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Étude du séchage solaire des boues de stations d'épuration urbaines

31 decembre 2006 Paru dans le N°297 à la page 41 ( mots)
Rédigé par : H AMADOU, C BECK, A-g SADOWSKI et 1 autres personnes

La filière "boue" traverse actuellement une crise essentiellement liée aux volumes considérables de boues produites et aux incertitudes qui pèsent sur les filières de valorisation en aval. Dans ce contexte, le séchage solaire sous serre se positionne comme un procédé intermédiaire, alternatif aux procédés conventionnels pour les petites collectivités. L?enjeu principal pour fiabiliser la mise en ?uvre de ce type de dispositif est d'en améliorer l'efficacité énergétique et le design. Il apparaît donc nécessaire de développer une meilleure connaissance de l'outil ?serre-boue?, pour ?uvrer à une gestion optimale de ce moyen de traitement. Le présent article résume les principaux points d'une recherche effectuée à l'ENGEES dans le cadre d'une thèse de doctorat sur la conception d'un modèle énergétique complet du séchage, qui tient compte des propriétés de la boue. Ce modèle est validé à travers une comparaison des résultats numériques avec des données expérimentales obtenues au laboratoire.

Suite à la législation européenne en matière d’épuration des eaux usées, les quantités de boues vont croître de manière drastique dans les prochaines années. Dans le même temps, les filières d’élimination s’amenuisent notamment suite à la réduction planifiée par l’Union Européenne des quantités de déchets biodégradables mis en décharge (Conseil de l’Union Européenne, 1999). Dès lors, la gestion des boues produites va devenir une question cruciale à court terme. Dans ce cadre, le séchage solaire sous serre des boues constitue une des solutions envisageables en aval.

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[Photo : Figure 1 – Les différents transferts thermiques pris en compte dans le modèle.]

des stations, avant une valorisation agricole ou thermique.

Ce procédé permet de réduire les volumes des boues avec un minimum de dépenses énergétiques et de garantir une siccité finale élevée de la boue.

L’enjeu principal pour les constructeurs est d’améliorer l’efficacité énergétique et le design de ces procédés pour minimiser les surfaces mises en jeu et dépasser les limites technologiques actuelles. Dans ce contexte, une thèse intitulée « modélisation du séchage solaire sous serre des boues de stations d’épuration » est en voie de finalisation. L’ambition de l’étude est de contribuer à améliorer les méthodes de conception et de dimensionnement des installations utilisant comme source d’énergie le rayonnement solaire, qui permet :

  • le réchauffement de la surface du lit de boues,
  • le réchauffement de l’air par effet de serre.

L’évaporation diminue lorsqu’une couche solide ou « croûte » se forme à la surface du lit de boues, ralentissant fortement la vitesse de diffusion de l’eau à travers ce dernier. Pour éviter ainsi les risques de formation de croûte à la surface du lit, les boues sont régulièrement retournées par un dispositif spécifique.

L’air chargé d’humidité contenu dans la serre est renouvelé régulièrement avec de l’air extérieur, à la fois par convection naturelle puis par convection forcée, à l’aide d’une ventilation mécanique. La ventilation mécanique permet d’assister la ventilation naturelle durant les périodes d’évaporation intense et d’homogénéiser l’air ambiant dans la serre. Ainsi, le renouvellement perpétuel de la masse d’air (le « milieu asséchant ») présente dans la serre permet de maintenir un degré d’hygrométrie favorable à l’optimisation de l’évaporation.

Description et formulation du modèle

Le modèle proposé est un modèle de connaissance dynamique monodimensionnel, qui s’articule autour de la formulation des bilans d’énergie instantanés des différents composants de la serre. Chacun des éléments du modèle est caractérisé par une variable d’état. Les modes de transferts thermiques mis en jeu sont :

  • conduction au travers du sol,
  • convection à la surface de la couverture, de la boue,
  • évaporation au niveau de la boue,
  • renouvellement d’air dû aux ouvrants de la serre ou à une ventilation mécanique,
  • apports solaires au travers du matériau de couverture,
  • échanges radiatifs de grande longueur d’onde entre les différents éléments.

Afin de simplifier la mise en équations du système, nous avons posé certaines hypothèses dont l’une d’elles est la distribution uniforme des différentes variables. Cette hypothèse a l’avantage de permettre la formulation d’équations dont la solution représentera l’état moyen des variables.

La formulation des bilans d’énergie détermine un système d’équations différentielles non linéaires où chaque équation correspond à la formulation du bilan d’énergie d’un élément.

Pour rendre compte de l’état de la boue dans la modélisation, la mise en place de protocoles pour la mesure des propriétés thermodynamiques de la boue (la chaleur spécifique et l’isotherme de désorption).

