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Traitement biologique en lit fixe d'une eau usée de laiterie

30 juillet 1997 Paru dans le N°203 à la page 37 ( mots)
Rédigé par : Abdelhafid KHOUDIR, Houria LAMARI, Smail LOUELHI et 1 autres personnes

Quatre techniques de traitement anaérobie des eaux usées de la laiterie " ORLAC " de Bir-Khadem (Alger centre) ont été étudiées. Il s'agit du traitement biologique ordinaire (T.B.O), du traitement biologique en lit fixe non traité en discontinu (T.B.L.NT.D), du traitement biologique en lit fixe non traité en continu (T.B.LF.NT.C) et enfin du traitement biologique en lit fixe traité en continu (T.B.LF.TR.C). Les résultats obtenus ont montré que le traitement T.B.LF.TR.C permettait un abattement de la DBO 5 du 95 % de la DCO de 93 %, des DE 74 % et une réduction du temps de rétention (6 jours) par rapport au traitement biologique ordinaire (T.B.O).

A également participé à la rédaction de cet article : M. H. Hamadache, Centre de Développement des Matériaux (Draria W. Tipaza)

De nombreux travaux de recherches ont attiré l’attention de la communauté internationale sur la situation préoccupante de la pollution de l’environnement et de la contamination des ressources hydriques plus particulièrement [1]. Une attention particulière a été accordée aux industries agroalimentaires car elles consomment non seulement de grands volumes d’eaux mais elles en rejettent aussi une grande partie sans aucun traitement préalable [2]. Les eaux usées des industries agroalimentaires algériennes ont une charge organique polluante évaluée à 140 000 kg/j de DBO5, 280 000 kg/j de DCO, 61 320 kg/j de M.E.S et plus de 480 kg/j de métaux lourds, soit une charge organique annuelle estimée à 280 320 tonnes en 1990 et qui risquerait de passer à 591 300 tonnes à l’horizon 2010 [3]. La laiterie « ORLAC » de Bir-Khadem (Alger-centre) consomme plus de 1 980 m³/j d’eaux dont 70 % sont rejetées sans aucun traitement préalable.

Ces eaux sont constituées principalement de matières organiques et micro-organismes provenant essentiellement du lactosérum qui a un pouvoir polluant extrêmement élevé [4]. Il s’agit d’utiliser dans cette étude un procédé de traitement basé sur les fermentations anaérobies avec support bactérien immobilisé inerte en plastique.

Matériels et méthodes

Nous avons utilisé dans ce travail un DBOmètre (BSB1020T), un DCOmètre (HACH), un système Kjeldhal pour doser l’azote.

La fermentation a été conduite dans un bioréacteur à trois compartiments muni de plusieurs raccords d’entrées et de sorties qui

Tableau 1 : Caractérisation physico-chimique de l’eau usée brute

Paramètres d’analyses (mg/l) Résultats expérimentaux de rejets Normes internationales
M.E.S 635 80
M.G 2252 20
D.B.O5 2831 40
D.C.O 6624 160
N.T.K 1831
S.T 1350

permettent à l'opérateur le contrôle systématique de l’état de l’effluent pendant sa fermentation dans les conditions mésophiles (37 °C) et dont le compartiment central est rempli d’anneaux en P.V.C. servant de lit fixe.

Ces derniers permettent aux bactéries de bien adhérer aux parois du garnissage grâce à une substance mucilagineuse qu’elles sécrètent augmentant ainsi leur efficacité et leur pouvoir de dégradation [5].

Résultats et discussion

Analyses préliminaires

La composition physico-chimique de l'eau usée de la laiterie de Bir-Khadem est consignée dans le tableau 1.

À la lumière de ces résultats nous constatons que la teneur en matière en suspension 635 mg/l dépasse largement celle recommandée par les normes internationales de l’O.M.S qui sont de 80 mg/l. Ces M.E.S empêchent une bonne luminosité de l'eau et entraînent une diminution de la teneur en oxygène dissous avec freinage de la photosynthèse et de l'activité biologique du milieu [6]. Les valeurs de la DBO5 et de la DCO obtenues montrent que l’effluent liquide est chargé en matières organiques et le rapport DCO/DBO5 = 2,33 révèle la nécessité de traiter cette eau usée par la voie biologique [7].

Traitement biologique

Les résultats obtenus par les quatre techniques de traitement utilisées sont reportés dans le tableau 2.

À la lumière de ces résultats nous constatons que le traitement biologique en lit fixe « T.B.LF. TR. C » comme support bactérien immobilisé est nettement plus efficace que les trois autres procédés. La DBO5 a régressé de 95 % et la DCO de 94 % en 6 jours par rapport au traitement ordinaire (T.B.O). En effet, la digestion anaérobie permet l’élimination d’une importante quantité de matière organique [8] en fonction du procédé de traitement utilisé et du degré d’épuration souhaité [9].

Évolution de la demande chimique en oxygène

Les valeurs de la DCO obtenues pour les quatre techniques sont illustrées sur la figure 1.

[Figure : Abattement de la DCO en fonction du temps par les quatre traitements]

L’étude de l’évolution de la DCO au cours des traitements a appelé les conclusions suivantes : le traitement (T.B.O) a permis une réduction de la DCO de 62 % après 26 jours de fermentation, c’est une dégradation lente où la vitesse d’abattement n’a pas dépassé 126 mg DCO/j.

La seconde technique (T.B.LF. NT. D) où l’on a introduit un garnissage plastique non traité a réduit la DCO de 87 % après 26 jours de fermentation.

