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Réseaux d’assainissement : de l’autosurveillance à l’optimisation d’une infrastructure devenue stratégique

04 novembre 2018 Paru dans le N°415 à la page 147 ( mots)
Rédigé par : Emilie TRAN PHONG

Obligés par la réglementation et les autorités préfectorales de surveiller certains points de leurs réseaux d’assainissement, les exploitants n’hésitent plus à aller bien au-delà de ce qui leur est demandé. Et pas seulement dans les grosses agglomérations. Ils sont de plus en plus nombreux à investir dans des instruments de mesure qui permettent, en plus, de mieux connaître et de mieux comprendre le fonctionnement de leurs installations, donc d’optimiser leur système et de prévenir les pollutions.

L’ arrêté du 21 juillet 2015 relatif aux systèmes d’assainissement impose aux exploitants de surveiller la qualité des effluents en sortie de station d’épuration, mais aussi en plusieurs autres points de leurs réseaux.

Pour éviter l’encrassement dû à une immersion en eaux usées, les exploitants privilégient souvent des capteurs sans contact, de type radar (ici, un Micropilot FMR10 ou FMR20 d’Endress+Hauser) ou à ultrasons.

Les déversoirs d’orage, notamment, sont particulièrement visés.

S’ils permettent de détourner le « trop plein » lié à de fortes précipitations, ils doivent être dimensionnés pour ne pas rejeter dans le milieu naturel plus que le volume et la charge polluante autorisés. Les fabricants sont nombreux à proposer les instruments nécessaires pour s’en assurer : ADCPro, Aqualabo, Cometec, CT Platon, Flow-Lab Technologies, Hydratec, Hydreka, Ijinus, Isma, Nke instrumentation, Nivus, Paratronic, Rittmeyer, etc.

Les déversoirs dans le viseur

Le dispositif de mesure à mettre en place dépend de la charge nominale de pollution organique des réseaux. Dès lors que ceux-ci reçoivent plus de 30 kg/j de demande biologique en oxygène (DBO5), soit les eaux usées d’au moins 500 équivalent-habitants (EH), ils doivent communiquer chaque mois aux autorités les débits rejetés par leurs déversoirs. 

Déversoir couplé : mesure combinée de débits déversés vers bassin de stockage et vers milieu naturel. Pour Nivus, l´instrumentation des ouvrages complexes doit parfois faire appel à une combinaison de plusieurs capteurs (multi-hauteur et/ou multi-vitesse).

Jusqu’à 2.000 EH, ils peuvent se contenter de détecteurs de surverse ou de capteurs de hauteur, connectés à un datalogger qui traduit leurs mesures en estimation de volume et de débit, grâce à des tables de conversion préprogrammées. Mais, au-delà de 2.000 EH, cela ne suffit pas. Les données doivent être précises et les mesures de débit continues. Les exploitants ne peuvent plus appliquer un calcul standard. Il leur faut exploiter une métrologie plus élaborée (avec notamment une mesure de vitesse en sus), ou alors connaître la formule mathématique qui correspond à la forme de leurs déversoirs. Pas si simple, car la grande majorité des déversoirs ont été conçus il y a longtemps, bien avant l’arrêté de 2015, donc avec des géométries complexes et souvent hétérogènes. 

Un bureau d’étude spécialisé en modélisation 3D peut alors être mandaté pour définir la bonne formule à appliquer et la fournir à la supervision… quand il y en a une. C’est le cas, aujourd’hui, des gros réseaux, mais pas encore de bien d’autres. À défaut, il faut bien choisir son débitmètre. « Nos modèles DLK, grâce à leur logiciel Logisma VP, peuvent appliquer les formules personnalisées établies par les bureaux d’études. Le DLK 102 est même capable de traiter des fonctions à plusieurs exposants, en fonction de la hauteur d’eau, de la pluviométrie ou des temps de surverse. Ce n’est pas le cas de tous les débitmètres du marché », indique Christophe Lichtle, gérant d’Isma.

En plus de mesurer la hauteur dans un déversoir ou une canalisation, les débitmètres DLK, développés par Isma, sont capables de recevoir et d’enregistrer les données d’autres capteurs, même de marques tierces, situés à proximité. 
Cela leur permet d’estimer le volume de pollution rejeté ou traité.

Pour Nivus, l´instrumentation des ouvrages complexes doit parfois faire appel à une combinaison de plusieurs capteurs (multi-hauteur et/ou multi-vitesse). La gamme de produits communicant Nivulink et NivuFlow Mobile propose ce type de combinaison complétée si besoin, par des lois mathématiques issues de modélisation.

