À l'heure actuelle, toutes les installations de désinfection UV en canal ouvert nécessitent un système de régulation du niveau de l'eau afin d’assurer une immersion permanente des lampes par le maintien d’une lame d'eau relativement constante au-dessus de ces dernières. Pour ces installations la fiabilité de la désinfection ne peut être assurée en permanence. En effet, des incidents de la régulation de niveau tant d’ordre mécanique que liés à l'automatisme sont fréquents et ce d’autant plus lorsqu’il existe une grande variation du débit à traiter en cours de journée. Ces incidents induisent des risques de détérioration des lampes par des arrêts-marche répétitifs, un échauffement possible des tubes quartz ainsi qu'une fluctuation importante de la tranche d’eau surmontant les lampes qui porte préjudice à la qualité de la désinfection.
Cette nouvelle configuration réactionnelle qui dispose les lampes verticalement et parallèlement au flux s'affranchit de tous les risques de dysfonctionnement possibles du système de régulation et assure de ce fait une grande fiabilité de la désinfection. D’autre part l’existence d'une zone d'irradiation à section fermée garantit une hydraulique optimisée gage d’une meilleure désinfection. En effet, l’écoulement très turbulent régnant dans la chambre réactionnelle de
[Photo : Principe de fonctionnement du procédé]
par les vitesses de passage élevées de l’effluent favorise l'homogénéité de l’irradiation des particules au sein de la masse liquide et de ce fait la qualité de la désinfection.
Caractéristiques fondamentales et avantages du procédé
L’effluent à désinfecter transite dans une ou plusieurs chambres réactionnelles disposées en série-parallèle au sein desquelles les lampes UV Wedeco Spectrotherm à haute énergie irradient la masse liquide en mouvement turbulent (figure 1).
Ce procédé est caractérisé par l’absence de système de régulation de niveau, la lame déversante en sortie de l'appareil assurant une immersion permanente des lampes. La zone d'irradiation possède une géométrie fixe, à contrario des installations actuelles, ce qui garantit un écoulement de type piston donc un temps d'irradiation équivalent pour chaque particule.
D’autre part, l’installation dispose d’un système de balayage automatique des gaines quartz qui évite de manière préventive la formation de dépôts adhérents et, par suite, la nécessité d’opérations de nettoyage manuel à l'aide d’une solution acide. L’installation de ce fait reste alors toujours opérationnelle.
Avantages du procédé
- fiabilité de fonctionnement de par la nouvelle configuration réactionnelle au sein de laquelle les lampes sont disposées de façon verticale et parallèle au flux ;
- hydraulique optimisée qui garantit une irradiation homogène des particules grâce à l’existence d'un flux piston et d’un régime turbulent ;
- emprise au sol limitée par rapport aux modules horizontaux, plus gourmands en longueur de canal.
- procédé modulaire où les lampes peuvent être disposées en réacteur unique, en série, en série-parallèle.
Résultats de l’étude pilote menée sur le site de la Ferté/Jouarre
L’étude a été menée sur le site de la station d’épuration de la Ferté/Jouarre (15 000 Eh) qui fonctionne selon le principe de l'aération prolongée. Cette installation reçoit majoritairement des effluents domestiques.
Le pilote a été installé en parallèle du canal de comptage en sortie de l'installation. Une pompe disposée dans le puits à eau épurée alimente le pilote à un débit variable de 10 à 80 m³/h.
Caractéristiques hydrauliques du réacteur UV
Il ressort des différents profils de vitesse effectués dans plusieurs sections du réacteur à l'aide d'une sonde électromagnétique (hors lampes en place) que l’écoulement est proche d'un flux piston.
Débit : 79,4 m³/h
Vitesse moyenne mesurée (Um) : 0,33 m/s
Écart type : 0,0179
Umin / Um : 0,90
Umax / Um : 1,07
Nombre de dispersion (d) : 0,054
Le nombre de Reynolds a été compris entre 15 000 et 33 000 pour les expériences réalisées avec une dose moyenne UV de 10 à 60 mW·s/cm².
Re = 4 * Rh * U / ν
avec
Rh : rayon hydraulique = surface mouillée / périmètre mouillé (m)
U : vitesse de l’effluent (m/s)
ν : viscosité cinématique (m²/s)
Rappelons que, pour se situer en régime turbulent, le nombre de Re doit être supérieur à 6 000. Le pilote UV a donc fonctionné dans des conditions hydrauliques satisfaisantes, à savoir un écoulement piston en régime turbulent.
