Quand les premières stations d’épuration municipales furent construites en Europe, dans les années 1920-1930, elles étaient habituellement équipées de grilles à nettoyage manuel dont le but était de retenir les solides les plus gros qui ne pouvaient être éliminés autrement ou étaient nuisibles aux équipements situés en aval ainsi qu’à l’efficacité des traitements. On parlait alors de prégrilles, pour celles dont les barreaux étaient écartés de 40 à 100 mm, et de grilles moyennes pour les écartements de 10 à 30 mm.
Compte tenu du type de déchets présents dans les eaux brutes durant les premières décades de fonctionnement des stations d’épuration, ce type de grilles était bien adapté et, dans l’ensemble, fonctionnait de façon satisfaisante. Le volume de matières dégrillées était de l’ordre de 2 à 5 l par équivalent-habitant et par an, avec une siccité d’environ 10 %.
L’analyse des quantités et de la composition des déchets transportés dans les eaux usées montre que leur volume par habitant a presque doublé durant les années 70 et qu’ils contiennent de plus en plus de fibres et de matières plastiques. L’utilisation accrue d’articles sanitaires jetables est à l’origine de cette augmentation rapide, laquelle est cause de perturbations, voire de dysfonctionnements des stations d’épuration. Il est donc devenu essentiel d’augmenter le taux de séparation, ce qui ne peut être obtenu qu’en réduisant l’écartement entre les barreaux des grilles. La tendance pendant la dernière décennie a donc été d’installer des grilles fines et des macrotamis avec des fentes de 5 à 15 mm pour les premières et des orifices de 0,5 à 5 mm pour les derniers.
Les machines de ce type, introduites sur le marché au cours des années 70, nécessitaient des conditions de fonctionnement précises et toute variation par rapport à ces situations provoquait des perturbations. D’autre part, les macrotamis à tambour requièrent en général une alimentation par pompage, ce qui accroît le coût de l’installation. Par ailleurs, ils sont assez sensibles aux matières grasses, surtout dans les climats froids. Une autre solution, depuis plusieurs années, a consisté en l’installation de macrotamis à chaînes, ou grilles très fines, qui existent en plusieurs versions. Avec ce type de dégrilleur fin, l’eau doit traverser deux fois la surface filtrante, ce qui, à perte de charge donnée, réduit considérablement le débit. De plus, ces grilles contiennent fréquemment des éléments en matières synthétiques qui sont combinés pour former la surface mobile de la grille. Les frais de maintenance des dégrilleurs de ce type ont tendance à augmenter quand ces composants, et d’autres pièces d’usure en contact avec le liquide, doivent être remplacés.
LA GRILLE EN ESCALIER : STEP-SCREEN
Pour éviter ces inconvénients, nous avons décidé, au début des années 80, de développer un nouveau modèle de dégrilleur fin, en visant les objectifs suivants :
- — former une unité compacte pouvant être installée dans les chenaux existants,
- — être réalisable avec des fentes comprises entre 1 et 6 mm,
- — avoir une capacité importante, tant en liquide traité qu’en rétention de déchets,
- — être utilisable dans les eaux usées municipales ainsi qu’industrielles,
- — posséder d’excellentes caractéristiques d’auto-nettoyage,
- — être insensible aux huiles et aux graisses,
- — représenter des coûts d’installation et d’entretien faibles,
- — retenir des quantités importantes de matières non-organiques, par rapport aux grilles traditionnelles,
- — permettre des modes de régulation adaptables à chaque situation.
Le dégrilleur fin mis au point à la suite de nos études et dénommé Step-Screen répond à la plupart de ces exigences.
Description
Au lieu d’une bande transporteuse continue, la grille comprend deux groupes de lames en forme d’escalier, l’un fixe et l’autre mobile. Ensemble, ces deux groupes forment la grille, qui est placée directement dans le chenal (figures 1 et 2), où les eaux coulent gravitairement sans qu’un système de relevage ne soit nécessaire. Une lame sur deux est reliée à l’ensemble formant la grille mobile qui effectue un mouvement circulaire. L’entraînement est assuré par un moteur électrique, un réducteur et quatre roues excentriques.
