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Stations de traitement des eaux: les automatismes au service de la maintenance

29 janvier 1999 Paru dans le N°218 à la page 29 ( mots)
Rédigé par : Marie-odile MITZIER

Au fil des années, la banalisation de l'outil informatique et l'arrivée des capteurs intelligents permettent des évolutions importantes en matière de contrôle des procédés. Le plus petit défaut, une anomalie, affectant les performances d'une installation sont aujourd'hui rapidement mis en évidence. Leur incidence est soigneusement analysée et l'intervention nécessaire décidée très souvent avant l'arrêt total « pour panne » de l'installation. Le secteur de l'eau n?échappe pas à cette tendance.

[Photo : Surveillance du procédé, alertes... la somme d'informations traitée devient de plus en plus importante dans le domaine de l'eau.]

La somme d'informations traitées dans le domaine de l'eau est de plus en plus importante : surveillance des pollutions, alertes... Les données sont collectées sur le site. Elles proviennent des usines de production d’eau potable et du réseau de distribution, des stations d’épuration et du réseau de collecte des effluents, mais aussi d'équipements distants comme les stations d'alerte, les forages, les prises d’eau... Une fois collectées et traitées, ces informations sont ensuite redistribuées auprès des nombreux intervenants.

« La tendance est aujourd'hui à l'interconnexion des postes de conduite pour échanger les données utiles et éviter du même coup la multiplication des points de mesure », explique-t-on chez Areal, la société qui commercialise le superviseur Topkapi.

Ainsi, les informations sur la qualité de l'eau sont transmises aux collectivités locales et aux exploitants. Les usines d'eau potable échangent des informations entre elles pour coordonner la gestion du réseau de distribution. Les réseaux de collecte des effluents communiquent avec la station d’épuration... Toutes ces données, correctement exploitées, permettent de voir toute dérive des procédés d’épuration, les dysfonctionnements des équipements, l'arrivée d’une surcharge de traitement. D’où l'aide importante que peuvent apporter ces informations pour la

[Photo : Couplé à la sonde InPro 4010, le transmetteur 2100 dispose de fonctionnalités élaborées.]

Conduite des équipements.

Cette masse de données collectées est d’autant plus intéressante qu'elle provient de capteurs et d'actuateurs de dernière génération. Ces équipements dits intelligents sont dotés d’une mémoire locale qui leur permet de stocker et d’exploiter sur place le signal avant de communiquer au superviseur leur état de fonctionnement — bon ou mauvais — ou encore leur dérive.

Alors, pourquoi ne pas se servir de ces données pour faciliter les tâches de maintenance ?

[Encart : Capteur analogique - capteur numérique Un capteur analogique conventionnel convertit une grandeur physique en un signal électrique analogique normalisé, le plus souvent du 4-20 mA. L’élément sensible, appelé transducteur, délivre un signal bas niveau (en microampère ou microvolt) en fonction de la grandeur mesurée et du principe physique (ou chimique) utilisé. Un étage d'adaptation permet l'amplification du signal. La mise à l'échelle est réalisée. Cette dernière opération est en général faite par deux potentiomètres. Le signal ainsi normé est transmis à l'unité de contrôle-commande. Pour pouvoir être traité par l'unité centrale il devra être numérisé par le biais d'une carte de conversion adaptée. Un capteur numérique se différencie par son étage d'adaptation qui n'est plus constitué d'un ensemble complexe de composants analogiques, mais par une unité de traitement logique : le microprocesseur. Cette technologie a permis de réels progrès tant sur le plan métrologique que sur celui de la mise en œuvre et de l'exploitation. Doté d'une mémoire locale, cet équipement peut réaliser in situ un traitement de l'information avant de communiquer ses données vers le système de contrôle-commande. Une des fonctionnalités importantes des capteurs numériques est la communication. Les équipements de dernière génération, compatibles avec les protocoles de communication des bus de terrain, peuvent interroger ou être interrogés à distance.]

