La corrosion et ses causes
L'étude, l’examen consécutif à un sinistre prend généralement en compte ce bilan matières pour expliquer la dégradation du matériel thermique.
Nous pouvons citer quelques incidents rencontrés dans les centrales thermiques conventionnelles :
- • les ruptures de tubes vaporisateurs,
- • la corrosion sous dépôts poreux avec le mécanisme de concentration de parois,
- • l'encrassement des tubes de la turbine (figure 1), etc.
[Photo : Photographie d'une turbine corrodée par entraînement d'oxydes]
De même, sur les générateurs de vapeur, dont l'énergie thermique est produite par effet Joule, des concentrations excessives en particules métalliques ou autres salissures, favorisent d'une part, le risque potentiel d’amorçage d’arcs électriques sur les chaudières à électrodes immergées ou à jets multiples et, d'autre part, la dégradation des thermoplongeurs gainés en acier inoxydable.
À de rares exceptions près, et compte tenu des puissances installées, les installations thermiques concernées mettent en œuvre des traitements complets d’épuration et de conditionnement des eaux, traitements classiques ou de récentes technologies. Nous en citerons quelques-uns :
- — traitement par amines volatiles et neutralisantes, associé ou non avec des amines filmantes,
- — traitement réducteur d’oxygène (volatil ou non),
- — phosphates associés ou non à des dispersants,
- — tout dispersant, tout organique.
Ces différents traitements présentent des efficacités variables, mais en règle générale, l’évacuation des salissures telles que calcium, magnésium, silice, fer dissous, sont jugées suffisantes par les utilisateurs. Cependant, faute d’examens complémentaires plus précis, la première approche peut s’avérer incomplète ou inexacte avec les risques potentiels qui en découlent ; en effet, une mauvaise appréciation de l'importance des quantités de salissures rentrant en chaudières et des quantités sortantes par les purges, amènera à terme les risques figurant sur le tableau I.
En conséquence, pour limiter la dégradation et la rupture de tubes sur les générateurs de vapeur, soit à flux thermique élevé, soit thermoélectriques, de récupération, ou d'usines d’incinération, etc., il sera nécessaire de les alimenter avec une eau d’alimentation contenant des teneurs en fer total et cuivre les plus faibles possibles.
Cette recommandation est largement reprise et demandée actuellement par l'ensemble de la profession ainsi que par nos prescripteurs.
La teneur en fer total et cuivre : le test sécurité du traitement des eaux, l’un des moyens de contrôle de la corrosion
Traditionnellement, les déterminations du fer par les méthodes colorimétriques donnent une appréciation suffisante des teneurs en fer dissous (Fe++ et Fe+++) mais ne renseignent aucunement sur la teneur en particules de fer véhiculées par le fluide (figure 2).
Les différentes particules de fer insolubles et amorphes de faibles dimensions et les agglomérats de fer « arrachés » provenant de la corrosion par érosion et cavitation échappent pour la plupart d'entre elles à l'analyse.
Nos travaux analytiques ont démontré que sur des installations thermiques correctement traitées, suivies et contrôlées, l'on pouvait détecter sur l’eau d’alimentation des chaudières la répartition suivante :
[Photo : Particules de fer vues au microscope.]
Suppression primage + vapeur sèche
Chaudron
[Photo : Élimination de l’effet du primage : entraînement d’eau par la vapeur.]
— fer dissous .... 0,005 à 0,020 mg/l
— fer total ........ 0,005 à 0,5 mg/l
— cuivre total : 0,003 à 0,020 mg/l
— fer total/fer dissous : 1 à 10
Bien entendu, l'interprétation de ces valeurs permet une première appréciation de la corrosion :
© corrosion électrochimique ?
© corrosion par érosion ?
© corrosion du cuivre et alliages ?
On peut la définir comme suit, en fonction des proportions de métal relevées :
— fer total < 0,020 mg/l — situation stable,
— fer total/fer dissous > 5 — corrosion par érosion,
— fer dissous > 0,020 mg/l — corrosion électrochimique,
— cuivre > 0,010 mg/l dans l’eau alimentaire. — corrosion localisée en chaudière.