Le mécanisme d’entraînement, situé sur le dessus de l’unité, est facilement accessible ; les éléments de transmission et les pièces d’usure sont hors d’eau et, comme la surface de séparation et de transport des refus ne se déplace que dans une direction, il n’y a pas de risques que des solides se mettent dans le chemin de retour de pièces mobiles de la grille et entravent leur trajectoire.
Le mouvement est transmis du moto-réducteur par des chaînes et des roues à quatre tourillons excentrés, ce qui permet au déplacement des lames mobiles d’être totalement synchronisé. Les arbres d’entraînement sont équipés de con-
Fonctionnement
Les particules solides, apportées par les eaux usées, qui ne passent pas au travers des fentes formées par les lames, sont retenues par les « escaliers » sur les lames mobiles, qui, par leur mouvement circulaire, les font monter marche par marche le long de l’escalier fixe jusqu’à ce qu’elles soient extraites des eaux et transportées sur la zone de la grille située au-dessus du niveau liquide.
La reprise des déchets, qui s’effectue toujours marche par marche, provoque alors un égouttage tel, que l’on obtient fréquemment des siccités de 10 à 15 %. Les refus sont ainsi conduits jusque sur la partie supérieure du groupe de lames fixes d’où ils sont normalement poussés dans la trémie d’une presse-transporteuse (figure 2). Celle-ci est constituée par un compacteur à piston hydraulique qui déshydrate, comprime et transporte les déchets par un tube de convoyage vers un conteneur ouvert ou fermé (figure 2) qui peut être équipé d’un ensachage en continu éliminant odeurs et pollutions diverses.
Le remplacement des grilles traditionnelles par des Step-Screen procure habituellement les avantages suivants :
- — beaucoup plus de solides étant retenus, le fonctionnement de la station en aval est amélioré ;
- — réduction des quantités de matières décantées,
- — boues plus homogènes et donc plus facilement traitables ;
- — installation simplifiée nécessitant moins de place,
- — réduction des frais d’entretien.
Dimensionnement — Capacité — Régulation
Le modèle de grille est déterminé en fonction de la profondeur du chenal et de la hauteur du point de rejet. Sa largeur est calculée à l’aide des graphes et relations de la figure 3, dans lesquelles on a :
- H₁ = hauteur d’eau en amont (mm)
- H₂ = hauteur d’eau en aval (mm)
- ΔH = charge d’eau disponible (mm) (ΔH = H₁ − H₂)
- B = largeur de la grille (mm)
- t = épaisseur des lames (mm) (habituellement 3 mm)
- s = taille des fentes (mm) (entre 1 et 6)
- Q = capacité (m³/h)
- V = vitesse fictive entre les lames, dépendant de ΔH
La capacité élevée de l’appareil est la conséquence des éléments suivants :
- — les déchets n’ont jamais la possibilité d’obturer les ouvertures de la surface filtrante : à chaque mouvement circulaire du groupe de lames mobiles, les fentes sont débarrassées des refus et l’eau peut passer entre les lames. Les propriétés d’auto-nettoyage de cette grille sont excellentes : non seulement elle est incolmatable, mais en plus elle est très vite libérée des solides qu’elle retient,
- — la grille en forme d’escalier offre une surface utile égale à 1/2 fois celle d’un dégrilleur oblique, plan, soit une augmentation relative de surface de filtration d’environ 40 %.
La vitesse de rotation de la Step-Screen est de 30 t/m, ce qui confère aux déchets une vitesse verticale le long de la grille de 2,6 m/mn. Le débit des solides qui sont ainsi extraits du liquide est fonction de l’épaisseur des refus sur la grille ; il est donné par le tableau pour une grille de 1 m de large, en fonctionnement continu.
