Le terme « boue d’eau potable » ne traduit en fait que le lieu de leur production, à savoir la station qui a la nécessité de produire une eau de qualité pour la consommation de la population, mais aussi, dans certains cas, pour la consommation industrielle. Ce secteur d’épuration est très vaste et fait appel à des traitements divers selon le but recherché : clarification, décantation partielle ou totale, démanganisation, déferrisation… Les sources d’eaux brutes sont elles aussi variées : fleuves à gros débits, rivières rapides ou lentes, lacs de montagne ou de barrage, canal navigable ou non, nappe phréatique, etc. En conséquence, les boues issues d’un traitement d’eau potable ont des propriétés souvent très dissimilables et le terme consacré repris dans le titre de cet exposé n’est donc absolument pas à lui seul une « référence de qualité ».
Il est possible de mélanger facilement à la boue pour former un mélange homogène.
L’ensemble est composté par fermentation aérobie thermophile. La température atteinte, de l’ordre de 70 °C, garantit une bonne hygiénisation du produit.
Le compost ainsi obtenu, tant par son aspect que par ses caractéristiques physico-chimiques, est facilement valorisable. Les études technico-économiques que nous avons effectuées, dans le cadre de projets récents, laissent à penser que la vente du compost permettrait de couvrir les frais d’investissement et d’exploitation d’une telle installation dans un délai qui rend le procédé attractif.
CONCLUSION
Les modes de traitement sont nombreux, que l’on considère les boues comme un déchet ou un produit à valoriser.
Il apparaît à l’analyse que le choix d’une filière doit être fait au cas par cas, en tenant compte du contexte local et de la taille de l’installation, pour obtenir le résultat économique le plus satisfaisant.
Il apparaît également que la revalorisation nécessite un investissement dont l’importance varie avec le degré d’élaboration du produit. L’investissement le plus élevé permet généralement une rentabilisation à un plus haut niveau, voire une rentabilisation des installations.
J.-P. LEGLISE.
par
Département Recherche – Société DEGREMONT
Le terme « boue d’eau potable » ne traduit en fait que le lieu de leur production, à savoir la station qui a la nécessité de produire une eau de qualité pour la consommation de la population, mais aussi, dans certains cas, pour la consommation industrielle. Ce secteur d’épuration est très vaste et fait appel à des traitements divers selon le but recherché : clarification, décantation partielle ou totale, démanganisation, déferrisation… Les sources d’eaux brutes sont elles aussi variées : fleuves à gros débits, rivières rapides ou lentes, lacs de montagne ou de barrage, canal navigable ou non, nappe phréatique, etc. En conséquence, les boues issues d’un traitement d’eau potable ont des propriétés souvent très dissimilables et le terme consacré repris dans le titre de cet exposé n’est donc absolument pas à lui seul une « référence de qualité ».
Il est donc temps aujourd’hui de clarifier les idées reçues dans ce domaine et de faire fructifier les nombreuses expériences vécues : en laboratoire, en pilote, mais aussi à l’échelle industrielle (la France compte cependant à ce jour moins de dix installations de traitement de boues de clarification et est encore loin des développements japonais, belges, anglais ou américains). Grâce à une vue d’ensemble globale des multiples cas rencontrés, nous pouvons maintenant brosser une ébauche de classification de ces types de boues. Cette classification n’a pas la prétention de vouloir résoudre la totalité du problème posé, mais elle permet toutefois déjà d’avoir une idée sur la qualité des boues à traiter et de présumer ainsi du choix judicieux de leur filière d’élimination et des résultats à en attendre.
1. — CLASSIFICATION (tableau 1)
Il est en effet utile d’avoir un premier outil de travail pour élaborer des projets de traitement de ces résidus et limiter ainsi le plus possible les errements de toute nature trop longtemps rencontrés. Par la suite, ce tableau permettra de situer…
Tableau 1. — Outil de travail : classification des résidus d’appellation générale « boues d’eau potable ».
