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Une nouvelle méthode de contrôle de la qualité des filtres à cartouches

28 juillet 1995 Paru dans le N°183 à la page 34 ( mots)

Les filtres à cartouches sont très largement utilisés dans l'industrie pour garantir la qualité d'une eau de procédé, leur seuil de filtration étant adapté à l'objectif visé : de la simple préfiltration à la stérilisation. Pour faciliter la comparaison des performances des cartouches proposées sur le marché, l'Institut de la Filtration a mis au point une nouvelle méthode d'essai qui a fait l'objet d'une validation rigoureuse et qui est en cours d'adoption comme norme française. Elle permet de connaître à la fois l'efficacité avec laquelle les particules sont retenues en fonction de leur taille, ceci pendant toute la vie du filtre, et d'autre part par la quantité de matières retenue avant colmatage, ce qui définit la capacité de rétention du filtre. Le principe de l'essai est décrit succintement, des résultats d'essais-types sont présentés et une approche méthodologique permettant d'optimiser le choix des cartouches filtrantes est proposée.

La technique de filtration des liquides sur cartouches s’implante dans un nombre sans cesse croissant de procédés et d’installations parce qu’elle répond à une majorité de cahiers des charges : facilité d’emploi, rapidité et commodité de sanitation, faibles coûts d’investissements et de fonctionnement, faibles pertes de produit lors de son remplacement. Il se crée donc un nouveau marché sur lequel sont en compétition de très nombreux fournisseurs.

Lorsqu’un utilisateur doit choisir son filtre, il compare à la fois les coûts et les performances annoncées : seuil de filtration « nominal » ou « absolu », perte de charge, durée de vie, taux d’extractibles, etc.

Or, ces performances sont déterminées dans des conditions et selon des procédures qui, pour la plupart, ne relèvent pas de normes mais de spécifications propres à chaque constructeur, ce qui empêche toute comparaison : en filtration plus que dans n’importe quel autre domaine, la performance d’un matériel dépend directement des critères choisis pour en juger et des conditions dans lesquelles elle est mesurée.

L’Institut de la Filtration, centre de recherche technique et laboratoire officiel d’essais des filtres, a répondu à l’attente des professionnels du traitement et de l’affinage des eaux et d’autres secteurs industriels (nucléaire, pharmacie, chimie fine, biotechnologie ...) en développant une méthode de mesure de l’efficacité de filtration et de la capacité de rétention des cartouches dont le seuil est annoncé entre 1 et 25 microns.

La procédure, qui est en cours d’adoption par une commission de normalisation, complétera la série des normes françaises NF X 45-300 : « Filtration des liquides – Cartouches filtrantes – Méthodes d’essais », dont la mise en œuvre par les fabricants de filtres permettra l’obtention de données techniques fiables et comparables, assainissant ainsi les règles de la concurrence.

Que sont l’efficacité et la capacité de rétention ?

Par définition, l’efficacité est la grandeur caractéristique de l’aptitude d’un filtre à remplir sa fonction, c’est-à-dire réduire le trouble, retenir des matières en suspension ou colloïdales, éliminer des particules indésirables, etc. Elle est quantifiée en comparant la valeur de cette grandeur, qui peut être une turbidité, une teneur en matières sèches ou un nombre de particules, avant et après le filtre.

Cette efficacité résulte de la faculté du milieu filtrant (papier, non tissé, membrane, bobiné, aggloméré ...) à retenir les particules, ce qui provoque une obstruction progressive des pores appelée colmatage. Il y a ainsi augmentation progressive de la perte de charge jusqu’à ce que la pression de remplacement de la cartouche soit atteinte.

La capacité de rétention est, par définition, la quantité de matières solides qu’une cartouche a retenue entre l’instant de sa mise en service et celui où cette pression est atteinte.

Pourquoi normaliser un essai de filtres ?

La meilleure mesure de l’efficacité est celle faite au point d’utilisation : chacun choisit le critère d’évaluation qui lui convient. Mais pour des raisons évi

1 CUVE PRINCIPALE
2 POMPE PRINCIPALE
3 RÉGULATEUR DE TEMPÉRATURE
4 PRISE D'ÉCHANTILLON
5 MANOMÈTRE DIFFÉRENTIEL
6 INDICATEUR DE DÉBIT
7 VANNE RÉGLAGE CONTREPRESSION
8 FILTRES DÉPOLLUERS
9 CUVE D'INJECTION
10 POMPE DE CIRCULATION
11 POMPE D'INJECTION
[Photo : Schéma du banc d’essai d’efficacité de filtration et de capacité de rétention.]

dentes, elle n’est pas transposable et encore moins publiable dans une documentation de fabricant. Il est donc indispensable de disposer d’une méthode de laboratoire qui reproduise aussi fidèlement que possible les conditions réelles de service mais en respectant des contraintes minimales de durée, de coût, de répétabilité et de sensibilité et qui recueille l’approbation de l’ensemble des constructeurs. Une bonne norme d’essai répond à l'ensemble de ces exigences.

Le projet NF X 45-303

De nombreuses normes de mesure de l’efficacité de filtration et de la capacité de rétention existent chez les professionnels de la mécanique, de l’aéronautique ou de l’automobile pour comparer les filtres à carburant, à lubrifiant ou à fluide de puissance. Aucune n’existe pour caractériser les cartouches filtrantes à usage industriel. En adaptant leur contenu au cas des cartouches appliquées aux eaux domestiques ou industrielles, il a été possible d’imaginer une méthode, de développer l’installation d’essai correspondante puis de la valider en testant plus d'une centaine de filtres à cartouches. Son principe peut être résumé sur la figure 1.

