Pour réussir à réduire efficacement le taux de perte d'un réseau, il faut bien sûr disposer des outils adéquats pour détecter les fuites, mesurer des débits. Mais il faut surtout de la méthode pour cerner et hiérarchiser les zones à problèmes et des personnels bien formés à l'utilisation de ses outils. Et bien sûr, l'indispensable continuité dans les actions menées pour pérenniser la performance du réseau sur le terrain.
Réalisé par , Technoscope
Pour réussir à réduire efficacement le taux de perte d’un réseau, il faut bien sûr disposer des outils adéquats pour détecter les fuites, mesurer les débits. Mais il faut surtout de la méthode pour cerner et hiérarchiser les zones à problèmes et des personnels bien formés à l'utilisation de ces outils. Et bien sûr, l’indispensable continuité dans les actions menées pour pérenniser la performance du réseau sur le terrain.
Le décret n° 2012-97 du 27 janvier 2012 relatif à la définition d’un descriptif détaillé des réseaux des services publics de l'eau et de l’assainissement et d'un plan d’actions pour la réduction des pertes d’eau du réseau de distribution d’eau potable va formaliser et surtout obliger les exploitants de réseaux. D’abord dans la connaissance fine de l’implantation réelle de leurs ouvrages ; ensuite dans le suivi régulier de leurs performances. Les systèmes d'information géographique seront une aide précieuse pour représenter et archiver les informations topographiques.
… et les caractéristiques physiques des réseaux (dimensions, matériaux…) ainsi que les historiques d’interventions. Construit au fil du temps, un réseau est rarement homogène, réparé en maints endroits, soumis aux sollicitations du terrain : circulation en surface, travaux à proximité qui déstabilisent, etc.
Les études menées sur les réseaux d’eau potable ont montré que les pertes sur un réseau sont inévitables. Le réseau a des points faibles : les joints, vannes de distribution, piquages de raccordement. Le problème réside moins dans la fuite importante que dans la multiplication de fuites insidieuses. Certaines sont très difficiles à détecter car elles ne génèrent pas, ou très peu, de bruit (fuites noyées) ; en outre les tuyaux polyéthylènes amortissent les bruits.
S’adapter à la nature des problèmes et aux réalités du terrain
La stratégie à développer devra s’adapter à la nature des problèmes et à la réalité du terrain. Un groupe de travail de l’Astee définissait en 2010 la stratégie dans le temps des plans d’actions à mener pour une amélioration continue de la connaissance fonctionnelle et patrimoniale du réseau. D’abord un diagnostic initial pour identifier les données disponibles, celles à collecter, définir les méthodologies et outils nécessaires. À court terme, c’est-à-dire 1 à 2 ans, il faut vérifier le parc de compteurs, suivre les prélèvements non comptés, gérer les pressions pour améliorer l’existant, installer des équipements de surveillance, initier une recherche de fuites systématique et dirigée, localiser et réparer les fuites. Ces actions, qui permettent de mieux analyser la situation, se poursuivent à moyen terme (3 à 5 ans) par l’adaptation du parc de compteurs, la poursuite de la gestion des pressions (réduction, modulation), la sectorisation du réseau, la prélocalisation acoustique à poste fixe, l’analyse des défaillances et une stratégie de renouvellement des équipements.
Grâce à la somme d’informations recueillies et analysées, il sera possible de renouveler préventivement des canalisations, des branchements et des organes du réseau… et surtout de pérenniser tout cet arsenal de matériels et d’actions au fil des
Les informations recueillies peuvent aussi alimenter la construction d’un modèle hydraulique du réseau.
La simulation et la modélisation permettront de tester des hypothèses de fonctionnement et de se faire une idée des vitesses de transfert de l'eau, d’évaluer des débits de pointe, des capacités de défense incendie, d’anticiper l’évolution des populations (création d'un lotissement) etc.
Une démarche progressivequi doit s’adapter au contexte local
Au cœur des actions de diagnostic, la sectorisation doit se déployer de manière progressive comme l’explique Alex Gaspar de Fuitexpert en l’adaptant au contexte local, urbain ou rural, avec la collaboration de tous les acteurs en cas de réseau actif sur plusieurs syndicats. L'étude initiale est décisive. Lors du Carrefour des gestions locales de l'eau en janvier, le syndicat d'Eau de Lezay (79) présentait son action : pour les 200 km de réseaux et 3 250 branchements l’audit patrimonial prévu sur 6 mois a duré un an et coûté 100 000 € (aide à 70 %). Réalisé par un cabinet spécialisé, il a demandé beaucoup d'investissement, du personnel du syndicat pour utiliser les archives et relever sur le terrain les coordonnées des points du réseau. Cette étape est indispensable et permet de dresser des cartes de temps de séjour, de pression très utiles pour la suite.