[Photo : Schéma du pilote
Débit max 80 m³/h – 12 lampes de 33 W UVc unitaire en 2 rangées de 6 lampes – eau sortie clarificateur – eau désinfectée – lampes]
Tableau 1 : Caractéristiques physico-chimiques et bactériologiques de l’effluent de la Ferté/Jouarre avant désinfection
du 21/10/96 au 24/12/96
|
DCO mg O₂/l |
MES mg/l |
STnf UV 254 nm |
STf UV 254 nm |
Couleur mg Pt/Co |
CTT ufc/100 ml |
SF ufc/100 ml |
MAX |
145 |
13,7 |
63 |
70 |
144 |
2,70E+06 |
3,26E+05 |
MÉDIANE |
51 |
7,1 |
54,2 |
61,8 |
94 |
6,40E+05 |
1,05E+05 |
MOYENNE |
51 |
7,4 |
54,2 |
61,8 |
94 |
6,40E+05 |
1,05E+05 |
ÉTENDUE |
– |
– |
– |
– |
44 |
– |
– |
Notes :
DCO : NF T 90 101
MES : NF T 90 105
%Tnf : % transmittance UV sur échantillon non filtré, sur spectrophotomètre Secomam
%Tf : % transmittance UV sur échantillon filtré
Couleur : NF T 90 034
CTT : coliformes thermotolérants : NF T 90 414, exprimés en moyenne géométrique
SF : streptocoques fécaux : XP T 90 416, exprimés en moyenne géométrique
Tf = -0,1566 Co + 76,557R² = 0,66
[Photo : Figure 2 : Transmittance filtrée selon la couleur]
Tf-Tnf = 0,7792 MES + 2,0225R² = 0,79
[Photo : Figure 3 : Transmittance (Tf-Tnf) selon la teneur en MES]
L’effluent a présenté au cours de l’étude, comme le montre le pourcentage de transmittance moyen, une aptitude favorable à la désinfection. Les teneurs parfois élevées en DCO ont été le fait d’un apport de DCO soluble important et non d’un départ du floc.
Le pourcentage de transmittance aux UV d’un effluent est lié à sa teneur en matières en suspension d’une part et d’autre part à sa teneur en matières solubles. Le paramètre couleur, même s’il n’est pas parfait, rend assez bien compte de l’influence des composés solubles sur la transmittance de l’effluent, mesurée sur échantillon filtré (voir figure 2). À valeur de couleur identique, la dispersion des points est due à la présence de composés organiques qui absorbent plus ou moins à 254 nm. L’analyse conjointe des valeurs de DCO obtenues explique ces écarts.
La figure 3 montre l’impact des matières en suspension sur l’absorbance UV. Dans le cas présent, un accroissement de la teneur en MES de 1 mg/l génère une augmentation du pourcentage de transmittance de 0,78. Cette donnée permet d’appréhender, de manière approximative, l’influence d’une filtration tertiaire sur le gain de transmittance possible.
Rappel du calcul de la dose UV
Doseₐ = (PUVe/Sₐ) eᵏ (V/Q)
avec Doseₐ : dose UV reçue au point A (mW·s/cm²)
PUVe = puissance germicide de la lampe UV (mW)
Sₐ = surface du cylindre coaxial à la lampe et passant par le point A (cm²)
k = coefficient d’absorption des UV de l’eau à traiter (cm⁻¹)
Xₐ = distance du point irradié par rapport à la source (cm)
V = volume de la zone d’irradiation (l)
Q = débit de l’effluent à désinfecter (m³/s)
La dose moyenne a été calculée selon la PSS Method (Point Source Summation Method) qui part de l’hypothèse selon laquelle le réacteur est mélangé idéalement et l’écoulement de type piston.
La figure 4 présente la courbe de survie des coliformes thermotolérants et des streptocoques fécaux selon la dose moyenne UV appliquée. Les temps d’exposition sont compris entre 2 et 6 s. Ceci a été rendu possible en obturant jusqu’à 63 % de la surface des lampes. En effet, à 75 m³/h pour 45 % de transmittance UV, la dose moyenne reçue de 35 mW·s/cm² ne permettait pas d’apprécier les limites inférieures du pilote.
