Les eaux résiduelles varient notablement selon qu’il s'agit de résidus urbains ou industriels. Nous distinguons ces deux domaines dans notre étude qui concerne l'utilisation de tissus monofilaments dans la déshydratation de ces boues.
Les procédés de traitement des boues
Les stations d'épuration urbaines
Il existe plusieurs types de filtres employés pour déshydrater les boues dans les stations d'épuration municipales, dont notamment les suivantes :
- • les lits de séchage : ils n’utilisent pas de toile filtrante, le lit de sable servant de drainage ;
- • le filtre rotatif à tambour sous vide à toile fixe : utilisé en première génération pour la déshydratation des boues, il n’est plus en service actuellement ;
- • le filtre rotatif à tambour sous vide à toile sortante : ce modèle n’est pratiquement plus utilisé en France, mais il est encore très répandu aux États-Unis ;
- • la presse « cyclique », filtre-presse continu à un seul plateau mobile associé à un système de filtres à bandes presseuses ;
- • le filtre automatique FALC, filtre-presse à marche séquentielle dont les plateaux entourent un tambour rotatif ;
- • le filtre à bande et le filtre-presse : ces deux filtres, qui font l'objet des développements ci-dessous, sont les plus couramment utilisés pour déshydrater les boues des stations d'épuration.
Le filtre à bandes pressantes
C'est le modèle le plus répandu ; il est spécialement conçu pour le traitement
des boues dans les petites et moyennes stations d’épuration, dont la capacité ne dépasse pas, en général, 100 000 EH.
Tous les types de filtres de ce modèle se composent de deux toiles filtrantes tournant dans le même sens ; la boue floculée est déposée sur l'une des toiles, dans une zone appelée « zone d’égouttage », puis se trouve incluse entre les deux toiles, lesquelles passent ensuite sur une série de rouleaux qui la compriment au fur et à mesure de la progression de la toile. Cette compression est proportionnelle à la tension de la toile et au nombre de rouleaux. Le déchargement de la boue est ensuite assuré à la sortie par des racleurs. Cette boue tombe alors sur un tapis d’évacuation (figure 1).
Pour assurer une bonne filtration, il faut au préalable assurer la floculation des colloïdes et particules pour obtenir des particules plus grosses et permettre le pressage. Ce rôle de floculation est assuré le plus souvent par un polymère.
Les toiles équipant ces filtres sont fabriquées à partir de monofilaments en polyester de fort diamètre (50 à 100/100ᵉ mm) possédant une très bonne résistance à la traction et qui sont recommandés pour leur grande régularité et leur rigidité ; elles sont tissées sous forme d’armure en chevron, ce qui permet de réaliser un bon équilibrage des bandes et une rotation régulière, sans mouvements latéraux qui seraient préjudiciables à la bonne marche du filtre.
Une jonction avec crochets en inox 316 L et un recouvrement anti-usure améliorent cette longévité ; ce recouvrement est assuré par une résine synthétique qui allie souplesse et résistance au frottement du racleur en sortie de machine. Cette disposition permet d’éviter l'abrasion rapide des crochets, qui pourrait causer la rupture de la toile.
Dans ces conditions, le tissu Fyltis qui équipe le plus grand nombre de filtres totalise plusieurs milliers d’heures de fonctionnement, avec une efficacité qui permet, avec une bonne floculation, d’obtenir des boues de 25 à 30 % de siccité, suivant les boues et le type de filtre à utiliser. La siccité peut être même plus élevée, en fonction de la longueur et de la tension de la bande.
Le filtre-presse
Il équipe en règle générale les stations d’épuration urbaines d’une capacité supérieure à 100 000 EH.
Ce modèle se compose d’un empilage de plateaux équipés de toiles et qui forment des chambres de filtration (pour permettre la séparation solide/liquide). Le liquide ou filtrat est évacué par un collecteur tandis que le gâteau est évacué après écartement des plateaux (figure 2).
Ce matériel très performant par rapport aux autres filtres permet d’obtenir des siccités atteignant 60 % environ, ce qui entraîne, soit une réduction du coût du transport, lorsqu’il s’agit de mettre les boues en décharge, soit une combustion plus facile, lorsqu’elles sont incinérées.
