Quand en 1860 la ville de Nice choisit de devenir française, l’État français concéda à la Compagnie Générale des Eaux la mission de construire le Canal de la Vésubie afin que la région niçoise soit correctement irriguée et ne souffre plus jamais de la sécheresse.
Construit en quatre ans et achevé en 1884 le canal assure depuis cette époque l’irrigation des collines de Nice, l’arrosage de ses jardins et une part croissante des fournitures d’eau potable.
Plusieurs usines de traitement ont en effet été construites successivement le long du cours du canal de façon à fournir aux populations une eau floculée, décantée, filtrée et traitée à l’ozone. L’ozonation des eaux a été mise au point et utilisée pour la première fois au monde en 1906 pour alimenter Nice.
Ces usines ont pour nom, d’amont en aval du canal :
- — Levens Polonia (8 600 m³/j) pour le syndicat de Levens au nord de Nice ;
- — Super Rimiez (90 000 m³/j) pour Nice ;
- — Col de Villefranche (43 000 m³/j) pour le littoral à l’est de Nice.
Ainsi ce sont plus de 50 % des eaux du Canal de la Vésubie qui sont aujourd’hui transformées en eau potable.
[Photo : Fig. 1 : Plan d’ensemble du Canal de la Vésubie - ■ vanne, capteur de niveau et poste de télétransmission ; ○ capteur de niveau]
Les 50 % restants alimentent :
- — le réseau d’eau brute qui sert à l’arrosage des rues et des jardins dans le centre de la ville de Nice et qui consomme plus de 60 000 m³ d’eau par jour ;
- — les rigoles d’irrigation qui consomment près de 15 000 m³/j d’eau brute.
Une adduction vitale
Ce qui précède situe bien l’enjeu vital que constitue pour l’agglomération niçoise la conservation de cette adduction. Il faut ajouter que l’ouvrage a été réalisé en tranchée maçonnée et en tunnels dans des conditions difficiles : aujourd’hui encore les accès par véhicule sont très peu nombreux et l’approvisionnement des matériaux nécessaires aux remises en état est effectué par hélicoptère. La géologie très instable ne le cède en rien à la difficulté géographique et l’on a vu dans le passé plusieurs ruptures de l’ouvrage provoquer des coupures d’eau.
Aujourd’hui les ressources ont été diversifiées et un large appel est fait aux nappes phréatiques du Var et de la Roya. De plus on a mis en service en 1986 la station du Roguez, laquelle permet de refouler dans le Canal de la Vésubie, aux deux tiers de sa course, 130 000 m³/j d’eau de surface prélevés dans le Var.
Le Canal de la Vésubie cependant reste l’ouvrage de base de l’adduction niçoise.
[Photo : Fig. 2 : Siphon de Saint-Blaise.]
[Photo : L'usine de Super-Rimiez : 90 000 m³/j.]
Le système de télécontrôle du réseau d’eau de Nice
La Compagnie Générale des Eaux a développé depuis 1977, à la demande de la ville de Nice, un système de télécontrôle informatisé qui permet de surveiller tous les réservoirs et les stations de pompage du réseau d’eau potable.
À base d’automates programmables, au nombre de 48, raccordés à deux ordinateurs centraux en mutuel secours, ce système brasse plus de mille informations, mesures et commandes qui permettent de « voir vivre » le réseau d’eau en temps réel. Ces automates assurent, outre la transmission des données, les automatismes électriques et l’optimisation du fonctionnement des pompages, avec intégration de fonctions interactives.
Le télécontrôle du Canal
Déjà fragile du fait de son âge et de son tracé, le Canal de la Vésubie est menacé par des éboulements de falaises déstabilisées par les incendies de forêt de l’été 1986. La ville de Nice a donc, à la demande de la Compagnie Générale des Eaux, accepté de moderniser les moyens de contrôle du canal.
Le projet comprend la mise en place de 5 vannes pelles protégeant autant de biefs du canal, 3 vannes protégeant l’entrée des rigoles secondaires ainsi que 13 capteurs de niveau ou de débit permettant un suivi de l’écoulement des eaux tout au long de l’ouvrage.
L’ensemble sera contrôlé par 6 postes satellites de télétransmission raccordés à un poste frontal assurant l’interactivité du système.
Quand un poste satellite constatera une variation de niveau de l’eau dans le canal sortant de la fourchette de surveillance, il alertera le poste frontal. Celui-ci recherchera si la variation résulte de la manœuvre d’une vanne amont. Dans l’affirmative il annulera l’alarme du poste satellite et celui-ci reprendra sa surveillance sur la base de la nouvelle valeur de niveau.
Si aucune vanne amont n’a été manœuvrée, la perturbation de niveau sera alors attribuée à une obstruction ou une rupture du canal. Le poste frontal ordonnera la fermeture de la vanne du bief intéressé par le débordement et le débit du canal sera rejeté par déversoir dans un vallon.
[Photo : Poste central de commande à l'usine de Super-Rimiez.]
Conclusion
Le gain de temps obtenu par un tel système par rapport à une intervention manuelle se chiffrera en heures et les dégâts occasionnés par l’éventuel écoulement des eaux seront ainsi réduits dans des proportions importantes.
Le télécontrôle complet du Canal de la Vésubie, entrepris en 1986, sera achevé dans le courant de 1987 et assurera une protection efficace des populations habitant en contrebas de son tracé.
[Publicité : Pierre JOHANET & fils Editeur S.A.]