Un abattement de 3 Ulog est obtenu pour les CTT et les SF avec les doses moyennes respectives de seulement 20 et 25 mW·s/cm². Au-delà de 30 mW·s/cm², la majorité des germes libres ayant été irradiés, la courbe tend vers un plateau. Les germes résiduels sont alors pour la plupart ceux adsorbés aux matières en suspension.
Cette nouvelle configuration de réacteur nous a permis de respecter la norme guide du 8 décembre 1975, soit un nombre de
Tableau 2 : Essais de dopage en MES de l’effluent traité
DATE |
MES₁ (mg/l) |
MESS (mg/l) |
CTT₁ (ufc/100 ml) |
CTTS₁ (ufc/100 ml) |
SF₁ (ufc/100 ml) |
SFS₁ (ufc/100 ml) |
V 04/10/96 |
10 |
38 |
7,50E+05 |
8,00E+05 |
3,00E+05 |
1,00E+06 |
L 28/10/96 |
6 |
32 |
5,00E+05 |
4,10E+05 |
1,30E+05 |
1,66E+05 |
L 04/11/96 |
7 |
32 |
3,00E+05 |
3,70E+05 |
1,20E+05 |
1,30E+05 |
Me 11/12/96 |
5,3 |
53 |
1,60E+05 |
3,10E+05 |
4,00E+04 |
4,00E+04 |
MES₁ : matières en suspension avant dopage.
MESS : matières en suspension après dopage (dopage effectué à l’aide de la boue activée du bassin d’aération).
[Photo : Photo du pilote de la Ferté / Jouarre]
[Photo : Courbes d’abattement des CTT et des SF selon la dose UV appliquée.]
germes résiduels < 100 ufc/100 ml, avec une dose moyenne de seulement 25 mW·s/cm² pour une teneur en CTT et SF initiale comprise entre 3,1 E+04 et 2,7 E+06.
Influence des matières en suspension sur la désinfection
Comme le montrent les différents essais de dopage en MES de l’effluent traité, seul le dernier essai où la teneur en MES a été multipliée par 10 présente une légère augmentation de la teneur en germes. Ceci laisse donc à penser que la très grande majorité des germes est présente sous forme libre et non liée aux flocs.
D’autre part, à dose moyenne UV équivalente, les échantillons ayant une teneur en MES comprise entre 30 et 54 mg/l ont les mêmes abattements que ceux dont la teneur en MES est < 10 mg/l. Nous pensons que le rôle d’écran joué par les matières en suspension vis-à-vis des germes libres a sans doute été atténué par les bonnes conditions hydrauliques qui ont régné dans le réacteur lors de ces essais.
Tableau 3 : Caractéristiques des réacteurs
Débit (m³/h) |
Ganges 80 |
Vico-Coggia 125 |
Nombre de modules |
Ganges 1 |
Vico-Coggia 2 |
Nº de lampes/module |
Ganges 12 |
Vico-Coggia 8 |
Références actuelles
Le groupe SAUR a construit dernièrement deux installations qui disposent de ce nouveau type de réacteur UV. La station d’épuration de Ganges (Hérault) opérationnelle depuis mai 1998 et celle de Vico-Coggia (Corse du Sud) en service courant 1999. Les caractéristiques des deux réacteurs sont données dans le tableau 3.
Conclusions
L’étude a montré l’efficacité de cette nouvelle génération de réacteur UV vis-à-vis des germes étudiés.
La disposition originale des lampes au sein du réacteur améliore les caractéristiques hydrauliques de l’écoulement garantissant une irradiation plus homogène de l’eau à traiter.
Nous n’avons pas observé d’influence des MES dans la gamme de concentration étudiée sur le nombre de germes irradiés. D’autre part, la suppression du système de régulation de niveau fiabilise le fonctionnement de la désinfection et donc la régularité des résultats obtenus.
Une dose moyenne UV de 30 mW·s/cm² a permis d’obtenir 4 Ulog d’abattement sur les coliformes thermotolérants et 3,3 Ulog sur les entérocoques, ce qui se traduit par une teneur en germes résiduels < 100 ufc/100 ml (norme guide du 8 décembre 1975). La maintenance d’un tel réacteur est d’autre part grandement facilitée par le système vertical de balayage automatique des lampes.
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