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Un procédé de dépollution des fumées industrielles avec récupération d'énergie

30 avril 1993 Paru dans le N°163 à la page 55 ( mots)
Rédigé par : Jean-jacques ROUSSEAU et Guillaume DEMARET

Cet article montre comment le procédé Aquadepoleco permet de brûler les combustibles fossiles, en particulier les fiouls lourds, en récupérant l'énergie contenue dans les fumées tout en préservant l'environnement de la contamination des rejets aqueux et gazeux.

L’élaboration de ce procédé d’épuration des fumées industrielles avec récupération d’énergie est intervenue à la demande de la Compagnie Générale de Chauffe (Centre d’Arras) qui souhaitait maintenir son installation de combustion de fioul lourd établie en milieu urbain, compte tenu de la nécessité de préserver l’environnement altéré par les rejets de suies, de cendres et d’acides tels qu’acides sulfurique, sulfureux, chlorhydrique.

Nous rappellerons à ce sujet quelques notions de chimie.

Les combustibles fossiles

Les combustibles fossiles sont essentiellement constitués de carbone C, d’hydrogène H, de soufre S, d’oxygène O, d’azote N et de cendres ; citons à titre d’exemple la composition d’un fioul lourd :

C = 83 – 85 %
H = 11 – 13 %
S = 0,5 – 0,8 %
O = 1 %
N = 0,3 %

Après combustion, le poids des cendres ne dépasse pas 0,15 % du total.

Par comparaison, la composition du charbon se révèle plus polluante en matière de valeurs indicatives pour un charbon maigre ou une anthracite :

C ≃ 80 – 85 %, H ≃ 3,5 – 3,8 %, S ≃ 0,8 – 1,2 %, N ≃ 1,1 à 1,3 ; les cendres représentent 4 à 6 % en poids avec une dispersion beaucoup plus élevée que dans le cas de fiouls.

En ce qui concerne les gaz naturels, et suivant leur origine, les titres seront :

CH₄ ≃ 80 – 95 % ; C₂H₆ ≃ 3 % ; C₃H₈ ≃ 0,4 à 1,5 % ; C₄H₁₀ ≃ 0,2 à 0,6 % ; CO₂ ≃ 0,8 – 1,0 ; N₂ ≃ 1,0 à 14,0 % (% vol).

La combustion

La formule chimique gérant la combustion du fioul lourd s’établit comme suit :

CₙH₂ₙ₊₂ + (3n + 1)/2 O₂ → nCO₂ + (n + 1)H₂O

L’azote N et le soufre sont oxydés à un stade plus ou moins avancé et donnent NOx ou SOx. En ce qui concerne le soufre par exemple, celui-ci se retrouve sous forme de SO₂ (majoritaire ≃ 95 %) et de SO₃. Le SO₃, dès que le point de rosée est atteint (120 à 140 °C), se condense et génère une corrosion en zone froide par la formation d’acide sulfurique. Les cendres, qui peuvent contenir des métaux lourds tels que le nickel (Ni), le vanadium (V) et des composés sodiques et siliceux, se retrouvent essentiellement dans les fumées ou s’accrochent en zone chaude du générateur (par exemple : eutectiques vanado-sodiques sur les surchauffeurs).

Si des impératifs locaux l’exigent, un traitement complémentaire permet d’éliminer les sulfates résiduels.

L’installation

L’installation d’épuration des fumées élaborée par nos soins est placée à la sortie des gaz de combustion émis par une ou plusieurs chaudières classiques équipées de brûleurs traditionnels (utilisant aussi bien du fioul lourd que du charbon ou une alimentation mixte) : elle comporte essentiellement (figure 1) un condenseur-laveur dénommé Aquadepoleco*, comportant deux étages de récupération (haute température, basse température permettant la condensation) et un ensemble de traitement des condensats. Le condenseur-laveur est monté en dérivation sur les conduits de fumée. Un ventilateur aspire les fumées issues du générateur et les refoule dans un ensemble échangeur — condenseur — laveur. Les gaz de combustion sont lavés (élimination des acides forts, du SO₂, des suies et des cendres). L’eau de la combustion est condensée et rejetée après traitement en respectant les dispositions de 1953 (concernant pH, DCO et MES).

