Que l’on considère une petite ville ou une grosse agglomération, le schéma général d’un réseau d’assainissement est le même : un cœur de ville, une couronne plus diffuse, des hameaux ou lotissements isolés dont les effluents sont collectés et dirigés par un émissaire vers la station de traitement. Ce qui change, ce sont les débits à traiter, les volumes, la nature des effluents, les
[Photo : Vue d’un fond de puits bouché.]
puissances à mettre en œuvre. Un facteur important est le type du réseau : unitaire collectant les effluents et les eaux de ruissellement, ou séparatif.
Situations très diverses
Un réseau unitaire pourra se charger rapidement en sable lors d’épisodes pluvieux rendant le fluide très abrasif. La géographie locale aussi est importante, les besoins de pompage ne seront pas les mêmes en plaine et dans des régions montagneuses. « Dans certaines régions l’impact des vacances est important, une collectivité peut voir sa population multipliée par 5 ou 10 », explique Patrice Noël, responsable de secteur de la région Rhône Méditerranée chez KSB, traçant à grands traits les principaux paramètres influençant le choix d’une pompe. Devant une telle diversité de cas, il n’est pas surprenant que les solutions de pompage soient différentes. En outre, la manière d’appréhender le problème est différente selon qu’il s’agit de travaux neufs à l'occasion de la création de nouveaux quartiers ou de rénovation et remise à niveau d'installations existantes.
Lingettes et non-tissés !
Les eaux usées sont avant tout des fluides chargés. « Depuis une dizaine d’années, elles ont évolué sous un double mouvement : celui des économies d’eau qui accroît les concentrations, et la généralisation de l’utilisation des lingettes et autres non-tissés qui forment des filasses », explique Patrice Noël. Dans les réseaux unitaires on trouve en plus ce qui traîne sur les chaussées : boîtes de boissons, emballages jetables de restauration rapide etc. Une réponse assez spontanée pour éviter les bouchages de pompes par ces objets divers a été trouvée : les broyer avec une roue dilacératrice.
Roue dilacératrice : à consommer avec modération
Cette technologie, qui consiste à faire tourner une lame couteau solidaire de la roue, est utilisée depuis près d'un quart de siècle. Elle était à la mode dans les années 1990, mais elle trouve ses limites avec l’évolution des effluents. Par nature, elle a ses limitations : le faible jeu hydraulique (entre roue et corps de pompe) indispensable à l'efficacité de l'action dilacératrice la rend sensible à l’abrasion, notamment par le sable (fond de vallée, bords de mer). Du fait du faible passage, les particules de silice viennent la heurter plus fréquemment et plus durement.
[Photo : Roue dilacératrice.]
C’est pourquoi cette roue est à réserver aux réseaux séparatifs et est plutôt indiquée pour de petits débits (5 à 10 m³/h) et les hauteurs importantes (HMT 70 m). « Je ne les préconise plus pour les faibles HMT et les réserve comme solution de secours si d'autres pompes ne conviennent pas », indique Patrice Noël.
Roue vortex : la bonne à tout faire
Pour s’affranchir de cette sensibilité à l’abrasion et au bouchage, les ingénieurs KSB sont passés maîtres dans la roue vortex à haut rendement (la roue F dans la nomenclature maison). « C’est un peu la bonne à tout faire en matière de pompage,
[Photo : Pompe bouchée par une lingette.]
Elle ne pose quasiment jamais de souci. Avec son passage intégral, sans jeu hydraulique, elle avale les lingettes ; son rendement (kWh par mètre-cube pompé) se conserve dans le temps. Celui-ci s’est considérablement amélioré en deux décennies et atteint les 60 à 65 % dans la zone de fonctionnement optimum ». Elle procure des HMT jusqu’à 50 à 60 m et s’utilise pour des débits jusqu’à 150 m³/h. Selon Patrice Noël, elle couvre 70 % des besoins et s’installe en tout point d'un réseau (postes de relevage) et en station en version submersible ou de surface.
[Photo : Roue Vortex.]
