Adduction ou traitement de l'eau réseaux d'incendie ou dessalement, papeterie, agro-alimentaire, chimie, sidérurgie, pétrole... posent le même problème : assurer l'étanchéité des pompes ou agitateurs, au passage de l'arbre, et surtout simplifier la maintenance ! Les garnitures mécaniques en deux parties constituent une solution. Ce nouveau type de garnitures, totalement sécables, vient de naître. D'utilisation simple et flexible, elles constituent la " génération Sectaflex ". Les résultats obtenus sur le terrain éveillent la curiosité et incitent à suivre, étape par étape, le développement de cette innovation.
Les résultats sur le terrain
Lancée en avril 1996, cette nouvelle garniture sécable a déjà atteint le Moyen-Orient. Un premier contrat prévoit la fourniture de 164 garnitures pour des arbres allant de 70 à 130 mm de diamètre. Les tests de certification, prévus pour la garniture de plus grand diamètre, sont explicites. Pour 3 bars de pression, une température de 20 °C et une vitesse de 1450 tr/min, le taux de fuite a atteint 30 ml en huit heures de fonctionnement et 5 ml/heure pour les 100 heures qu'a duré le test.
D'autres expériences significatives, allant de la pompe verticale à eau (14 psi et température ambiante) au mélangeur Prochem (145 psi et 200 °C), affichent des taux de fuite similaires à ceux obtenus sur bancs d’essais.
Les performances de cette garniture sont les suivantes : pression jusqu'à 20 bars et vitesse jusqu'à 3600 tr/min. Sur la figure 1 on remarque la courbe pression/taille pour les différents matériaux de face de friction : carbone/silicium ou silicium/silicium.
Etape 1 : le postulat de base
Jusqu'alors, la garniture totalement sécable était utilisée, dans la majorité des cas, en remplacement des garnitures à tresses, et parfois en première monte. Plusieurs configurations existaient jusqu’alors, mais leur utilisation était complexe et ne garantissait pas les faibles taux de fuite attendus par les clients. Il était donc impératif de développer un nouveau type de garniture sécable, capable de répondre aux attentes du marché. Une équipe de développeurs s'est alors appliquée à réunir les compétences indispensables : marketing, vente, ingénierie, production et service, afin d’établir le cahier des charges, sachant que celui-ci contribue pour 50 % au succès final du produit.
Etape 2 : l’idéal selon le client
Seules les attentes du client intéressent les développeurs. Un questionnaire a donc permis de recueillir leur témoignage :
- • Montage. L'espace disponible, pour le montage d’une garniture, est toujours limité. Il faut absolument faciliter le montage sur la machine, d’autant que cela joue directement sur les performances de la garniture. Une garniture correctement montée a toutes les chances d’afficher un faible taux de fuite.
- • Performance. Avant tout, il faut un faible taux de fuite, même si la garniture est coupée en deux. Ce taux de fuite doit être comparable à celui d’une garniture classique, même pour des pressions supérieures à 10 bars. De toute façon, une garniture à fort taux de fuite ne pourrait même pas remplacer les tresses.
- • Prix. Les garnitures sécables semblent plus coûteuses à l’achat. Mais il est vrai qu'il faudrait prendre en considération les économies réalisées ensuite sur la maintenance.
- • Diamètres. On a réellement besoin d’une solution pour les garnitures de grand diamètre, dont le coût de maintenance est exorbitant. Il faut donc simplifier au maximum la manipulation des garnitures de grande taille.
- • Adaptabilité à la boîte à garniture. L'idéal serait une sécable qui puisse s’adapter facilement à la boîte à garniture et cela malgré la multitude d’interfaces machines existantes : pompe, mélangeur, réacteur, environnement marin...
Etape 3 : analyse de l’existant
Analyse des anciens produits et des produits existants permet de cerner l’évolution technique, qui conduit de la garniture en deux parties à la génération Sectaflex.
Un premier arrangement reprend une configuration traditionnelle ne comprenant qu’un seul ressort. La cassure des faces de friction est réalisée par usinage de deux demi-motifs. L’espace de jonction entre les deux moitiés de chaque composant est rodé. La conception des composants assure l’étanchéité entre le flex et son support. L’avantage de cette solution est que seules les faces (les pièces rénovables) sont en deux parties. Le principal désavantage de cette garniture est que les limites de pression risquent d’être trop basses. À haute pression, les taux de fuite aux faces risquent donc d’augmenter.
Un second arrangement, plus récent, a été développé pour une application en milieu marin. Il utilise une configuration de garniture à soufflet flexible, au lieu du ressort. Les deux faces de la garniture sont en deux parties. Cette configuration permet un découpage très rapide des faces de la garniture, sans avoir à isoler le liquide de barrage. Une attention toute particulière a été portée à la conception de l’espace situé entre le joint torique, les faces et les supports métalliques. Un vaste programme d’essais a été mené à bien, avec le client, pour valider la conception. En particulier, des tests répétés ont été pratiqués afin d’améliorer la fiabilité de la garniture. Des tests en cas de choc et de vibration ont vérifié la torsion et son intégrité. Le principal avantage est que l’élément flexible est un soufflet. Le joint torique dynamique des garnitures traditionnelles a été supprimé. Le seul désavantage de cette garniture, utilisée pour des applications courantes, est qu’elle n’est pas totalement sécable et nécessite un espace suffisant pour le montage.
