[Photo : L'esthétique du bâtiment de la station d’épuration participe également au respect de l'environnement]
« On n’est jamais si bien servi que par soi-même », c'est assurément une maxime dont le Centre Vinicole Champagne Nicolas Feuillatte (CVCNF), situé à Chouilly près d’Epernay dans la Marne, a fait sienne.
Thierry Gomerieux, directeur de production, et de surcroît œnologue, explique : « La décision de construire notre propre station de traitement des eaux usées repose sur trois points principaux. Le premier est lié à l'application de notre politique environnementale qui, d'une part nous pousse à participer à l’effort de tous au respect de la nature, et d’autre part à rester vigilants pour maintenir la certification ISO 14 000 de notre site de production. Le deuxième est d'ordre financier ; il tient au coût important que nous devions supporter pour nous raccorder à la station ».
[Photo : CVCNF est le troisième opérateur de champagne, avec une production annuelle de 20 millions de bouteilles, dont plus de 5 sont commercialisées sous la marque Nicolas Feuillatte.]
d’épuration de la ville d’Épernay et à l’acquittement de la taxe annuelle dont le montant n'était pas arrêté avec précision. Dernier point, nous devions obligatoirement dépolluer à 50 % les eaux usées avant de pouvoir les rejeter dans la station de la ville. CVCNF est le troisième opérateur de champagne, avec une production annuelle de 20 millions de bouteilles, dont plus de 5 sont commercialisées sous la marque Nicolas Feuillatte.
De 70 à 220 m³/jour d’effluents
L’unité de production a besoin d'un volume de 25 000 m³ d’eau par an, approvisionné à partir du réseau de distribution d’eau potable d’Épernay, pour effectuer principalement les opérations de nettoyage. Celles-ci sont particulièrement nombreuses et rigoureuses dans ce secteur de l'agroalimentaire. Elles concernent toutes les opérations liées au lavage des cuves de stockage et d’assemblage, des machines installées sur les lignes de production et de l'ensemble des sols des locaux. Elles s’appliquent également au rinçage des bouteilles, avant soutirage du fameux breuvage de champagne, et à leur lavage avant habillage final.
Ces eaux usées sont chargées d’éléments organiques et minéraux provenant du jus de raisin, des résidus de filtration…, d’acides et de bases additionnés à l'eau pour le nettoyage ainsi que de déchets constitués par des capsules, des morceaux de verre ou de plastique.
Tous ces effluents, soit une quantité journalière de 70 m³, atteignant 220 en période de vendanges, sont acheminés par une canalisation de plus de 500 m jusqu’à la station d'épuration. Deux lagunes, d'une capacité unitaire de 600 m³, ont été creusées pour les accueillir temporairement en cas de surcharge accidentelle ou de non fonctionnement de la station. Les effluents entrent dans la station par un canal de mesure où un échantillon est prélevé automatiquement, à raison de 150 ml tous les 2 m³, puis analysé par le laboratoire intégré. Ils sont acheminés dans une fosse, puis sont relevés à l'aide de deux pompes fonctionnant en alternance. Ces dernières alimentent un hydrocyclone.
[Photo : Après traitement, l’eau est rejetée à l’extérieur dans deux lagunes d’infiltration.]
[Photo : Deux lagunes d'entrée accueillent temporairement les effluents en cas de surcharge accidentelle ou de non fonctionnement de la station.]
[Encart : Les intervenants
Maître d’ouvrage : CVCNF
Maître d’œuvre : Nantaise des Eaux
Lot électrique/supervision : Enersys
Programmation automatisme : Fluides et Automation
Fournisseurs de matériels : Guinard, Schneider Electric, Panorama, Endress + Hauser...]
[Photo : Deux surpresseurs fournissent l'air nécessaire aux bassins d’aération]
[Photo : L’automate Premium Schneider Electric contrôle le procédé]
dont la fonction est d’assurer la séparation des particules lourdes et de l'eau. Les particules sont compactées dans une vis et récupérées dans une benne. L'eau est filtrée au travers de mailles de 400 microns d'un tamis rotatif. Elle passe ensuite dans une cuve de neutralisation biologique où sont introduits du chlorure ferrique et de la soude afin de ramener son pH à une valeur normale.
