La réglementation mise en place ces cinq dernières années, depuis la loi sur l'eau du 3 janvier 1992, a considérablement renforcé les obligations des Maires en matière d’assainissement (1).
En ce qui concerne le traitement des eaux usées, celles-ci doivent être soumises à un traitement biologique secondaire avant rejet, sauf dans le cas des petites agglomérations et lors des événements pluviaux « exceptionnels ». Cette validation de facto des technologies mettant en œuvre des cultures de micro-organismes pour épurer les eaux usées est néanmoins accompagnée d’une obligation de résultat déterminée en fonction de la sensibilité du milieu récepteur (décret n°94-469 du 3 juin 1994) et d’une obligation de surveillance accrue (arrêté du 22 décembre 1994).
Actant cette volonté de nette réduction des flux polluants, de fiabilité et de surveillance plus poussées des ouvrages de traitement, de réduction des nuisances (visuelles, sonores, olfactives) des systèmes d’assainissement, les acteurs de l’assainissement réévaluent l'ensemble des filières techniques existantes et proposent leur modification pour répondre aux nouveaux objectifs. Parallèlement, de nouvelles technolo-
(1) « Les nouvelles contraintes d’exploitation des usines d’épuration » (in TSM 7-8/1994)
[Photo : Station d’épuration à BioRéacteur à Membranes de Villefranque]
[Encart : texte :
Une combinaison de traitements (cf Figure 1). Le BRM® est composé de 2 opérations intimement liées :
- un traitement biologique pour dégrader la pollution,
- un traitement physique de séparation par membranes d’ultrafiltration pour obtenir une eau parfaitement clarifiée et de qualité constante.
Dans le réacteur biologique, les micro-organismes, essentiellement des bactéries, transforment la pollution en gaz (gaz carbonique ou azote N₂) et en biomasse.
[Photo : le bioréacteur à membranes]
L’eau traitée par un BRM® est toujours parfaitement désinfectée, limpide et de qualité constante : les membranes d’ultrafiltration constituent une barrière physique infranchissable pour les matières en suspension, quelles que soient les variations de la qualité de l’eau à traiter. Contrairement aux clarificateurs, le BRM® ignore les dysfonctionnements liés à la mauvaise décantation et au foisonnement des boues.
]
[Photo : Schéma de principe du procédé BRM®]
De nouvelles technologies sont mises au point, et, parmi elles, le BioRéacteur à Membrane (BRM®) qui est un traitement biologique secondaire mis en œuvre avec des outils innovants : il constitue une réponse globale et complète à l’ensemble des exigences de la nouvelle réglementation sur l’assainissement.
La première station de traitement d’eaux usées urbaines de type BRM® (capacité 1 200 EH) vient d’être inaugurée à Villefranque (64) dans la région de Bayonne : elle permet aux élus locaux d’assumer de façon totale et pérenne leurs responsabilités en matière d’assainissement collectif, à savoir :
Préserver le milieu naturel
- - la station assure un rejet quasi exempt de matières organiques biodégradables avec l’élimination de plus de 95 % de la pollution carbonée (exprimée en DCO), et en particulier une biodégradation très poussée des graisses et des macromolécules organiques ;
- - l’eau traitée rejetée dans la rivière est toujours parfaitement clarifiée (limpide), les pertes de boue étant physiquement impossibles au travers des membranes ;
- - si cela était nécessaire, la station pourrait éliminer, outre les carbones, l’azote (couplage nitrification/dénitrification) et le phosphore (par voie physico-chimique) dans le bassin biologique unique dimensionné pour ces fonctions complémentaires.
Maîtriser les sous-produits de l’épuration des eaux usées :
- - les refus du tamisage de l’eau brute sont égouttés, compactés et ensachés : leur destination est l’enfouissement en CET ou l’incinération ;
- - les boues en excès sont valorisables en agriculture (boues liquides à 7 - 8 % après épaississement mécanique), ou peuvent être déshydratées ou digérées sur un site plus important disposant d’une filière de traitement des boues complète. La production de boues biologiques peut être réduite en utilisant des temps de séjour de la biomasse plus longs ;
- - les eaux de lavage des équipements hydrauliques sont recyclées dans le bassin d’aération.
Réduire les nuisances dues à la station d’épuration (voir les nouvelles normes ISO 14000)
- - la station étant entièrement couverte, l’air est extrait par un ventilateur et désodorisé avant rejet à l’extérieur du bâtiment. De plus, un mode d’exploitation original évite aux boues extraites de séjourner plus de 24 h dans le silo de stockage des boues épaissies afin d’éviter les odeurs ;
- - la station étant entièrement intégrée dans un bâtiment celui-ci a été conçu pour insonoriser l’ensemble des locaux hébergeant des équipements ; l’absence d’installation d’air surpressé facilite la réduction des émissions sonores ;
- - le choix du bâtiment permet une intégration parfaite au site et supprime tous les problèmes d’aspect visuel en cas de proximité des habitations : à Villefranque c’est tout naturellement le style basque qui s’est imposé pour le bâtiment abritant la totalité de la station.
