Le Pulsator a été pendant de longues années, et reste encore dans de nombreux pays, l’appareil le plus utilisé : on peut rappeler que, à chaque heure qui s’écoule, plus d’un million de mètres cubes d’eau est traité par un décanteur de type Pulsator. Le lit de boue augmente la concentration en matière floculée de la zone de floculation, ce qui multiplie la probabilité de rencontre entre les particules coagulées, et favorise le grossissement du floc.
Le développement systématique de l’utilisation de la décantation lamellaire (ou tubulaire) a ensuite été la caractéristique des techniques de sédimentation. Les modules lamellaires sont, en général, installés dans la partie supérieure de la zone de clarification, ce qui permet d’augmenter artificiellement la vitesse de décantation (selon Hazen) et d’aboutir à deux résultats :
— augmentation du débit traité par un appareil donné à surface constante (ou réduction de la surface nécessaire pour traiter un débit donné),
— amélioration de la qualité de l’eau clarifiée.
Le tableau 1 donne les principales familles de décanteurs développés par Degrémont, et leurs principales caractéristiques en clarification d’eau (eau potable ou eau de procédé).
Pourquoi un nouveau décanteur ?
Les exigences des exploitants d’installations de traitement d’eau potable, ou d’eau de procédé, évoluent dans le temps et deviennent de plus en plus sévères. Elles sont de plusieurs natures :
— exigences économiques : on recherche une réduction des coûts d’investissements. Les installations doivent être compactes. Ceci implique des volumes construits réduits (béton, équipement), avec des surfaces occupées au sol qui soient les plus faibles possible, tout particulièrement dans les zones urbanisées. Les coûts d’exploitation doivent être optimisés. On a donc cherché un décanteur capable de réduire les taux de traitement en réactif de clarification ;
— souplesse d’emploi : l’automatisation croissante des installations de traitement, qui va de pair avec une réduction de la main-d’œuvre affectée à l’exploitation, conduit à un appareil de décantation de plus en plus fiable, à grande souplesse de fonctionnement, et qui soit le moins sensible possible aux variations de la qualité des eaux brutes à traiter d’une part, et de la demande en eau traitée d’autre part ;
— amélioration de la qualité de l’eau produite : l’amélioration de la qualité de l’eau traitée est une exigence des consommateurs. Cette exigence passe par l’amélioration de chacune des étapes du traitement de l’eau. La clarification est l’une des principales : toute amélioration de la qualité de l’eau décantée entraînera « de fait » l’amélioration des étapes suivantes : filtration, oxydation, adsorption ;
— traitement des boues : la diminution du taux de traitement en réactif de coagulation entraîne, à posteriori, une diminution de la quantité de boues produites ; en outre, l’obtention d’une boue plus concentrée au sein même du décanteur permet de réduire les équipements nécessaires au traitement des boues et de minimiser le coût de ce traitement.
Le Densadeg
La figure 1 donne le schéma de principe du Densadeg RPL. Son fonctionnement est caractérisé par la combinaison de trois éléments principaux :
— le réacteur R, qui assure la floculation. Le dispositif (breveté) met en œuvre deux zones successives à énergie de floculation variable. Une zone centrale à haute énergie assure le mélange rapide des réactifs. Une turbine permet le mélange de l’eau coagulée avec les boues recyclées, la dispersion optimale du floculant et la recirculation interne des boues. Une zone externe est destinée à la floculation à faible énergie dissipée, pour le grossissement et la densification du floc ;
— le prédécanteur-épaississeur P, dans lequel la plus grande partie du floc décante et s’épaissit. La forme cylindro-conique de cet élément est alliée à un raclage en continu des boues. Une partie des boues épaissies est prélevée par pompe à différentes hauteurs de l’épaississeur, et est recyclée en tête du réacteur. Ce recyclage améliore les cinétiques de floculation et permet la production d’un floc plus dense. Les boues en excès sont extraites à la base du prédécanteur-épaississeur : la concentration de ces boues est suffisante pour qu’elles puissent être envoyées directement au système de déshydratation, sans qu’il soit besoin qu’elles soient à nouveau épaissies ;
Tableau 1 : Principales familles de décanteurs
Vitesse apparente |
Concentration |
Type |
Exemples |
Floculateur |
sur la zone de décantation (m/h) |
des boues extraites (g/l) |
Décanteur statique |
— à flux horizontal en tête |
0,5 – 2 |
1 – 5 |
— à flux vertical en tête ou intégré |
1 – 4 |
1 – 5 |
Décanteur à lit de boue |
(Pulsator) |
— sans lamelles intégré |
3 – 5 |
1 – 5 |
— avec lamelles intégré |
6 – 10 |
2 – 10 |
— Superpulsator intégré |
6 – 12 |
2 – 10 |
Décanteur à recirculation de boues |
(circulator) |
— à lamelles intégré |
2 – 3 |
5 – 10 |
— RPS à lamelles en tête |
10 – 15 |
10 – 20 |
[Photo : Schéma de principe du Densadeg RPL]
- la zone de décantation lamellaire L, dans laquelle le floc résiduel est éliminé.