Seule lecture de ce tableau, nous voyons bien sûr qu'il serait arbitraire d'élaborer une doctrine unique de traitement en ne prenant en compte que deux ou trois résultats particuliers.
Les boues obtenues, liquides, sont la somme des composants indésirables extraits de l'eau brute avec tout ou partie des réactifs utilisés pour l'épuration. Le rapport de coprésence de ces différents éléments, ainsi que leur nature, sont déterminants pour définir des groupes de boues de qualités semblables, c’est-à-dire ayant des comportements identiques dans les filières de traitement choisies (épaississement, déshydratation...).
C'est ainsi que plusieurs paramètres ont été retenus :
1.1. — ORIGINE DES EAUX BRUTES ET NATURE DE LEURS POLLUANTS
Présence plus ou moins importante de limons, argiles, sables, calcaires, matières organiques (plancton, algues, acides humiques...).
Le problème est rendu encore plus délicat du fait que sur une même installation les qualités des eaux brutes sont souvent assez variables en fonction de certaines conditions (pluies, crues, sécheresse, navigation, température des lacs...).
1.2. — NATURE ET DOSAGES DES RÉACTIFS UTILISÉS
Formation plus ou moins forte de CaCO₃, de silicates, d’hydroxydes de fer, d’aluminium, de magnésium... Présence possible de charges minérales hydrophobes (charbon actif, bentonite). Selon les variations de l’eau brute et parfois de la demande, les dosages et même la nature des réactifs peuvent varier. Avec certains décanteurs on peut même facilement passer d’une clarification à une décarbonatation partielle, voire totale. À noter aussi que, parfois, le choix du coagulant de traitement d'eau peut être d’importance pour la filière boue : souvent, par exemple, une boue d’hydroxyde ferrique est plus favorable qu'une boue d’hydroxyde d'aluminium (degrés de solvatation différents).
1.3. — TENDANCE HYDROPHILE OU HYDROPHOBE
Tout traitement de boues se traduit généralement par une élimination plus ou moins poussée d'eau et ce caractère est donc essentiel. Le caractère hydrophile est dépendant de la présence d’hydroxydes hydratés et de colloïdes organiques. Le caractère hydrophobe résulte de la présence de carbonates, limons, oxydes, etc. Ce qui rend bien sûr difficiles les regroupements sont les interférences plus ou moins accentuées de ces deux caractères. Toutes ces boues, sans exception, sont par contre classées minérales (pas de stabilisation prévue).
En analysant cette classification et en tenant compte de toutes les remarques précédentes (variation saisonnière, traitement d'eau non constant, etc.), nous sommes amenés à faire plusieurs observations :
- — les comparaisons technico-économiques de tel ou tel appareil, de telle ou telle filière doivent être faites à des périodes semblables et même au mieux statistiquement sur l’année ;
- — tout résultat d’essai, si sérieux soit-il, doit être interprété avec précaution, car il y a malheureusement souvent carence dans la caractérisation de la boue et les extrapolations à d'autres cas sans précautions supplémentaires sont sujettes à caution.
La classification ne suffit malheureusement pas pour cerner TRÈS PRÉCISÉMENT les performances des traitements applicables. Si la station d'eau existe ou si un petit volume de boue est disponible (produit par pilote), nous pouvons alors rechercher des paramètres plus spécifiques de caractérisation de la boue.
2. — CRITÈRES CHIMIQUES ET PHYSIQUES DE CARACTÉRISATION DES BOUES
Un gros effort est fait actuellement pour rendre les traitements des boues moins empiriques. De nombreux tests laboratoire sont maintenant fiables et extrapolables. Ici encore, comme pour la classification, c’est la multiplicité des tests avec à chaque fois leur SIMILITUDE INDUSTRIELLE ou semi-industrielle qui nous a permis de progresser. Nous savons déterminer maintenant rapidement le comportement d’une boue en épaississement et en déshydratation et cela avec des quantités restreintes, ce qui amoindrit les coûts d'études (but premier recherché).
