Depuis plus de dix ans, les Agences de l’Eau encouragent les collectivités locales à réaliser des diagnostics de leurs réseaux d’assainissement et de leurs systèmes d’épuration. L’objectif principal de ces missions est de détecter les anomalies structurelles et fonctionnelles importantes de ces réseaux (infiltrations d’eaux claires, sous-dimensionnements, effondrements, etc.), pour parvenir à une fiabilité accrue de ces systèmes et une meilleure protection des milieux récepteurs. Parallèlement à cette démarche de « diagnostic », ces études comprennent très souvent un volet consacré à la connaissance des réseaux. Cette phase de connaissance est parfois un préalable obligatoire aux missions de diagnostic, en l’absence de plans de réseaux à jour ou de récolements complets. Nous présentons ici un système de restitution informatique de cette connaissance, outil souvent mis en place à l’occasion de ces diagnostics compte tenu de la quantité d’informations recueillies.
La commune de Pantin a conduit récemment une étude diagnostic de ses réseaux d’assainissement. Cette étude comprend la constitution d’un dossier de récolement-gestion complet (une fiche descriptive pour chaque entité significative du réseau : regard de visite, branche de réseau et tronçon de réseau visitable), ainsi que la fourniture de ce dossier sous forme informatique de type « S.I.G. » (système d’information géographique).
Afin d’en permettre un usage aisé, la meilleure formule nous a semblé être l’adoption d’un système tournant sur micro-ordinateur classique de type PC (pouvant éventuellement être dédié à l’assainissement ce qui n’aurait pas été pensable dans le cas d’une station de travail). Le logiciel utilisé comme base est le S.I.G. MapInfo® pour Windows®, pour lequel BCEOM a élaboré un applicatif assainissement nommé T.I.G.R.A© (traitement d’informations géographiques pour la gestion des réseaux d’assainissement). Co-développé avec la société A.D.D.E. (distributeur exclusif de MapInfo® en France), cet applicatif répond à deux objectifs : d’une part faciliter la réalisation du dossier de récolement-gestion et d’autre part fournir aux services techniques des collectivités un puissant outil de gestion des ouvrages d’assainissement.
Dans le cas de Pantin, la constitution de l’outil complet s’est déroulée en deux étapes : la confection par un géomètre d’un fond de plan digitalisé d’une part (cadastre, facultatif mais permettant un déplacement plus aisé dans la ville lors des consultations graphiques et un habillement des sorties, figures 1 et 3), et la saisie des fiches de terrain dans la base de données d’autre part. C’est pendant cette dernière opération qu’un lien est créé entre les éléments de la base et les « objets graphiques » des différentes couches décrivant le réseau d’assainissement. La création de la base de données a été assurée par le responsable des levés de terrain, afin de permettre un nécessaire recoupement entre les fiches de terrain et une connaissance du fonctionnement complet du réseau. La description des ouvrages porte à la fois sur la connaissance physique du réseau et sur son état de santé. Les informations saisies sont donc de nature très variée : cotes X, Y, Z des tampons, adresse dans la rue, description des connexions en amont et aval, profondeur, état structurel du regard et des jonctions, présence d’indications sur le fonctionnement des réseaux (exemple : traces de mises en charge), etc. (figure 2 : l’écran 1 de la fiche regard). Après cette étape de saisie simple concernant exclusivement les ouvrages de visite, l’organisation du réseau est mise en place avec la création d’entités « tronçons », reliant deux regards déjà déclarés. Ces tronçons sont associés aux objets graphiques issus de la digitalisation, dont l’apparence finale est fonction des caractéristiques domaniales saisies.
À cet égard, signalons un des points importants de l’applicatif : toutes les tables de valeur interrogées lors de la saisie (exemples : liste des types de tampons rencontrés, couleur et épaisseur des réseaux communaux ou privés, séparatifs ou unitaires, etc.) sont modifiables et peuvent être enrichies en fonction du niveau de précision souhaité pour la base de données. Ainsi, à l’issue de l’étape de saisie des tronçons, la consultation des caractéristiques de tous les éléments de la base peut se faire à partir d’une interrogation graphique, en cliquant sur le regard ou sur le tronçon de réseau souhaité. À titre d’exemple, un « clic » sur une canalisation circulaire pourra faire
[Photo : Interface graphique à partir de laquelle la consultation par « clics » est possible.]
