Le débit est une mesure essentielle dans le secteur de l'eau. Les techniques de mesure sont aujourd'hui matures. De leur choix et de leur mise en ?uvre dépend la précision du débit. Aujourd'hui trois grandes techniques se partagent le marché du comptage et de la mesure de transfert de fluide et les débitmètres massiques industriels sont mis en ?uvre pour améliorer les dosages en cours de procédé de traitement.
La CER (Compagnie des Eaux de Royan) a choisi un débitmètre de 700 mm de diamètre de type Tidalflux et fabriqué par Krohne pour mesurer le débit entrant sur la station de Royan, une STEP de 175 000 EqH. Cette mesure est obligatoire aujourd’hui lorsqu’on respecte les règles de l’auto-surveillance des STEP. Ce capteur comptabilise le débit entrant et compare cette valeur avec le débit sortant. Souvent, une mesure intermédiaire est faite en cours de processus. Ces trois mesures assurent une partie de l’auto-surveillance de la station d’épuration.
Dans le domaine de l'eau, la débitmétrie est une mesure très utilisée. On la trouve partout. Sur les réseaux d’eau potable, elle sert à mesurer les transactions d'eau et aide à la détection des fuites. Sur les réseaux d'eau usée, elle quantifie la charge des installations et permet de détecter les pertes. En station de traitement elle mesure les flux entrants ainsi que les échanges entre équipements. Elle facilite le dosage des additifs,
Les grands principes physiques
Électromagnétique - Les débitmètres électromagnétiques fonctionnent sans aucune pièce mobile. Ils mesurent les fluides dont la conductivité est supérieure à 1 µS/cm. Le champ électrique créé autour de l’écoulement induit une force électromotrice directement proportionnelle à la vitesse d’écoulement du fluide. La valeur mesurée ne fait pas état de la conductivité. L'appareil s'insère dans la tuyauterie et ne provoque aucune perte de charge. Pour les canalisations en partie remplies, cette mesure est faite pour la surface mouillée déterminée à partir d'une mesure de niveau.
Les ultrasons ou techniques acoustiques - Elles se divisent entre les ultrasons dits à temps de transit et ceux à effet Doppler. Dans le premier cas, le temps nécessaire à une onde ultrasonore pour se propager dans un fluide en mouvement est directement proportionnel à la vitesse d’écoulement. Dans l'autre, la vitesse d’écoulement du liquide est assimilée à la vitesse des particules présentes dans le fluide.
La dynamique des fluides - Cette théorie énonce que le débit dépend du niveau d'eau dans une section. Une modification géométrique du canal Venturi entraîne une variation du niveau directement liée au débit. Reposant sur le même principe, les organes déprimogènes calculent la différence de pression produite par un fluide qui s’écoule dans la contraction. Au niveau du diaphragme, la pression différentielle varie dans le rapport du carré de la vitesse du débit. Pour utiliser ce principe de mesure, il est nécessaire d’avoir un liquide homogène, sans bulles ni grosses particules en suspension. Sur le déversoir calibré, c’est la hauteur qui est mesurée alors que sur le Venturi on s’intéresse à la vitesse. On réalise alors une mesure de temps de transit entre deux capteurs de pression placés en des endroits précis du canal.
Mesurer les rejets. La mesure de débit permet aussi de comptabiliser les pollutions présentes dans les rivières.
Trois grands principes physiques sont disponibles pour effectuer la mesure du débit d'eau : les méthodes acoustiques, électromagnétiques et la dynamique des fluides. La mesure par débitmétrie massique Coriolis commence à faire son apparition notamment pour le dosage des additifs de traitement.
Quasiment tous les cas d’école sont rencontrés dans ce secteur lorsque l'on considère la mise en œuvre du capteur. Les fluides mesurés sont selon les cas de l'eau ultra pure, de l'eau propre, de l'eau chargée ou des boues et le tout s’écoule en charge dans des conduites pleines ou partiellement pleines, des canaux ouverts normalisés ou non. Autant dire que le choix du capteur devra prendre en compte tous ces éléments et retenir la bonne technique.