Prévention de la corrosion du fer et du cuivre
Selon la gravité des problèmes, la maîtrise ou l'amélioration de la protection contre la corrosion se traduira inévitablement par la réduction des teneurs en fer total et des teneurs en cuivre dans l'eau alimentaire des chaudières.
Seuls l'étude sur le site et le chiffrage des paramètres de corrosion permettent de choisir cas par cas, les actions prioritaires à mettre en place. Compte tenu des équilibres successifs que peut rencontrer ce fluide thermique remarquable que constitue l'eau, celles-ci peuvent être d’ordre thermique, physique ou de nature chimique. On en trouvera l'inventaire ci-après, complété par les diverses méthodes d'aide à l'exploitation.
Actions d’ordre thermique
Elles permettent d’agir sur plusieurs facteurs :
© dimensionnement des conduites, vitesse d’écoulement, perte de charge maximale ;
© tracé du réseau et problèmes de purge (figure 3) ;
© réduction de pression, son influence sur la qualité de la vapeur ;
© évacuation des condensats et des incondensables, air et autres gaz : oxygène, azote, hydrogène (figure 4) ;
© implantation de casse-vide.
Actions d’ordre physique
Elles comportent :
© le choix des métaux (notion des flux thermiques ou de charge calorifique),
© la pose des séparateurs, et, le cas échéant, des déverseurs,
© l'installation des dispositifs de dégazage et de mise à l'équilibre,
© la rétention des particules métalliques sur filtre du type Ferrostop équipé de bougies magnétiques & aimants permanents (figures 5 et 6),
© la filtration et l'épuration des retours de condensats (appelé aussi polishing des condensats).
Actions d’ordre chimique
Elles sont développées en vue d’atteindre les objectifs de traitements suivants :
— neutralisation complète du CO₂ libre ;
[Photo : Élimination des condensats et des incondensables.]
[Photo : Photographie du filtre Ferrostop à bougies magnétiques & aimants permanents.]
— teneur en O₂ dissous réduite au minimum (on peut descendre jusqu’à 0,1 mg/l ;
— dispersion des dépôts d’oxydes de fer et de cuivre ;
— passivation des surfaces métalliques (par formation de magnétite).
À cet effet, on dispose des moyens suivants :
© utilisation d’amines à coefficient de partage différents (des types Kemazur VN 11, Kemazur VN 12...)
© introduction d'un réducteur d’oxygène dans la vapeur (Kemazur B 109, Kemazur B 120...)
© dispersion des salissures (Kemazur B 118, Energix TM 10...)
© formation d'un film mono-moléculaire isolant le métal de l'eau (Kemazur VEC 9...)
© réduction des teneurs en ammoniaque (par le choix approprié des produits de conditionnement).
[Photo : Schéma du filtre Ferrostop.]
[Photo : Photographie d’un analyseur d’oxygène portatif.]
[Photo : Tableau I - Liste des risques favorisés par l’accumulation des produits de la corrosion.]
Aides à l’exploitation
Selon le genre de l’exploitation, on peut faire appel à une ou plusieurs des méthodes ci-après :
- — mise en place de capteurs : température, pression, pH ;
- — surveillance de la ventilation des réseaux retours par la détermination des teneurs en oxygène dissous (figure 7) ;
- — contrôle du fer total et du cuivre total ;
- — pose de sondes (ou manchettes) témoins de corrosion ;
- — suivi de la corrosion par la détermination de l’hydrogène contenu dans la vapeur au départ de celle-ci.
Conclusion
L’accumulation du fer et du cuivre dans les eaux de chaudière est souvent à l’origine de la corrosion et des ruptures de tubes entraînées par les dépôts d’oxydes qu’elle engendre.
Ces problèmes graves peuvent être évités par l’adoption de mesures préventives, d’une part lors de la conception des installations, et d’autre part, lors de leur exploitation.
Des traitements adaptés et des contrôles réguliers permettent en particulier une meilleure maîtrise des bilans « fer total et cuivre total », qui apporte la garantie d’acquérir une maintenance optimale des générateurs de vapeur.
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