[Photo : Exemple d’écran de consultation / édition de T.I.G.R.A.]
[Photo : Exemple d'impression type : une fiche-regard]
apparaître des informations saisies : diamètre, matériau,…, ainsi que des informations calculées : longueur du tronçon, pente (tenant compte d’éventuelles chutes), débit maximum admissible en écoulement libre.
Enfin, une dernière étape de constitution de « fiches synoptiques » permet l'organisation à grande échelle du réseau, en définissant l’appartenance de tel tronçon à telle antenne de réseau, appartenant elle-même à tel bassin versant. C’est lors de cette étape qu’une numérotation logique des regards est instituée (sans occulter une éventuelle numérotation antérieure à l'étude, que la collectivité peut conserver), afin de permettre par la suite : d'une part la détermination aisée de l’exutoire final de tout regard, et d'autre part le traitement par bassin versant des impressions ou requêtes. L’impression « type » d'une fiche synoptique permet d’apprécier rapidement les caractéristiques topographiques des regards de visite la constituant, ainsi que de mettre en évidence les pentes des tronçons.
Dès l’achèvement du dossier de récolement en version « papier », l'outil complet [MapInfo® + T.I.G.R.A.© + Fond de plan + base de données] est prêt à être livré à la commune de Pantin, pour en commencer l’exploitation et la mise à jour.
Dans ce cadre d’exploitation, les fonctionnalités utilisées sont principalement les fonctions de modification, de consultation et d’impression des fiches de la base de données. Les opérations de mise à jour peuvent concerner plusieurs aspects : modification de cotes de tampons, suppression de défauts suite à travaux de réhabilitation, changement de type de tampon, etc.…
Parallèlement aux fonctionnalités de cet applicatif, dédiées à la mise en œuvre correcte de la base de données, et notamment à sa cohérence générale en ce qui concerne les connexions, l’utilisation des fonctions standards de MapInfo permet la réalisation de requêtes pouvant être très complexes. Par ailleurs, il sera très facilement possible de faire apparaître une carte mettant en évidence les éléments d’une requête, ce qui peut s’avérer très utile pour organiser la gestion des chantiers ou optimiser les tournées de contrôle.
Quelques exemples de requêtes simples : localisation des canalisations en grès, localisation des tronçons de diamètre ø 200 à ø 300 dont la pente est inférieure à 3 ‰, liste des regards où manquent des échelons,… On comprend aisément que les chantiers ainsi que les commandes de matériels peuvent être optimisés par l’utilisation de requêtes judicieuses, permettant la limitation des interventions. Par ailleurs, si la commune envisage l’informatisation d'autres sections de l’équipement urbain : autres réseaux, programme voirie, …, la superposition des couches de chaque section est tout à fait possible, et permet la pleine utilisation des fonctions S.I.G. classiques de gestion des projets et de programmation des travaux. Il est important de noter à ce sujet que MapInfo dispose de passerelles d’échange avec d'autres logiciels, aussi bien de type S.I.G. que de type « DAO » notamment avec le format DXF.
Conclusion
La réalisation de cet outil de gestion pour la commune de Pantin a duré plusieurs mois, entre le démarrage des opérations de terrain et la constitution de l’outil complet. Le résultat final est la mise à disposition de la commune d’un outil graphique synthétique (dont la place sur disque dur est d’environ 2 Mo — plus de 1300 regards — pour les données et 13 Mo pour le cadastre digitalisé), permettant le maintien permanent de plans à jour et l’optimisation de la programmation des travaux communaux.
Le S.I.G. choisi ici comme base de l’outil nous a montré sa capacité à manipuler de très nombreux éléments sur un PC de configuration classique, et son coût relativement réduit (moins de 30 KF pour la machine équipée de MapInfo) rend l’accès de cet outil accessible à de nombreuses communes qui ne souhaitent pas engager des budgets importants dans des systèmes trop lourds au niveau de l’exploitation. Le plus important dorénavant est de s’intéresser à la manière dont l’outil est géré au niveau de la commune : mise à jour, fréquence d'utilisation, afin d’envisager d’éventuelles fonctions complémentaires.