Mesurer sur des conduites
Le comptage de l’eau potable, la surveillance des transferts d’effluents dans les conduites d'eau résiduaire sont des cas parfaits de la mesure sur conduites gravitaires. Ces écoulements sont réalisés en conduites pleines ou partiellement pleines. Parmi les mesures de débit réalisées en conduite pleine, 80 % d’entre elles utilisent la technologie électromagnétique.
Née dans les années 70, cette technique a fortement évolué jusqu’à la fin des années 90. Depuis quelques années, les équipements sont matures et son évolution marque le pas. Elle est aujourd'hui proposée par la plupart des constructeurs de débitmètres ABB Instruments, Endress + Hauser, Krohne, Siemens Process… « C’est la technique la plus demandée aujourd'hui », précise Philippe Rabiet, responsable marketing eau et eaux usées chez Siemens Process. Aujourd’hui, la technique électromagnétique s’adapte à toutes sortes de canalisations du petit diamètre jusqu’aux tuyaux de DN 2000 (Partl-MagII d’ABB).
Si le principe électromagnétique mesure toutes sortes de fluides chargés ou non de particules ou de bulles d’air, dès lors qu’ils sont d'une conductivité supérieure à 1 µS/cm, les ultrasons, eux, travaillent correctement uniquement sur des fluides homogènes. Conséquence, cette technique est surtout mise en œuvre pour la mesure de débit sur l'eau potable, les eaux ultra pures, des acides et des eaux faiblement chargées, là où la conductivité est trop faible pour mettre en œuvre un débitmètre électromagnétique. Pendant longtemps, on a reproché à cette technique de devoir percer les tuyaux pour mettre en place les capteurs. Ces derniers se trouvent alors en contact avec le fluide et forment des zones de rétention incompatibles avec les contraintes imposées par l’alimentaire. Depuis quelques années, l’arrivée des capteurs ultrasoniques non intrusifs permet
formats prêchent pour la technique.
« Aujourd'hui, les débitmètres ultrasons non-intrusifs sont au point. Les matériaux des tuyauteries ne sont plus un frein pour une mesure correcte », explique-t-on chez Endress+Hauser. « En effet, le débitmètre recherche la fréquence de mesure idéale pour l'application et va adapter automatiquement la puissance du signal émis pour mesurer le débit jusqu'au DN 4000 sur des tuyauteries en acier, en carbone ou acier inoxydable, en fonte et même en fibre de verre avec un revêtement interne. » La plupart des constructeurs proposent maintenant cette technique comme ABB, Endress+Hauser, Engineering Mesures (avec Controlotron), Krohne, Ultraflux.
L'utilisation de technique non intrusive permet de résoudre un autre point faible du capteur : la partie en contact avec le fluide. Ces équipements doivent en effet supporter certaines contraintes, notamment celles liées à l'abrasion lorsque l'appareil mesure les eaux usées. Pour répondre à ces besoins, Endress+Hauser a mis au point un revêtement de tube en polyuréthane sur sa ligne PROLine Promag W. Ce matériau, très utilisé dans l'industrie de l'automobile et dans celle de l'ameublement, est très facile à mettre en œuvre et possède des caractéristiques de résistance à l'abrasion remarquables.
Ce problème de matériau est encore plus important sur l’eau potable. Là, le revêtement doit être de qualité alimentaire et répondre à des critères très précis, notamment en matière de toxicité. Pour s'assurer de la compatibilité de ses capteurs, les constructeurs s’entourent de garanties. Endress+Hauser fait contrôler le matériau en contact avec l'eau par une société indépendante. Chez Krohne, les revêtements et les électrodes de l’Aquaflux ont des agréments de potabilité.
Si ces techniques sont très utilisées sur les conduites en charge, elles devront s'adapter pour la mesure sur les conduites partiellement pleines, cas très souvent rencontrés sur les réseaux d’assainissement, dans les usines de traitement.
S’adapter aux conduites partiellement pleines
La mesure sur conduite gravitaire partiellement pleine ne fait pas appel aux mêmes appareils. Pour réaliser ces mesures, les entreprises développent depuis quelques années des instruments spécifiques combinant mesures de hauteur et de débit.
