécialisées comme Le Floch Depollution, Ovive, Serpol, Vivlo Exonia et Aeroe entre autres, au service d’exploitants de CET comme Paprec, Veolia, Suez, Semardel … ou les intercommunalités elles-mêmes, opèrent sur ce marché. 

Pour une ISDND au pied des Pyrénées, Ovive a conçu et construit une filière complète autour d’un BRM suivi d’une osmose inverse. L’eau traitée est évapotranspirée par une saulaie. Les boues biologiques sont compostées sur un filtre planté de roseaux.

Les «décharges municipales» recevant les déchets domestiques, aujourd’hui appelées ISDND (installations de stockage de déchets non dangereux, ex-«décharges de classe 2») représentent la majorité des cas. Il ne faut cependant pas oublier les sites recevant des déchets du BTP, aujourd’hui appelés ISDI (installations de stockage de déchets inertes, ex-«décharges de classe 2»). «Ces deux types de CET représentent le gros du marché du traitement, mais nous sommes parfois appelés aussi par des plateformes de compostage. Elles réutilisent généralement leurs lixiviats pour l’arrosage des andains mais, en cas d’excédent, il faut traiter» ajoute Maxime Pollet, Responsable commercial d’Ovive.

L’ouverture de nouveaux sites d’enfouissement étant devenue extrêmement difficile, les exploitants ont tendance à augmenter la capacité de leur installation, en gagnant en hauteur par exemple. Inévitablement, il leur faut mettre à niveau leur système de traitement des lixiviats. Autre cas de figure, de plus en plus fréquent: celui où un CET rejetait ses effluents dans une STEU qui ne peut plus les recevoir. 

Dès lors comment traiter ces effluents difficiles ? Autant le poser d’emblée: il n’existe pas de recette universelle. Tout d’abord parce que, contrairement aux eaux usées urbaines, la composition et le débit des lixiviats varient selon les sites, et même selon la saison sur un même site. Avec tout de même quelques grandes tendances. «Outre leur forte charge organique, les lixiviats de décharge se distinguent des eaux usées par leur très forte teneur en azote. Leur équilibre carbone/azote est très particulier» explique ainsi Maxime Pollet. «L’azote, notamment ammoniacal, constitue la part la plus importante de l’azote présent dans un lixiviat. Ce dernier peut être extrait par distillation, rapporte Philippe Caurier, PDG de la société Exonia et revalorisé dans la filière chimique, cruellement en manque d’ammoniaque». 

Sur l’important site d’Aix – Marseille Provence, Serpol a déployé un système d’osmose inverse suivi d’une évapoconcentration. Ici l’évapoconcentrateur qui diminue le volume de concentrat d’osmose à exporter.

Matthieu Dancoisne, gérant de Performance Process, une société d’ingénierie spécialisée dans les eaux industrielles et les lixiviats, opère pour sa part une distinction. «Les déchets d’ISDI, très concentrés en calcium, forment des tartres. Ceux des ISDND sont très chargés en matières organiques, azote et métaux» précise-t-il. A ce propos, beaucoup d’acteurs parlent, pas toujours à bon escient, de «DCO dure» pour quantifier la matière organique non dégradable. «La DCO dure, c’est la partie de la matière organique qu’on n’arrive pas à oxyder avec un procédé donné. Il y en a donc à strictement parler autant que de techniques d’oxydation. Cependant, par abus de langage, dans le milieu, on appelle souvent «DCO dure» ce qui n’est pas dégradable par procédé biologique» souligne Matthieu Dancoisne. 

Autre particularité à prendre en compte: si les grands CET traitent leurs lixiviats en continu, beaucoup de plus petites installations le font par campagnes. Elles stockent leurs effluents dans une lagune pendant l’hiver, période de forte production, et font venir une unité mobile de traitement pendant quelques mois durant la belle saison. De nombreux fabricants comme Emo, Firmus France ou d’autres prestataires de services à l’industrie comme CTP environnement déploient un matériel de pointe dans des containers de 20 pieds. Pour ses nombreux avantages (de compacité, capacité à traiter des charges variables, rejet d’excellente qualité), le procédé Bio Réacteur à Membranes (BRM) est un procédé de plus en plus répandu en traitement de l’eau reconnait CTP environnement. Entièrement automatisées, leurs unités BIOMOBIL® proposées à la location peuvent fonctionner à une ou deux files d’ultrafiltration et traiter jusqu’à 2 x 4 m3 d’effluents bruts. 

