Jusqu’à une époque récente, l’homme des zones climatiques tempérées négligeait cette manne tombée du ciel : les eaux de pluie. Si par hasard elles se collectaient dans un lac, dans un puits ou dans une rivière, il s’en servait à son gré, sans penser à l’avenir. Qu’elle devienne un jour rare, voire un élément de pollution, ne lui traversa jamais l’esprit.
Bien que le risque de pénurie soit compris depuis quelque temps, le risque de pollution par les eaux pluviales et de ruissellement n’a été pris en compte que très récemment. On a toujours pensé que ces eaux sont propres, ce qui est loin d’être le cas. Elles peuvent être aussi nocives que les eaux usées.
De plus, l’arrivée subite des eaux de pluie lors d’un fort orage engorge les canalisations et les stations d’épuration, et impose souvent le rejet sans traitement de l’excès dans les rivières.
Ce phénomène est aggravé par l’imperméabilisation des sols, surtout en milieu urbain. Les quantités importantes d’eau de pluie tombant sur des surfaces imperméables entraînent des polluants, comme des hydrocarbures, des métaux lourds et autres nuisances vers les collecteurs qui s’engorgent et débordent.
Plusieurs solutions sont proposées pour mieux gérer l’écoulement des eaux de ruissellement. Les chaussées poreuses ou les tranchées drainantes permettent une gestion « sur place » du problème, mais lorsque la perméabilité du terrain ne tolère pas ces solutions on fait recours au principe de la régulation du débit par moyen d’une rétention provisoire.
Il existe plusieurs types d’ouvrage capables de donner satisfaction : les réservoirs tampon d’orage en acier galvanisé, les ouvrages de stockage en béton, les noues, les chaussées réservoirs et les bassins de retenue. Ces derniers, souvent en air libre, sont pour la plupart étanchés par une géomembrane.
Un caoutchouc synthétique
Plusieurs matériaux d’étanchéité différents sont utilisés : PVC, PEHD, Polypropylène, Bitume ou l’EPDM.
L’EPDM a fait ses preuves depuis trente ans et plus. C’est un matériau léger, facile à poser, tout à fait écologique et sans danger pour l’environnement.
La première étanchéité en EPDM fut la toiture de l’aéroport O’Hare à Chicago, installée en 1965. Cette toiture est toujours en service à ce jour.
La signification de EPDM est Éthylène Propylène Diène Terpolymère. Le « M » est une classification américaine de polymères synthétiques, et ne veut pas dire monomère comme souvent il a été prétendu.
De l’éthylène, du polypropylène, des dérivés du pétrole et du gaz naturel sont mélangés avec un peu de diène, un hydrocarbure, pour former un caoutchouc synthétique. La molécule ainsi obtenue est très résistante aux rayons solaires, à la chaleur, à l’ozone et à l’humidité. Ces molécules sont vulcanisées et calandrées pour former de grandes feuilles capables de résister à un allongement de 450 %, sans modifier leur structure.
EPDM est le matériau de base auquel sont ajoutées différentes charges, comme le noir de carbone. Outre le fait que le noir de carbone rende le matériau noir, il crée l’ossature qui accroît la résistance mécanique de l’ensemble.
D’autres adjuvants, comme des huiles de paraffine, apportent de la résistance aux basses températures. Une feuille d’EPDM supportera facilement les changements de température rencontrés sous des conditions désertiques ou en montagne.
Une mise en œuvre aisée
Les membranes sont fabriquées en plusieurs dimensions jusqu’à 15,25 m × 61,00 m. Le point faible de toute membrane étant le joint entre deux feuilles, les grandes dimensions possibles avec l’EPDM réduisent le nombre de joints à réaliser sur un chantier. La pose est à la fois rapide et sûre.
La mise en œuvre d’une membrane EPDM, qui ne pèse que 1,3 kg/m², est des plus simples. Aucun engin de soudure ni groupe électrogène ni source de gaz n’est nécessaire. Les lés de membrane sont tout simplement collés.
Les lés adjacents sont disposés avec un recouvrement de 15 cm.
[Photo : EPDM posé sur la réserve d’eau d’alimentation de canons à neige, à Valmorel (73).]
[Photo : EPDM mis en œuvre sur les bassins de lagunage à Melle (79).]
Les surfaces à encoller sont dégraissées avec un solvant nettoyant spécial et une colle à base de butyle est appliquée. Un cordon de mastic est inséré et la feuille supérieure est ramenée de sorte que les parties encollées soient en contact sur toute la longueur du joint. Un coup de maroufleur, et c’est fini.
Un développement prometteur est l'utilisation de bandes auto-adhésives en butyle. L'épaisseur constante de la bande garantit un joint fiable. En outre la méthode écarte les solvants du chantier.
De la toiture au génie civil
Les membranes EPDM ont trouvé leur première utilisation en tant qu’étanchéité de toiture. Des dizaines de millions de mètres carrés de toits sont étanchés chaque année aux États-Unis et de par le monde.
Les mêmes qualités qui distinguent ces membranes en étanchéité de toiture font de l'EPDM une membrane idéale pour étancher les bassins de retenue d'eau.
Sa souplesse et son extrême élasticité (450 %) lui permettent d’épouser les formes des ouvrages d’assaissement comme bondes, regards d’arrivée d'eau, etc. Étant un élastomère la membrane est élastique, donc après allongement, revient à sa dimension d’origine. D’autres membranes sont des plastomères, et ne retrouvent pas leur forme originale.