« La sectorisation elle-même consiste à définir des zones distinctes du réseau sur lesquelles les volumes mis en distribution sont mesurés et enregistrés en temps réel. Ceci grâce à des débitmètres enregistreurs notamment pour enregistrer le débit minimum nocturne » explique Alex Gaspar. Des mesures continues ou seulement sur quelques jours ou quelques semaines pour établir un diagnostic. Plusieurs solutions existent : les manchettes électromagnétiques fournies par Krohne, Engineering Mesures, Tecfluid ou encore Flow Lab Technologies, très précises, ou les débitmètres à ultrasons tels que le débitmètre portable UF 801-P d’Ultraflux, le Prosonic Flow d’Endress+Hauser, l’Optisonic de Krohne ou encore le ChronoFlo d’Hydreka ayant une autonomie de 2 mois sur batterie et l'UFL30 d’Isma. Autre solution, les sondes à insertion telles que HydrINS2 ou mini-HydrINS2 d'Hydreka, adaptables à partir d'un diamètre de 70 mm, évolutives d'une solution portable à une solution permanente sans changement de la sonde Primeprobe 2 de Primayer, 8045 de Burkert ou encore FPI-MAG™ de Cometec, adaptées à toute mesure sur des canalisations en charge transitant de l'eau potable ou brute. Elles nécessitent un piquage sur la canalisation mais, une fois celui-ci réalisé, il est ensuite aisé de revenir pour effectuer des mesures ponctuelles.
On peut aussi varier le périmètre de sectorisation pour mieux valider le diagnostic. Cette délimitation des secteurs relève d'un travail de spécialiste qu’il convient bien souvent de déléguer à des bureaux d'études. Pour affiner les mesures de rendement du réseau et mener correctement les campagnes de recherche de fuites, ces secteurs peuvent à leur tour être redécoupés en sous-secteurs. « Ceci est important pour éliminer de manière réfléchie les zones où il y a peu ou pas de fuites et se concentrer sur les zones à problèmes » insiste Alex Gaspar. La sectorisation doit permettre de dégager des indicateurs de casse de réseau, de débits de fuites mensuels, des indices linéaires de perte sur des sections identifiées et, plus globalement, de manière annuelle, l’évolution hebdomadaire des consommations pour les analyser finement.
Travailler sur des échelles de plus en plus restreintes
Après cette sectorisation à l’échelle kilométrique, la recherche ciblée de fuites
Proprement dite, elle se déploie à une échelle plus restreinte de la centaine de mètres pour les localiser et intervenir. La prélocalisation des fuites par des appareils installés de manière temporaire ou permanente sur certains composants du réseau s'est fortement développée, dopée par l’arrivée sur le marché de matériels efficaces, abordables et simples d’emploi proposés par Lacroix Sofrel, Perax, Wit, Primayer, Hydreka, vonRoll Hydro, SebaKMT, TD Williamson ou encore Sewerin. Les dataloggers (voir EIN 352) ont beaucoup progressé.
Le système Zonescan.net mis au point par Gutermann et commercialisé par T.D. Williamson (France) pilote l’ensemble des loggers Zonescan 820. Il a été conçu pour être un système autonome et permettre aux utilisateurs de s’affranchir de toutes les fonctions de recherche et de maintenance. Le système fonctionne via le réseau Internet et il suffit d’une connexion Internet à partir de n’importe quel ordinateur avec un mot de passe pour se connecter. Le système fonctionne autour du logger Zonescan 820 qui transmet les informations via un répéteur jusqu’au concentrateur Alpha. Une fois que les données sont collectées et compressées, l’Alpha transmet toutes ces dernières via la carte SIM GPRS. Toutes les informations sont stockées sur un serveur Gutermann qui a pour avantage d’avoir une maintenance en continu, une mise à jour des loggers et du software Zonescan.net. Chaque jour, l’utilisateur a accès à une base de données qui lui permet de contrôler l’état du réseau et de vérifier s’il y a une présence de fuite, d’avoir une corrélation automatique pour lui indiquer la position de la fuite. L’utilisateur a la possibilité de visualiser les données du bruit aussi bien en fréquences (Hz) qu’en décibels.
bels (DB) et d’écouter ce bruit directement depuis son ordinateur. Le logiciel Zonescan.net analyse lui-même le bruit et affiche la qualité de celui-ci en tenant compte de la fréquence et des bruits parasites. Cette analyse est très importante car elle évite les recherches inutiles et se traduit par un gain de coût non négligeable.