Etape 4 : cahier des charges et spécifications
Sur la base de ce qui précède, les spécifications suivantes ont été établies :
- • garniture totalement sécable,
- • montage facile,
- • faible taux de fuite : comparable aux garnitures classiques, même en pression,
- • performance égale après les actions de maintenance,
- • adaptable à tout type de machine,
- • conception robuste,
- • dimensions métriques et en pouces,
- • faible coût : le surcoût d’une garniture sécable par rapport à une garniture classique ne doit pas excéder 20 %,
- • gamme complète,
- • utilisation des technologies modernes (matériaux, faces de friction…),
- • utilisable sur des produits agressifs et abrasifs,
- • accompagnée d’un outillage simple facilitant le montage (sans pour autant multiplier les gadgets).
Etape 5 : conception d’un nouveau produit
Afin de coller au cahier des charges, les développeurs se sont mis d’accord sur les principaux aspects de la conception :
Garniture compensée. Pour atteindre de hautes pressions, la garniture doit être compensée hydrauliquement.
En interne, la pression du liquide se fera à l’extérieur des faces. En appliquant une pression externe sur les faces, le produit aura tendance à presser les deux moitiés de faces l’une contre l’autre et donc à limiter la fuite.
Le multi-ressort stationnaire, isolé du produit. Le fait d’isoler les ressorts du produit présente les avantages suivants : le risque de corrosion et le cokkage sont limités. La conception multi-ressort permet une meilleure répartition de la pression aux faces. La taille du ressort est également un paramètre important à considérer : certaines garnitures utilisent de très petits ressorts (par exemple de 2 mm de diamètre et 8 mm de long). On peut facilement imaginer le degré de difficulté pour réaliser le montage de ces petits ressorts, sur le site…
Montage en dehors de la boîte à garniture. Un grand nombre d’applications
Tableau I
Premier prototype : les résultats des tests.
PRESSION (bar abs) | TEMPÉRATURE (°C) | PRODUIT | VITESSE (tr/min) | TAUX DE FUITE (ml/h) |
---|---|---|---|---|
2 | 40 | Eau | 1500 | 50 |
1 | 40 | Eau | 1500 | 60 |
3 | 40 | Eau | 1500 | 60 |
5 | 40 | Eau | 1500 | 60 |
7 | 60 | Eau | 1500 | 120 |
10 | 40 | Eau | 1500 | 500 |
Tableau II
Second prototype : les résultats des tests.
PRESSION (bar abs) | DIAMÈTRE D’ARBRE (mm) | TEMPÉRATURE (°C) | PRODUIT | VITESSE (tr/min) | TAUX DE FUITE (ml/h) |
---|---|---|---|---|---|
5 | 75 | 20 | Huile | 3600 | 3 |
5 | 75 | 60 | Eau | 1500 | 5 |
15 | 75 | 60 | Huile | 3600 | 5 |
1 | 75 | 40 | Eau | 1500 | 10 |
10 | 75 | 40 | Eau | 1500 | 10 |
2 | 75 | 40 | Huile | 3600 | 25 |
8 | 160 | 40 | Eau | 3000 | 10 |
4 | 160 | 50 | Eau | 3000 | 15 |
6 | 160 | 40 | Eau | 3000 | 15 |
10 | 160 | 80 | Eau | 3000 | 15 |
1 | 160 | 40 | Eau | 3000 | 25 |
des garnitures sécables est l’échange standard des systèmes à tresses. Pour ces applications, la boîte à garniture est de petit diamètre. Pour cette raison, il est nécessaire d’avoir l’ensemble des composants en dehors de la boîte à garniture.
Étape 6 : premier prototype
Pour valider la conception de la garniture retenue, un premier prototype a été fabriqué. Il respecte les quatre principes listés précédemment. Ainsi que le montre la figure 5, les principaux composants reprennent les concepts suivants :
- le même profil de faces est utilisé sur les deux côtés, de façon à avoir une fourniture rationalisée,
- le grain est poussé par le chapeau multi-ressort. Quatre ressorts sont utilisés, contrairement à la conception traditionnelle, et les ressorts sont en tension. Cette solution permet d’avoir une réduction de la longueur de la garniture,
- les deux moitiés du chapeau sont fixées, positivement, par des boulons. Des goupilles assurent une position correcte de ces composants. Ce positionnement reste malgré tout critiquable, en particulier du côté du grain,
- la coupelle reprend la même conception : boulons et goupilles,
- les joints Viton® bénéficient d’un système de clip : une petite boule à l’extrémité du joint s’insère dans une cavité à l’autre extrémité et permet ainsi de sceller le joint sans colle (figure 2).
Afin d’étancher le chapeau et le porte-coupelle, un joint conditionné en liquide a été utilisé. Il permet d’éviter l’ouvrasion impliquée par d’autres solutions (joints toriques, joint plat, procédures de rodage…).
