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Déminéralisation des eaux d'appoint de chaudières : les procédés de régénération à contre courant

28 février 1985 Paru dans le N°89 à la page 37 ( mots)
Rédigé par : Bernard CAUSSE

Dans le domaine de la déminéralisation des eaux d’appoint de chaudières, la régénération à contre-courant a fait ses preuves depuis longtemps, tant du point de vue de l'économie de réactifs que du point de vue de la qualité de l'eau traitée et de la fiabilité de l’exploitation. Dans de nombreux cas, on a ainsi pu éviter d’avoir à prévoir des lits mélangés de finition. Cette technique a donné lieu à de nombreux procédés qui ont eu à résoudre les problèmes pratiques suivants, propres à la régénération à contre-courant :

Bernard CAUSSE

Degrémont

Dans le domaine de la déminéralisation des eaux d’appoint de chaudières, la régénération à contre-courant a fait ses preuves depuis longtemps, tant du point de vue de l'économie de réactifs que du point de vue de la qualité de l'eau traitée et de la fiabilité de l’exploitation.Dans de nombreux cas, on a ainsi pu éviter d’avoir à prévoir des lits mélangés de finition. Cette technique a donné lieu à de nombreux procédés qui ont eu à résoudre les problèmes pratiques suivants, propres à la régénération à contre-courant :

  • - afin de conserver les avantages de cette technique, la précaution indispensable à prendre est d’éviter le bouleversement des couches du lit de résine ; par exemple, la couche de résine de finition, celle que l'eau à déminéraliser traverse en dernier, juste avant de quitter l'appareil, doit impérativement rester en place, et surtout ne pas être mélangée avec les résines des couches supérieures dont la régénération n’est jamais parfaite ;
  • — ceci conduit évidemment à éviter le soulèvement systématique de la résine à chaque régénération, tel qu’il a lieu dans les échangeurs d'ions régénérés à co-courant, pour détasser la résine, enlever les fines et les matières en suspension résiduelles amenées par l’eau brute.

De cela, il découle évidemment que l'eau brute à traiter doit être de bonne qualité et en particulier dépourvue de matières en suspension.

LES DIFFÉRENTS TYPES DE PROCÉDÉS

Pour qu'une régénération effectuée de bas en haut soit efficace, la principale précaution à prendre est de maintenir compact le lit de résine afin d’éviter le bouleversement des couches de résine, les chemins préférentiels... De nombreuses solutions ont été proposées pour résoudre ce problème et nous en rappellerons brièvement quelques-unes.

Blocage à l'eau

Dans un échangeur classique, la fixation s’effectue de haut en bas et la régénération de bas en haut avec contrôle de l’expansion des résines par injection d’un débit d’eau de blocage descendant, et avec sortie des effluents par un réseau situé à la surface de la résine. Les remarques que l’on peut maintenant faire sur ce procédé relativement ancien sont les suivantes :

  • — importante consommation d'eau ;
  • — blocage du lit de résine pas toujours efficace ;
  • — résultats assez décevants.

Blocage à l'air

Tous les procédés faisant appel à cette technique sont réalisés selon le schéma :

  • — cycle de fixation de haut en bas ;
  • — régénération de bas en haut.

En fin de cycle, on vide le dôme et la partie supérieure de l’échangeur jusqu’au niveau supérieur de la résine, cette vidange se faisant par une grille médiane dont les points de reprise sont noyés de 10 à 30 cm dans la résine. Une fois la vidange terminée, la couche supérieure est essorée et constitue un « couvercle » qui s’oppose à l’expansion des résines situées en dessous. On applique alors le courant ascendant de régénérant sans risque de fluidisation du lit de résine. Le réactif, après avoir traversé la couche de résine, ressort par le collecteur intermédiaire en même temps qu'une proportion variable d'air qui traverse la couche essorée de résine.

Ces procédés donnent une eau d’excellente qualité avec des rinçages très rapides ; dans les premiers, l'air de blocage est fourni par un surpresseur d’air, ce qui a le léger inconvénient de consommer de l'énergie. De plus, l'air produit est souvent chaud d’où une déshydratation parfois importante de la partie supérieure du lit de résine. C’est pour résoudre ce problème que, voici bien des années, notre société a mis au point un procédé où la circulation d’air de blocage est assurée par une légère dépression provoquée par un hydro-éjecteur relié à la sortie du collecteur intermédiaire : le mélange réactif-air est aspiré vers l’extérieur (figure 1).

Blocage mécanique

Dans tous ces procédés de régénération à contre-courant, le lit de résine est bloqué mécaniquement (parfois entre deux plateaux à buselures) ou en supprimant le volume mort situé au-dessus de la résine, en le remplissant par exemple avec

[Photo : Régénération à contre-courant - Blocage par aspiration d'air.]

des billes inertes flottantes qui sont évacuées à l'extérieur de l'échangeur d'ions quand un détassage est nécessaire, afin de libérer la partie supérieure de l'échangeur pour le détassage.

