Tous les procédés de désinfection nécessitent une eau claire pour fonctionner dans des conditions optimales. Mais le choix du procédé de filtration est très difficile compte tenu des variations de turbidité importantes à la sortie d'une station d'épuration. Le procédé exposé ci-dessous peut être une bonne réponse en tant qu'application de la filtration directe sur lit multicouches avec les avantages suivants : grande vitesse de filtration (20 m3/h/m2), faible turbidité de l'eau traitée, qualité d'eau constante en sortie, grande capacité (jusqu'à 500mg/l de matière en suspension à l'entrée), faible consommation en réactifs chimiques, faible investissement et encombrement.
Dans le domaine du traitement tertiaire de station d’épuration, la désinfection est généralement la dernière étape avant le rejet en milieu naturel. Compte tenu des multiples procédés existants, cette étape est relativement aisée à mettre en œuvre dans la pratique. Celle-ci peut être obtenue à partir des moyens suivants :
- chloration (gazeuse généralement),
- rayonnement ultra-violet,
- ozonation.
Par contre, quel que soit le procédé, le résultat obtenu sera directement lié à la qualité de l’eau disponible à l’entrée du dispositif mis en place pour la désinfection. Le paramètre le plus important à considérer pour définir cette qualité, dans ce type d’application, est la turbidité. En effet, on peut considérer que la majorité des matières organiques destinées à être oxydées ensuite est « contenue » dans les matières en suspension caractérisant cette turbidité. Si celle-ci accuse des variations importantes ou possède en permanence une valeur résiduelle élevée, il est évident que la désinfection sera difficile, voire impossible à conduire avec des résultats acceptables.
Par exemple, la chloration fera apparaître une quantité excessive de composés organo-chlorés et le rayonnement ultra-violet ne pourra pénétrer toutes les matières organiques, si les matières en suspension s’interposent.
Le tableau indiquant la variation de la charge bactérienne dans les différentes phases du traitement d’épuration de Bazzano illustre parfaitement l’importance de la filtration utilisée (figure 1) : cette charge passe de 10 % avant le filtre à 1 % après.
L’utilisation des méthodes conventionnelles (floculation, sédimentation, filtration sur lit de sable ouvert) se heurte à un obstacle majeur : l’effluent d’une station d’épuration biologique possède inévitablement des caractéristiques très variables, au cours de son exploitation. Ce type de filtration nécessiterait donc une surveillance constante afin de rectifier les réglages. De plus, ce sont des traitements lents, nécessitant un génie civil important et un investissement très lourd. La nécessité de disposer d’une surface importante interdit également, dans la plupart des cas, l’amélioration de stations d’épuration existantes.
Cependant, depuis quelques années, la filtration directe est apparue comme une solution économique pour clarifier l’eau contenant des matières en suspension et des colloïdes. Elle est maintenant considérée comme une alternative à un traitement conventionnel.
Le développement de cette technologie de filtration directe a été limité par ses
capacités restreintes à traiter des eaux très turbides tout en gardant une perte de charge et une qualité d’eau traitée acceptable en évitant le contrôle dû à la variation de turbidité de l’eau brute.
Le système exposé ci-après est un nouveau concept de filtration à deux sections filtrantes, breveté, qui peut fournir de l’eau d’une turbidité inférieure à 1 FTU à partir d’une eau brute ayant une turbidité pouvant atteindre 100 FTU.
La principale différence entre un système traditionnel de filtration et ce système provient surtout de la façon de retenir les matières en suspension.
Un système conventionnel retient les particules de turbidité dans les interstices des grains de sable de la partie supérieure du filtre, tandis que ce système retient les particules dans tout le volume du lit du filtre sans obstruer les interstices et, donc, sans provoquer de perte de charge importante.
Pour mettre en œuvre l’omnifiltration, deux filtres en série sont nécessaires : le premier retient le maximum de turbidité, le second la turbidité résiduelle et délivre continuellement une eau de qualité constante.