Le traitement de déshydratation fait appel à trois types de conditionnement différents aussi affinés les uns que les autres :
- - chlorure ferrique et chaux : en règle générale, pour assurer un bon conditionnement dans une concentration de boue normale (contenant 4 à 5 % de matière solide), il faut employer 7 à 8 kg de chlorure ferrique et 20 à 25 kg de chaux ;
- - floculants organiques polymères : pour assurer une bonne floculation
de la boue normale précédente, il faut en général disposer de 250 à 300 g de polymère par m² ;
- • thermique : il s'agit de rompre la chaîne colloïdale par une élévation de température et de changer ainsi la structure de la boue, ce qui permet après épaississement d'atteindre une concentration de 100 à 150 g/l. La boue peut être alors filtrée directement sans autre adjuvant.
Les tissus utilisés pour garnir les plateaux du filtre-presse sont en monofilaments en polypropylène (retenus en raison de leur bonne résistance aussi bien en milieux acides que basiques) ou en monofilaments de polyamide 11 (pour leur très bonne résistance mécanique). Ils subissent au préalable un traitement de calandrage qui permet de réduire le colmatage en évitant l'incrustation des particules au cœur du tissu, ce qui est obtenu en stabilisant thermiquement le monofilament sur une calandre et qui transforme sa section circulaire en demi-lune. On obtient ainsi une surface plane qui permet un meilleur contact avec la boue (figures 3 et 4).
Grâce à ce traitement, il se produit au moment de la filtration une classification des particules en contact avec le tissu qui laisse échapper les ultrafines (1 à 5 µ). Le gâteau est alors constitué par la superposition des particules les plus grosses en contact avec la toile, puis des particules moyennes, et enfin des particules fines. Le calandrage assure aussi un bon débaîttissage du gâteau, les grosses particules n'accrochant pas ou peu à la toile, la laissant la plus propre possible pour assurer une nouvelle filtration. Cela permet également d'espacer les lavages du filtre, l'incrustation des particules à sa surface étant ralentie par rapport aux tissus non calandrés qui demandent des lavages très fréquents.
Pour le conditionnement chlorure ferrique et chaux, les qualités de tissu retenues présentent une forte perméabilité, de l'ordre de 3 500 à 6 000 m³/h/m² (la perméabilité est une mesure du débit d'air exprimée en m³/h/m² sous 196 Pa ; c'est un critère technique majeur pour la détermination d'un tissu). Il n'est pas nécessaire de rechercher des qualités très fines car la structure de la boue est plutôt minérale (20 à 25 % chaux) et composée de grosses particules supérieures à 20 µm.
Le conditionnement utilisant des polymères entraîne un processus différent : en effet la structure de la boue est fragile, et il faut piéger au maximum l'ensemble des particules, tout en conservant la structure floculée. De bons résultats sont obtenus avec des qualités d'une perméabilité moyenne : 1 000 à 4 000 m³/h/m² sous 196 Pa, en fonction des polymères utilisés.
Le monofilament polyamide 11, dont la fibre est parfaitement ronde, est souvent préféré au monofilament polypropylène qui présente un diamètre irrégulier. De ce fait, l'usage du polyamide 11 permet d'obtenir un tissu avec une surface lisse qui permet un débaîttissage optimal.
Les qualités utilisées dans le conditionnement thermique, le moins répandu, présentent une perméabilité de 2 000 à 3 500 m³/h/m² sous 196 Pa, ce qui réalise un bon compromis entre la filtrabilité, la résistance mécanique et la tombée du gâteau.
Les stations d'épuration industrielles
Ici, le contexte est très différent, car les types de filtration sont de natures très variées étant donné la diversité des industries, lesquelles sont dissemblables sur plusieurs points :
- • les types de boues, comme par exemple, en galvanoplastie : faiblement concentrées ; en papeterie : boues fibreuses ; dans les huileries : très colloïdales ; dans l'industrie des colorants : faiblement concentrées et très organiques ;
- • le conditionnement, suivant qu'il est pratiqué avec ou sans chaux, adjonction de chlorure ferrique ou de polymère ;
- • la quantité à traiter, qui peut varier de quelques dizaines jusqu'à 100 000 EH ;
- • les investissements mis en œuvre, qui sont fonction du taux de pollution et de charge des effluents.
Ces industries ont néanmoins en commun le fait d'être soumises à une même réglementation et, pour assurer le respect des normes, elles utilisent pour la plupart des filtres-presses.