LE PROCÉDÉ U.F.D.

Afin d'étendre l'éventail de ces procédés, surtout dans un domaine aussi important que la régénération des échangeurs d'ions à contre-courant, nous avons mis au point un procédé original à blocage mécanique : U.F.D. (Up Flow Degrémont, breveté).

L'échangeur d'ions est constitué par une colonne comportant deux plateaux à buselures entre lesquels est bloqué le lit de résine. Comme dans la plupart des procédés à contre-courant, le cycle de production s'effectue de haut en bas de la colonne, la régénération s'effectuant de bas en haut (figure 2). Afin de supprimer les risques de fluidisation au cours de la régénération, la colonne est remplie de résine à environ 95 % du volume compris entre les deux plateaux.

Ce système présente les avantages ci-après.

1) Il procure une grande simplicité et une grande fiabilité d'exploitation ; en effet, dans l'U.F.D., le courant d'eau à traiter passe de haut en bas de l'échangeur : l'U.F.D. n'est donc pas sensible aux changements de débit et aux arrêts en cours de cycle ; son exploitation demeure à l'abri de fausses manœuvres telles que l'arrêt de l'alimentation en eau brute : pendant le cycle de fixation, l'échangeur U.F.D. se comporte hydrauliquement comme un échangeur d'ions conventionnel.

2) Comme pour tous les procédés utilisant la régénération à contre-courant, l'eau brute doit être de très bonne qualité et exempte de matières en suspension. Cependant, un U.F.D. est moins sensible aux matières en suspension résiduelles que certains autres procédés. En effet, dans celui-ci, les matières en suspension éventuelles restant dans l'eau brute vont rencontrer en premier la couche supérieure du lit compact de résine, c'est-à-dire les billes les plus fines. Ces matières en suspension sont donc principalement retenues par la surface et la partie supérieure du lit de résine. Lors de la séquence « soulèvement et compactage », phase n° 1 de la régénération (figure 2), qui s'effectue à vitesse relativement élevée, une part importante de ces matières en suspension traverse la couche de résine inerte et est évacuée à l'égout : il s'effectue donc un nettoyage partiel du lit de résine à chaque régénération de l'U.F.D. lors de la phase de compactage. On a effectivement pu constater que dans un grand nombre de cas, quand la qualité de l'eau à traiter était bonne, la nécessité de nettoyer la résine à l'extérieur de l'échangeur ne se faisait sentir qu'extrêmement rarement (par exemple tous les 200, voire 400 cycles).

De plus, comme seule la partie supérieure du lit est affectée par les matières en suspension, il est en général suffisant de la nettoyer sans bouleverser les couches inférieures qui assurent la finition du traitement : d'où un redémarrage facile après nettoyage, et sans grande altération de la qualité d'eau traitée.

3) Ses autres avantages découlent de la technique de la régénération à contre-courant :

  • - faible quantité de réactifs de régénération : on se rapproche de la quantité stœchiométrique ;
  • - excellente qualité de l'eau traitée due à l'efficacité de la couche de finition ;
  • - rinçages très courts des résines en fin de régénération, et obten-
[Photo : Séquences de régénération.]

tion rapide de la qualité de l'eau traitée au redémarrage.

Ceci est d’autant plus vrai que la conception (très simple) des U.F.D. permet :

  • de disposer de hauteurs de résine importantes (jusqu’à 3 m) améliorant les performances de fixation-élution, ce qui accroît la qualité du traitement et du rendement de la régénération ;
  • de placer les dispositifs de distribution des fluides à la proximité immédiate de la surface de la résine, ce qui diminue considérablement les volumes morts et par conséquent les temps de rinçage.

Il reste que l'U.F.D. n’est pas conçu pour que les résines puissent être détassées et nettoyées à l'intérieur de l'échangeur : elles doivent être de temps en temps sorties hydrauliquement de l’échangeur et transférées de celle-ci dans l’échangeur (figure 3).

[Photo : Fig. 3 – Séquences de transfert et lavage externe.]

Il convient cependant de noter que ces opérations, très peu fréquentes, sont courtes, simples et, à condition d’être effectuées avec soin, ne présentent aucun risque.

INSTALLATIONS RÉCENTES UTILISANT LE PROCÉDÉ

Le procédé U.F.D. a déjà été adopté pour équiper de nombreuses installations, entre autres pour la réalisation d'une série de centrales thermiques espagnoles.

Centrale de Soto de Ribéra (province d’Oviedo)

Après un prétraitement commun (clarification dans un décanteur lamellaire – filtration sur sable), l'eau filtrée alimentant l'installation de déminéralisation d’eau d’appoint présente en moyenne les caractéristiques données (en mg/l) dans le tableau ci-dessus.