2.1. — ANALYSES CHIMIQUES
Elles permettent de faire une première sélection et complètent la classification. Les analyses plus spécialement intéressantes dans les boues d'eau potable sont assez simples :
- — perte au feu entre 105 °C et 175 °C : évaluation de la quantité d'eau liée aux hydroxydes ;
- — résidu calciné à 550 °C : c’est la teneur en matières volatiles et non pas en matières organiques ; en effet, une partie de l'eau liée s'est évaporée et une partie des matières organiques peut ne pas se comptabiliser à 550 °C (cas des boues chaulées avec la méthode du four à moufle) ;
- — résidu calciné à 900 °C : teneur approchée en carbonates ;
- — analyse chimique élémentaire : citons surtout Ca, Fe, Al, Mg, Mn, SiO₂, C. Une plus grande enquête est coûteuse et somme toute peu instructive sur l'aptitude d’une boue à être déshydratée ;
- — demande chimique en oxygène (au dichromate) : elle est exprimée en DCO/g MS et permet d’apprécier la qualité des matières organiques.
2.2. — ANALYSES THERMOGRAVIMÉTRIQUES
Comme nous l’avons déjà dit, toute filière de boue passe généralement par une déshydratation (partielle ou poussée, de l'épaississement gravitaire au séchage thermique) et il nous a donc paru fondamental de mieux cerner la nature de l’eau contenue dans la boue et, par conséquent, d’adapter les méthodes thermogravimétriques aux études sur boues résiduaires : la proportion d’eau libre et d'eau liée est en effet déterminante dans l’aptitude d’une boue à être épaissie ou déshydratée. L'étude de nombreux thermogrammes et leurs correspondances systématiques industrielles nous ont permis de tirer de nombreux enseignements. Bien entendu, les corrélations laboratoire/industriel ou pilote ne sont devenues fiables que dans la mesure où nous avons pu mettre au point dans nos laboratoires des manipulations reproductibles dans des conditions opératoires STRICTES ET PRÉCISES.
Nous donnons (fig. 1) deux types de thermogrammes sur boues d'eau potable : si celui avec boue de décarbonatation hydrophobe est très simple (décroissance linéaire AD – structure bien établie), il n'en est pas de même avec boue d’hydroxyde hydrophile à cause de la présence d'une assez grande proportion d'eau chimiquement liée (décroissance linéaire avec variations de pente et pseudo-palier BC). L’eau entièrement libre est définie comme la quantité d'eau éliminable à vitesse constante de séchage (points A et A’ des thermogrammes de la fig. 1. Voir plus de précision dans le Mémento Degremont, édition 1978).
La thermogravimétrie prend donc une part essentielle dans les prédictions laboratoire à partir, et c'est important, de 100 à 200 ml de boues. Les caractères hydrophiles et hydrophobes peuvent être appréciés QUANTITATIVEMENT et, concrètement, nous pouvons en déduire :
- — évaluation des performances (siccité sédiment) de tous les appareils de déshydratation avec une précision suffisante à ± 2 points ;
- — évolution de ces siccités en fonction des divers conditionnements ;
- — détermination des siccités limites pour chaque type de traitement.
Voici, ci-après, quelques enseignements à titre d'exemples sur les boues d'eau potable :
2.2.1. — Comparaison des thermogrammes et des performances (siccité) de divers appareils :
- Sac filtrant avec polymère : 75 à 80 % d’eau libre éliminée.
- PressDeg avec polymère : totalité de l'eau libre éliminée et extraction d'une petite quantité d'eau liée (plus ou moins forte selon le débit massique).
- Centrifugeuse avec polymère : totalité de l'eau libre éliminée (premier point critique A).
- Filtre-presse avec chaux : toute l'eau libre éliminée ainsi qu'une partie appréciable d'eau liée (deuxième point critique). Siccité limite au troisième point critique.