Cette chambre de clarification est équipée de modules lamellaires ou tubulaires de décantation rapide, dans lesquels l’eau circule à contre-courant des boues. Les boues décantées sont recyclées en tête du réacteur.
Le système se caractérise donc par :
- un réacteur assurant une densification du floc, une floculation rapide, optimisée et homogène,
- une recirculation externe des boues,
- un épaississement intégré des boues,
- une décantation lamellaire.
La figure 2 présente un exemple du système en version industrielle. Selon la qualité de l'eau brute, et en fonction de l'objectif recherché, il est possible de faire varier l'importance relative de la zone d’épaississement et de la zone de décantation lamellaire. En particulier, au cas où la décantation n’est suivie d’aucune filtration, il est possible de supprimer la zone de finition lamellaire : c’est le Densadeg RP.
[Photo : Schéma simplifié d'une version industrielle du Densadeg]
Performances
La conception du Densadeg lui permet d’atteindre des performances répondant aux exigences formulées précédemment.
- Vitesse de décantation : la vitesse de décantation à travers la zone lamellaire se situe autour de 25 m/h en clarification (tableau n° 2). Elle peut atteindre jusqu’à 40 m/h en décarbonatation.
Tableau 2 : Performances du Densadeg
Application |
Vitesse de décantation |
Concentration |
Clarification |
25 (20 à 30) m/h |
20 – 150 g/l |
Décarbonatation |
35 (30 à 40) m/h |
300 – 550 g/l |
Eau résiduaire urbaine physico-chimique primaire |
25 (20 à 30) m/h |
40 – 80 g/l |
- Épaississement des boues : l’épaississement intégré des boues, obtenu après la densification du floc, permet d’obtenir des concentrations allant de 20 à 550 g/l (en fonction de la nature du traitement). Cette concentration autorise une déshydratation directe des boues, sans qu'il soit nécessaire de mettre en œuvre une étape intermédiaire d’épaississement. Au cas où le fonctionnement du système de déshydratation n’est pas prévu en continu, ce qui demande un dispositif de stockage des boues, ce stockage peut être, sous certaines conditions, prévu au sein même du Densadeg.
- Souplesse d'emploi : la recirculation externe des boues à partir de la zone d’épaississement permet une maîtrise de la concentration en boue dans le réacteur de floculation. Le contrôle peut être parfaitement automatisé et autorise un fonctionnement de la plus grande fiabilité.
- Qualité de l'eau traitée : le décanteur lamellaire assure la qualité finale de l'eau clarifiée par élimination du floc résiduel.
Un décanteur universel
Sa souplesse d'emploi permet au Densadeg d’être utilisé dans les domaines les plus divers, avec les applications les plus variées :
- traitement d’eau potable : il est utilisé pour la clarification des eaux de surface (Morsang-sur-Seine, 3ᵉ tranche : 3 540 m³/h par exemple), ou pour la décarbonatation des eaux profondes (station de Guntersblum, R.F.A. : 1 500 m³/h) ;
- préparation d’eau industrielle de procédé, comme par exemple l’installation de Neckarwestheim (R.F.A., 7 000 m³/h) pour la décarbonatation d’une eau de rivière, ou l’installation de Collonges (F., 400 m³/h) pour la clarification d’une eau de rivière ;
- traitement des boues : il est tout particulièrement adapté pour le traitement d’épaississement des eaux de lavage des filtres sur les installations fonctionnant en coagulation sur filtre, sans étape de décantation. C’est le cas de l’installation des Ansereuilles (F., 200 m³/h) pour le traitement des boues de lavage de filtres déferriseurs ;
- eau résiduaire urbaine : sa fiabilité permet de le recommander soit en traitement physico-chimique comme à Gréoux-les-Bains (F., 400 m³/h) avant filtration biologique, soit en traitement tertiaire, comme pour la déphosphatation ;
- traitement d’eau résiduaire industrielle : pour les réactions de précipitation et d’épaississement, comme par exemple sur l’installation de Pennaroya (France) en vue de l’élimination de métaux lourds précipités.
[Photo : Installation de Guntersblum (1 500 m³/h). Vue sur la zone de décantation]
[Photo : Installation de Neckarwestheim (7 000 m³/h). Vue générale avant sa mise en eau]
Conclusion
Le Densadeg est un appareil compact et rapide, assurant un bon épaississement des boues et une excellente qualité de l'eau traitée. Sa conception en fait un appareil entièrement automatisable, dont le fonctionnement est parfaitement fiable et permet ainsi la parfaite maîtrise de la clarification des eaux.