La cartouche filtrante à tester (filtre en essai) est soumise à un débit constant d’eau à 20 °C dans laquelle est mis en suspension le contaminant d’essai (poussière de silice normalisée de granulométrie 0-80 microns) à des concentrations successivement égales à 5 mg/l pendant 30 min et à 100 mg/l pendant 60 min. Les particules sont comptées dans des domaines dimensionnels variant entre 1 et 40 microns selon le seuil de filtration présumé du filtre, les comptages étant continus à l'aval et interrompus en amont lorsque la concentration est de 100 mg/l.

Les paramètres de l’essai (débit, température, pression différentielle, …) sont enregistrés en continu et l’efficacité peut être calculée pendant chaque phase à 5 mg/l jusqu’à ce que la perte de charge maximale (fixée par l’Afnor à 2,5 bars pour des cartouches plissées et à 1,5 bar pour des filtres en profondeur) soit atteinte. Avant chaque essai, le banc d’essai est soigneusement dépollué pour garantir la répétabilité des comptages amont.

Résultats d’essais

La figure 2 présente les nombres de particules comptées en amont et en aval de trois cartouches annoncées 1,2 µm tirées d’un même lot du même fournisseur. On en conclut que les cartouches « A » et « B » sont bonnes tandis que la cartouche « C » ne garantit pas une qualité de filtrat constante.

La figure 3 permet de voir comment se sont comportées trois cartouches de seuil annoncé 1,2 micron de structure identique, mais de trois fournisseurs différents : les filtres « A » et « C » assurent une bonne décontamination du filtrat tandis que le filtre « B » supporte mal les variations de concentration amont. Le filtre « A », aussi efficace que le filtre « C », se colmate deux fois plus vite.

La figure 4 permet de visualiser le colmatage, élément majeur de la comparaison des deux cartouches entre elles. Ainsi, le filtre « C » est susceptible d’être utilisé deux fois plus longtemps que le filtre « A », ce qui se traduit par des capacités de rétention très différentes (« A » : 181,2 g ; « B » : 225,7 g et « C » : 337,5 g).

Intérêt de la procédure

Du point de vue strictement méthodologique, cette procédure s’avère très sensible : les différences de qualité, même très minimes, qui existent entre deux cartouches, sont immédiatement mises en évidence.

Du point de vue des utilisateurs de filtres, elle donne accès à deux informations essentielles pour bien choisir son produit :

  • • l'efficacité, bien sûr, qui garantit la qualité du liquide filtré,
  • • mais aussi la capacité de rétention, qui permet d’une part de prévoir la fréquence de remplacement des cartouches quand ce remplacement n’a lieu qu’une fois atteinte la perte de charge maximale et d’autre part de réduire les coûts d’approvisionnement si la cartouche est renouvelée avec chaque lot de fabrication (produits pharmaceutiques, pigments et colorants, encres et peintures, polymères, colles, etc.). Dans ce dernier cas, l'utilisateur dispose d’une donnée qui lui permet de sélectionner le fournisseur qui offre, à efficacité égale, la durée de vie (la capacité de rétention) la plus courte compatible avec le temps de filtration d’une cuvée ou d’un lot.

Comment optimiser un approvisionnement

L’approvisionnement des cartouches au meilleur rapport qualité-prix peut dorénavant s’appuyer sur la démarche suivante :

  • ° Établissement du cahier des charges techniques des cartouches actuellement en service et réputées donner satisfaction. Pour cela, un laboratoire indépendant, s’appuyant sur les nouvelles normes, détermine par exemple le point de première bulle, la courbe de perte de charge en fonction du débit, l’efficacité de filtration et la capacité de rétention ;
  • ° Consultation des fournisseurs avec le cahier des charges techniques reprenant les valeurs précédemment mesurées ;
  • ° Intercomparaison, toujours par un laboratoire indépendant, des filtres
[Photo : Fig. 2 : Comparaison du comportement de trois cartouches 1,2 μm tirées d'un même lot.]
[Photo : Fig. 3 : Comparaison de l’efficacité de trois cartouches sur les particules de dimension supérieure à 1 micron.]
[Photo : Fig. 4 : Comparaison de vitesse de colmatage de trois cartouches du même seuil de filtration annoncé.]

Proposés et sélection, sur des critères purement techniques puis économiques, de la meilleure référence.

Conclusion

Une centaine de cartouches de nature, de seuils de filtration et de structures très différents ont été testées à ce jour selon la méthode mise au point par l'IFTS et en cours d’adoption comme norme française NF X 45-303.

La précision des mesures permet de faire une discrimination très fine de leur capacité de rétention et de leur efficacité qui est vérifiée pendant toute la vie de la cartouche.

L'outil mis en place par un laboratoire d’essai indépendant permet aux « consommateurs » de cartouches de choisir le meilleur produit au meilleur prix.

Pour permettre une synthèse des nombreux résultats obtenus pendant l’essai et pour clarifier le vocabulaire de spécification d’un filtre, la commission de normalisation a adopté la définition du « seuil de filtration de référence » servant dorénavant à désigner une cartouche filtrante.

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