Tableau : Capacité d’extraction des déchets
Épaisseur de refus sur la grille (mm) | 1 | 3 | 5 | 10 | 20 | 50 |
---|---|---|---|---|---|---|
Débit horaire d’extraction (l/h) | 156 | 468 | 780 | 1560 | 3120 | 7800 |
La hauteur d’eau en amont varie, pour une installation donnée, avec le débit et l’épaisseur des déchets qui se trouvent sur la grille. Le meilleur mode de régulation du fonctionnement d’une Step-Screen est donc par détection du niveau amont. Au débit de pointe, la grille fonctionne en continu. Sa capacité d’extraction des refus, pour une épaisseur de 3 mm, étant, du moins pour les eaux brutes urbaines, supérieure à la quantité de solides entrants (c’est-à-dire à leur concentration multipliée par le débit d’eaux usées), le débit admissible par la grille n’est pas affecté par les déchets. Quand le débit baisse, la grille fonctionne de façon discontinue. Il se forme un matelas sur la grille qui réduit le débit traversier ; pour une couche de 5 cm d’épaisseur, le débit réel à travers la grille est d’environ la moitié du débit théorique admissible (coefficient correctif = 0,5). Ceci entraîne deux conséquences bénéfiques :
- — une économie d’énergie : sur des eaux urbaines, en dehors des heures de pointe, la grille peut ne fonctionner que 10 % du temps, soit environ une rotation toutes les 20 secondes ; à chaque rotation, les solides retenus par une contre-marche sont portés sur le degré supérieur,
- — la rétention de particules beaucoup plus fines que les fentes et le piégeage de graisses et de sables, grâce au matelas qui se forme sur la grille.
Dans les applications industrielles, il est parfois nécessaire d’appliquer au débit traversier un coefficient correctif qui tienne compte de la concentration en solides. Cela est surtout vrai si l’on souhaite traiter des matières flottables et/ou décantables qui justifient la définition d’une couche de solides d’épaisseur pré-déterminée, constamment présents en surface de la grille. D’autres modes de régulation peuvent alors être adoptés, tels que horloge et minuterie, et une presse située immédiatement en aval du système permettra de réduire le volume des solides qui auront été séparés en quantités importantes.
Grâce à ces différents modes de régulation, de très bons résultats ont été obtenus sur des effluents aussi variés que boues primaires, eaux brutes urbaines, matières de vidange, eaux usées d’abattoirs, de blanchisseries, de tanneries, etc.
Analyse d’une installation
Durant les six premiers mois de cette année, un grand nombre de dégrilleurs fins de ce modèle ont été mis en place sur des stations d’épuration de 1 500 à 30 000 équivalents-habitants, les nouvelles installations étant toutes combinées à des presses.
L’une de ces machines est placée à la station de traitement des eaux usées de la ville de Tidaholm en Suède, dimensionnée pour 15 000 éq.-hab., dont le débit moyen est de 440 m³/h et le débit de pointe de 880 m³/h. L’ancienne grille, comportant des espacements entre barreaux de 15 mm, a été remplacée par une Step-Screen du modèle 2200 de 700 mm de largeur avec des fentes de 3 mm. Celle-ci est dotée d’un détecteur de niveau réglant l’automatisme du fonctionnement, grâce auquel, lorsque la surface de la grille est couverte de déchets, le niveau amont monte et la grille est mise en route.
La grille n’effectue qu’un cycle par démarrage, ce qui garantit le maintien d’un matelas de refus à sa surface, lequel permet de retenir de nombreuses particules beaucoup plus fines que les fentes, ce phénomène est amplifié par le fait que l’eau traverse très lentement la grille (le différentiel de charge amont-aval est en général de 20 à 30 mm) ;
Après six mois de fonctionnement, nous avons effectué les constatations suivantes :
- — la quantité de refus retenus a augmenté de 250 %,
- — tous les problèmes d’obstruction des pompes, aérateurs et autres équipements sur la station ont été éliminés grâce à la finesse des fentes,
- — l’ensemble compact que forment la Step-Screen et la presse a permis d’isoler facilement ces machines et d’effectuer une extraction forcée de l’air vicié,
- — grâce à la régulation optimisée par détecteur de niveau, qui permet la création d’un matelas fibreux sur la grille, la Step-Screen a pu retenir beaucoup de sables : le volume de sables déposés dans le dessableur est ainsi réduit de 70 %.