2.2.2. — Humidités au premier point critique A sur boues non conditionnées :
Boue décarbonatation I .................. | 50-40 % |
Boue décarbonatation partielle I ........ | 65-50 % |
Boue clarification IV ................... | 92-86 % |
Boue clarification VII ................. | 82-75 % |
2.2.3. — Influence du conditionnement :
- — par polymère : peu d'action sur le taux d'eau liée ;
- — par chaulage : transformation de l'eau liée en eau libre avec généralement disparition des paliers intermédiaires sur le thermogramme ;
- — par congélation : la structure de la boue est complètement modifiée et un taux très important d'eau liée se transforme en eau libre.
Les siccités seront bien sûr d'autant plus fortes que le taux d'eau liée sera plus faible.
L’étude des thermogrammes nous donne une base de comparaison solide entre les différents types de boues et c’est un outil de travail intéressant et peu coûteux pour l'ingénieur de projet. D’autre part, elle nous permet de mieux comprendre les phénomènes intervenant dans les divers stades de traitement.
2.3. — ANALYSES PHYSIQUES
Il s'agit de préciser une certaine structure de la boue afin d’estimer sa réaction face aux différents traitements physiques appliqués. On peut ainsi évaluer les performances (débit – siccité) de certains appareils et mesurer aussi les conditionnements à mettre en œuvre pour qu'un système choisi soit viable.
en fonction de la nature de la boue. Ces tests bien connus maintenant (voir en détail le chapitre 7 du MEMENTO 78) découlent directement des techniques de déshydratation mises en œuvre :
— décantabilité (pour l’épaississeur statique), — filtrabilité (résistance spécifique et compressi- bilité pour un filtre-presse ou sous vide), — drainage et centrifugabilité (choix d’un polymère pour PressDeg et centrifugeuse).
En conclusion, beaucoup de prédictions laboratoire possibles, mais il nous reste encore à extrapoler certaines données, notamment pour l’estimation des débits massiques en centrifugeuse, filtre à bande presseuse (type PressDeg), SQUEEZOR (filtre- presse CONTINU à 10 bars en couche mince).
3. — FILIÈRES DE TRAITEMENT — PERFORMANCES OBTENUES
3.1. — FINALITÉ
Pour choisir judicieusement la filière la mieux adaptée, il est rationnel de procéder chronologique- ment comme suit :
a) destination finale choisie, b) compatibilité entre la nature des boues et les différents systèmes de traitement, c) masse globale à traiter, d) conception de l’exploitation.
Ceci nous amène à faire plusieurs remarques :
— Il faut fixer l’état physique final du résidu (liqui de – pâteux – plastique – friable) SELON LE BUT RECHERCHÉ.
Le critère de siccité est souvent insuffisant pour définir un résidu. Par exemple, une siccité de 30 % correspond à un état pâteux thixotropique pour une boue de décarbonatation et à un état solide friable pour des boues d’hydroxydes chauf fées.
Contrairement au domaine des eaux résiduaires urbaines, le stade final de traitement de ces boues est assez restreint et, généralement, il faut donc que le résidu final satisfasse aux normes de décharge publique.
Bilans massiques : c’est un des points les plus importants et ils peuvent varier de 1 à 10 selon les caractéristiques de l’eau brute, par exemple en clarification entre une eau de barrage et un fleuve à l’embouchure (voir tableau II). D’autre part, une étude statistique est à faire pour cons tater les périodicités et les longueurs des crues. Il faut alors adopter un bilan sensé pour ne pas construire une maxi-station qui ne serait à plein régime que quelques jours par an. La filière doit donc être adaptée en notant que les crues ame nent surtout une pollution minérale hydrophobe.
Tableau II. — Influence de l’origine des eaux brutes sur la production de boue d’une station de clarification.
