En vue du traitement et de la valorisation par voie thermique des vinasses résultant de la fabrication du cognac, un Groupement d’Intérêt Economique, dénommé REVICO, a été constitué en 1970 ; il nous a confié l’étude et la réalisation d'un procédé industriel permettant de résoudre le problème posé.
Dans une première étape, il s'est agi de concentrer les vinasses brutes, comportant à leur arrivée 3 % de matière sèche : préconcentrées d’abord dans un évaporateur à multiple effet, elles sont ensuite neutralisées (avec récupération de tartrate de calcium). Un second étage de concentration permet de préparer une liqueur contenant plus de 50 % de matière sèche.
Dans une deuxième étape, il a fallu trouver le moyen d’éliminer et de valoriser le concentré de vinasse ainsi obtenu.
Après des essais positifs, compte tenu du pouvoir calorifique du concentré, le choix du procédé s'est porté sur une incinération avec production de vapeur et d’énergie électrique, malgré le caractère saisonnier de l’exploitation.
Le procédé de combustion des vinasses
La capacité importante de l’installation souhaitée, la nature du concentré et, notamment, la quantité élevée de matières minérales nous ont conduits à concevoir un véritable prototype industriel en développant un procédé d’incinération spécifique, dérivé du traitement des liqueurs noires de papeterie. Le four, du type statique vertical muni d'une double enveloppe métallique et d'un garnissage réfractaire intérieur, est équipé d'un injecteur breveté, installé à la partie supérieure.
Le principe de fonctionnement est le suivant :
— l’air de combustion est réchauffé par circulation dans la double enveloppe, puis distribué à deux niveaux différents de la périphérie du four et l'air chaud est alors injecté au travers de tuyères tangentielles. Cette disposition assure la qualité de la combustion et a également pour effet de centrifuger les particules sur la paroi. Une partie de l'air frais est dirigée vers l’extracteur de cendres pour le refroidir et achever la combustion du carbone ;
— le concentré introduit dans l'injecteur rotatif fournit un jet massif arrosant la paroi du four, sans pulvérisation, ce qui limite la formation de poussières fines et leur entraînement par les fumées ;
— le produit sèche au contact des réfractaires et tombe à la partie basse où il forme un gaz pauvre sous l’action de l’air chaud provenant des tuyères inférieures ; ceci modère les températures de combustion bien que le produit dans cette zone soit complètement sec ;
— la combustion du gaz pauvre s’achève au contact de l'air chaud soufflé par les tuyères supérieures. Les gaz sont alors dilués par la vapeur d’eau provenant du séchage, et la température reste pratiquement constante.
Ce procédé, qui permet de brûler le concentré en autocombustion, se déroule donc en trois phases : séchage – pyrolyse – combustion lente. Le brûleur au fuel n’est utilisé que pour le démarrage. Cette conception stabilise le fonctionnement et supprime les zones de températures locales très élevées et hétérogènes, en réduisant de ce fait les problèmes liés à l'extraction des cendres. La tenue des réfractaires est également améliorée, car ils sont d'une part refroidis par circulation d’air et projection de liqueur et, d’autre part protégés par le produit en cours de séchage et d’écoulement le long de la paroi, ainsi que par le dépôt de cendres.
Le schéma 1 montre le four d’incinération de vinasses.
[Schéma : Four d’incinération de vinasses – Schéma 1
1. Four d’incinération. — 2. Poteaux supports. — 3. Injecteur rotatif à vinasse. — 4. Brûleur de démarrage. — 5. Ventilateur d’air comburant. — 6. Collecteur d'air frais. — 7. Double enveloppe. — 8. Collecteurs d’air chaud. — 9. Joints souples. — 10. Registres de répartition d’air. — 11. Tuyères d’injection d’air chaud. — 12. Portes de visite. — 13. Broyeur à cendres. — 14. Vis d’extraction de cendres. — 15. Hotte de la chaudière. — 16. Clapet de secours.]
[Photo : L'installation REVICO à Cognac]
Installation Revico à Cognac
L’installation Revico, mise en route en janvier 80, marche par campagne annuelle de 20 semaines environ, pendant lesquelles elle fonctionne en continu au moins quatre jours par semaine. Elle est exploitée par une seule personne.
Le schéma 2 représente l’ensemble de l’installation comprenant :
- - un four d’incinération qui brûle 3,5 à 4 t/h de concentré de vinasses de vins, ayant un pouvoir calorifique inférieur de 1 450 kcal par kg de concentré à 57 % de matière sèche. Les matières minérales, composées de potassium et calcium, représentent environ 20 % de la matière sèche ;
- - une chaudière de récupération à tubes d’eau Lardet Babcock, avec hotte, chambre de rayonnement, économiseur, équipement de ramonage et de battage de tubes, qui produit environ 8 à 9 t/h de vapeur de 27 bars, surchauffée à 330 °C, turbinée ensuite pour fournir de l’énergie électrique ;
[Schéma : Ensemble de l’installation Schéma 2]
1. Four d’incinération. — 2. Bac de collecte des cendres. — 3. Chaudière de récupération. — 4. Économiseur. — 5. Multicyclones. — 6. Venturi. — 7. Laveur concentrateur. — 8. Bac de vinasses avec pompe de recyclage. — 9. Ventilateur de tirage. — 10. Cheminée.
- - une installation de traitement de fumées Precipco avec multicyclone Venturi, laveur de gaz permettant de concentrer la vinasse diluée par contact direct avec les fumées.
Le rendement thermique global four — chaudière — économiseur est d’environ 85 % sur PCI.
Les cendres, contenant 20 % de potassium, sont également récupérées et vendues comme base de fabrication d’engrais.
Conclusion et extension du procédé
Ce procédé peut être étendu à beaucoup de liquides organiques concentrés parmi lesquels les liqueurs noires de papeteries, les vinasses provenant des sucreries et des distilleries de production d’alcool à partir de végétaux. En fonction des besoins, plusieurs variantes peuvent être envisagées, concernant notamment :
- — la récupération des calories contenues dans les gaz de combustion soit au profit d’un fluide intermédiaire (vapeur, eau chaude, air chaud, fluide thermique), soit par utilisation directe des gaz chauds pour le séchage des produits (après traitement éventuel des fumées) ;
- — l’extraction des cendres, suivant la nature et la fusibilité des matières minérales, soit en phase solide avec broyeur, soit en phase liquide avec bec de coulée et dissolveur des sels fondus.
La rentabilité du procédé dépend de plusieurs facteurs parmi lesquels on peut citer la capacité de l’installation, la durée annuelle de fonctionnement, les formes de valorisation choisies (production de vapeur, d’électricité, valorisation de sous-produits).
Dans ce cas particulier, Revico a estimé, après étude, que son installation serait amortie en trois années, ce qui est particulièrement remarquable.
Nos dossiers du mois pour l’année 1984 :
- Janvier/Février : Eau et Chaleur (Géothermie, PAC)
- Mars : L’eau potable
- Avril : Stérilisation
- Mai : Pompes — Vannes — Canalisations
- Juin/Juillet : Épuration — Assainissement
- Août/Septembre : Filtration
- Octobre : Produits pour le traitement de l’eau
- Novembre : Automation — Régulation
- Décembre : Boues — Ordures — Déchets