Traitement biologique et ultrafiltration
L'eau est alors transférée dans un des deux bassins d’aération d’une capacité unitaire de 1 350 m³. Équipé de deux agitateurs, chaque bassin reçoit de l’air à la température de 80 °C délivré par un surpresseur. Le traitement réalisé consiste à faire dégrader par des micro-organismes présents naturellement dans l'eau les matières organiques qui y sont dissoutes. Cette dégradation, effectuée par voie biologique dans le bassin d’aération, conduit à la formation de boues. Une pompe, située à la base du bassin, extrait l’eau et l’achemine dans le circuit final d’ultrafiltration via une étape de dégazage suivie d’une filtration à 60 microns. L’ultrafiltration est réalisée dans deux colonnes munies de filtres en céramique qui séparent l'eau des boues par des orifices de 0,1 micron. Les filtres sont nettoyés par passage d’un mélange constitué d'eau, de soude, de javel et d’acide nitrique. Après avoir été analysée, l'eau est rejetée à l’extérieur, selon un débit de 10 m³/h, dans deux lagunes d’infiltration.
Les boues sont quant à elles centrifugées ; ne contenant pas de matières métalliques, elles sont valorisées comme engrais par les agriculteurs qui les épandent dans les champs.
Un automate Premium contrôle le procédé
Le procédé de traitement des effluents est sous le contrôle d’un automatisme s’appuyant sur un automate programmable Premium Schneider Electric communiquant, via une liaison Ethernet TCP/IP, avec une supervision Panorama. L’automate gère plus de 300 entrées/sorties tout ou rien et une trentaine d’entrées/sorties analogiques. Il traite les informations transmises par les capteurs mis en place sur l’installation (débit, température, niveau, position de vanne…) et commande les différents actionneurs tels qu’électrovannes et moteurs.
Certains moteurs de forte puissance sont en particulier pilotés au travers de démarreurs-ralentisseurs progressifs Altistart. C’est le cas des deux surpresseurs d’air (150 kW) et des deux agitateurs (45 kW) des bassins d’aération.
L’automate contrôle les boucles de régulation liées aux colonnes de l’ultrafiltration et le procédé de nettoyage des filtres. Toutes les informations sont mises à la disposition de la supervision. Celle-ci autorise la conduite et le suivi de l'installation à l'aide de vues animées : prétraitement, préparation soude et chlorure ferrique, aération, ultrafiltration, centrifugation des boues, infiltration, architecture de l’automatisme, gestion des bilans, des défauts et des alarmes…
[Encart : Les eaux de pluie et de ruissellement aussi
Deux autres réseaux installés chez CVCNF procèdent à l'infiltration des eaux sans passage par la station d'épuration.
Le premier, affecté aux eaux de pluie récupérées par les toitures, réalise directement l'opération. Collectant les eaux de ruissellement des parkings, le second alimente un dispositif de déshuilage avant rejet.
À noter aussi qu'au niveau du rinçage des bouteilles, CVCNF a mis en place un système de filtration. Celui-ci est constitué d'une cuve alimentée par le réseau d'eau potable. L’eau est extraite pour le rinçage des bouteilles ; elle est ensuite récupérée, filtrée et recyclée. À la fin d'une campagne de huit heures, l'eau stockée dans la cuve est envoyée sur le réseau de traitement des eaux usées.]
[Photo : Système de filtration installé au niveau du rinçage des bouteilles]
imprimante délivrant un journal de bord sur lequel sont consignés les paramètres essentiels ainsi que toutes les mesures nécessaires aux analyses et autocontroles effectuées et mises à disposition des organismes de contrôle.
Une unité de télésurveillance est reliée à l'automate. « L’automate disposant d’un coupleur Ethernet embarquant la fonction web serveur, nous allons pouvoir, à distance, nous connecter à l’ensemble de l’architecture de l’automatisme. L’agent d’astreinte sera en mesure de visualiser le suivi de conduite, d’effectuer un diagnostic et le cas échéant intervenir sur l’automatisme garantissant ainsi une grande disponibilité de l’installation », précise Philippe Massart, responsable de la maintenance.
« L’installation fonctionne avec satisfaction depuis le mois d’avril 2001 », affirme Thierry Gomez. « La période de vendanges, où le volume d’effluents est trois fois plus important qu’en période normale, a été parfaitement absorbée par notre station d’épuration. À noter, et nous en sommes fiers, que l’installation de celle-ci constitue une grande première pour les Maisons de champagne. Nous n’en restons pas là et étudions la possible valorisation des eaux traitées. Quelques pistes intéressantes sont déjà trouvées... ».
[Photo : La conduite et le suivi de l’installation s’effectuent à l’aide d’une supervision Panorama]