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Un nouveau procédé permettant de réduire le coût du traitement et le volume des boues d'hydroxydes métalliques

30 janvier 1991 Paru dans le N°142 à la page 65 ( mots)
Rédigé par : Didier PASCAL

Le centre de Tredi Hombourg, à proximité de Mulhouse, traite annuellement 30 000 à 35 000 tonnes de déchets industriels de nature minérale, issus essentiellement des ateliers de traitements de surface : acides, bases, solutions chromiques et cyanurées. Les effluents sont, en phase finale, neutralisés au lait de chaux avant d’être transférés dans un décanteur. Les boues sont ensuite soutirées et passent sur un filtre à vide pour être enfin stockées dans une lagune contiguë à l’usine. Une tonne d’effluents génère ainsi 400 à 500 kg de boues, suivant sa teneur en métaux lourds. Compte tenu des difficultés potentielles s’opposant à l’accroissement de la capacité de la lagune actuelle, différentes solutions ont été étudiées, afin de revaloriser une partie des métaux contenus dans les boues et de diminuer leur volume.

C’est dans ce cadre qu’a été mis au point sur le site un procédé de densification des boues, qui, après une phase d’essais sur boucle-pilote, a été installé et fonctionne depuis octobre 1989. À la suite des résultats très encourageants obtenus sur ce centre, il a été décidé d’équiper également les unités de traitement d’eau issues du lavage des gaz des fours d’incinération de déchets industriels de Salaise II et de Saint-Vulbas.

Le procédé

Le procédé de densification des boues est une technique de neutralisation et de précipitation des métaux qui permet de diminuer le volume des boues produites et d’abréger le temps nécessaire à leur filtration. Il peut, tout à la fois, s’adapter sur une installation nouvelle ou sur des ouvrages existants, et consiste à recycler une partie de la boue du décanteur pour la mélanger avec l’alcalin (chaux, soude, calcaire…) avant la neutralisation de l’effluent.

Le fait de mélanger le réactif alcalin aux boues recyclées a pour conséquence l’adsorption de celui-ci à la surface des particules solides. Lorsque ce mélange est ajouté à l’effluent à traiter, les réactions de neutralisation des acides puis de précipitation des métaux se produisent à la surface des particules de boue, permettant aux hydroxydes et aux précipités de s’y intégrer en croissant par couches successives. Les particules solides en résultant possèdent une énergie de surface beaucoup plus faible, et, de ce fait, moins de molécules d’eau s’y agrègent. En raison de l’effet tampon des boues et de la meilleure utilisation de l’alcalin, le contrôle du pH s’avère plus aisé que dans un système traditionnel, et les réactions de précipitation se déroulent en général à une unité de pH en dessous de leur valeur habituelle.

Les figures 1 et 2 permettent de comparer le procédé de neutralisation classique avec le nouveau procédé de densification des boues.

Historique du procédé

Développé à l’origine par la société Bethlehem Steel pour traiter des eaux d’exhaure de mines contenant principalement du fer et du manganèse, le procédé de densification des boues (dénommé HDS aux États-Unis) a ensuite été appliqué sur des effluents divers provenant d’usines métallurgiques, d’ateliers de traitement de surface et d’unités de lavage de gaz, dans lesquels on pouvait rencontrer chrome, plomb, zinc, nickel, cadmium, cuivre etc. à des concentrations variées. Une vingtaine d’applications existent aux USA, d’autres ont été réalisées en Espagne, en Afrique du Sud, et au Canada, avant diffusion du procédé en Europe et en Afrique francophone.

Centre de traitement de déchets de Hombourg

Les essais-pilotes pratiqués à Hombourg ont été conduits sur une boucle

[Photo : Fig. 1 : Schéma du procédé de neutralisation classique.]

Composée d’un décanteur muni d’un racleur, de trois bacs agités permettant de fabriquer le lait de chaux, de le mélanger avec les boues recyclées puis avec l’effluent à traiter.

Les boues obtenues ont été caractérisées en laboratoire, après filtration sur Büchner. Pour chaque effluent, deux essais ont été réalisés : le premier avec le procédé classique (neutralisation simple), le deuxième avec le procédé de densification des boues.

