Une eau dure, « calcaire », engendre des coûts directs, comme l'utilisation de produits anticalcaires, et réduit la durée de vie des équipements électroménagers. La majorité des consommateurs d'eau du robinet mécontents incriminent le calcaire. Ces consommateurs ont une perception dégradée de la qualité de l'eau du robinet et, plus globalement, de la qualité du service public. Pour pallier ces coûts et remédier à cette insatisfaction, il existe de multiples technologies de traitement. Elles permettent de traiter tous les types d'eau en s'insérant dans une nouvelle unité de traitement ou dans une filière existante qu'il faut renforcer.
Traiter l'eau pour distribuer une eau moins dure est un levier important à l’échelon local pour concilier les politiques sociale, économique et environnementale :
- du point de vue social, cela soulage financièrement les ménages modestes ;
- du point de vue économique, cela améliore la croissance par le renforcement du pouvoir d’achat ;
- du point de vue environnement, cela réduit la consommation des produits anticalcaires et leurs rejets, et améliore le bilan carbone...
Une eau de meilleure qualité est directement appréciée par tous les usagers et leur procure une sensation de confort et de bien-être. La distribution d’une eau équilibrée est un vecteur de communication important pour valoriser la politique de l’eau d'une collectivité locale.
Adoucissement
Les inconvénients d’une eau « dure »
Une eau dure, « calcaire », engendre des coûts directs, comme par exemple pour l'utilisation de produits anticalcaires, ou encore à cause d'une surconsommation de lessive, et réduit la durée de vie des équipements électroménagers. Utiliser une eau moins dure permet à chaque ménage de diminuer ses dépenses et de réaliser une économie substantielle.
Une eau dure, c'est en moyenne :
- - 120 € par an de coût supplémentaire pour un ménage de 3 personnes (produits ménagers, surconsommations d’énergie, vieillissement prématuré des équipements...);
- - 300 € par an d’eaux en bouteilles pour 2,5 fois plus de consommateurs qui ne boivent pas l’eau du robinet;
- - 2 fois plus de consommateurs insatisfaits;
- - 10 % de surconsommation d’énergie dans l'habitat (2 mm de calcaire engendre une perte de 15 % du rendement d’une résistance thermique);
- - 25 % de surconsommations de détergents et de produits d'hygiène corporelle;
- - 25 % de réduction de la durée de vie de l’électroménager de la maison.
La majorité des consommateurs d’eau du robinet mécontents incriminent le calcaire. À la question « Êtes-vous satisfait de l’eau du robinet pour la boire ? », 40 % des Français se disent insatisfaits et 22 % la trouvent « trop calcaire ». Ces consommateurs ont une perception dégradée de la qualité de l'eau du robinet et, plus globalement, de la qualité du service public.
Pour pallier ces coûts et remédier à cette insatisfaction, il existe de multiples technologies de traitement. Elles permettent de traiter tous les types d'eau en s'insérant dans une nouvelle unité de traitement ou dans une filière existante qu’il faut renforcer. Le traitement collectif de la dureté de l'eau représente un coût compris entre 0,10 et 0,30 €/m³ (selon les caractéristiques de l’eau à traiter), soit entre 12 et 36 € par an (comprenant l'investissement et l’exploitation) pour un ménage de 3 personnes.
À chaque territoire sa problématique
La qualité des eaux brutes servant de ressource pour la production d'eau potable est très hétérogène et dépend à la fois du sous-sol correspondant (donc de la zone géographique) et du type de ressource (eau de surface, eau souterraine...). D’un point de vue macroscopique, les départements du territoire n’ont donc pas tous la même problématique liée au calcaire.
Principe de base
Le potentiel de formation de calcaire dans l’eau dépend de la proportion des différents composés chimiques dissous qu'elle contient et qui peuvent réagir entre eux. On peut considérer l’existence simultanée de trois phases :
- - la phase gazeuse principalement constituée de gaz carbonique (CO₂);
- - la phase liquide où se déroulent toutes les réactions chimiques;
- - la phase solide constituée du dépôt qui se forme dans le cas des eaux entartrantes.
L’idéal est d'obtenir un équilibre du système formé par le carbonate de calcium (CaCO₃) susceptible de se déposer, du gaz carbonique (CO₂) et de l'eau (H₂O). On parle d’équilibre calco-carbonique.
Les procédés de décarbonatation centralisée
Le procédé de diminution de la dureté de l'eau est appelé « décarbonatation ». Il élimine la partie du calcaire excédentaire de l'eau distribuée. Le principe est d'accélérer et/ou de contrôler la formation de calcaire pour débarrasser l'eau de ses éléments indésirables, au sein même de l'usine de production d’eau potable, avant sa distribution. On parle alors de décarbonatation centralisée.