Le principe du condenseur-laveur, relativement simple, se définit comme suit :

• les fumées sont refroidies dans l’échangeur, à la fois par pulvérisation et par échange thermique (à haute température), et l’eau contenue dans les fumées est condensée dans le deuxième étage (à basse température) ;

* Procédé breveté par les sociétés Aquafrance et Equip’technic.

• parallèlement à l’échange thermique s’effectue la dépollution : les suies et cendres sont abattues par la pulvérisation et se retrouvent dans l’eau recueillie au fond du récupérateur. Le SO₂ est totalement neutralisé dès le premier contact avec la solution (réaction acide fort, base forte). Le SO₂ est quasiment éliminé (jusqu’à 98 % si nécessaire) ; il se retrouve dans l’eau de ruissellement sous forme de soufre (S), de sulfate (SO₄) et de composés plus ou moins fixés sur les matières en suspension générées par les cendres et les suies, une faible partie se présente sous forme de métabisulfite. La teneur en CO₂ est réduite de 10 à 20 %.

• la condensation entraîne le maintien d’un film d’eau sur les surfaces lisses de l’échangeur, ce qui permet, par lavage, de recueillir les suies, dont les particules de plus de 10 µm (qui représentent souvent 95 % des émissions) sont presque totalement éliminées, ainsi qu’environ 95 % des particules de taille inférieure à 5 µm (figure 2). Leur élimination, qui représente environ 2 kg par tonne de fioul, s’effectue sans nuisances, du fait de leur humidité et de ce qu’elles sont strictement ensachées pour être envoyées en décharge spécialisée.

[Photo : Fig. 1 : Schéma de principe de l'installation.]
[Photo : Fig. 2 : Efficacité de l'élimination des rejets de suies.]
[Photo : Fig. 3 : Efficacité de l'élimination SO₃/SO₂.]
[Photo : Fig. 4 : Rendement de la récupération d’énergie en fonction de la température de l’eau du condenseur.]

• L'eau de ruissellement est collectée au fond de l'échangeur puis reprise à l'aide d'une pompe ; une partie du débit assure l'homogénéisation du réceptacle, l'autre partie subit une floculation-décantation des matières en suspension ; la surverse est renvoyée dans un bac permettant son recyclage vers les pulvérisations après un traitement alcalinisant oxydant ;

• L'eau condensée en excédent (soit environ 1 m³ par tonne de fioul) est rejetée à l'égout en respectant les dispositions de l'arrêté du 6 juin 1953 concernant pH, DCO et MES. Si des impératifs locaux l'exigent, un traitement complémentaire permet d'éliminer les sulfates résiduels.

Élimination des rejets acides

L'Aquadepoleco utilise les réactions chimiques bien connues :

• L'utilisation de bases fortes permet une cinétique de réaction rapide et totale sur les acides forts, sulfurique (SO₃) et chlorhydrique (HCl) si le pH est maintenu légèrement alcalin ; la chimie de l'élimination du SO₃ est plus complexe et fait intervenir à la fois la pH-métrie et l'oxydoréduction. En fonction du pH de la solution recirculée, le rendement de la réaction peut atteindre 98 % (figure 3).

• Tout au long du traitement, des contrôles sont réalisés, de manière à maintenir le pH du rejet et une parfaite réaction sur les émissions gazeuses.

Cet équipement, qui n'impose aucune contre-pression supplémentaire aux brûleurs, peut être mis en service ou stoppé sans dérégler la combustion.

Récupération d'énergie

L'opération permet de récupérer une partie de l'énergie normalement perdue par les fumées grâce au sous-refroidissement et à la condensation. Le rendement de la combustion peut ainsi passer de 90 % à 106 % en fonction de la température de l'eau dans le condenseur (avec un gain d'énergie de 10 à 16 %). À cet effet, la température de l'eau à l'entrée du condenseur de basse température ne doit pas dépasser 55 °C (figure 4).

Conclusion

Le coût d'investissement de l'installation, qui reste relativement faible, même pour de basses puissances (60 à 70 KF par MW installé), décroît rapidement pour des puissances supérieures.

Le coût d'exploitation, de l'ordre de 0,01 par kW et % de soufre, comprend la fourniture du réactif alcalinisant oxydant, la main d'œuvre et l'entretien, qui permet la pérennité du matériel.

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