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une application de techniques de traitement en évolution : l'eau dans l'industrie des boissons gazeuses

30 mai 1989 Paru dans le N°128 à la page 58 ( mots)
Rédigé par : Alain COUSIN et Françoise PETITPAIN

Alain COUSIN – Françoise PETITPAIN

Société Degrémont

L’eau donne lieu, dans les industries alimentaires, à de multiples utilisations :

  • — l’eau est un fluide de service : fluide de transport, fluide utilisé pour ses propriétés thermiques : production de vapeur, pasteurisation, refroidissement ;
  • — l’eau est un fluide de nettoyage employé dans toutes les usines.

Dans chacune de ces utilisations, on retrouve les traitements classiques, en fonction de l’origine de l’eau disponible :

  • — décantation-filtration d’eau de rivière,
  • — déminéralisation (partielle ou totale) de l’eau servant à l’alimentation des chaudières,
  • — adoucissement des eaux de lavage.

L’eau est une matière première

Une utilisation spécifique aux industries alimentaires doit retenir toute notre attention : l’eau en tant que composant à part entière du produit alimentaire final. Elle passe alors d’un rôle utilitaire à celui de matière première, et son traitement doit donc faire l’objet des plus grands soins : dans ce cas, en effet, l’eau devient un facteur de qualité tant organoleptique que bactériologique du produit final.

Il faut donc que les caractéristiques de l’eau soient conformes, d’une part, à la législation concernant l’eau destinée à la consommation humaine et, d’autre part, aux spécifications nécessitées par les fabrications.

L’eau, matière première dans l’industrie des boissons gazeuses

L’eau intervient pour diluer des concentrés utilisés dans la fabrication des boissons rafraîchissantes et pour le brassage dans la fabrication de la bière.

Il est reconnu depuis toujours en brasserie que la composition en sels minéraux de l’eau est responsable du caractère amer, moelleux ou sec d’une bière et influence donc directement le produit final.

Actuellement, une même boisson peut être fabriquée dans le monde entier (donc avec des eaux différentes), et le produit final doit être le même dans toutes les usines. Cette standardisation est le résultat de l’application de cahiers des charges très précis dans les différentes étapes de fabrication et notamment dans le traitement de l’eau (tableau 1).

Traditionnellement, l’étape principale du traitement des eaux dans ce type d’industrie consistait en une décarbonatation à la chaux accompagnée d’une chloration-déchloration sur charbon actif. Ce traitement, très efficace, pose néanmoins actuellement un certain nombre de problèmes :

  • — mise en œuvre de chaux,
  • — difficultés pour obtenir une conduite complètement automatisée,
  • — traitement des boues de décarbonatation,
  • — faible action du chlore à pH élevé,
  • — nécessité de procéder à des stérilisations périodiques des filtres déchloreurs,
  • — réduction du TAC sans modification de la teneur en chlorures, sulfates, nitrates (qui peut être souhaitée en brasserie par exemple).

Pour pallier ces inconvénients, nous avons conçu et réalisé des installations mettant en œuvre des techniques modernes de traitement, techniques qui entraîneront à terme une évolution du traitement de l’eau dans l’industrie des boissons, et que nous évoquons ci-après.

Décarbonatation sur résines échangeuses d’ions

De nouvelles résines échangeuses d’ions sont apparues récemment, et notamment une résine du type carboxylique dans la composition de laquelle n’intervient pas d’acrylonitrile, laquelle a obtenu l’agrément du ministère de la Solidarité, de la Santé et de la Protection sociale pour la production d’eau destinée à la consommation humaine.

En cycle de production, les cations liés au bicarbonate sont retenus par la résine ; lors de la régénération de la résine par un acide, ces cations sont remplacés par les ions H⁺ de l’acide. L’eau est ainsi décarbonatée par échange d’ions, ce qui permet de rem…

Tableau 1

Composition de l’eau Exemple d’une qualité d’eau standardisée pour la fabrication de soda Exemple d’une qualité d’eau standardisée en brasserie
NO₃ < 20 mg/l
Cl < 30 mg/l
SO₄ < 100 mg/l
TAC < 5 °F < 10 °F
pH 5 – 6

remplacer le traitement classique de décarbonatation à la chaux. Ce traitement est automatisable de façon très fiable.

L'eau décarbonatée est ensuite chlorée pour obtenir une qualité bactériologique satisfaisante, puis déchlorée, après stockage, sur charbon actif. Cette étape de déchloration permet également d’enlever les éventuels goûts et odeurs de l'eau.

Dans ce type d’installation, seule l'étape de décarbonatation a été modernisée alors que le traitement de désinfection reste du type traditionnel ; par contre, les traitements sur membranes d’osmose inverse permettent à la fois de réaliser une déminéralisation partielle de l'eau tout en assurant directement une bonne qualité bactériologique.

Traitement sur membranes : osmose inverse basse pression, microfiltration, ultrafiltration

L'osmose inverse est l'application de traitement sur membranes le plus développé actuellement. Elle permet d’obtenir une eau de bonne qualité bactériologique et organoleptique, tout en éliminant une grande partie des sels : l’eau traverse la membrane alors que les sels et les macromolécules organiques sont concentrés dans le rejet. De plus, ce type d'installation se conduit de façon automatique et occupe une surface au sol limitée.

Les membranes d’osmose les plus utilisées sont du type fibres creuses et composite spirale. Il existe aujourd’hui des membranes « basse pression » qui travaillent aux environs de 8-10 bars. Ces membranes présentent la particularité de réaliser un taux de rejet des ions bivalents plus élevé que celui des ions monovalents. Elles permettent en général de réduire la salinité de l'eau d’environ 80 %.

L'eau peut être reminéralisée sélectivement (adjonction de chlorures de calcium…) si nécessaire.

Comme pour tous les traitements par osmose inverse, il faut utiliser des eaux préalablement bien prétraitées (valeur de « Fouling Index » maximale à respecter).

L'application d'une pression de l’ordre de 10 bars limite à la fois l'investissement et le coût d’exploitation (environ 1 kW/m³ d’eau traitée) par rapport aux installations classiques d’osmose inverse pouvant fonctionner à 25-30 bars avec une eau de ville.

D’autres procédés de traitement sur membranes tels que la microfiltration et l'ultrafiltration sont également utilisables (dans le cas où une réduction de la salinité n'est pas nécessaire).

Dès aujourd'hui, dans le domaine des industries alimentaires, nous avons mis en application les évolutions récentes des techniques de fabrication de résines échangeuses d’ions et de membranes d'osmose inverse.

Deux exemples de réalisation en témoignent : — une installation de décarbonatation sur résine échangeuse d’ions d'un débit de 180 m³/h, dans la nouvelle usine de Coca-Cola Production SA à Bergues ; — une unité de traitement sur membranes d’osmose inverse à basse pression pour l’extension de l’usine de La Française de Brasserie à Mons-en-Barœul, d'un débit de 200 m³/h.

Ces installations permettent d’obtenir de façon fiable et automatisée des eaux standardisées de qualité constante tant au niveau physicochimique que bactériologique.

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