Les procédés utilisés pour le traitement du calcaire sont mis en œuvre sur les usines de traitement d'eau après un processus complet de sélection du plus adapté. Dans ce domaine d’activité, il n’y a pas une solution évidente. Chaque eau est un cas particulier qu'il faut appréhender en considérant tous les critères de choix.
Une eau dure peut être décarbonatée selon plusieurs types de procédés :
- - la décarbonatation chimique, soit par recirculation, soit catalytique;
- - la décarbonatation physico-chimique sur résines échangeuses d'ions;
- - la décarbonatation physique, soit par séparation membranaire, soit électrocatalytique.
Le choix du procédé sera fonction de la qualité d’eau brute, des objectifs de traitement à atteindre et des débouchés possibles des sous-produits.
La décarbonatation chimique
Ce procédé repose sur l’injection d'un réactif alcalin (chaux ou soude) au sein d’un réacteur pour un mélange optimum avec l’eau à traiter. Ce type de réactif élève le pH du milieu, ce qui déplace l’équilibre calco-carbonique et accélère la formation de précipité de CaCO₃. Le précipité est ensuite piégé dans l’enceinte du réacteur.
Réaction à la chaux :
Ca(OH)₂ + Ca(HCO₃)₂ → 2 CaCO₃ + 2 H₂O
Réaction à la soude :
2 NaOH + Ca(HCO₃)₂ → Na₂CO₃ + CaCO₃ + 2 H₂O
Ces réactions peuvent être accélérées par la recirculation de grains de calcaire dans le réacteur ou par apport d’un élément minéral qui serviront de support à la formation du précipité et en accéléreront sa formation ; ce sont des catalyseurs de la réaction.
Réacteur à recirculation : exemple du Densadeg®
Le Densadeg® est une technologie de Degrémont, spécialiste du traitement de l'eau de SUEZ ENVIRONNEMENT. C'est un décanteur à recirculation externe qui associe dans un seul ouvrage une décantation physico-chimique rapide (floculation optimisée + clarification en zone lamellaire) et un épaississement intégré.
L'eau brute (1) est introduite dans une zone de mélange rapide brassée mécaniquement (2) où le réactif alcalin est injecté pour initier la formation des cristaux de calcaire. Cette zone est constituée de deux chambres de coagulation en série pour pallier le risque de passages préférentiels et assurer une coagulation efficace.
L'eau circule ensuite dans une zone de floculation constituée de deux réacteurs en série : d'une part un réacteur agité mécaniquement par hélice à flux axial ascendant placée à l'intérieur d'une gaine (3), dans laquelle du polymère et une partie des carbonates recirculés sont injectés ; d’autre part, un réacteur à piston à courant ascensionnel (4) où la floculation se poursuit. Puis l'eau arrive dans la zone de décantation où les cristaux de calcaire agglomérés ont acquis une taille et une densité qui provoquent leur décantation. Ils se déposent dans le fond de l’ouvrage (5) pour former une masse qui s’épaissit.
L'eau partiellement clarifiée remonte vers des modules lamellaires (6) où la vitesse de Hazen* est réduite. Les lamelles inclinées et assemblées en nid d’abeille agissent comme une étape d’affinage piégeant les particules solides plus légères et moins denses qui n’ont pas encore décanté. L'uniformité des vitesses de passage empêche toute remontée locale. Dans cet ouvrage, la vitesse de décantation peut atteindre 40 m/h.
L'eau clarifiée est ensuite reprise par des goulottes (7) pour être dirigée vers l’étape de traitement suivante (8). La ligne de traitement est complétée par une étape de filtration sur sable nécessaire à l’élimination des matières en suspension résiduelles. Une partie des carbonates épaissis est recirculée (9) vers la zone de floculation pour favoriser et accélérer la germination des cristaux de calcaire et augmenter leur vitesse de décantation. La quantité en excès, appelée également « terre de décantation », est quant à elle évacuée (10) vers une autre ligne de traitement de l'usine.
Le Densadeg® est un réacteur de décarbonatation efficace même sur des eaux brutes de mauvaise qualité. Grâce à la densité des flocs formés, l’épaississement des carbonates est très rapide et supérieur à celui obtenu par les autres types de décanteurs. Les carbonates très concentrés du Densadeg® sont faciles à déshydrater. La conception modulaire et lamellaire du Densadeg® en fait un appareil stable en fonctionnement, facile à exploiter et compact. Il s'adapte à toutes les tailles de stations.
Réacteur catalytique : exemple du Gyrazur
Le Gyrazur est un réacteur de décarbonatation catalytique à lit fluidisé développé par les spécialistes du traitement de l’eau de SUEZ ENVIRONNEMENT.