Ainsi, ABB propose PartiMAG II. Cet appareil met en œuvre la technique électromagnétique. Le fluide conducteur (de conductivité comprise entre 50 µS/cm et 10 mS/cm) se déplace dans le tube de mesure (de DN 150 à DN 2000) perpendiculairement au champ magnétique. La tension induite est mesurée par quatre paires d’électrodes disposées de façon à obtenir un signal optimum dans la section de passage. Une électrode complémentaire est placée dans la manchette du capteur pour détecter la tuyauterie pleine. Les quatre paires d’électrodes présentes fournissent, en plus du débit, une mesure précise de la hauteur de remplissage avec une précision, sur un débit partiel, de 3 ou 5 % et, sur une conduite pleine, de 1 %. La plage de mesure est réglable dans une gamme de vitesse de fluide de 0,5 à 10 m/s. De plus, ABB a développé un débitmètre autonome à piles, l’AquaMaster, permettant une implantation dans des zones non accessibles par une alimentation électrique (applications en sectorisation et/ou recherches de fuites sur réseau).
Dans sa solution Tidalflux, Krohne associe la mesure de débit à induction magnétique classique avec une mesure de niveau capacitive intégrée dans le revêtement. Conséquence, le débit est mesuré quelle que soit la hauteur de remplissage de la section de la conduite. Le convertisseur IFC 110 PF associé intègre ces données et calcule le débit réel (sortie 4/20 mA, Impuls…). Ce capteur est disponible du diamètre DN 200 à DN 1000. Étudiée pour toutes les utilisations sur eaux et eaux usées, cette technologie est une alternative intéressante à la mesure de débit par canal ouvert et niveau ultrason. « Son installation n’est pas contrai-
gnante que celle d'un Venturi et de son canal d’approche. Par contre son incertitude est bien meilleure puisqu'elle se situe à 1 % de la pleine échelle contre 4-5 % pour un Venturi », explique M. J.-M. Montel, Responsable marché Eau chez Krohne, « De plus, le coût d’installation est souvent nettement inférieur à la mise en place d’un canal ouvert ».
Mesurer sur les canaux ouverts
De nombreuses mesures sont réalisées sur canal ouvert, notamment pendant les transits inter bassin et en sortie de stations d'épuration. Il s'agit ici de mesurer la hauteur d’eau provoquée par l’introduction d’une singularité (rétrécissement) dans l’écoulement. La conversion de la hauteur en débit est réalisée à l'aide d’organes déprimogènes normalisés. Des normes ISO/AFNOR très précises définissent les conditions de réalisation, l'emploi, et la formulation reliant le débit à la hauteur pour nombre d’organes déprimogènes courants. Il s’agit de déversoirs en mince paroi à échancrure triangulaire ou rectangulaire, canaux jaugeurs à cols rectangulaires, trapézoïdal, ou en U, déversoirs à profil triangulaire...
Pour le traitement du signal, la préférence est à donner aux conversions numériques par microprocesseur, appliquant strictement les formules de ces normes. Les formulations approchées du type Débit = Constante × Hauteur **1,5 entraînent des erreurs non négligeables et sont à déconseiller fortement. De même pour les conversions faisant impasse sur certains paramètres requis dans les normes telles que, par exemple, rugosité des parois et température de l'eau pour les canaux jaugeurs (Venturis).
Pour les ouvrages ne répondant à aucune norme les formulations décrites précédemment ne pourront en aucun cas être employées.
La mesure du débit ne pourra se faire qu’en prenant en compte la courbe de ces organes fournis par le constructeur et entrée point par point dans le calculateur. Une opération fastidieuse entraînant des risques d’erreurs !