ORIGINE DES EAUX BRUTES | PRODUCTION DE BOUES kg TS/m³ eau | PRODUCTION BOUE en kg PS/habitant.j (base 200 l/hab.j) |
---|---|---|
Rivière de qualité moyenne | 7 – 25 | 1 – 5 |
Rivière en crue hivernale | 65 – 150 | 13 – 30 |
Rivière (beaucoup de plancton) | 40 – 95 | 8 – 19 |
Eau de barrage | 2 – 15 | 0,4 – 3 |
Lac propre | 2 – 15 | 0,4 – 3 |
Fleuve (embouchure, influence des marées) | 70 – 140 | 14 – 28 |
3.2. — PERFORMANCES DES TECHNIQUES DISPO NIBLES
L’accumulation de multiples essais nous a permis d’établir des fourchettes d’ensemble de performances pour divers appareils et pour les divers groupes défi nis dans la classification du tableau I. C’est ainsi que dans les tableaux III, IV, V, nous avons synthé tisé successivement les résultats obtenus en épaissis sement statique, en déshydratation sur boues hy drophobes et sur boues hydrophiles. Sans entrer dans le détail des techniques (cf. MEMENTO DEGREMONT 78), nous nous bornerons à tirer les principaux ensei gnements spécifiques de ces types de boues :
3.2.1. — Filières
La filière la plus souvent rencontrée dans les sta tions existantes est du type : épaississement suivi d’une filtration sous pression (par filtre discontinu à plateaux chambrés). Elle est en effet très sécuri sante quel que soit le type de boue et permet le mieux d’amortir les variations de qualité de la boue. Lorsque l’on part dans l’inconnu, ceci est un atout majeur. Malheureusement, cette filière est rarement la plus économique. Nous présentons, à titre d’exem ple, trois réalisations DEGREMONT selon ce schéma :
Sans renier cette filière filtre-presse, il est cepen dant de notre devoir d’étudier d’autres traitements plus économiques. La lecture des tableaux III, IV et V nous montre en effet que, selon le type de boue, d’autres appareils donnent également de très bons résultats.
3.2.2. — Épaississement statique
Il est presque toujours nécessaire, sauf si le traite ment d’eau est réalisé par flottation (cf. nos stations de Moulle/Dunkerque et de Guingamp). Certains appareils combinés permettent d’obtenir un pré épaississement des boues malheureusement souvent encore trop faible, car les temps de séjour sont sou vent trop courts, notamment pour les boues d’hy droxydes. Des concentrations supérieures à 20 g/l sont généralement suffisantes pour le fonctionne ment des appareils de déshydratation, mais des con centrations maximales permettent toujours de réduire les investissements de l’atelier de déshydratation (pour un filtre-presse, par exemple, les temps de pressée sont inversement proportionnels aux concen trations alimentaires).
Tableau III. — Quelques performances d’épaississement statique
(…contenu du tableau…)
La lecture du tableau III nous montre que l’épais sissement est un domaine où les résultats sont les plus dispersés et où tout peut se dire si la boue n’est pas bien caractérisée. Notamment, il faut toujours tenir compte de trois paramètres essentiels : temps de séjour, charge massique et vitesse ascensionnelle.
L’épaissement naturel, sauf sur boues hydro phobes, n’est pas souvent très performant. Nous devons donc généralement faire appel à des conditionnements divers :
— Chaulage : il est souvent béné fique pour augmenter les concentrations de soutirage et les charges massiques admissibles ;
— Polymère seul : les concen trations finales, à temps de séjour égal, ne sont que lé gèrement plus fortes que cel-
les obtenues en décantation naturelle, mais les vitesses ascensionnelles permises peuvent être de 2 à 10 fois plus élevées.
— Épaississement en deux stades : chaulage dans le premier épaississeur et polymère dans le second où le lit est modérément agité pour briser le floc. Nous obtenons là les concentrations maximales. Cette filière ne s'impose que pour diminuer au maximum la taille d'un filtre-presse.