* Vitesse de Hazen = vitesse ascensionnelle de l'eau. Elle doit être inférieure à la vitesse de décantation des particules pour leur dépôt sur l'eau. Plus le différentiel entre les deux vitesses est grand, plus le dépôt est rapide.
Flotation catalytique à lit fluidisé développée par les spécialistes du traitement de l'eau de SUEZ ENVIRONNEMENT. La décarbonatation se fait par précipitation chimique dans un réacteur contenant des billes ou grains de carbonate de calcium.
L'appareil est composé de l'empilement de trois cylindres métalliques (A-B-C) de diamètre croissant de la base au sommet. L'eau brute est introduite en partie basse du réacteur (1) dans ce qu'on appelle la chambre de mélange (A). Le réactif (lait de chaux) est également injecté dans la chambre de mélange (2) pour initier la formation de cristaux de « calcaire ». La précipitation peut alors se produire. Sans autre action ou additif, la précipitation est lente.
Dans le Gyrazur, la cinétique de précipitation est considérablement augmentée. Tout d'abord, l'eau à traiter et le réactif sont donc introduits dans la chambre de mélange qui est une zone agitée pour faciliter un mélange rapide. Le flux ascendant créé provoque un mouvement hélicoïdal (d'où le nom de l'appareil) optimisant encore plus le mélange qui est amené dans la zone de réaction (B). Des grains de sable d'environ 0,3 mm de diamètre sont injectés à ce niveau (3) pour constituer une masse de contact catalysante. En effet, le carbonate de calcium se fixe sur ces grains de sable. Par accumulation de précipité, ces grains grossissent et forment des billes qui restent en contact avec l'eau à traiter grâce à l'effet de fluidisation créé par le flux ascendant. La croissance des billes calciques les conduit à une taille critique de décantation. En arrivant en haut de l'appareil dans la zone dite de séparation (C), elles couleront vers le fond de l'appareil. Les vitesses de décantation peuvent atteindre 80 m/h. Au sommet de la zone de séparation, l'eau est collectée en tant qu'eau décarbonatée (4).
Les plus petites billes restent dans la zone de réaction. Les billes accumulées dans le fond sont extraites (5) régulièrement par bâchées. Les billes calciques ainsi formées sont constituées d'un précipité compact qui s’essorent rapidement et ne nécessitent pas de déshydratation avant leur réutilisation en industrie, en agriculture, ou en tant que remblai.
Le Gyrazur est un appareil de faible encombrement au sol, mais avec une hauteur importante. Tout comme pour les réacteurs à recirculation, la filière de traitement sera complétée par une étape de filtration sur sable pour l’élimination des matières en suspension résiduelles.
Très compact, le Gyrazur possède les avantages suivants :
- des coûts d'investissement et d'exploitation réduits ;
- une faible consommation énergétique ;
- la production de sous-produits valorisables.
La décarbonatation physico-chimique : les résines échangeuses d’ions
Les eaux naturelles contiennent entre autres, d'une part des sels alcalino-terreux de calcium et de magnésium très peu solubles, et d'autre part des sels d’hydrogénocarbonate de calcium et de magnésium instables qui ont tendance à précipiter sous forme solide. Ces deux formes chimiques contribuent à la constitution du tartre mais peuvent être éliminées par un traitement sur résines échangeuses d’ions.
Les résines échangeuses d’ions sont des substances granulaires insolubles comportant dans leur structure moléculaire des radicaux susceptibles d’échanger, sans modification de leur aspect physique et sans altération, les ions qui y sont fixés contre des ions de même charge se trouvant en solution dans le liquide à leur contact. Pour lutter contre le tartre, on distingue deux types de résines :
- les résines cationiques : résines ayant des ions sodium (Na⁺) fixés sur leurs radicaux ;
- les résines carboxyliques : résines à radicaux carboxyliques (R-COO⁻).
Dans le cas de l'utilisation des résines cationiques, on parle d’adoucissement. La résine échange ses ions sodium (Na⁺) contre les ions calcium (Ca²⁺) et magnésium (Mg²⁺) contenus dans l'eau à traiter. Les sels alcalino-terreux de calcium et de magnésium sont transformés en sels de
sodium parfaitement solubles suivant les réactions suivantes :
(R-Na)₂ + Ca²⁺ ⇔ R₂-Ca + 2 Na⁺ (R-Na)₂ + Mg²⁺ ⇔ R₂-Mg + 2 Na⁺
✓ Dans le cas des résines carboxyliques, on parle de décarbonatation. La résine échange ses ions (H⁺) contre les ions calcium (Ca²⁺) et magnésium (Mg²⁺) de l'eau à traiter. Les sels d’hydrogénocarbonate (HCO₃⁻) de calcium et de magnésium sont transformés suivant les réactions suivantes :
(R-COOH)₂ + Ca(HCO₃)₂ ⇔ (R-COO)₂Ca + 2 H₂CO₃ (R-COOH)₂ + Mg(HCO₃)₂ ⇔ (R-COO)₂Mg + 2 H₂CO₃
Les résines se présentent sous forme de billes d’environ 1 mm de diamètre. Elles possèdent un nombre défini de sites au niveau desquels elles peuvent échanger des ions. Une fois que tous les sites ont échangé leur ion, la résine est dite épuisée, il faut alors la régénérer. Les éluats de régénération doivent être traités, soit en centre adapté, soit sur la station de traitement des eaux usées la plus proche où ils seront injectés à débit régulé.