Le marché du traitement des lixiviats est aussi un marché d’urgences pour lequel il faut être capable d’assurer une continuité de services en cas de pluviométrie inhabituelle, d’éventuels problèmes techniques ou de travaux sur des installations existantes, de campagnes de traitements prévues ou imprévues, note GRS Valtech. Avec un parc composé de 6 osmoses inverses déployables partout en France et à l’international, l'entreprise traite chaque année 300000 m3 de lixiviats . «Sur une installation de stockage de déchets située dans l’est de la France, nous avons récemment déployé une osmose mobile pour maintenir la continuité du traitement des lixiviats pendant que nous installions une nouvelle osmose plus puissante dans le bâtiment de production», rapporte Nicolas Carray. 

Pour les sites importants, Vivlo privilégie les solutions à base d’osmose et d’évapoconcentration utilisant le biogaz produit sur place. La concentration est telle que le lixiviat est évacué sous forme solide.

Le Floch Depollution intervient également sur des opérations ponctuelles in situ (pluviométrie …. ) nécessitant une réactivité importante et également sur des contrats pluriannuels. «En 2021, nous sommes intervenus sur des traitements de 1000 m3 à 90000 m3 pour un total traité de près de 150 000 m3 , se félicite Yannick Lagardere, responsable traitement des eaux de la société Le Floch Depollution. Avec un parc important d'unités mobiles d'osmose inverse (OI) et d'évapo-concentrateur, le traitement des lixiviats fait partie intégrante de nos métiers. Et nous sommes reconnus comme un acteur majeur tant en France qu’à l'étranger». 

Bref, si les techniques utilisées sont souvent parentes de celles utilisées pour les eaux usées (traitement biologique, membranes, media filtrants), les traiteurs de lixiviats n’opèrent pas les mêmes choix et n’utilisent pas les mêmes paramètres de dimensionnement. 

Chaque site présentant un problème spécifique, une phase préalable de caractérisation est indispensable. «La première étape consiste à bien connaître le site, son historique et même son futur - va-t‑il toujours recevoir le même type de déchets? – car une installation de traitement est un investissement à long terme. Nous mettons en place un programme de prélèvements (souvent asservis au débit de production) pour caractériser volumes d’effluents et concentrations en polluants. Puis nous réalisons des essais au laboratoire et des pilotes de terrain pour prouver la validité de nos choix de traitement» affirme Matthieu Dancoisne (Performance Process). Tous les professionnels agissent ainsi, avec leur propre laboratoire ou en déléguant à des spécialistes. Etant donné la variabilité saisonnière des lixiviats, il convient même d’étudier le site pendant au moins un an avant de déterminer la filière la plus adaptée. Philippe Caurier confirme ce point «en précisant qu’un dimensionnement d’installation ne peut être fait qu’à l’issue d’un essai, chaque lixiviat ayant ses caractéristiques propres ce qui détermine la filière et le dimensionnement de l’unité de traitement». 

UN CHOIX FONDAMENTAL 

Vaut-il mieux traiter la pollution sur place ou l’exporter vers des installations spécialisées - souvent des incinérateurs ? Ce débat aux dimensions multiples (économiques, environnementales …) décide du choix entre deux grandes familles de traitement. «Pour exporter la pollution, on la concentre avec des systèmes d’osmose inverse (OI) et/ou des évapoconcentrateurs. Le traitement in situ, que nous prônons quand c’est possible, est souvent à base biologique à cause de l’azote, en général complété par du charbon actif pour la «DCO dure». Les métaux sont séquestrés dans les boues biologiques. Les traitements physico-chimiques sont moins utilisés dans ce domaine car ils concentrent la pollution dans une boue : mieux vaut alors mettre une OI et gérer un concentrat» résume Maxime Pollet. 

L’unité mobile ESV est composée d’un évaporateur sous vide avec compression mécanique de vapeur, d’un finisseur permettant d’atteindre des boues d’une siccité supérieur à 30% de matières sèches totales. Le rejet au milieu naturel subit une finition par osmose inverse trois étages. L’énergie thermique est apportée par une chaudière bi-carburant (biogaz ou fioul).