Avec des boues très peu chargées (inférieures à 0,5 g MS/l. Cas d'une filtration directe, de certaines boues d'eau de barrage, d'eaux de lavage de filtres non recyclées...) nous sommes contraints de passer par une étape de clarification/épaississement et, dans ce cas, la surface d'ouvrage est dimensionnée en fonction d'une vitesse de décantation instantanée et non en fonction d'une charge massique (cf. nos stations de Semur-en-Auxois et de Séoul). Un décanteur lamellaire peut également dans ce cas servir de pré-épaississeur.
N'oublions pas, pour finir, que l'épaississeur statique est une sécurité indéniable pour l'exploitant : c'est un stockeur-tampon sans nuisance pour l'environnement.
3.2.3. — Flottation des boues
Pour les boues difficiles à épaissir en statique (faibles charges CN et faibles concentrations au soutirage : cas CLARIFICATION I-II-III-IV et eaux de lavage des filtres), il est alors tout à fait judicieux de mettre en œuvre la flottation qui permet d'augmenter TRES RAPIDEMENT la concentration des boues dans un ouvrage aux dimensions réduites. Il est souvent nécessaire d'ajouter un polyélectrolyte.
Tableau IV. — Quelques performances en déshydratation : boues hydrophobes.
Tableau V. — Quelques performances en déshydratation : boues hydrophiles. (Taux plus ou moins important d’hydroxydes et de M.O.)
pour obtenir des concentrations importantes (20 à 40 g/l) avec des charges appréciables (100 à 200 kg MS/m²/jour). Une récente réalisation à noter en France, celle de MOULLE/DUNKERQUE sur des boues de clarification III (voir fig. 2). C'est là un cas astucieux d’adaptation d’une filière à une qualité précise de boue. La flottation s'impose presque à coup sûr pour les boues à haut taux d’hydroxydes et de colloïdes organiques et évite le chaulage parfois abondant de l’étape épaississement.
3.2.4. — Déshydratation
Les tableaux IV et V sont suffisamment explicites et démontrent, si besoin était à nouveau de le rappeler, la diversité des résultats obtenus et des conditionnements appliqués avec les groupes de boues définis dans la classification du tableau I.
— Le FILTRE-PRESSE, classique, discontinu, est l'appareil le plus utilisé et le plus universel. Il fonctionne à des pressions de 6 à 14 bars selon le facteur de compressibilité de la boue conditionnée. Pour les boues de clarification, un chaulage supplémentaire est souvent nécessaire si l'on veut obtenir des cycles assez courts et de bonnes siccités. Nous avons quelques installations en Angleterre (Pynes Work – Hampton Lodge à Birmingham – Wing & Empingham...) où le conditionnement avant filtre-presse s'effectue avec des doses réduites de polymère sans chaulage : les siccités obtenues sont alors assez faibles (gâteaux plastiques) et les cycles très longs (15 à 24 h). Pour la filtration sous forte pression, il faut obtenir un coefficient de compressibilité inférieur à 0,8 avec une résistance spécifique r inférieure à 30 × 10¹¹ m/kg si nous voulons garder des cycles inférieurs à 4 h.
Le filtre-presse classique, grâce aux qualités du résidu obtenu, connaît donc un grand succès et ce, malgré sa discontinuité et ses sujétions de main-d'œuvre. C'est pour cela que se développent actuellement de nouveaux filtres-presses continus, à membrane et en couche mince (par exemple les appareils français SQUEEZOR et FALC).
Le FILTRE SOUS VIDE nécessite de très bonnes filtrabilités (r < 5 à 10 × 10¹¹ m/kg), ce qui n'est généralement obtenu qu'avec des boues de décarbonatation.
Les FILTRES À BANDES PRESSEUSES nécessitent l'emploi de polymères anioniques et, si la boue est très colloïdale (taux d’hydroxydes supérieur à 40 %), un chaulage est généralement nécessaire. Sinon les capacités et siccités sont trop faibles. C'est sûrement la filière la plus économe sur le plan énergétique. Les pressions mises en œuvre restent toutefois très faibles (inférieures à 1 bar) et les zones de pressage non étanches latéralement.