Cette élasticité, combinée avec une résistance à la déchirure élevée, rend l’EPDM capable d’épouser facilement des aspérités que l’on peut trouver au fond ou dans les parois d’un bassin terrassé.
Sa stabilité dimensionnelle facilite sa mise en œuvre. D’autres membranes ont la fâcheuse habitude de changer de dimension lors d’un changement de température ou d’ensoleillement pendant la pose. En effet, la fourchette de température de service admissible d’une membrane EPDM va de –60 °C à +150 °C.
Sa résistance naturelle aux rayons ultraviolets et aux effets d’ozone fait d’elle une géomembrane idéale pour les bassins en altitude exposés au soleil. Les essais démontrent qu’une membrane EPDM soumise à 4 000 heures d’exposition aux U.V. à 80 °C ne montre aucune fissure ni craquelure. Même sous traction, elle résiste parfaitement aux effets de l’ozone.
Ces caractéristiques inhérentes aux molécules qui constituent l’EPDM lui confèrent une durée de vie exceptionnelle, d’au moins 50 ans.
Enfin, l'EPDM se répare facilement, comme la chambre à air d’un vélo. Il est tout à fait praticable de nettoyer une ancienne membrane et de coller une rustine découpée dans une nouvelle membrane EPDM.
Des utilisations variées
L’EPDM n’est pas inconnu en France, ayant été choisi par Eurodisney pour étancher son lac principal. Ce lac d’agrément couvre 120 000 m² au parc de loisirs de Marne-la-Vallée. Ayant satisfait le cahier des charges imposé par le bureau d’études français d’Eurodisney, l’EPDM était choisi principalement à cause de la grande dimension des membranes, qui réduisait ainsi le nombre de joints à faire in situ. De plus, le chantier, durant plus d’un an, nécessitait une membrane d’une grande stabilité dimensionnelle face aux changements de saison.
Mais les lacs d’agrément ne sont pas la seule destination des membranes EPDM. L’étanchéité des bassins de lagunage de finition de la station d’épuration de Melle (79) était réalisée en 1995 en EPDM.
La particularité de ces trois bassins d’une surface totale de 12 000 m² était la nature du sol argileux de faible portance. Compte tenu de celle-ci et de la construction d’une ceinture en murets anti-batillage, la membrane recherchée devait être élastique, pour combattre les tassements du sol et le poinçonnement des murets eux-mêmes.
Un bassin de baignade en eau de mer à Brétignolles-sur-Mer (85) exigeait une membrane capable d’épouser les nombreux ouvrages complexes de génie civil qui sont aménagés sur ce site de 20 000 m² avec ses quais en béton armé et épis en enrochement. Elle devait résister à l'eau de mer et être compatible avec la faune aquatique.
La résistance de l’EPDM au vieillissement sous l’effet des rayons ultraviolets n’était pas étrangère à la décision de mettre l’EPDM en œuvre pour étancher un bassin de fabrication de neige artificielle à Valmorel (73). Les contraintes mécaniques et climatiques sévères engendrées par la pression de l'eau stockée, la formation de glace et les variations de température exigeaient une membrane très performante. De plus, la simplicité du procédé d’assemblage permet des réparations aisées par un personnel non spécialisé.
La ZAC de Saint-André, à Marseille, s’étend sur 105 hectares. Une véritable ville avec 140 000 m² de surfaces com-
Commerciales, 5 000 places de parking, un lotissement de 20 000 m², 70 000 m² de bureaux et même un parc animalier de 400 000 m², la ZAC est construite sur une ancienne tuilerie. Le sol, remblayé sur 15 à 18 m il y a seulement 4/5 ans, serait à long terme très susceptible à des tassements. Pour étancher les bassins d’orage, le Bureau d’Études et le Maître d’Œuvre ont choisi une solution « sandwich ». À cause de sa grande souplesse et sa résistance à l’allongement, l’EPDM a été préféré pour créer la première couche d’étanchéité et pallier tout mouvement du terrain. Cette membrane souple est recouverte d’une couche drainante en gravillon. Par-dessus, il y a une deuxième membrane, en géocomposite à base de bentonite.
Pour ces mêmes qualités, l’EPDM est utilisé aussi pour étancher toutes les tranchées de canalisation d’eau potable, pluviale et usée de la ZAC.
Également résistant à la plupart des liquides agricoles, l’EPDM est largement employé pour créer des fosses à lisier, et entre ainsi dans la panoplie des solutions proposées pour lutter contre la pollution de la nappe phréatique. Plusieurs dizaines de fosses sont déjà en exploitation dans l’ouest de la France, la région la plus touchée par la pollution agricole.
Quant à son prix, l’EPDM est tout à fait abordable. Le plus souvent vendue posée par des entreprises spécialisées, une membrane d’étanchéité avec sa couche de protection en géotextile a un prix de revient entre 45 et 55 F le mètre carré. Tout dépend de la complexité de la forme du bassin et des particularités du chantier. À ce prix, ce matériau est très compétitif par rapport aux autres membranes que l’on peut trouver sur le marché.
Facilement recyclable, la membrane EPDM jouera, dans les années à venir, un rôle de plus en plus prépondérant dans le domaine de la conservation de l’eau.
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