Le plus de l'instrumentation intelligente

Il y a encore quelques années, il était courant de dire que « seulement 30 % des pannes ne remontaient jamais jusqu’au service de maintenance et qu’elles n’étaient, de fait, jamais corrigées. » Aujourd'hui, l'intelligence délocalisée auprès des capteurs et des actuateurs permet de réaliser des calculs élémentaires et d’analyser au plus près du point de mesure la qualité du signal recueilli. Ceci limite le risque de dérive de l’équipement dans le temps. Cette analyse est d’autant plus aisée que la mémoire locale autorise le stockage des courbes de réglage des vannes, les caractéristiques d'un moteur ou les données de calibration d'un capteur.

Prenons l’exemple de la sonde InPro 4010 de Mettler Toledo. Elle est destinée à la mesure du pH dans l’eau. Cette électrode comporte une sonde Pt100 ou Pt1000 (selon le modèle) permettant une compensation automatique en température. Le transmetteur de pH associé est simple d’utilisation. Sa programmation est réalisée à l’aide de pictogrammes qui informent également de l'état du transmetteur. L’appareil dispose de fonctions élaborées telles que l’étalonnage par reconnaissance automatique des tampons, le diagnostic continu de l’électrode et du transmetteur. Et c'est bien là une des évolutions majeures des capteurs dits intelligents.

Pour les actuateurs (vannes, commandes de moteur…) l'approche est similaire. Sur le plan du diagnostic, l’équipement intègre un outil d'autocontrôle qui le rend capable de signaler tout défaut. Il donne une indication précise de la cause du problème et peut très souvent en restituer l’historique. L'exploitation et le suivi de ces informations permettent d’intervenir à temps, avant la panne.

[Photo : L'opérateur peut programmer le variateur de vitesse UMV 2301 AS pour qu’il déclenche un plan de maintenance.]

Chez Leroy-Somer, par exemple, la configuration du variateur UMW 2301 AS, présentée au salon Elec’98 en décembre dernier, ne se contente pas de délivrer au moteur la quantité précise d’énergie dont il a besoin, ce qui lui permet de générer jusqu'à 35 % d'économie d’énergie par rapport à une installation sans variateur. L’opérateur peut le programmer afin de choisir une logique de commande (par potentiomètre, impulsions, vitesse préréglée ou consigne de débit). Un système d’alarme peut être paramétré pour déclencher les plans de maintenance et gérer les anomalies de fonctionnement.

Même les composants de type relais informent l’exploitant sur leur état de marche. C'est le cas des relais de la série F de Crouzet. Ils offrent à l'utilisateur une palette com-

[Photo : Même les composants, comme les relais, informent l’exploitant sur l'état de marche.]
[Photo : Avec TOPKAPI Vision 2.5, les mesures qui ne correspondent pas à certains critères sont éliminées d’office.]

Au-delà des fonctions traditionnelles de la supervision de la conduite des procédés, ces outils logiciels commencent à intégrer des fonctionnalités spécifiques à la maintenance. Ainsi, l’informatique recueille l'ensemble des données pour une gestion technique centralisée d'un site. Ces informations sont transmises à l’opérateur ou au prestataire de la maintenance qui peuvent ainsi suivre à distance le bon fonctionnement des équipements ou se déplacer rapidement en cas d’anomalie.

Par exemple, Apigraf d’Apilogic transmet aux intervenants sur le poste maintenance, en permanence, des messages explicites. Pendant le fonctionnement de la supervision, cet opérateur a accès à la documentation machine, au diagnostic de panne, à la visualisation et à la modification temps réel des paramètres du système piloté. Ce partage nécessaire des données est aujourd’hui rendu possible par une évolution des logiciels et des systèmes de communication de type Internet et Intranet.

Une exploitation en règle des données

Avec sa dernière version 2.5 de Topkapi Vision, présentée à Pollutec en novembre dernier, Areal élimine, pour rédiger les rapports de synthèse, les mesures qui ne correspondent pas à certains critères de validité. Ainsi, les capteurs en défaut, les opérations de maintenance non effectuées, les mesures aberrantes sont éliminées d’office.