Il souligne la dimension environnementale du débat. «Le traitement in situ présente un meilleur bilan en termes d’émission de gaz à effet de serre (GES) car la concentration implique l’exportation de la pollution par camion sur de longues distances jusqu’aux sites d’élimination finaux. Ovive a confié à un bureau d’étude spécialisé la création d’un outil de comparaison des technologies en kg de CO2 émis par m3 de lixiviat traité. Sont prise en comptes les consommations électriques, les réactifs, les transports, les déplacements des exploitant, l’énergie grise des équipements. C’est un bel outil d’aide à la décision pour nos clients, qui eux-mêmes sont souvent engagés dans des démarches de réduction des GES» affirme-t‑il. 

Matthieu Dancoisne, confirme le choix fondamental entre concentration avant exportation et traitement sur place. «L’évapoconcentration et l’OI rejettent une eau claire qui va vers le milieu et un concentrat contenant toute la pollution. Les exploitants ont longtemps eu - et ont encore pour certains - tendance à renvoyer le concentrat d’osmose dans les casiers … qui deviennent à terme intraitables. Cette vision à court terme est une vraie problématique» prévient-il. 

Les deux grandes filières semblent donc fixées. Des travaux de R&D se poursuivent cependant pour améliorer la finition après traitement biologique. «L’oxydation avancée semble se faire une petite place mais ce sont des procédés compliqués à mettre en œuvre à cause de la charge minérale des lixiviats. J’ai assisté à des essais décevants car les minéraux entartrent les échangeurs et réacteurs» affirme Matthieu Dancoisne. «Le charbon actif coûte de plus en plus cher. Comment traiter autrement la DCO dure ? J’ai vu des essais d’oxydation avancée et d’ozonation (qui demande beaucoup de puissance électrique). Nous mêmes travaillons sur le sujet. Des polluants comme les acides humiques et fulviques, par exemple, sont très stables et difficiles à oxyder» confirme JeanLuc Mangiacotti, chargé du développement de l’activité traitement d’eaux chez Serpol. Une solution pourrait être, comme le propose la société Exonia, une stabilisation in-situ des concentrats d’évaporation et une remise en casier spécialisé afin d’éviter le retour d’une partie de la matière sèche dans les lixiviats. Ainsi, le mauvais bilan carbone lié au transport et à la destruction des concentrats s’en trouve amélioré. 



UTILISER LE BIOGAZ : LA FIN D’UNE AUBAINE ? 

Pour des raisons souvent plus fiscales que techniques, les exploitants de CET ont tendance à privilégier les solutions comme l’évapococentration, voire l’évaporation finale du rejet, en utilisant le biogaz émis par les déchets en décomposition. En effet, si le site valorise plus de 75% de son biogaz, il bénéficie d’une réduction de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP). De même, si le site fait de la co-génération, il bénéficie d’une surprime lors de la vente de l’électricité s’il utilise la chaleur dégagée par le moteur. Or, sur un CET, il n’y a souvent que le traitement des lixiviats pour utiliser cette chaleur. «Certains projets avec évapoconcentration, voire évaporation finale du rejet, n’avaient du sens qu’en fonction de ces avantages fiscaux. Or la réduction de la TGAP cessera en 2025. Ces mécanismes s’arrêtant, il y aura moins d’intérêt à utiliser le biogaz dans le traitement des lixiviats. D’autant qu’il est maintenant possible de l’épurer suffisamment pour pouvoir le réinjecter dans le réseau, ce qui représente un vrai gain économique et écologique, avec la Technologie Waga Energy» estime Maxime Pollet. 

Plateforme de traitement des lixiviats Paprec tout vaporisaiton 2.5 T/h. 