CATIONS (teneur en CaCO₃) Ca²⁺ 215 ; Mg²⁺ 76 ; Na⁺ 74 ; Total 365
ANIONS (teneur en CaCO₃) HCO₃⁻ 159 ; Cl⁻ 82 ; NO₃⁻ 20 ; SO₄²⁻ 104 ; Total 365
Autres éléments SiO₂ 6 ; CO₂ libre 17,6

L’installation comporte deux chaînes, chacune, fonctionnant à 44 m³/h, étant composée de :

  1. Un échangeur de cations, stratifié, type U.F.D., régénéré à l’acide sulfurique :

    • diamètre extérieur : 2 550 mm,
    • hauteur cylindrique : 3 400 mm,
    • quantité de résine carboxylique : 3 750 l,
    • quantité de résine sulfonique : 9 700 l,
    • plancher intermédiaire de séparation entre les deux lits de résine,
    • quantité de résine inerte (dans chacun des deux compartiments) : 750 l.
  2. Un dégazeur atmosphérique.

  3. Un échangeur d’anions, stratifié, type U.F.D., régénéré à la soude caustique (sans réchauffage) :

    • diamètre extérieur : 2 300 mm,
    • hauteur cylindrique : 3 700 mm,
    • quantité de résine anionique faiblement basique : 5 350 l,
    • quantité de résine anionique fortement basique type I : 5 350 l,
    • plancher intermédiaire de séparation entre les deux lits de résine,
    • quantité de résine inerte (dans chacun des deux compartiments) : 615 l.
  4. Un lit mélangé de finition, à trois couches (c’est-à-dire avec résine inerte).

À la sortie de la chaîne primaire, la résistivité de l’eau traitée est

constamment très supérieure à 1 mégohm, et sa teneur en silice résiduelle est en moyenne de 10 µg/l.

Après six mois de fonctionnement continu, il n'avait toujours pas été envisagé d'utiliser la colonne externe de lavage des résines (diamètre 2 200 mm, hauteur cylindrique 3 000 mm), les pertes de charge au travers des échangeurs ayant peu varié.

Nous résumerons ci-dessous la description des autres installations dont les détails pourraient paraître fastidieux :

● La centrale de La Robla (province de Léon) comprend une chaîne de 46,5 m³/h instantanés, composée de :

  • - un cation fort type U.F.D., de diamètre 2 000 mm, régénéré à l'acide sulfurique et comportant 7 500 l de résine,
  • - un anion stratifié type U.F.D., de diamètre 1 600 mm, comportant 3 800 l de résine anionique faible et 3 800 l de résine anionique forte, les deux résines étant séparées par un plancher intermédiaire à buselures,
  • - un lit mélangé de finition.

La salinité de l'eau entrante varie de 150 à 180 mg/l CaCO₃. À la sortie de la chaîne primaire, la résistivité de l'eau traitée est constamment supérieure à 2 mégohms et la teneur en silice résiduelle est toujours inférieure à 10 µg/l.

[Photo : Centrale thermique d’Escombreras - 2 chaînes UFD. Débit unitaire : 75 m³/h.]

● La centrale de Narcea (province d’Oviedo) comprend deux chaînes de 46,5 m³/h instantanés, chacune composée de :

  • - un cation fort type U.F.D., de diamètre 2 300 mm, régénéré à l'acide sulfurique et comportant 9 400 l de résine,
  • - un anion stratifié type U.F.D., de diamètre 2 000 mm, comportant 4 200 l de résine anionique faible et 6 500 l de résine anionique forte, les deux résines étant séparées par un plancher intermédiaire à buselures,
  • - un lit mélangé de finition.

La salinité de l'eau entrante varie de 90 à 100 mg/l CaCO₃ et la silice est de 6 mg/l SiO₂. À la sortie de la chaîne primaire, la résistivité de l'eau traitée est de plus de 2 mégohms et la teneur en silice résiduelle est régulièrement inférieure à 10 µg/l.

[Photo : Centrale thermique d’Escombreras - Colonne de définage des résines.]

Dans ces deux installations, après quatre mois de fonctionnement continu, il n’avait toujours pas été nécessaire d'utiliser la colonne externe de lavage des résines.

● La centrale d’Escombreras (province de Carthagène) dont les installations se trouvent en début de fonctionnement industriel, comprend deux chaînes de 75 m³/h, comportant chacune un cation stratifié type U.F.D., de diamètre 2 000 mm et un anion stratifié type U.F.D., de diamètre 1 800 mm.

La salinité entrante est d’environ 500 mg/l CaCO₃ et la silice d’environ 5 mg/l SiO₂. Les premiers résultats d’exploitation industrielle concernant la qualité de l’eau traitée recoupent tout à fait les résultats obtenus aux trois installations précédentes.

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