Internet se positionne en force

Car aujourd’hui, les choses changent très vite. Le multimédia n’est plus l’apanage du monde de la bureautique et Internet pourrait bien détrôner rapidement le Minitel dans les tâches de consultation à distance. Déjà, de nombreuses entreprises ont développé des outils logiciels permettant l’accès via Internet aux données disponibles sur le superviseur. Ainsi, Arc Informatique a mis au point, pour sa suite logicielle PCVue Industrial Office, un composant appelé WebVue. Il s’agit de combler les besoins des postes déportés ou des équipements nomades en leur proposant des informations via le réseau Internet ou Extranet de l’entreprise. « Cette approche permet de réduire les coûts tout en améliorant la réactivité des personnes », explique-t-on.

[Encart : Télégestion d’installations techniques Spécialement conçu pour le contrôle à distance d’installation technique, la nouvelle génération de poste local de télégestion Softel S50 est entièrement exploitable par Minitel ou PC. Cet équipement offre tout un ensemble de fonctions : • Téléalarmes, télémesure, télécomptage, télécommande et téléréglage. • Transmission des informations par réseau téléphonique commuté RTC, lignes spécialisées et privées, liaisons radio, série GSM. • Archivage des informations sous forme de bilans et d’historiques. • Automatisme par la combinaison d’équations logiques, de calculs et de plages horaires. • Communications avec les automates. • Liaisons inter-sites pour gérer les asservissements. • Serveur vocal : réception d’alarmes vocales, acquittement des alarmes par téléphone, consultation des informations du réseau, boîte vocale…]
[Photo : Les logiciels de dernière génération recueillent l'ensemble des données pour une gestion centralisée d’un site.]
[Encart : Les nouvelles technologies au service des automatismes Les logiciels de simulation sont utilisés au Cirsee, le Centre de Recherche de Suez-Lyonnaise des Eaux, depuis plusieurs années. Ils servent à comprendre le fonctionnement des procédés. Ils en étudient les limites et permettent de connaître le comportement des installations au-dessus du point de charge, sans craindre la panne puisque les tests sont virtuels. Arnaud Cockx, jeune docteur ingénieur, travaille sur ce sujet. Il explique : « Ces outils permettent de mieux concevoir les stations et de prévoir leur fonctionnement. Ils peuvent également servir à résoudre les accidents en simulant une pollution accidentelle en analysant le comportement de l’installation et la façon d’éliminer les différents éléments. » Cette approche a été utilisée pour optimiser la réhabilitation de l’usine de Morsang-sur-Seine. Une simulation du fonctionnement et l’optimisation des différentes étapes du traitement a permis de baisser de façon drastique (de l’ordre de 30 à 40 %) la consommation d’énergie et de réactif. Les outils informatiques du Cirsee ont été développés par EDF pour les besoins du nucléaire. Sur l’ensemble de la chaîne de traitement, ils permettent d’optimiser les points de mesure (type de capteur, emplacement), le nombre de capteurs, la précision de la mesure… « Nous pouvons par exemple choisir entre différents capteurs ou relier deux paramètres de façon à mettre en place des capteurs moins coûteux. » Pour réaliser ce travail, il s’agit de bien comprendre tous les phénomènes physiques en jeu, puis de passer en revue la cinétique chimique et les transferts avant de prendre en compte l’influence des bactéries. Cette approche pluridisciplinaire est payante, mais elle demande une expertise polyvalente et une maîtrise de la mécanique des fluides, des cinétiques chimiques et biochimiques, sans oublier les facteurs d’échelle qui permettent de transposer ce qui se passe dans l’éprouvette à une simulation en taille réelle.]
[Photo : Toute dérive de l’équipement de production est analysée, comme ici à la station de traitement des boues de Marseille.]
[Photo : Le partage des données est rendu possible par l’évolution des logiciels et des systèmes de communication.]