La décarbonatation par résines échangeuses d’ions est adaptée aux faibles débits. Elle est très simple d’exploitation et nécessite peu de maintenance.
La décarbonatation physique
Électrocatalyse : exemple de la technologie ERCA™
La technologie ERCA™ (« Électro-Réduction CArbonate de CAlcium ») élimine le pouvoir entartrant d’une eau par électro-décarbonatation. Le procédé consiste en une précipitation accélérée du carbonate de calcium (CaCO₃) au niveau d'une poly-électrode : des signaux électriques spécifiques provoquent une germination et une déshydratation du CaCO₃. Ce procédé est le seul permettant d’obtenir un abattement identique du THCa (Titre Hydrotimétrique calcique = teneur en calcium) et du TAC (Titre Alcalimétrique Complet = teneur en hydrogénocarbonates).
La mise en œuvre du procédé est réalisée au moyen d'un réacteur dans lequel sont placées des électrodes planes parcourues par un signal électrique basse tension (6 à 8 V). Le phénomène de l’électrolyse se réalise entre les anodes et les cathodes. Le calcaire germe sur ces dernières sous forme de cristaux amorphes peu adhérents. Sous l'influence de différents effets hydrauliques, le calcaire est décroché des cathodes et se dépose dans la partie basse du réacteur. Il est récupéré sans intervention humaine dans une benne filtrante, puis évacué de la station.
Les matériaux constituant les équipements sont de très haute qualité et semblables à ceux utilisés par l'industrie agro-alimentaire : inox 316 L pour les cathodes et le réacteur, titane revêtu d'iridium pour les anodes.
La noblesse de ces matériaux permet une durée de vie extrêmement longue et ne demande aucun entretien particulier.
Le procédé possède de nombreux avantages : - un fonctionnement entièrement automatisé qui s'adapte instantanément aux variations de débit et de qualité d’eau ; - une efficacité régulière et mesurable en continu ; - l'absence de réactifs chimiques et la simplicité du procédé réduisent les opérations d’exploitation ainsi que les mesures de sécurité à mettre en œuvre ; - le faible pourcentage de perte en ligne (environ 0,3 %) contribue à la préservation de la ressource ; - la qualité du « calcaire » produit en fait un sous-produit facilement valorisable.
sous-produit facilement valorisable.
Ce type de traitement est utilisé pour la décarbonatation des eaux potables notamment lorsque le traitement est spécifique et que les capacités de production restent modestes.
Séparation membranaire : nanofiltration ou osmose inverse basse pression
Une membrane de nanofiltration peut être assimilée à une cloison, une paroi, ou encore une barrière poreuse de très faible épaisseur capable, lorsqu’elle est interposée entre deux phases fluides, de contrôler le passage sélectif de matière (liquide, gaz, molécules, ions, ...) d'une phase vers l'autre. Les matières retenues pourront être des particules (vivantes ou inertes), des substances dissoutes (solutés), ou même des solvants (eau d’électrodialyse par exemple).
Le procédé de décarbonatation par nanofiltration peut être proposé sur les unités de production d’eau potable parce qu’il est particulièrement adapté aux eaux nécessitant un traitement de pollutions multiples (décarbonatation, traitement des micropolluants, des sulfates, des perchlorates, etc.). L’adoucissement par membrane de nanofiltration consiste à faire passer l'eau à travers une structure moléculaire semi-perméable caractérisée par un pouvoir de rétention des sels divalents (Ca²⁺, Mg²⁺ et SO₄²⁻ en particulier) supérieur à 90 %. Le principe de traitement est simple mais peut nécessiter un prétraitement pour préparer l'eau à la nanofiltration : l'eau à traiter sera préalablement affinée par un prétraitement conventionnel (clarification, filtration sur sable, ou encore filtration sur cartouche) qui dépendra de la qualité initiale.
Pour obtenir une eau traitée compatible avec les normes de distribution d’eau potable en termes de dureté, de pH et d’alcalinité, seule une fraction du débit total est traitée par nanofiltration. Cette fraction est ensuite mélangée à un flux de by-pass dans des proportions adaptées aux objectifs de distribution.