Cet article présente brièvement la programmation du système et décrit les différentes parties du programme.
Le nombre de Systèmes Experts utilisés en 1988 dans l'industrie chimique est d’environ une centaine, et de nombreux autres sont en cours de développement (1). Par contre, dans l'industrie du traitement de l'eau, les SE sont actuellement très peu employés pour le dimensionnement et le fonctionnement des usines et peu d’articles ont été écrits sur ce sujet. Néanmoins, une revue de la littérature par Gera et al. (2) présente six applications de l’intelligence artificielle dans ce domaine.
La fluctuation temporelle de la « qualité » de l’eau est un facteur important qui dépend de paramètres tels que température, précipitations et variations saisonnières ; or les conditions de fonctionnement d’une usine de traitement d’eau sont souvent changées manuellement par l’opérateur en fonction de son expérience : il existe donc un besoin significatif pour implémenter des SE qui prennent en compte ces variations.
L’ozone a été pendant longtemps principalement utilisé en tant que désinfectant et la conception des contacteurs d’ozone était généralement basée sur des règlements semi-empiriques tels que maintenir une concentration d’ozone dissous de 0,4 mg/l pendant un temps de contact de 4 minutes. Depuis il est reconnu que l’ozone possède d’autres propriétés, telles que réaction avec polluants toxiques, oxydation de la matière organique ou réduction des goûts et odeurs, ce qui induit de nouvelles bases de conception des unités d’ozonation.
Durant ces dix dernières années l’ozonation a été étudiée de manière approfondie par de nombreuses équipes de chercheurs et elle est en outre de plus en plus utilisée dans les usines d’eau potable ; il était donc intéressant de développer un SE intégrant cette connaissance et la restituant sous une forme conviviale. Le but de ce système est d’obtenir un logiciel utile à la fois pour le concepteur d’une nouvelle unité et l’opérateur d’une installation existante.
Le dimensionnement et les simulations de fonctionnement dépendent d’objectifs définis initialement et intègrent des concepts de génie des procédés et de cinétique chimique, aussi bien que des données de coûts d’investissement ou de fonctionnement.
Description du programme
Le point de départ du SE est basé sur le choix effectué entre deux options :
- — conception d'une nouvelle unité d’ozonation,
- — simulation de fonctionnement d'une installation existante.
Conception d'une nouvelle unité
L’organigramme général du SE est présenté sur la figure 1. La première étape est la détermination par l'utilisateur des objectifs à atteindre pour l’unité d’ozonation. Dans la version actuelle les choix possibles sont les suivants :
- — désinfection,
- — réduction de la couleur,
- — élimination de micropolluants spécifiques,
* Lyonnaise des Eaux.
** INSA, Toulouse.
[Photo : Fig. 1 : Configuration des Système Experts utilisés pour la conception des réacteurs d’ozonation.]
— réduction de la densité optique,
— applications spécifiques.
Une ou plus de ces applications peuvent être sélectionnées. Aux étapes suivantes, l’utilisateur est interrogé sur la qualité de l’eau à traiter. S’il ne connaît pas ces paramètres, une base de données permet de ressortir certains exemples obtenus sur des eaux de différentes qualités.
Afin de simuler les conditions opératoires et de les comparer entre elles, un ou plusieurs contacteurs peuvent être choisis dans la liste ci-dessus :
— colonne à bulles,
— tube en U,
— colonne-packing,
— turbine de Fringe,
— réacteur mécaniquement agité.
Pour chacun de ces réacteurs, un coefficient de transfert de matière moyen, k, la surface spécifique de transfert, a, et la rétention liquide, β, sont inclus dans la base de données. Une sélection est alors effectuée en calculant l’adéquation de chacun des réacteurs, suivant la méthode décrite par Brodard et coll. (3). Le critère de choix des réacteurs est basé sur l’utilisation du nombre de Hatta et du « nombre de réaction » R. Ces nombres sont calculés en utilisant la constante cinétique de la réaction de l’ozone avec un produit P.
Les dimensions (hauteur, volume, section) sont calculées d’après les spécifications de l’utilisateur, du débit de l’eau à traiter et du temps de contact. Chacune de ces valeurs peut être ensuite modifiée de façon interactive. La concentration en ozone dissous est calculée suivant les objectifs sélectionnés au départ, le pourcentage d’élimination désiré et le type de réacteur.
La simulation des conditions de fonctionnement est alors lancée pour indiquer la concentration d’ozone dans le gaz (entrée, sortie), l’efficacité de transfert et la concentration en ozone dissous pour différents débits gazeux. Pour cette simulation de fonctionnement des différents réacteurs, les bilans de matière sur l’ozone et le(s) composé(s) P sont utilisés. Le transfert gaz-liquide est modélisé par la théorie du double film. Les régimes hydrodynamiques des différents réacteurs (écoulement-piston, mélange parfait, écoulement non idéal…) sont aussi pris en compte (4).
Simulation de fonctionnement d’une unité existante
« Comment puis-je atteindre tel ou tel objectif et quel est le prix de revient ? »
Ce sont les questions clés que se pose le responsable d’une station de traitement existante. Les concepts et procédures de raisonnement sont identiques à ceux utilisés pour la partie conception de nouvelles unités. Les seules différences proviennent des contraintes dues à la taille des contacteurs et aux unités de production d’ozone.
L’ingénieur obtient un bilan économique et technique de son installation en fonction de l’objectif spécifique sélectionné à la première étape.
Conclusion
Ce Système Expert rend donc possible la conception d’une unité d’ozonation en utilisant des concepts provenant du génie chimique et en intégrant les différentes propriétés de l’ozone en fonction d’objectifs précis.
Un tel Système Expert permet d’homogénéiser la connaissance sur les principes d’ozonation et de sauvegarder l’expérience et la connaissance de manière ordonnée et facilement accessible.
C’est aussi un outil d’aide à la décision en cas de crise (ex. : pollution accidentelle).
Dans sa version finale, le système permettra aussi aux responsables de stations de traitement d’optimiser le fonctionnement de leur unité et constituera un excellent outil de formation du personnel.
BIBLIOGRAPHIE
1 — « Expert-systems — Thinking for the CPI », Chemical Engineering, p. 27, 14 mars 1988.
2 — A. Gera, A. Hopkins, A. Collins, S. Nix, T. Tsay, « The potential of knowledge based expert systems in water treatment plant operation », Proceedings 1988 Annual Conference, AWWA, Orlando (à paraître).
3 — E. Brodard, P. Kassem, M. Roustan, J.-P. Duguet, J. Mallevialle, « Basic Concepts in ozone contactor Design », Proceedings 1987 Annual Conference, AWWA, Kansas City.
4 — M. Roustan, J.-P. Duguet, B. Brette, E. Brodard, J. Mallevialle, « Mass balance analysis of ozone in conventional bubble contactors », Ozone Science and Engineering, vol. 9, p. 289-297 (1987).