Vivlo, à l’instar des sociétés Exonia, KMU Loft ou TMW, déploie beaucoup d’évaporateurs sur les grands sites. «Les exploitants bénéficient de primes de valorisation énergétique si les évaporateurs utilisent le biogaz. En particulier, nous mettons en place des systèmes avec évapoconcentration et évaporation totale sur les sites en «zéro rejet liquide», qui n’ont pas le droit de rejeter l’eau, même traitée, dans leur milieu» précise Julien Brochier, directeur commercial chez Vivlo. Si TMW, avec son évapo Ecostill, est plus actif sur le marché industriel du traitement des effluents industriels que sur le traitement des lixiviats, le procédé présente toutes les spécificités favorables à une tel traitement: robustesse, conception plastique, récupération d’énergie thermique. «TMW a d’ailleurs positionné des démonstrateurs sur différents sites, qui ont démontré l’efficience d’Ecostill pour traiter des concentrats d’UF ou de nanofiltration» se félicite Thierry Satgé, son directeur. Acteur historique dans le monde du déchet et de l’environnement, FBI Biome étudie, dimensionne, conçoit, et déploie toute une gamme d’unités de traitement fixe ou mobile de lixiviats répondant aux Meilleures Techniques Disponibles MTD afin de satisfaire aux exigences environnementales, techniques et budgétaires des exploitants. 

Antea Group, Aeroe, GRS Valtech interviennent également de l’installation clés en mains à l’exploitation et assurent tant l’étude, la réalisation des projets que l’installation de procédé. Présent historiquement sur les enjeux de stockage des déchets, Antea Group conçoit des sites pour limiter la production de lixiviats en phase exploitation et post exploitation, et réalise des études pour évaluer les volumes de lixiviats à traiter, identifier les solutions de traitement et assurer la maîtrise d’œuvre des installations. 

S’il n’existe pas de solution type pour le traitement des lixiviats, c’est bien l’analyse des contraintes et des spécificités de chaque site qui doit orienter le choix le plus adapté, en combinant éventuellement plusieurs solutions, rappelle la société. 

«En tant qu’ingénierie conseil indépendante, Antea Group est à même de conseiller des exploitants et des collectivités sur les meilleures techniques de traitement sur toute la durée de vie d’un site en y associant les contraintes d’exploitation et de maintenance, souligne Frédéric Degouve de Nuncques, responsable infrastructures et valorisation des matériaux. Les principaux paramètres concernent notamment l’âge et la nature des déchets, les possibilités de rejet au milieu naturel, la sensibilité environnementale du site, la disponibilité d’énergie (en valorisant le biogaz produit), la place disponible sur site ainsi que les conditions météo locales». Sur toute la France et dans les DOM TOM, GRS Valtech indique traiter chaque année plus de 2 millions de m3 d’effluents de son côté.  «Grâce au panel très large de solutions fixes ou mobiles que nous mettons en œuvre, parmi lesquelles les BRM (Bioréacteur à membrane), les osmoses inverses ou encore les évapoconcentrateurs, nous sommes à même de répondre à l'ensemble des problématiques des exploitants d’installations de stockage de déchets» souligne Nicolas Carray, responsable du segment effluents.

GRS Valetch assure la continuité de traitement lors de travaux sur des installations fixes ou intervient en urgence grâce à son parc mobile d’osmoses inverses.

 Ainsi dans le cadre de la réhabilitation d’un important centre de stockage en Afrique, l’entreprise a mené un projet d’envergure en réalisant l’ingénierie, la réalisation clés en main et la mise en service d’une unité complète et complexe composée d’un traitement biologique des lixiviats par BRM de 10 m3 /h, d’une unité de traitement des boues par centrifugation, d’un traitement de finition par deux nano-filtrations et d’un traitement sur-concentration par deux évaporateurs. 

En Corse, Aeroe a installé quant-àelle une unité de traitement des lixiviats par Compression Mécanique de Vapeur. «Celle-ci permet l’obtention de seulement 5% de concentrat et au contraire d’une osmose, le distillat peut être réutilisé sur site (dans un bassin à incendie, pour le lavage de locaux, de camions, ou l’arrosage de pistes…etc), souligne Philippe Stock, son gérant. Le procédé CMV, qui fait partie des procédés d’évapo-concentration pour le traitement des effluents aqueux, est simple car il est entièrement automatisé. Il cherche à récupérer la chaleur latente due à la condensation et à concentrer les polluants dans un volume réduit afin d’obtenir une eau de qualité et de la réutiliser». Enfin Exonia s’est également fait une spécialité du traitement des lixiviats en «tout évaporation» utilisant les calories du site (cogénération, chaudière biogaz) mais aussi en Tout Electrique par Compression Mécanique de Vapeur avec rejet liquide conforme. 