Diagonal, monocanal queue de cochon… Les grosses agglomérations ont des besoins de pompage de plusieurs centaines de mètres-cube par heure. Il faut donc des pompes capables d’assurer de gros débits. C'est la tâche des roues diagonales. La roue D pour diagonal, c’est la dernière née de KSB, commercialisée à partir de 2004. Conçue pour des HMT d'une cinquantaine de mètres, les différentes références de la gamme couvrent des débits de 40 à 1200 m³/h. Elle s'utilise sur les postes de relevage et en station d’épuration. « La forme de cette roue monocanal est en “queue de cochon” ; c'est un canal totalement ouvert ; la roue dispose d’une capacité à sectionner les fibres (pas les broyer) ». La taille des fibres étant diminuée, la production de filasses est limitée. Il existe un jeu hydraulique entre rotor et stator et la roue reste sensible à l'abrasion.
[Photo : Roue Emonocanal KSB fermée.]
L'usure diminue le rendement. Cet inconvénient peut être cependant considéré comme mineur si, comme chez KSB, les concepteurs ont prévu le moyen de rattraper ce jeu de manière très simple, sans démontage de la pompe ni extraction de la volute. Il suffit de relever la pompe, de la nettoyer et de resserrer quelques vis sur le corps de pompe.
[Photo : Roue D-monocanal KSB diagonale ouverte.]
Roue multicanaux
Les grosses pompes submersibles (Amarex KRT chez KSB) disposent depuis longtemps d’un quatrième type, la roue multicanaux (K). Son domaine d'utilisation est le gros débit, supérieur à 500 m³/h. On la trouve donc sur de grosses installations de relevage en réseau mais aussi en sortie de station lorsqu’un écoulement gravitaire n'est pas possible. Elle est destinée aux eaux peu chargées ; son rendement est excellent. C’est une roue fermée qui s'accommode donc mal des fibres ou des gaz. Mais à partir de 500 m³/h, avec des canalisations de DN 200 et plus, le passage de roue est au minimum de 100 mm, capable d’avaler de petits débris sans dommage.
Choisir son type définitif
À l'intérieur de ces quatre catégories de roues, après le choix entre les différentes plages de débits et HMT couverts on peut encore affiner la spécificité de la pompe en fonction des types d’effluents réellement rencontrés sur le terrain. Patrice Noël précise : « Certaines zones sont identifiées par les exploitants comme particulièrement sableuses, il faudra donc choisir un matériau dur comme les fontes Ni-Hard ; si l'effluent contient des rejets industriels, de l'acide lactique d'une laiterie par exemple il faudra se tourner vers des fontes au chrome ». KSB élabore ses propres alliages et maîtrise donc leurs propriétés. La motorisation de la pompe sera fonction de l'installation (surface ou submergée), de la puissance et des vitesses de rotation nécessaires.
Le besoin de pompage des eaux usées varie au cours de la journée. Le relevage peut se faire par batchée, fonctionnement intermittent où la pompe travaille à sa vitesse nominale fixe. Pour les gros débits et en station pour faire face à des débits de pointe, on recourt à la variation de vitesse. Le rendement électrique du moteur (classes IE2, IE3) est une autre donnée. Tous les exploitants n’ont pas la même sensibilité à ce rendement. Mais Patrice Noël met en garde : « Il ne sert à rien de vouloir un moteur à haut rendement si la roue n’a pas un bon rendement ». Il insiste donc sur l'homogénéité de la solution de pompage : pompe, type de roue, motorisation, fiabilité (problème de la maintenance) dans un contexte donné d’exploitation et en pensant à l’exploitation globale avec ses frais d’intervention sur site. Non décidément, la roue universelle n’existe pas.
Tableau : les roues les plus performantes
Chaque roue a ses qualités et doit être choisie selon les types d’effluents à transporter. Le choix de la bonne roue permet de fonctionner à un rendement maximal et de prévenir les bouchages.
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Roue dilacératrice |
Roue vortex |
Roue multicanal |
Roue mono-anal ouverte |
Teneur en fibres |
+ |
++ |
+ |
+ |
Teneur en gaz |
+ |
++ |
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|
Grosseur des particules (section de passage) |
++ |
++ |
|
+++ |
Teneur en matières sèches (MS) |
- |
+ |
|
++ |
Rendement hydraulique |
* |
** |
*** |
|
Teneur en sable |
* |
+++ |
+ |
++ |
Viscosité |
-- |
- |
|
++ |
Comportement en régulation |
- |
** |
|
++ |
En fonction des matériaux mis en œuvre