Ce nouveau concept de filtration apporte les avantages suivants :
- une vitesse de filtration très élevée (16 à 24 m³/m²/h au lieu de 4 à 8 m³/m²/h pour une filtration directe d’une eau de turbidité élevée) ;
- une qualité d’eau traitée élevée (turbidité inférieure à 1 FTU, se rapprochant le plus souvent de 0,1 FTU) ;
- absence d’influence (ou faible influence) des variations de qualité d’eau brute et des débits ;
- capacité de filtrer des eaux très turbides ;
- économies considérables en produits chimiques (floculants et coagulants).
Les bases conceptuelles du système
On peut dire intuitivement que l’exploitation maximum d’un filtre est obtenue lorsque la première fuite de particules en suspension coïncide avec la saturation maximale et uniforme de toutes les parties du lit de filtration.
Si l’on peut imaginer théoriquement pareille situation, dans la pratique, elle est tout à fait irréalisable. En fait, le choix des conditions de service n’est pas seulement très complexe. Il demande également une connaissance très précise des caractéristiques physico-chimiques de la turbidité et de la distribution des dimensions des particules en suspension.
Il est clair que ces caractéristiques devraient ensuite rester constantes durant tout le cycle de filtration.
Pour toutes ces raisons, il est impossible, dans la pratique, de traiter des eaux à haut degré de turbidité car la fuite des particules est inévitable même si l’on renonce à obtenir une perte de charge optimum.
Mais même si la turbidité n’est pas très élevée, il est toujours possible, pour empêcher une régression de la qualité de l’eau filtrée, « d’obliger » le filtre traditionnel à travailler principalement dans les couches superficielles en ayant recours à l’emploi de coagulants.
Si l’on emploie des coagulants inorganiques du type sulfate d’alumine, il est très rare que le filtre atteigne des pertes de charge significatives au moment où l’on constate la fuite de turbidité.
Dans ce dernier cas, en effet, le filtre traditionnel conserve une énorme capacité de stockage non exploitée.
De nombreuses études ont montré qu’en filtration directe, la consommation de réactifs est sensiblement réduite par rapport à celle qui serait nécessaire à la sédimentation en bâche, ce qui confirme un comportement de réacteur chimique du filtre.
En associant donc les caractéristiques particulières de la filtration directe avec celles du sulfate d’alumine, il en découle que la notion de fin de cycle devrait dans ce cas ne pas tenir compte de la fuite de turbidité comme critère d’épuisement.
Ceci est absolument impossible si l’on opère avec une seule unité de filtra-
[Figure : schéma de fonctionnement de « l’Omnifiltration Système » (OFSY)]Il faut cependant se pencher aussi sur la nature de la fuite elle-même. Si nous acceptons en fait la théorie du « défaut » d’attachement comme cause de la fuite, nous pouvons considérer cette turbidité comme étant encore « réactive », c’est-à-dire, susceptible de former de nouveaux liens. Cela est encore plus probable si le filtre opère, à son égard, en tant qu’élément de dispersion mécanique. En d’autres termes, la turbidité qui fuit a des caractéristiques physico-chimiques tout à fait différentes de la turbidité influente.
En d’autres termes encore, la première unité de filtration n’a pas pour unique fonction d’accumuler des quantités énormes de dépôts mais aussi celle d’engendrer un nouveau type de particules en suspension plus homogènes du point de vue de la distribution dimensionnelle et du potentiel de charge, c’est-à-dire des particules en suspension « idéales » à filtrer.
C’est ainsi que l’on peut convenablement exploiter cette réactivité particulière, parfaitement adaptée aux caractéristiques de la turbidité effluente du premier filtre, dans une seconde unité de filtration où, toujours grâce à la disposition particulière des couches, l’on obtient une pénétration en profondeur des particules en suspension avec formation de liens très tenaces.
En d’autres termes, le second filtre ne permet pas seulement d’obtenir de l’eau parfaitement limpide en opérant en tant que « polisseur », mais il favorise aussi l’accumulation de grandes quantités de dépôts grâce à la capacité des flocons de pénétrer dans le lit et d’adhérer aux minéraux filtrants.