EN PRATIQUE 

Conformément à sa préférence pour les traitements in situ, Ovive propose surtout des filières centrées sur un bioracteur à membranes (BRM) avec des traitements complémentaires. Pour une ISDND publique au pied des Pyrénées, la société a ainsi installé un BRM (un Bioréacteur à membrane d’ultrafiltration en céramique) suivi d’une finition par osmose inverse. Le site n’ayant pas d’autorisation de rejet dans le milieu, l’effluent traité est envoyé sur un taillis en très courte rotation (TTCR) de saules, de 2,5 hectares. Les arbres évapotranspirent l’effluent, qui ainsi ne peut pas rejoindre la nappe. Les saules sont coupés tous les 3 ans et la biomasse valorisée dans une chaufferie proche. «Au total, les lixiviats produisent de l’énergie, c’est un renversement» sourit Maxime Pollet. 

Aeroe propose différents modèles de CMV qui peuvent traiter de 50l/h à plus de 3500 l/h.

Les boues biologiques, elles, sont compostées sur un filtre planté de roseaux. «Les sites en «zéro rejet liquide» deviennent fréquents. Le TTCR est alors une alternative à l’utilisation du biogaz pour évaporer le rejet» affirme Maxime Pollet. Une contrainte cependant: le lixiviat est abondant en hiver alors que les arbres évapotranspirent surtout pendant la saison chaude. Il faut donc prévoir une lagune ou un bassin de stockage. 

Spécialiste du traitement des sites et sols pollués, Serpol est un nouveau venu sur le marché des lixiviats. La société fait son choix dans toute la panoplie de technologies disponibles, sans préférence. «Nous traitons les lixiviats de l’agglomération Aix – Marseille Provence. Etant donné la taille du site et les exigences, nous utilisons l’OI, qui traite 25 à 30000 m3 /an de lixiviat et produit 7000 m3 de concentrat. Celui-ci est évapococentré en une liqueur dense dirigée vers une filière d’élimination» explique Jean-Luc Mangiacotti. Pour un autre site géré par un major du déchet, plus modeste (6000 m3 de lixiviat par an), Serpol a déployé un BRM suivi d’une finition sur charbon actif pour la «DCO dure». Même configuration à Trifyl (Tarn), avec un gros BRM suivi de charbon actif et de filtres à métaux. «Ce site rejette dans une STEU industrielle, donc nous n’allons pas au bout de la nitrification/dénitrification dans le BRM, pour laisser une charge azotée à la STEU. L’ensemble est installé dans des bâtiments en dur et sera livré en septembre» précise Jean-Luc Mangioacotti. Serpol déploie également des TTCR de saules pour les sites ne pouvant rejeter aucun effluent dans le milieu. 

Performance Process propose des essais pilote sur site ou en laboratoire pour valider la théorie par des essais car les lixiviats sont des effluents complexes. Ici, un pilote d’ajout d’antitartre pour éviter la formation de dépôts minéraux

Vivlo, pour sa part, intervient plutôt sur des sites importants avec des technologies demandant de l’énergie. «Nous avons deux spécialités : l’OI qui produit une eau d’excellente qualité rejetée dans le milieu et un concentrat contenant les métaux lourds, la MO et les différentes formes d’azote. C’est la technique la moins coûteuse pour les gros débits mais elle génère des volumes de déchets importants. Nous les re-concentrons par évaporation, avec nos évaporateurs «maison» avant de les diriger vers une filière d’incinération» explique Julien Brochier. 

«C’est aujourd’hui la technique la plus aboutie qu’on puisse mettre en place. Nos super-concentrateurs permettent d’évacuer le lixiviat sous forme solide» ajoute-t-il. Exonia, de son côté, continue le développement de sa gamme d’évaporateur standard 0.5 T à 10 T/h en tout vaporisation ou en Compression Mécanique de Vapeur, misant en cela comme sur les sites de Paprec ou Suez sur le développement du tout électrique dans un pays ou la production électrique est fortement décarbonée. 