Les faces sont sectionnées par les soins du constructeur, à l’aide d’une méthode éprouvée. Une cassure naturelle des composants est faite. Elle permet d’obtenir une parfaite symétrie des deux moitiés. Les faces sont rodées avant d’être sectionnées. Le contrôle de planéité, effectué après sectionnement, indique que cette méthode est parfaite.
De façon à faciliter le montage de la garniture, un outil inventif a été conçu. Il s’agit d’un demi-anneau en plastique, le C-Ring. Le diamètre intérieur du C-Ring correspond au diamètre d’arbre où la garniture sera montée. Ce C-Ring a deux fonctions principales :
- il donne la position du porte-coupelle. Lorsque la garniture est installée, la première opération consiste à positionner le C-Ring sur l’arbre, contre la boîte à garniture, puis à amener le porte-coupelle contre le C-Ring. De cette manière, la cote d’empilage de la garniture est facilement obtenue. - le chapeau n’a pas de centrage. Pour le positionner, deux goupilles à l’arrière du chapeau s’engagent dans les deux orifices du C-Ring. Ainsi, le chapeau de la garniture est ajusté radialement.
Étape 7 : tests du premier prototype
Les tests du premier prototype confirment la conception générale de la garniture. Les principaux résultats de ces tests sont donnés dans le tableau I. Les agencements de base décrits précédemment ont été validés. En particulier, la cassure des faces est un succès : aucune colle n’est nécessaire. L’avantage en est évident : pas de risque de coller les faces ou de mal positionner les pièces…
Néanmoins, de possibles améliorations ont été listées :
- un système d’arrêt en rotation des faces doit être utilisé. Lorsque la garniture est en fonctionnement, à haute vitesse, les faces ont tendance à tourner, en raison du couple. Avec une conception sécable, une fuite peut apparaître lors de conditions exceptionnelles : au démarrage, lors de l’arrêt, en cas de variation de la pression…
- le joint du porte-coupelle doit avoir un fort taux de compression : des fuites pourraient apparaître du fait de la distorsion du porte-coupelle, en cas de serrage insuffisant du joint.
- en ce qui concerne le grain et la coupelle, une face large doit être opposée à une face étroite. Ainsi, on peut obtenir un film lubrifiant plus efficace et un désalignement radial plus important.
- les deux moitiés du chapeau de la garniture et la chemise doivent être scellés par un joint auxiliaire. L’étanchéité à l’aide d’un joint conditionné en liquide n’est pas réellement aisée à utiliser et, à haute pression, des fuites sont observées à cet endroit.
Étape 8 : second prototype
Le second prototype a été fabriqué en deux tailles : 75 mm et 160 mm de diamètre d’arbre (figure 3). L’objectif principal était d’améliorer la maniabilité et d’atteindre un très faible taux de fuite. Pour ce faire, toutes les améliorations potentielles relevées sur la première expérience ont été introduites :
- face large contre face étroite,
- système d’arrêt en rotation des grains et coupelles,
- les deux moitiés du chapeau et du porte-coupelle étanchées par un joint torique,
- pas de joint liquide ni de colle.
D’autres améliorations ont été apportées de façon à améliorer la préhension de la garniture, en particulier à
Vendroit du chapeau. La plupart du temps, la boîte à garniture est différente d'une machine à l’autre. Par conséquent, un concept de bride a été introduit, de façon à obtenir une garniture modulable.
Le C-Ring, ainsi qu'il a été décrit précédemment, est conservé, puisque les tests démontrent que c’est un outil très efficace.
Une modification supplémentaire a été portée, de manière à créer un système permanent de contrôle de l’état de la garniture. La longueur du chapeau de la garniture a été très légèrement augmentée. Celui-ci recouvre la plaque arrière de pression sur le grain. Lorsque la garniture est nouvelle et correctement montée, la plaque est dans l’alignement du chapeau de la garniture. Lorsque la garniture commence à s’user, la plaque se déplace, et il devient facile de le détecter par le témoin d’usure.
En ce qui concerne les joints, seule la coupelle utilise la technique du clip. Le joint de grain emploie la technique élaborée pour les garnitures sécables en milieu marin. Le joint est collé sur la coupelle avant que celle-ci ne soit séparée en deux parties. Une fois la coupelle en deux parties, le joint est coupé.
En ce qui concerne le porte-coupelle, un chanfrein à 5° est utilisé de manière à faciliter le montage de la coupelle et à comprimer le joint dans son insert.
Étape 9 : le résultat
Les tests pratiqués sur le second prototype ont confirmé toutes les suppositions évoquées pendant le développement du produit. Des taux de fuite extrêmement faibles ont été relevés (tableau II). Pour exemple, des tests ont été menés, au-delà de 20 bars, sur une garniture de diamètre 75, sans fuite visible.
Malgré la répétition des tests, ces chiffres se sont confirmés, et le taux de fuite n’a pas augmenté.
Le résultat est atteint (figure 4), et la garniture 100 % sécable, « génération Sectaflex » est née. Son aspect compact confirme un montage aisé. Son degré de technicité s’impose sur chacun de ses cinq composants et garantit ses performances.