— La CENTRIFUGEUSE à bol cylindro-conique donne souvent un sédiment d'aspect pâteux. Pour ne pas être limité par le débit hydraulique, il faut généralement épaissir sinon les débits massiques sont dérisoires. La centrifugeuse reste possible dans la totalité des cas : système contre-courant avec les boues lourdes hydrophobes et système équi-courant avec les boues légères de clarification. Néanmoins, il faut se soucier du sable pour les boues contenant trop de limons (cf. Boue de clarification VII des eaux aux embouchures de fleuves par exemple).
Comme pour le PressDrain, nous noterons pour la centrifugeuse l'influence des traitements préalables en épaississement et traitement d'eau sur la siccité du sédiment.
Le SAC FILTRANT, peu onéreux, doit être considéré comme un épaississeur rapide amélioré. Il nous donne un sédiment pâteux, parfois d'une relative bonne siccité comme sur les boues de décarbonatation.
Les LITS DE SÉCHAGE : uniquement valables en zones méditerranéennes sur boue épaissie avec une grande surface de terrain (15-20 l de boue/m²/jour).
La LAGUNE : il en faut généralement deux (fonctionnement alterné) et les surfaces occupées sont très importantes. Les conditions climatiques doivent être idéales (été chaud, hiver très froid) et les odeurs sont toujours possibles (voir la DCO/g MS des boues). L'impact sur l'environnement n'est pas toujours des plus inapercus. Néanmoins, cette technique est possible dans certains cas particuliers, mais si les prix des terrains sont élevés et si les lagunes sont aménagées (à moins de se contenter de la lagune « dépotoir »), ce n'est pas toujours la filière la plus économique. Le résidu obtenu est souvent à la limite du pâteux et du plastique.
3.2.5. — Traitements ultimes
Ils servent à modifier la structure du sédiment. Le plus ancien traitement est l'ajout de chaux vive après centrifugeuse, sac filtrant, etc., donc sur sédiment pâteux (par exemple AIRE/LYS en France). Le résidu obtenu est alors friable et peut servir en amendement calcaire. Les doses à mettre en œuvre (5 à 20 % sur poids du sédiment) dépendent du résultat attendu et de l'efficacité des mélanges. Cet ancien procédé semble prendre actuellement un essor nouveau, notamment en Allemagne.
Les procédés de solidification sur boues liquides sont bien connus (PETRIFIX, PERRIER, DRAVO, SEAL O SAFE, CHEMFIX, etc.), leurs désavantages aussi : aucune réduction de volume et dosages très importants de réactifs (ciments, silicates...).
Des voies de recherche sont toutefois déjà ouvertes pour trouver d'autres traitements plus économi-
Citons par exemple l’emploi de boues de décarbonatation pour conditionner des boues résiduaires organiques : installation de NOYON en construction avec PressDeg, sur boues digérées anaérobies et installation de SHELL-CHIMIE en fonctionnement avec filtre-presse sur boues biologiques d’industrie chimique.
La CONGÉLATION des boues, qui nécessite une pré-déshydratation pour être relativement économique et qui est bien maîtrisée au Japon (plus de vingt réalisations), n’a cependant pas encore eu de concrétisations en France.
4. — CONCLUSION
L’ingénieur de projet dispose maintenant d’armes indiscutables pour résoudre le problème d’élimination des boues d’eau potable et, malgré les difficultés rencontrées (caractérisation difficile, diversité des qualités et des quantités…), il peut faire appel à des techniques fiables. À lui maintenant d’avoir un cheminement sain pour définir la filière la plus rationnelle en fonction de la qualité de la boue et du but final recherché. Comme pour tous les autres traitements des boues, il faut avant tout parler le MÊME LANGAGE pour être efficace et c’est aussi un peu le but de cet exposé.