SITES FERMÉS : UN MARCHÉ D’AVENIR 

Même fermé, un CET produit encore un lixiviat pollué pendant de nombreuses années. Les exploitants sont donc soumis à une obligation de suivi à long terme. L’article 10 de la directive européenne Décharges (Directive 1999/31/CE du Conseil du 26 avril 1999) fixe une durée minimale de 30 ans. «Généralement les premières années après la fermeture la charge à traiter baisse peu, par la suite c'est assez variable d'un site à l'autre. Il y a des sites fermés depuis 15 ans où nous traitons encore les lixiviats avec des technologies relativement lourdes : BRM ou Osmose inverse, car les lixiviats ou les normes de rejet l'impose» explique Maxime Pollet. Ovive lance d’ailleurs une grande campagne de R&D sur les sites fermés car le suivi post-exploitation est devenu une problématique d’avenir. La firme a prélevé des échantillons sur plusieurs sites pour qualifier au laboratoire des techniques comme les réacteurs biologiques séquentiels (SBR), les procédés physico-chimiques, le charbon ou la phytoépuration… 

Avec un parc important d'unités mobiles d'osmose inverse (OI) et d'évapoconcentrateur, Le Floch Depollution intervient sur des opérations ponctuelles in situ.

«Les BRM ou les OI sont des systèmes trop complexes pour des sites arrêtés car ils exigent la présence d’un technicien en permanence. Nous serons de plus en plus amenés à travailler sur le sujet. Des dizaines de petits sites vont fermer dans les années à venir» confirme Jean-Luc Mangiacotti. Serpol a d’ailleurs anticipé le problème en développant avec l’Ademe, en 2010, le système Roseaulix. Basé sur un filtre planté de roseaux (FPR), avec une finition au charbon actif pour la «DCO dure» ce système extensif vise essentiellement a nitrifier/dénitrifier le lixiviat. Au besoin, une pompe à chaleur réchauffe le lixiviat à 15°C afin de maintenir l’activité bactérienne. Serpol en installe un sur la décharge de Saint Jean de Libron, près de Béziers. «Le système Roseaulix a cependant besoin de foncier. Notre R&D travaille donc sur d’autres solutions plus compactes» révèle Jean-Luc Mangiacotti. 

Peformance Process a un positionnement particulier en tant que bureau d’ingénierie. «On nous sollicite souvent pour les «moutons à cinq pattes » » sourit Matthieu Dancoisne. Par exemple pour traiter des lixiviats « vieux » avec peu de moyens financiers puisque les sites sont fermés. Une ISDND n’avait par exemple besoin que de traiter le nickel pour parvenir à un effluent répondant aux normes de rejet dans le milieu. «Certains concurrents ont proposé de grosses installations. Nous avons étudié les formes de nickel présentes et, avec notre pilote, nous avons prouvé qu’un dispositif d’adsorption suffisait. Nous avons ainsi réduit d’un facteur 3 la charge financière sur 20 ans d’exploitation » se souvient Matthieu Dancoisne. 

A La Dominelais (35), sur un centre d’enfouissement technique CTP environnement met à disposition ses unités mobiles BIOMOBIL® pour le traitement d’environ 4000 m3 de lixiviats sur site, en traitement continu 7/7j et 24h/24 . (traitement biologique aérobie/anoxie + filtration tangentielle + adsorption sur charbon actif).

Sur une ISDI, il ne fallait traiter que la partie minérale et empêcher les tartres de se former. «Nous avons joué avec le pH et ajouté des antiscalants pour éviter d’installer un traitement complet. Là encore nous réussirons à réduire la facture. Nous jouons sur « le juste nécessaire » pour garantir aux exploitants que le traitement mis en place est optimal techniquement et financièrement. Pour rendre cela possible, nous construisons actuellement un bâtiment intégrant un laboratoire d’essais » affirme Matthieu Dancoisne. 

« Un site en post-exploitation voit sa production de gaz diminuer d’année en année, précise Philippe Caurier. Aussi, les moyens de traitement thermique habituels utilisant les calories du site deviennent inadéquats et bien souvent sont arrêtés faute d’énergie. Avec sa construction modulaire réutilisable, Exonia, diminue les structures utilisées en post-exploitation puis modifie ces dernières en passant au tout électrique quand le biogaz vient à manquer, ce qui permet d’assurer la concentration des lixiviats résiduels ». La société Aeroe propose également des solutions simples, au coût d'exploitation particulièrement bas, avec les modules HBS et DHC08 pour les sites fermés.

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