Répondre aux problèmes de santé publique
Si le fait d’assainir constitue la réponse de base à différents problèmes de santé publique de l’agglomération, on peut ajouter qu’une station BRM® contribue à une meilleure maîtrise des risques pour la santé des riverains :
- - aucune pollution microbienne ou virale n’est due au rejet de la station BRM®, l’eau traitée étant en permanence désinfectée (élimination complète des bactéries et des virus par les
Tableau 1
Premiers résultats sur les eaux usées de Villefranque :
Paramètres | Eau Brute | Eau Traitée |
DCO | 770 mg/l | < 30 mg/l |
DBO5 | 385 mg/l | < 5 mg/l |
NH4 | 100 mg/l | < 2 mg/l |
MES | 580 mg/l | 0 mg/l |
Coliformes | 10⁵ UFC/ml | 0 UFC/ml |
membranes d'ultrafiltration).
- le confinement de l'air et son traitement avant rejet élimine la diffusion de germes par les aérosols issus du bassin d’aération.
- l’intégration dans un bâtiment fermé évite aux « visiteurs non accompagnés » d’être exposés aux risques de chute et/ou noyade dans les bassins, blessures ou électrocution par des équipements.
Surveiller (autosurveillance/contrôles) la station et ses performances :
- la totalité des fonctions critiques (relevages, prétraitement, traitement biologique, séparation liquide-solide) de la station sont télésurveillées 24 h/24 (365 jours/an) : des alarmes circonstanciées permettent des interventions rapides et pertinentes.
- un programme d’autosurveillance comprenant au moins 4 bilans par an complété par un bilan SATESE par an est mis en œuvre.
- grâce au suivi permanent des pressions de fonctionnement des membranes et des niveaux dans les bassins par le télécontrôle centralisé, tout rejet au milieu naturel est immédiatement détecté et, le cas échéant, une intervention est déclenchée.
S’assurer de la fiabilité du système de traitement :
- chaque équipement de la station peut être remplacé ou réparé sur site en moins de 4 h, ce qui minimise le temps de rejet au milieu naturel en cas de dysfonctionnement.
- même si la station BRM® est de faible capacité, une architecture en plusieurs lignes de traitement, complètes, en parallèle, est possible et présente son avantage habituel : l’impact d’un dysfonctionnement ne porte que sur 1/2 ou 1/3 de la capacité selon que l’on met en œuvre 2 ou 3 lignes de traitement.
- le nombre d’équipements motorisés a été réduit afin de minimiser le nombre d’appareils à secourir et de faciliter l'exécution d’un programme de maintenance préventive.
- la compacité de la station BRM® permettant sa couverture totale, aucun équipement n’est exposé aux dysfonctionnements dus au gel et aux intempéries. De plus, le terrain requis étant plus petit, il est souvent possible d’éviter les zones à risque parfois retenues pour implanter les STEP.
Anticiper les besoins à terme de l’agglomération :
- une station BRM® est totalement modulaire et peut-être réalisée en tranches successives, homogènes pour le traitement (aucune partie de l’installation n’est obligée de fonctionner en sous-capacité dans l’attente de la pleine capacité).
- une architecture en plusieurs lignes de traitement permet aux agglomérations à vocation touristique de ne faire fonctionner que les installations nécessaires au traitement des flux de pollution entrant, quelle que soit la saison.
- la compacité de la station limite considérablement les réserves foncières nécessaires pour faire face aux besoins futurs, et évite un éloignement trop important (coût du réseau) entre lieu de collecte et lieu de traitement.
- la qualité de l'eau traitée pouvant être réglée par simple changement du seuil de coupure des membranes et/ou par nouveau réglage des paramètres de fonctionnement biologique, une station BRM® est en mesure de répondre aux exigences des 20 prochaines années sans modification majeure ni addition de filière technique.
- la raréfaction des ressources en eaux de qualité incite au développement de la réutilisation des eaux usées : à Villefranque, une petite tannerie envisage d’utiliser l’eau traitée de la station pour différentes opérations de lavage.
S’assurer de l’efficacité des sommes investies pour restaurer la qualité des eaux :
- les élus de Villefranque et du Syndicat d’assainissement de la Vallée de la Nive ont pu réduire l'investissement global requis pour leur nouveau système d’assainissement collectif (réseau séparatif, station BRM®) : moins de terrain, moins de réseau, moins de fondations spéciales, et moins de voirie et réseaux divers du fait du choix de la technologie BRM®.
- cette station leur permet de faire face aux évolutions futures de la réglementation, aux nouvelles normes et à l’augmentation de capacité à des coûts faibles.
La technologie des BioRéacteurs à Membranes est développée et maîtrisée par le groupe Lyonnaise des Eaux (CIRSEE, Degrémont, FD Conseil) depuis 1990 ; elle a fait ses preuves par des réalisations industrielles dans les domaines de l'industrie (cosmétique, agro-alimentaire) et des déchets (traitement des lixiviats) (voir encadré).
À Villefranque, le traitement des eaux usées domestiques par BRM® fait ses premiers pas en Europe : c’est une réponse cohérente à l'ensemble des préoccupations des élus locaux de cette authentique Vallée Basque.
[Encart : Le BRM® est un outil également bien adapté au traitement des effluents industriels, grâce à ses avantages spécifiques :
- il permet de s’affranchir des problèmes liés à la décantation (bulking, filamenteuses).
- il réalise une biodégradation plus poussée grâce à l’utilisation des membranes qui permettent de maintenir dans le bioréacteur des métabolites de haut poids moléculaire lentement biodégradables (qui sont oxydées progressivement) et des produits non biodégradables. Leur évacuation avec les boues plutôt que dans l’eau traitée améliore sensiblement la qualité de l’eau.]