A. HAUBRY — C. FAYOUX.
MÉTHODES D’ÉVALUATION DE LA STABILITÉ BIOLOGIQUE DES BOUES RÉSIDUAIRES.
Application au suivi des traitements de stabilisation et à la prévision de leur évolution lors du stockage et de la mise en décharge
par François COLINDocteur ès SciencesDirecteur Scientifique de l’Institut de Recherches Hydrologiques (I.R.H.) à Nancy
Cet article rend compte de travaux de recherche ayant bénéficié de l’aide financière du Ministère de l’Environnement et du Cadre de Vie, Comité Scientifique « Sol et Déchets Solides » (contrats n° 75-02-041, 77-02-071, 77-02-075) et Comité Scientifique « Eau » (contrat n° 56-00-75-227) et de l’application des résultats obtenus à la résolution de problèmes immédiats.
Toutes les boues résiduaires d’origine urbaine et bon nombre de boues d’origine industrielle possèdent une phase solide riche en matières organiques fermentescibles. Selon les cas, cette matière organique est constituée par des particules solides séparées des eaux polluées ou par des micro-organismes épurateurs qui se sont développés au détriment des polluants organiques biodégradables initialement présents.
Ces boues, telles qu’on les recueille dans les ouvrages de traitement des eaux, présentent un potentiel de nuisances important du fait de leur fermentescibilité (risques de génération de mauvaises odeurs, pollution du milieu par les produits d’évolution) et éventuellement de leur concentration en germes pathogènes. On y remédie en pratique en réalisant des traitements dits « de stabilisation » mettant en œuvre des moyens biologiques ou chimiques puis en déshydratant les boues de façon plus ou moins importante jusqu’à obtention d’un déchet solide ou pâteux. Malgré ces précautions, le déchet final qui, dans bien des cas, sera éliminé directement dans le milieu naturel (épandage, incorporation au sol, mise en décharge) ou préalablement stocké, est encore susceptible d’évolution et par conséquent présente un risque potentiel qu’il convient d’apprécier à sa juste valeur.
Au cours de nos nombreux travaux sur le traitement et l’élimination des boues, nous nous sommes heurtés à l’absence de critères valables et d’utilisation générale en matière de caractérisation de la stabilité des boues, c’est-à-dire de mesure de leur résistance à l’évolution biologique dans les conditions du milieu auxquelles elles pourront se trouver exposées au cours de leur destin ultérieur.
Les critères existants ont, par ailleurs, fait l’objet d’études critiques et comparatives par plusieurs équipes de recherche scandinaves (1, 2, 3 et 4).
Ceci nous a conduits à développer de nouvelles méthodes de caractérisation de la stabilité biologique des boues résiduaires qui, malgré leur imperfection, sont devenues des outils précieux pour l’étude des traitements de stabilisation et la prévision de l’évolution lors du stockage, de l’incorporation au sol ou de la mise en décharge de ces déchets. Ces méthodes font largement appel à la biochimie et à l’utilisation de paramètres globaux.
Dans le cadre de cet article, nous décrirons la démarche qui nous a conduits à la définition de paramètres descriptifs de la tendance des boues à l’évolution biologique, les méthodes utilisées et leur application à l’étude de quelques cas pratiques représentatifs des problèmes habituellement rencontrés.
I. — INSUFFISANCE DES CRITÈRES CLASSIQUES D’ÉVALUATION DE LA STABILITÉ BIOLOGIQUE DES BOUES RÉSIDUAIRES
Les critères classiques utilisés pour évaluer la stabilité biologique des boues résiduaires présentent de nombreuses insuffisances résultant soit de leur nature plus ou moins empirique, soit du caractère indirect de leur relation avec la stabilité effective des boues, soit encore de leur domaine de validité restreint. Nous citerons en particulier parmi les méthodes les plus employées :
- — la mesure du pourcentage de matières volatiles de la phase solide des boues. Cette détermination consiste à mesurer le pourcentage de perte de poids résultant de la calcination à 550 °C de la phase solide