L’intelligence au service de l’autonomie

Les déversoirs d’orage sont souvent situés dans des zones difficiles d’accès (isolées ou sous la chaussée d’une voie rapide, par exemple), et quelquefois loin de toute possibilité de raccordement électrique. Il est donc souvent nécessaire de veiller à préserver l’autonomie des appareils. « Nos dataloggers Sofrel LT, compatibles avec tous les capteurs du marché fonctionnant en 4-20 mA, peuvent les alimenter pendant dix ans grâce à leur pile lithium longue durée, rappelle Benoît Quinquenel, chef de projet digital chez Lacroix Sofrel. Pour préserver cette énergie, nous préconisons un enregistrement des mesures de hauteur et de vitesse toutes les quinze minutes. Une mesure plus fréquente ne sert à rien quand il n’y a aucun de risque de déversement. En revanche, nous pouvons les programmer pour qu’ils réduisent le pas de temps dès que le capteur de niveau détecte le dépassement d’un certain seuil d’eau dans le déversoir. Cela permet de disposer de données plus précises quand cela devient utile ». 

La mesure de débit en petits collecteurs (de DN 200 à 300) est souvent délicate. C’est pourquoi Ijinus propose le dispositif Osrai’Flow, basé sur les principes du canal Venturi mais avec une pose plus facile, des pentes amont pouvant atteindre 4%, avec un risque d’encrassement faible.

D’autres appareils, intégrant à la fois des sondes et un datalogger, fonctionnent également de façon intelligente : « En couplant un détecteur de surverse à nos capteurs ou loggers, qu’il s’agisse de capteurs de niveaux, de débitmètres IAVL ou LaserFlow ou les Dataloggers Ijilog qui sont compatibles avec d’autres capteurs en 4/20 mA ou Modbus RTU, nous n’avons plus besoin de mesurer en continu une absence de déversement. Ce n’est qu’en cas de dépassement de seuil (le paramètre restant au choix de l’utilisateur) que les capteurs se mettent à accélérer leurs pas de mesures, puis forcent l’envoi des données vers le superviseur et peuvent envoyer un SMS d’alerte à l’opérateur, explique Mathieu Zug, directeur scientifique et innovation chez Ijinus. Même chose avec les préleveurs automatiques d’échantillons, ou encore avec les mesures de conductivité ou de turbidité, qui n’ont pas besoin de fonctionner tout le temps au même rythme ».

De l’analyse ponctuelle au suivi continu

Les préleveurs automatiques font partie de l’arsenal d’autosurveillance, notamment sur les gros réseaux. En plus du débit de déversement, ces derniers doivent en effet fournir chaque mois des indicateurs concernant la qualité des eaux rejetées par les déversoirs : pH, température, DBO5, DCO, MES, NTK, NH4, NO2, NO3 et Ptot. Si la norme ne reconnaît que les résultats des analyses réalisés ponctuellement en laboratoire à partir d’échantillons, beaucoup d’exploitants choisissent de compléter le dispositif par des mesures en temps réel.

Prélèvement automatique d’échantillons avec un appareil CSF48 d’Endress+Hauser, branché à un datalogger Sofrel LT-US. Celui-ci intègre un capteur de hauteur.

Il ne s’agit pas ici de se livrer à un zèle inutile : cela leur permet d’éviter toute mauvaise surprise, par exemple de découvrir, au moment de la mesure réglementaire, une pollution installée depuis plusieurs jours et d’avoir à payer une amende. Avec un suivi en continu, à l’aide par exemple de sondes multiparamètres, il est possible de réagir très en amont et de bloquer le flux à temps en cas de contamination.

Même chose en tête de station : les exploitants de réseaux supérieurs à 10.000 EH – ou à 2.000 EH s’il s’agit d’une nouvelle usine – doivent connaître ce qui entre chaque jour dans leurs process de traitement, afin de pouvoir contrôler en sortie son efficacité. 

Le capteur d’hydrocarbures Row, proposé par Cometec, s’installe au niveau des postes de relevages, par exemple, pour anticiper l’arrivée d’une nappe accidentelle d’hydrocarbures vers la station.

Mais « plutôt que d’attendre chaque jour le verdict, certains préfèrent disposer d’un suivi en temps réel. C’est ce que permet notre préleveur automatique Liquiline CSF48 : en raccordant des sondes à son transmetteur, on peut facilement le transformer en station d’analyse en continu », rappelle Aurélia Genet, chef de marché environnement chez Endress+Hauser. Les capteurs utilisés peuvent concerner les mêmes paramètres que ceux qui doivent être mesurés ponctuellement en laboratoire, mais peuvent également s’ouvrir à d’autres types de mesure, comme la conductivité ou la turbidité.

Ce dernier indicateur intéresse de plus en plus les stations d’épuration. « Il donne une indication de la quantité de matières en suspension qu’elles auront à traiter, ce qui leur permet d’adapter les process en temps réel, notamment les quantités de réactifs à injecter dans les bassins », explique Alexandre Huchon, directeur commercial chez EFS Environnement, qui a lancé en 2017 un nouveau turbidimètre, le TurbiProbe 4 000, spécialement adapté à la forte charge des eaux usées (jusqu’à 4 000 NTU).