Principe du séchage solaire

Le séchage solaire des boues s’effectue par évaporation naturelle de l’eau contenue dans les boues, en

[Photo : Figure 2 – Configuration du pilote expérimental.]

miques de la boue intervenant dans la modélisation est effectuée. Ces protocoles utilisent un calorimètre de type C80 pour déterminer la chaleur spécifique massique et un système DVS (Système dynamique de sorption de vapeurs) pour la détermination de l'isotherme de sorption.

L'utilisation du DVS a permis d’obtenir très rapidement des isothermes de désorption complète sur un domaine large de l’activité (humidité relative). En effet, la connaissance de l'isotherme de désorption permet en outre de calculer la teneur en eau en équilibre de la boue, indiquant la fin du séchage, et détermine également les conditions appropriées de stockage des boues. Un ordre de grandeur pour la capacité calorifique massique de la boue anhydre est donné. Des formulations semi-empiriques concernant ces grandeurs ont été proposées.

Ces formulations sont utilisées dans la modélisation et c’est à travers elles que le caractère évolutif de la boue est décrit.

Expérimentation et validation du modèle

Le modèle numérique décrit est, d’ores et déjà, un outil d’aide pour comprendre les mécanismes complexes et couplés intervenant durant le séchage.

Toutefois, pour acquérir un caractère prédictif à ce programme, il faudrait valider le modèle en comparant les résultats numériques et mesurés au niveau expérimental. Une description détaillée de la maquette de laboratoire pour l'étude de séchage à couche mince et de l'ensemble du matériel mis en œuvre pour traiter les données expérimentales est effectuée.

La méthode utilisée concerne un plan d’expérience mené en deux étapes, de manière à mieux appréhender le couplage très complexe des différents transferts thermiques et massiques. Il s’agit du modèle I, où le séchage est considéré purement convectif, puis du modèle II, où le séchage a lieu à l'intérieur d'une serre, elle-même placée dans une enceinte climatique (voir figure 2).

L’approche expérimentale a été effectuée sous atmosphère immobile et confinée.

La comparaison des résultats observés et mesurés s’est avérée souvent très satisfaisante, tant au niveau des transferts couplés de chaleur et de masse qu’au niveau de l’évaluation des vitesses de séchage. Néanmoins, plusieurs phénomènes échappant à la formulation macroscopique et monodimensionnelle du code ont été évoqués pour expliquer certains écarts entre les simulations et les comportements observés. L’outil numérique permet d’ores et déjà d’apporter certaines réponses à de nombreuses questions que peuvent se poser les conducteurs de séchoir, notamment par rapport à l'orientation de la serre, la hauteur adaptée, la position de la ventilation dynamique.

[Photo : L’outil numérique permet d’apporter certaines réponses aux questions que peuvent se poser les conducteurs de séchoirs, notamment par rapport à l’orientation de la serre, la hauteur adaptée, position de la ventilation dynamique.]

Les résultats des simulations peuvent se résumer de la manière suivante : il est préférable d’agrandir la serre suivant sa longueur plutôt que sa largeur, les ouvertures dénivelées assurant la ventilation au sein de la serre admettent aussi des valeurs optimales qui dépendent de la vitesse moyenne du vent ; les ouvertures de ventilation doivent être adaptées à la direction du vent.

Perspectives

Les perspectives de ce travail sont dans un premier temps de valider les prévisions du modèle par suivi de quelques installations à l’échelle réelle en Alsace, ensuite de valoriser ce modèle à travers le développement d'un logiciel appliqué à l'ingénierie et au diagnostic énergétique des serres de séchage des boues.

En vue de la réalisation de ces perspectives, nous cherchons un cofinancement d’un post-doctorant auprès d’entreprises intéressées par ces travaux, afin de le finaliser.

[Encart : Références bibliographiques : - H. Amadou, C. Beck, A.G. Sadowski, J.B. Poulet, Modélisation du séchage solaire des boues de stations d’épuration, 6ᵉ Congrès International du GRUTEE, « Devenir des Pollutions et Traitements des Eaux », 27 au 29 septembre 2005, Aix-les-Bains, France. - H. Amadou, C. Beck, A.G. Sadowski, J.B. Poulet, Experimental study and modelling of the drying kinetics of urban wastewater treatment plant sludge, 6th International Conference on Advances in Fluid Mechanics, 8 – 10 May 2006, Skiathos, Greece. - H. Amadou, C. Beck, R. Mose, C. Vasile, A.G. Sadowski, J.B. Poulet, Analysis of the convective drying of residual sludge: from the experiment to the simulation, Eighth International Conference on Modelling, Monitoring and Management of Water Pollution, 4 – 6 September 2006, Bologne, Italie.]
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