Les caractéristiques des effluents étudiés sont portées sur le tableau I.

[Photo : Fig. 2 : Schéma du procédé de densification des boues.]

Analyse des résultats

Les caractéristiques de la boue à la sortie du décanteur et du gâteau de filtration sont portées sur le tableau II.

Ces résultats montrent qu’avec le procédé de densification des boues :

  • la densité du gâteau augmente de 1,09 à 1,33 ;
  • la boue est plus sèche, la siccité passant de 23 % à 47,5 % ;
  • la concentration en matières sèches augmente de 0,24 à 0,62 g/cm³ (soit un volume des boues réduit, pour une même quantité de matières sèches, par un coefficient de 2,6).

Application industrielle

Compte tenu de l’intérêt présenté par ces premiers essais, l’installation de Hombourg a été modifiée. D’ores et déjà, les résultats obtenus durant les premiers mois d’exploitation sont très significatifs, comme le montrent les valeurs des différents paramètres :

Tableau I Caractéristiques des effluents étudiés

Type d’effluent1234
SO4²⁻ (g/l)64,52,318,6
PO4³⁻ (mg/l)322
Cl⁻ (mg/l)253
Fe (mg/l)4 70087 00031,8
Zn (mg/l)6031 00013,612
Cr (mg/l)8 00051281 600
Ni (mg/l)17734,61,5
Cd (mg/l)30,23400
Pb (mg/l)
Cu (mg/l)13016011575
Consommation alcalin (g/l)41,42154544
g solides/litre d’effluent97,229220,666,4

Nota : L’effluent (3) provient de la régénération de résines échangeuses d’ions, l’effluent (4) est un effluent-type traité à Hombourg.

Tableau II Caractéristiques de la boue et du gâteau de filtration

Gâteau de filtration

Neutralisation classique / Densification des boues

Type d’effluentDensité (NC)Siccité (a) (NC)Masse de MS par volume (g/cm³) (NC)Densité (DB)Siccité (a) (DB)Masse de MS par volume (g/cm³) (DB)
11,03270,281,4680,9
21,02260,271,2380,46
31,23190,231,4410,6
41,08180,191,3430,5
Moyenne1,09230,241,3347,50,62

Nota : MS = matières sèches ; (a) : masse de MS/masse de boue correspondante.

[Photo : Hombourg. Les cuves de stockage des déchets.]
  • • pH de neutralisation : 9 au lieu de 10 précédemment.
  • • Consommation de chaux : réduite de 20 %.
  • • Concentration des métaux dans les rejets : 4,2 mg/l (très en dessous de la norme imposée : 15 mg/l).
  • • Boues obtenues au sortir du décanteur : densité 1,12 — siccité 17 %.
  • • Gâteau obtenu après filtration sous vide : densité 1,35 — siccité 42 %.
  • • Résultats obtenus en laboratoire après neutralisation traditionnelle et filtration sous vide (échantillon n° 4) : densité 1,08 % — siccité 18 %.
[Photo : Décanteur (Hombourg).]

L’application du procédé de densification des boues a donc d’ores et déjà permis d’obtenir des résultats appréciables :

  • • diminution du pH de neutralisation d’une unité sans affecter la qualité des rejets,
  • • accroissement de 24 % de la siccité des boues, en réduisant leur volume par un coefficient de 2,9 et leur poids par 2,3,
  • • réduction de 20 % de la consommation de chaux.

À la suite de ces premiers résultats, il a été décidé d’entreprendre de nouveaux essais afin d’améliorer encore le procédé et de se rapprocher un peu plus des valeurs moyennes obtenues durant les tests (siccité 47,5 % après filtration).

[Photo : Hombourg. Local de traitement des boues avec filtre à vide.]
[Photo : Saint-Vulbas. Unité de lavage des gaz.]

D’autre part, les nouvelles applications sur les unités de traitement d’eau issues du lavage des gaz des fours d’incinération de déchets industriels de Saint-Vulbas et de Salaise II démarreront l’année prochaine, ce qui fera l’objet d’un prochain article.

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