De même, la conductivité, qui permet de détecter un apport d’eau parasitaire, est de plus en plus mesuré volontairement. Pour répondre à cette demande, de nombreux fabricants ont développé des gammes dédiées à la mesure de tous ces paramètres.

Le capteur radar sans contact Raven Eye de Cometec, associé à un capteur de hauteur et à un datalogger autonome de type Sofrel LT-42 fournit une mesure du débit en canal ouvert ou fermé partiellement rempli.

C’est par exemple le cas d’Ijinus, qui dispose d’une gamme conductivité/pH/oxygène dissous et de turbidimètres, pour détecter et comprendre la dynamique des flux en réseau. De son côté, Cometec, spécialisée dans l’instrumentation, a sorti en 2014 un capteur d’hydrocarbures, le Row, qui permet de voir arriver une nappe d’huiles ou de carburants.

Cela permet d’organiser son pompage avant qu’elles n’entrent dans la station d’épuration, donc d’empêcher la dégradation des équipements et les coûts de remise en état associés.

Plus de paramètres et plus de sites de mesure

En plus de suivre un nombre plus important de paramètres qu’exigé, les réseaux, surtout les gros, sont tendance à exploiter davantage de sites de mesure. Souvent à la demande de la préfecture ou de l’agglomération, ils contrôlent ce qui arrive au niveau des collecteurs et postes de relèvement, voire à certains embranchements. 

Plusieurs raisons à cela : pouvoir remonter à la source d’une pollution, anticiper un afflux exceptionnel, ou encore facturer à chaque commune utilisant le réseau le coût du service réellement consommé (fonction du volume qu’elles ont envoyé vers la station d’épuration). Dans les deux derniers cas, c’est surtout la mesure du débit qui intéresse l’exploitant. Et elle se doit d’être précise. 

En dirigeant leurs faisceaux d’ultrasons à la fois verticalement vers l'avant et vers l'arrière, mais aussi sur les côtés, les débitmètres IQ™ d’ADCPro sécurisent la mesure du débit que ce soit en canal ouvert ou en conduites fermées en charge ou partiellement remplies.

Dans les canalisations à écoulement gravitaire, partiellement remplies en dehors des heures de pointes, les débitmètres électromagnétiques standards, qui basent leurs calculs sur une section de canalisation pleine, ne conviennent pas. C’est pourquoi des appareils spécifiques, comme le Tidalflux de Krohne, ont été développés. « Une plaque capacitive intégrée derrière le revêtement du TidalFlux permet de mesurer la hauteur du liquide en même temps que sa vitesse, donc de connaître précisément la section mouillée pour calculer le débit. Et ce même si la conduite n’est remplie qu’à 10 % », explique Christian Jay, responsable marketing et produits chez Krohne.

La mesure de ce débit dans des conduites partiellement remplies (DN 200 à DN 1600) est une tâche effectuée par le débitmètre électromagnétique Tidalflux de Krohne.

En canal ouvert, le débit peut être mesuré via une simple mesure de hauteur dans un canal Venturi, avec un datalogger qui, comme le Sofrel LT-US et sa table de conversion, ou le Prosonic FMU90 et ses courbes pré-programmées, peut traduire l’information en débit. « Mais cela peut être trompeur : en cas de crue, la vitesse de l’eau augmente plus vite que la hauteur, explique Olivier Paillard, responsable technico-commercial chez Cometec. C’est pourquoi, dans les zones à risque d’inondation, la préfecture peut demander d’associer à la mesure de hauteur un capteur de vitesse, comme notre radar sans contact Raven-Eye. Avec ses antennes coniques, celui-ci est capable de repérer des petits bruits sur de faibles débits, comme ceux que l’on trouve à l’entrée des réseaux d’assainissement ». 

Surveiller et contrôler des équipements distants dans des environnements sévères nécessite des équipements robustes avec une autonomie avancée des batteries. TBOX Nano de IP Systèmes, répond à ces besoins critiques.

Certains appareils permettent même de s’affranchir du génie civil, à l’instar des débitmètres doppler de la gamme IQ™ : « que ce soit dans des canaux ouverts ou dans des conduites fermées partiellement remplies ou en charge, le fait que ces appareils envoient des signaux ultrasons à la fois verticalement vers l'avant et vers l'arrière ainsi que sur les côtés, pour couvrir un large champ de la section mouillée, les rend très précis », explique Daniel Engel, président de ADCPro.

On le voit, la gamme des appareils permettant de surveiller les réseaux d’assainissement déjà très large, ne cesse de s’enrichir et de se diversifier. Il s’agit de répondre aux besoins, toujours plus importants, des exploitants qui éprouvent le besoin de connaître parfaitement leurs systèmes d’assainissement et ce qui y transite. 




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