Des entreprises comme Aqualyse, Endress+Hauser proposent des canaux préfabriqués répondant à ces normes. L’Aqua-Venturi proposé par Aqualyse est calculé pour créer une hauteur d’eau maximum même pour les débits intermédiaires. Par exemple, le modèle AV 100 crée une hauteur d’eau de 181 mm à seulement 50 m³/h. La gamme comporte huit modèles pour des débits de 0 à 2 500 m³/h. Réalisé en résine polyester armée fibre de verre, cet équipement a une excellente tenue aux agressions chimiques et mécaniques. Ces canaux associés à un des quatre capteurs ultrasons commercialisés par l’entreprise permettent une mesure de la hauteur avec une résolution meilleure que 1 mm et un calcul du débit avec totalisation ou pas de la mesure et une transmission des données via internet selon l’équipement retenu.
Le système Prosonic FMU 861 proposé par Endress+Hauser réunit un système Venturi conforme à la norme ISO 4359 d’une largeur comprise entre 220 et 1600 mm et une sonde FDU 80. Ce capteur de précision millimétrique possède une étanchéité IP68. Les courbes types des canaux Venturi sont programmées dans le transmetteur ce qui permet de convertir automatiquement la mesure de hauteur en mesure de débit.
Le contrôle du débit d'eau ainsi réalisé participe à l’optimisation du traitement du procédé de traitement. Il peut aussi servir de base au calcul de la taxation ou au versement de primes.
Respecter certaines règles
pour améliorer la précision
Il est essentiel de respecter quelques règles permettant d’améliorer la précision des mesures et d’obtenir ainsi de meilleurs résultats.
Par exemple, au niveau des capteurs, il est important de veiller à la compensation de température des capteurs. « Cette compensation est impérative. Son absence entraîne des erreurs inacceptables en matière de mesure de débit sur canal ouvert » explique Noël Groisard d’Aqualyse, « Compte tenu de l’importance de ce paramètre la préférence est à donner à une mesure de température réagissant le plus fidèlement et le plus rapidement possible.
Rappelons que 1 mm d'erreur peut en effet dans de nombreux cas entraîner une erreur de plusieurs pourcents sur le débit annoncé.
Il faut veiller à ce que la mesure de la température soit le plus possible au contact de l'air autour du capteur et non noyée dans la masse. En effet, elle ne doit pas être influencée par le rayonnement direct du soleil, ni par la chaleur induite par la masse du capteur. La garde d'air constructeur ou zone morte est également un point à surveiller avec la plus grande attention (voir l’encadré intitulé capteur à ultrasons...).
Sur le process de traitement, l'amélioration de la précision des débitmètres et de leur faculté de mesurer toutes sortes de produits rendent certaines techniques aptes au dosage des additifs.
La débitmétrie,
une aide au dosage
Les mesures imprécises ou peu fiables des débits d'injection entraînent très souvent le recours à des réservoirs de rétention journalier et à de fréquentes interventions de correction manuelle. De plus, certains additifs visqueux colmatent les organes de mesure.
Des compteurs mécaniques, entraînant pour fiabiliser le dosage de fréquentes interventions d’entretien et d’étalonnage.
Or, un bon réglage et un bon suivi de l'équipement de dosage permettent d’optimiser le procédé tout en réduisant la consommation du produit chimique.
Une des solutions consiste à mesurer le volume du produit à ajouter au process. Mais la qualité de l'additif peut varier dans le temps, notamment sur les additifs gazeux comme le chlore où le volume délivré fluctue en fonction des variations de la température et de la pression du gaz. Sans vérification de ces paramètres, la quantité délivrée entraîne alors, selon les cas, un sur ou un sous-dosage qui influence le bon déroulement du traitement.
L'utilisation d’un débitmètre permet de fournir une totalisation continue en masse ce qui évite la pesée.
La solution proposée par CIR résout ce problème avec le Clorus, un débitmètre spécifique développé pour les installations de chloration. Pour ceci, l’entreprise met en œuvre un débitmètre à bille qui, associé à un chloro-détendeur et à un pointeau de réglage du débit, permet de délivrer une quantité précise et constante de chlore.
Quant à Emerson Process, sa solution est basée sur la mise en œuvre d'un débitmètre massique à effet Coriolis de type MicroMotion. Cet équipement permet de doser le chlore gazeux avec une précision de ±0,35 % sur une étendue de débit dans un rapport de 1 à 40.