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Une première en matière de valorisation énergétique des déchets de bois : les chaudières à lit fluidisé de Clairvivre

28 decembre 1983 Paru dans le N°79 à la page 25 ( mots)
Rédigé par : J.-p. LEGLISE

L’article ci-dessous présente une première française en matière de valorisation énergétique de déchets forestiers ; il s'agit de la réalisation d'une chaufferie utilisant comme générateurs des chaudières à lit fluidisé polycombustibles.

Cette chaufferie est en cours de réalisation en Dordogne et a fait l'objet du classement Technologie Innovante par l’Agence française de la maîtrise de l’énergie (AFME) ; ses chaudières, conçues, réalisées et commercialisées en France par nos soins, pourront brûler indifféremment des déchets de bois ou du charbon, et alimenteront le réseau de chauffage de la Cité de Clairvivre.

LES LITS FLUIDISÉS

La technique du lit fluidisé consiste à mettre en suspension un solide granulaire dans un courant gazeux ascendant. Le gaz se comporte comme des bulles d’air dans un liquide, ce qui se traduit par un brassage important des particules qui composent le lit fluidisé.

Leurs applications sont nombreuses et déjà très anciennes dans l'industrie, du fait des excellentes qualités réactionnelles d’un tel milieu :

  • grande homogénéité en température, ce qui facilite le contrôle des réactions,
  • transferts de chaleur et de masse très rapides, du fait de l’état particulaire du lit et de la forte agitation des solides,
  • très grande surface de contact solides/gaz.

Parmi les applications les plus connues, il faut citer : les réactions catalytiques, le grillage et la calcination, la combustion.

LES CHAUDIÈRES À LIT FLUIDISÉ

Il s’agit d’une nouvelle génération de chaudières dans lesquelles la grille traditionnelle est remplacée par un foyer à lit fluidisé, ce qui confère à la chaudière des propriétés nouvelles qui en améliorent les performances, la souplesse et la fiabilité (aucune pièce en mouvement).

[Photo : Schéma de la chaudière à vapeur]

Le lit fluidisé s'accommode d'un large spectre granulométrique du combustible et s'adapte très facilement à des changements de caractéristiques du combustible.

Principe de fonctionnement

Le combustible est généralement alimenté par gravité au-dessus du lit. Au contact de la masse granulaire en suspension (maintenue à une température comprise entre 700 et 900 °C), il est rapidement porté à la température de combustion.

L'air de combustion est injecté à la base du lit, proportionnellement à la quantité de combustible, lui-même alimenté proportionnellement à la puissance appelée par l'utilisateur.

Afin de garder en permanence les conditions optimales de fluidisation, la section utile du lit varie, elle aussi, proportionnellement avec la puissance de la chaudière, ce qui garantit en tout temps le maintien des meilleures conditions de combustion : agitation du lit et excès d'air.

Les tubes d’eau placés dans le lit assurent la régulation de sa température.

[Photo : Schéma de la chaîne de traitement.]

LA CITÉ DE CLAIRVIVRE

La Cité de Clairvivre (Dordogne) est un Établissement public départemental d’actions sociales, de rééducation professionnelle et d'aide par le travail. Cet établissement gère :

  • — un centre de rééducation professionnelle qui a une capacité d’hébergement de 341 lits,
  • — un centre d’aide par le travail d'une capacité d’accueil et d'emploi de 200 ouvriers.

Au total, l’Établissement est agréé pour une capacité d’accueil et de formation à l'emploi de 540 handicapés.

Avec l'ensemble des personnels enseignant, médical, administratif, services généraux, c’est au total plus de 1 000 personnes qui vivent dans la Cité.

Les équipements sont importants, nombreux et diversifiés : ateliers mécanique, reliure, électronique, salles de cours et de formation, centre médical, serres, élevages, infrastructures pour l’hébergement en pension complète des malades et des stagiaires, infrastructure commerciale, logement du personnel.

Construite en 1932, et devenue Établissement public en 1980, la Cité a fait l'objet d’un grand programme de travaux de réhabilitation qui comprend notamment la création d’une chaufferie centrale et d'un réseau de distribution de chaleur.

Les besoins énergétiques

Jusqu’alors, la Cité était chauffée par des chaufferies d’îlots fonctionnant au fuel domestique ou, au niveau pavillonnaire, par des systèmes individuels (poêles convecteurs) également au fuel domestique.

La consommation annuelle globale ressortait à environ 2 200 tonnes de fuel domestique.

La Cité de Clairvivre se trouve géographiquement située au cœur d’une région d’exploitation forestière riche en déchets de bois, dont la valorisation thermique s’est avérée pour l’Établissement public départemental une source importante d’économie d’exploitation. Les retombées, tant pour l’économie locale que pour la nation étant par ailleurs évidentes.

Il fallait néanmoins préserver l'équilibre économique du projet et éviter notamment que l’existence de la demande de déchets de bois ne se traduise par une envolée des prix pour un déchet non valorisé par ailleurs.

C’est la raison pour laquelle le choix des autorités s’est porté vers une solution de chaufferie centrale, équipée de générateurs polycombustibles, capable de brûler les déchets de bois et du charbon, et par la même de fixer un plafond au prix de rachat des déchets de bois.

Le choix technologique s’est porté sur des chaudières à lit fluidisé, seules capables de garantir un haut rendement énergétique et une souplesse d’exploitation compatible avec les exigences d’un réseau de chauffage urbain.