La troisième technique (T.B.LF. NT. C) est caractérisée par le passage du système discontinu au système continu avec le lit fixe non traité, ce qui a permis une réduction de la DCO de 87 % après 14 jours de digestion.

Enfin la quatrième technique (T.B.LF. TR. C) dont le garnissage a été traité en vue de le rendre plus inerte est nettement meilleure car on a enregistré une réduction de la DCO de 94 % en 6 jours.

Vitesse d’abattement de la DCO

Le calcul de la vitesse d’abattement de la DCO est basé sur la formule suivante :

V = (DCOi − DCOf) / TRH (1)

Cette vitesse caractérise l’action des bactéries acidogènes et méthanogènes sur la matière organique polluante contenue dans l’effluent et dépend de la stabilité de la flore microbienne, de la surface de contact et de la richesse du milieu de culture.

Les vitesses d’abattement enregistrées pour les quatre techniques sont respectivement égales à 125,94 mg/l pour le T.B.O, 265,02 mg/l pour le T.B.LF. NT. D, 459,37 mg/l pour le T.B.LF. TR. D et enfin 931,33 mg/l pour le T.B.LF. TR. C. Il apparaît ici que la vitesse de dégradation obtenue avec la technique T.B.LF. TR. C (931,33 mg DCO/j) est la plus rapide par rapport aux trois autres.

Ce qui montre le rôle du P.V.C traité sur la vitesse d’abattement de la demande chimique en oxygène.

Matières en suspension

Les résultats obtenus sur la figure 2 montrent que les M.E.S se réduisent plus rapidement dans la fermentation en lit fixe traité que dans les trois autres.

On peut noter que les M.E.S. se réduisent plus rapidement dans la digestion en lit fixe

[Figure : Abattement des M.E.S en fonction du temps par les quatre traitements]

traité en continu que dans les trois autres. Les M.E.S sont considérées comme l'un des paramètres les plus redoutables à éliminer car leur excès perturbe le milieu récepteur notamment la flore aquatique.

Dans ce travail la fermentation anaérobie en culture libre (T.B.O) a permis une régression des M.E.S qui sont passées de 750 à 350 mg/l après 26 jours de traitement discontinu soit une réduction de 53 % de la charge initiale, alors que dans la digestion en continu à lit fixe traité les M.E.S sont passées de 1350 à 350 mg/l après 14 jours de traitement soit un abattement de 73,88 %.

Le fait le plus marquant est que la dégradation des M.E.S enregistrée lors du T.B.O après 26 jours a été obtenue par le T.B.LF.TR.C au bout de 6 jours seulement.

Ce haut pouvoir de dégradation des M.E.S est l’œuvre du garnissage plastique qui a permis aux bactéries une stabilité qui leur confère une biodégradabilité accélérée.

Les taux de dégradation des matières en suspension enregistrés par les quatre techniques passent respectivement de 53 %, 73,88 %, 88,03 % à 95,64 % grâce au P.V.C. traité. La quatrième technique est nettement meilleure du point de vue régression comme il est illustré par la figure 2.

C'est ce qui renforce la thèse du rôle du P.V.C en plastique qui est insoluble sur la biodégradation des M.E.S contenues dans l'effluent de la laiterie.

[Encart : Références bibliographiques [1] Gaïd A. – Traitement des effluents liquides technologiques propres, Séminaire Méditerranéen, USTHB - Alger (1990) [2] Caz V. et al. – Technologies des eaux résiduaires, Springer-Énergie – Paris (1990) [3] SonotConsult – Étude de prospection contre la pollution des ports du littoral algérien – Algérie (1990) [4] Peltis L. – Prévention et lutte contre les nuisances des laiteries-fromageries, Ministère de la Qualité de l’Air – Paris (1976) [5] Lamari H., Hamadache N., Louelh S. – Optimisation du traitement biologique de l’eau usée en filtre, Mémoire de fin d’études, USTHB-CNR – Alger (1993) [6] Bremond A., Vichard P. – Paramètres de la qualité des eaux, Éd. Dunod – Paris (1973) [7] Chouikh S., Sayah N. – Traitement anaérobie des eaux usées résiduaires de la laiterie de Oued Smar (Alger), Mémoire de fin d’études, USTHB – Alger (1992) [8] Fodine F. – Épuration biologique des eaux résiduaires, 3e édition – De Boeck (1988) [9] Renaud H. – Comment réduire la pollution en industrie laitière, Bulletin technique – Paris (1978)]

Tableau 2 : Rendements et vitesses d’abattement des charges organiques par les trois traitements

Traitements D.C.O₀ D.C.Of REND (%) D.B.O₀ D.B.Of REND (%)
T.B.O 5264 1989 62 1900 285 85
T.B.LF.N/D 5284 1023 87 1900 100 90
T.B.LF.INT.C 5156 653 87 1850 203 89
T.B.LF.TR.C 5889 360 94 2000 110 95

Conclusion

Dans cette étude nous avons montré que l'introduction d’un garnissage plastique traité comme support bactérien immobilisé réduisait considérablement le temps de rétention hydraulique qui passe de 26 jours à 06 jours avec un abattement de la DCO et des M.E.S respectivement de 94 % et 74 %. Cette amélioration est due à l'augmentation de la surface de contact entre les bactéries et la matière organique grâce au support plastique inerte qui offre une meilleure régularité de biodégradation de la charge organique polluante.

Ce procédé pourra faire l’objet de préconisation dans les stations de traitement des eaux usées agroalimentaires.

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