Chez Arc Informatique, WebVue permet de visualiser et de contrôler à distance tout type de procédé au travers du réseau Internet. Le poste distant se comporte comme un client léger et ne demande aucun applicatif particulier, seulement un navigateur du marché. Les accès sont contrôlés par deux niveaux d’identification et la vérification de l'identité des opérateurs agréés. La sécurité d’accès à l’installation est préservée. Le format de communication ne peut pas être désassemblé. Tout transfert de données est crypté selon un format standard de protection.

L’option Guardian de WinCC, développée par Siemens, surveille en permanence par vidéo des zones sensibles et difficiles d’accès. Si l'état, la couleur ou le mouvement se modifie, la caméra enregistre l'événement et stocke les enregistrements dans une base de données vidéo. Il suffit ensuite à l'opérateur d'astreinte de cliquer sur les icônes pour que les enregistrements soient restitués.

Le système de courrier électronique sans clavier WinCC Messenger ouvre lui aussi de nouvelles perspectives. Il permet, par exemple, à l’utilisateur d’expédier le contenu de l’écran avec des commentaires parlés et dessinés vers un autre utilisateur, et d’en attendre une réponse.

Visualiser, diagnostiquer, agir sont les trois actions clés proposées par Fix WebServeur d'Intellution, un module logiciel à insérer dans l’approche Fix Dynamics. Cet outil permet de consulter en temps réel toutes les informations clés d’une installation quelle que soit sa situation géographique. Il suffit pour cela de se connecter sur le serveur pour obtenir des données chiffrées, les rapports de production ou les anomalies de fonctionnement. En cas d’urgence ou de dérèglement, il est possible d’intervenir en quelques secondes (à distance) pour rétablir la situation.

Basé sur la technologie Intranet/Internet, Wizcon est développé par PCSoft International. Cet outil visualise et pilote lui aussi l'application de supervision à partir de postes clients équipés de navigateur Internet.

Ainsi, tous les responsables peuvent rapidement avoir accès en temps réel à l'ensemble des informations présentes sur le système de supervision depuis n’importe où, par le réseau téléphonique. L'accès aux données est sécurisé par les outils de protection standard Internet. Une approche pratiquement similaire est adoptée par Ordinal Technologies avec Global Screen. Ce système de supervision permet un accès direct au journal d’alarmes depuis n’importe quel site géographique, dès l’instant où l’opérateur possède un code d’accès.

[Photo : Avec les nouveaux outils de supervision, tous les responsables peuvent avoir accès en temps réel à l’ensemble des données du process.]
[Photo : L’intelligence délocalisée permet des calculs au plus près du point de mesure.]
[Photo : Le logiciel transmet en permanence sur le poste de maintenance des informations explicites sur le fonctionnement des appareils.]

Si les outils sont là, les applications commencent seulement à pointer dans le domaine de l’eau.

Les applications arrivent

Ils sont de plus en plus nombreux présentés à Pollutec. Dans le domaine de l’eau les équipements intelligents commencent leur percée. Leur développement est suivi de très près par les centres de recherche de Suez-Lyonnaise des Eaux et Générale des Eaux. Pour Claude Lamoureux, Vice-Président d’Emerson Europe Water Solution Division : « L’instrumentation numérique peut beaucoup apporter au secteur de l’eau mais pour que les équipements intelligents trouvent leur place il ne faudrait plus dissocier les lots lors de la passation des marchés ». En attendant, Emerson organise un groupe de travail avec tous les acteurs du secteur : exploitants, ingénieries, fournisseurs de matériels, agences de l’eau… Réunis en Aquademy, ils vont travailler sur l’apport de ces nouvelles technologies.

[Photo : Toutes les données collectées sur le site sont traitées avant d'être redistribuées auprès des intervenants.]

Les 11 et 12 mars 1999 un premier Aqua Symposium va réunir à Angoulême tous les responsables qui s’intéressent au problème, autour du thème : « Comment relier le système d’automatisation à la création de valeur ».

Au programme : les enjeux économiques de l’industrie de l’eau, la convergence de l’automatisation et des systèmes d’information, les logiciels d’Asset Management, de supervision, les bus de terrain et l’instrumentation, les analyseurs et les moteurs intelligents.

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