Ces filtres-presses sont équipés généralement de toiles en multifilaments polypropylène ou polyamide (figure 6), mais depuis quelques années, nous équipons un nombre croissant de ces filtres avec des monofilaments très performants sur le plan du pouvoir d'arrêt, du débaîttissage et du décolmatage : il s'agit de monofilaments en polypropylène fortement calandrés, d'une perméabilité très basse, de l'ordre de 100 m³/h/m². Ces tissus permettent de retenir des particules de quelques microns et assurent ainsi un filtrat très clair.
Ces tissus sont élaborés à partir d'un monofilament en polypropylène de 15/100 tissé avec une forte densité de fil en chaîne, ce qui lui donne les caractéristiques recherchées.
Certaines unités industrielles sont cependant équipées de filtres à bandes pressantes, le milieu chimique pouvant imposer l’utilisation de monofilaments en polyamide plutôt que de polyester, ce qui assure une meilleure résistance chimique en milieu alcalin.
Conclusion
L’usage des tissus à base de monofilaments est maintenant généralisé dans la plupart des unités de déshydratation des boues.
Ces tissus équipent maintenant la quasi-totalité des stations d’épuration urbaines. Les progrès réalisés dans le traitement de calandrage des monofilaments en polypropylène et en polyamide ont permis d’étendre leur utilisation à tous les filtres-presses, y compris dans les applications industrielles, ce qui a conduit à un progrès significatif dans le fonctionnement des filtres par l'amélioration du déblatissage et la capacité de décolmatage, éléments essentiels à rechercher pour obtenir un bon rendement des cycles de filtration.
Rectificatif
HELECO 93 —
1er Salon grec sur les technologies environnementales
Athènes — 1-4 avril 1993
Les informations que nous avons publiées antérieurement sur ce salon sont à compléter par référence à l’organisateur : Horizon — 14 Nikis Street — GR 10557 Athènes (Grèce). Tél. 301 32 22 144. Fax 301 32 47 048 et 325 53 16.
LE FORUM DES LECTEURS
Cette rubrique, qui a pour objet d’instituer un débat entre nos lecteurs, accueille leurs réflexions, suggestions, informations et questions diverses.
Une installation de traitement des déchets hospitaliers à risques
Nous avons publié sous ce titre dans notre numéro d’avril dernier un article rédigé par M. Yves Flute au nom de la société IMH (Industrielle de maintenance hospitalière). L’auteur y présentait un nouveau procédé, opérationnel depuis cinq ans et déjà en service en Europe (Allemagne, Espagne, Suisse, Italie, Pologne, Tchécoslovaquie) de même qu’aux États-Unis, qui permet de transformer les déchets hospitaliers à risques en déchets assimilables à des ordures ménagères, au moyen d'une installation fixe ou mobile.
En conclusion, il était précisé que ce nouveau procédé avait obtenu une autorisation de mise en exploitation par le ministère de la Santé, après un avis favorable du Conseil supérieur d’hygiène publique de France du 27 novembre 1991.
Par lettre en date du 9 juillet 1992, Madame Aline Godard, sous-directeur de la Prévention générale et de l’Environnement au ministère de la Santé et de l’Action humanitaire, nous signale que cette dernière formulation n’est pas conforme à la réalité réglementaire :
« En effet les ministères de la Santé et de l’Environnement n’ont pas encore publié de circulaire de validation du procédé ZDA-M3 en application de la circulaire du 27 juillet 1991 ; nous disposons à ce jour du seul avis provisoire du Conseil supérieur d’hygiène publique de France, qui souhaite un suivi analytique complémentaire avant de rendre un avis définitif. Dans l’attente la société IMH a été seulement autorisée à “mettre en œuvre de façon ponctuelle et en conditions réelles la machine ZDA-M3 (…) afin de réunir (…) les éléments complémentaires” nécessaires à l’adoption d’un avis définitif. »
Il nous est donc demandé de publier le correctif qui suit, ce que nous faisons bien volontiers, avec l’accord de M. Yves Flute :
« Le ministère de la Santé et de l’Action humanitaire communique que, contrairement à ce qui est indiqué dans le numéro 154 de notre revue d’avril 1992, la machine ZDA-M3 ne fait pas l'objet d'une autorisation de mise en exploitation de la part du ministère de la Santé. L'avis rendu par le Conseil supérieur d’hygiène publique de France est donné sous réserve d’un suivi analytique complémentaire, à l’issue duquel un avis définitif sera rendu. La société IMH est seulement autorisée à mettre en œuvre ponctuellement cette machine, notamment pour réaliser les essais complémentaires sollicités. Compte tenu des éléments déjà rassemblés, la démarche en cours devrait se conclure favorablement. »