L’exemple de la chaufferie de la Cité

Les principales hypothèses retenues dans la conception de cette chaufferie ont été les suivantes :

  • — utiliser des déchets de bois à faible PCI et à forte teneur en eau, disponibles dans la région,
  • — obtenir un rendement énergétique élevé,
  • — concevoir un matériel pouvant accepter sans modifications d’autres combustibles (notamment du charbon) ; il est en effet important de pouvoir parer à toute hausse du coût des déchets de bois, voire à tout problème d’approvisionnement,
  • — faire face à des variations de régime importantes au cours de la saison de chauffe.

Cette installation comprend essentiellement trois parties :

  • — un parc à bois,
  • — un ensemble de prétraitement du bois,
  • — les générateurs proprement dits.

Le parc à bois : après pesage, les déchets de bois seront stockés sur une aire aménagée en plein air ayant une autonomie d'une semaine. Ils seront ensuite envoyés à l’aide d’un tracto-chargeur, dans une trémie de stockage tampon d’où ils seront ensuite extraits vers les équipements aval.

Le prétraitement du bois : le premier élément de cette unité est un trieur à disques destiné à retenir la matière première d'une granulométrie supérieure à 30 mm x 30 mm x 30 mm. Les refus du trieur seront recyclés vers un broyeur à marteaux et réinjectés en tête de chaîne après broyage.

Les déchets ainsi prétraités seront stockés dans deux silos dont la capacité assurera l’autonomie de fonctionnement de la chaufferie pendant les fins de semaine.

La chaufferie : elle se compose de deux générateurs conçus pour délivrer de l'eau à 110 °C. Ces générateurs, en cours de construction, ont une puissance nominale de 3 et 5 KTh (3,5 et 5,8 MW).

Chaudière3 KTh5 KTh
Section du foyer (m²)....................4,57,5
Fonctionnement au bois à 50 % d'eau :
débit de combustible (kg/h)............1 9803 300
température des fumées (°C)...........205205
rendement global (%)...................8080
Fonctionnement au charbon
débit de combustible (kg/h)............485805
température des fumées (°C)...........170170
rendement global (%)...................8888
Variation de charge......................1 à 41 à 4

Chaque appareil comprend les équipements suivants : une chambre de combustion à lits fluidisés ; des tubes d’eau sont répartis géométriquement pour assurer une bonne répartition de la surface d’échange à travers toute la section du foyer ; une zone de convection ; un économiseur ; un traitement des fumées effectué en deux étapes :

— cyclonage : les fines de carbone entraînées sont recyclées dans le foyer, ce qui permet d’obtenir un rendement de combustion élevé ;

— filtre à manche : ce traitement de finition garantit un rejet conforme aux normes.

Les bilans de fonctionnement et les performances de ces chaudières sont rassemblés dans le tableau ci-contre.

INTÉRÊT ÉCONOMIQUE DU PROJET

Sur la base de la substitution d’énergie entre le fuel domestique et le déchet de bois rendu à la chaufferie, le gain annuel d’exploitation attendu sur le poste combustible est très important.

On déplacera en effet 2 170 tonnes de fuel domestique dont le prix TTC (1983) est de 2 800 F/T, soit 6 076 000 F, qui seront remplacées par 11 900 tonnes de bois (déchets) rendu à 90 F/T TTC, soit 1 071 000 F.

C'est donc une économie de 5 000 000 F qui sera obtenue sur le poste « combustible » rendant ainsi l'investissement extrêmement rentable. Celui-ci présente en outre l’intérêt d’utiliser un combustible d'origine nationale, ce qui permettra d’économiser des devises.

La station de compostage des boues de la ville de Blois

La ville de Blois est desservie par un réseau d’égouts unitaires qui aboutit à une station d’épuration située à proximité de la Loire ; d’une capacité nominale de 50 000 e/h, elle traite en fait une charge de 80 000 e/h suivant le processus : prétraitement – relèvement – décantation primaire – lit bactérien – décantation secondaire.

Les boues sont soumises à une digestion anaérobie puis à une extraction par centrifugation, ce qui conduit à une production de 12 m³/j, dont 3 t de matière sèche ; celle-ci contient 55 à 60 % de matières organiques, 25 à 30 % de carbone organique, 2,5 à 3 % d’azote total, 3 à 5 % de P₂O₅, 0,2 à 0,3 % de K₂O avec un rapport C/N variant de 7 à 10 et un pH compris entre 6,5 et 7,5.

La mise en décharge des boues a dû être abandonnée il y a quelques années, faute de sites utilisables.

Devant cette situation, la ville a chargé la société Ternois Épuration d’étudier une solution de rechange conduisant à la valorisation des boues.

Après avoir envisagé l'épandage des boues liquides sur des terrains agricoles, cette filière a été abandonnée en raison de ses contraintes (périodes courtes, pollution des nappes...) en s’orientant vers le compostage. À cette fin deux méthodes ont été expérimentées sur une aire de béton située dans la station, l'une utilisant l’insufflation d’air et l’autre la technique du retournement.

Une première phase a consisté à définir la préparation du mélange avec divers supports carbonés utilisables, en vue de provoquer des fermentations aérobies : ordures ménagères, sciure, occasionnellement feuilles mortes... C’est la sciure de bois, abondante dans la région, qui a été retenue (avec un mélange de 40 % de MS contre 60 % de MS de sciure).

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