La disposition en série des filtres n’est donc pas une simple et banale double filtration qui, à la limite, ne permettrait que de doubler la durée du cycle, mais elle favorise l’exploitation de leur capacité d’opérer en tant que réacteurs avec leurs propres caractéristiques.
De plus, ce système ne dépasse pas seulement les limites de la filtration simple pour ce qui est du maximum de turbidité à traiter et du maximum de capacité de rétention de turbidité. Il élimine aussi complètement la nécessité de modifier continuellement les dosages de coagulants à la moindre variation des caractéristiques des particules en suspension dans l’eau brute.
Description du système
Dans la disposition en série, les filtres employés sont tout à fait identiques, du moins en ce qui concerne la disposition des couches.
Ce fait, essentiel du point de vue théorique, présente aussi beaucoup d’avantages pratiques pour ce qui est des problèmes de gestion, d’entretien et d’économies de fabrication.
Le système peut en fait être représenté selon le schéma de la figure 2 :
On remarque que la première unité est seulement dotée de trois vannes hydrauliques à diaphragme alors que la seconde unité, comme tout filtre, en possède cinq.
Il y a deux autres avantages :
1 - On contre-lave le second filtre avec de l’eau préfiltrée en éliminant ainsi le risque de pollution et en réduisant la quantité d’eau consommée ;
2 - On peut exécuter les opérations de contre-lavage avec de l’eau brute sans gaspiller d’eau traitée.
La commande des différentes phases est automatiquement réglée par un pilote unique et peut être actionnée par une horloge ou sur la base des pertes de charge et/ou des fuites de turbidité.
Les avantages du système
On peut établir en conclusion la liste de tous ses avantages.
Tout d’abord, par effet d’une double filtration, la qualité de l’eau filtrée est de beaucoup supérieure à celle que l’on obtiendrait par filtration simple.
Cela nous permet de garantir une tur-
La turbidité finale qui ne dépasse pas 1 FTU. Il faudrait cependant souligner que la vraie turbidité que l’on peut obtenir est normalement plus voisine de 0,1 FTU.
Le niveau de turbidité en sortie est maintenu constant pendant toute la durée du cycle de filtration.
La phase de maturation du filtre, qui normalement dure longtemps, est toujours, par l'effet de la double filtration, pratiquement éliminée, c’est-à-dire que l’OFSY, une fois le lavage fait, est immédiatement en mesure de fournir de l’eau de la meilleure qualité.
Par ce système, on peut traiter des eaux qui ont de très hauts niveaux de turbidité (jusqu’à plus de 500 mg/l de solides en suspension) et que, jusqu’à présent, la filtration simple ne pouvait traiter.
Pour cette même raison, ce système rend superflus les systèmes traditionnels de présédimentation.
Il est, du point de vue de la qualité de l'eau filtrée, pratiquement insensible aux variations de la turbidité influente, même si elles sont rapides et fortes.
De plus, les variations de turbidité ne nécessitent ni variation relative des dosages des réactifs ni même changement du type de coagulant.
De la même façon, de brusques variations de la vitesse de filtration ou des interruptions du cycle de filtration n’influencent pas de façon sensible la qualité de l’eau filtrée.
Les vitesses de filtration étant très élevées (environ 20 m³/h/m²), le rendement absolu de l’unité est très élevé et l’espace occupé très restreint. (Une station de filtration conventionnelle a une vitesse entre 4 et 8 m³/h/m² pour une filtration directe d’une eau de turbidité élevée).
La quantité d’eau nécessaire au contre-lavage est réduite au minimum et elle est fonction seulement de la turbidité influente, c’est-à-dire de la durée du cycle.
Le système est complètement automatisable.
L’identité des unités et de leurs composants permet de réduire au minimum les stocks, les connaissances techniques de suivi et les problèmes de maintenance et de gestion.
Le système de filtration directe sur lequel il se base permet de grosses économies de coagulants et de floculants par rapport aux traitements traditionnels par sédimentation.