Par ailleurs, une interface Google permet une visualisation soit sur le plan de la ville, soit sur la photo. Il est également possible d’intégrer le plan du réseau (à condition qu’il soit numérisé) ce qui permet de faire des corrélations manuellement à partir du bureau.
Automatiquement, le logiciel Zonescan.net transmet toutes les données techniques du logger, du répétiteur et des alphas. En cas de défaut, une alarme signale à l'utilisateur l’appareil qui est en panne ou qui n’a pas pu être relevé.
Le N3 de SebaKMT est capable de fonctionner verticalement ou horizontalement en mode immédiat, temporaire ou permanent (GSM) en assurant une reconnaissance automatique des nouveaux loggers ajoutés.
L'Ortomat MT de vonRoll Hydro est capable de fonctionner selon une plage horaire définie ou en continu. Il est doté d'une fonction de surveillance des poteaux d’incendie (vol d'eau). La programmation et la relève peuvent se faire par GSM et/ou radio. Le logiciel permet la programmation des appareils, le rapatriement des données par FTP et leur analyse.
Le Xilog+ de Primayer peut stocker jusqu’à 500 millions de données. Jjilog d’Ijinus, multi-protocoles, peut recevoir jusqu’à 10 capteurs. Le LS, de Lacroix Sofrel, spécialement conçu pour ce type d’application, dispose d'une autonomie allant jusqu’à 10 ans, communique désormais en GPRS, peut être équipé de deux capteurs de pression, et peut être prolongé par différentes solutions de centralisation et d’exploitation des données.
Le système de télérelève P16XT de Perax permet de mesurer des débits et pressions sur les canalisations avec un pas de temps pouvant aller jusqu’à 2 mn ; il dispose d'une option de communication spécifique avec les débitmètres électromagnétiques MAG8000 de Siemens afin de transmettre les données lues directement dans le débitmètre, ainsi que les informations d’auto-diagnostic pour la validation des données. Il est entièrement paramétrable et réglable en local ou à distance via SMS.
Chez Wit, les multiples entrées/sorties du TwinY, compatibles avec tous les types de compteurs impulsionnels et capteurs 4-20 mA et 0-10 V du marché, permettent de répondre aux applications standards de sectorisation ainsi qu’aux plus spécifiques avec, par exemple : détection de l’ouverture du regard, surveillance de l'état des capteurs, commande de vanne, etc. TwinY existe en deux versions : pile ou alimenté par une source externe, tel qu'un panneau solaire pour une autonomie sans limite, sans maintenance et respectueuse de l’environnement. Son modem GSM/GPRS permet de diffuser les enregistrements de manière efficace et à moindre coût, périodiquement ou sur événement. Il est également possible de consulter et de commander en temps réel les états de TwinY par SMS depuis son téléphone portable.
Bref, les outils permettant d’assister l’exploitant à chaque étape d'une démarche de sectorisation sont matures. Sensibles, autonomes en énergie, résistants et communicants, ces outils peuvent même communiquer entre eux via des passerelles industrielles multi-protocoles programmables. Selon les zones et les matériaux des canalisations, on peut entendre des fuites sur 200 à 250 m de réseau. Dès la détection de bruits, ces appareils télétransmettent une alarme. « La recherche sera affinée par des corrélateurs acoustiques puis par de l’écoute directe au sol pour localiser la fuite à moins de 1 mètre », précise Maxime Kieffer, responsable marketing chez Sewerin. « Ces appareils ont progressé sur un plan acoustique et sur la détection des basses fréquences, une nécessité avec le développement des canalisations polyéthylène qui amortissent les bruits à haute fréquence ».
Si les performances des appareils s'améliorent, Alex Gaspar pointe aussi la nécessité d’une bonne formation des utilisateurs de ces détecteurs acoustiques : « On voit encore trop de personnels mal formés aux matériels ». Une autre solution consiste à recourir aux services de spécialistes de la détection des fuites tels que Gerris (vonRoll Hydro), Geowest, Héliotrace ou Fuitexepert.
Tout ce travail de sectorisation, sous-sectorisation, de mise en place de prélocalisateurs, de recherche pas à pas des fuites.
Une solution complète en matière de sectorisation
Polier Water, représentant français du fabricant de compteurs d'eau, débitmètres et systèmes de télérélève Arad, propose une solution complète de sectorisation d’eau potable.
Le débitmètre Octave, breveté, possède des performances métrologiques équivalentes à celles d'un débitmètre électromagnétique. Il a l'avantage d'avoir une longue autonomie (garantie 10 ans), de s'installer sans longueur droite en amont ou en aval et de présenter un excellent rapport qualité/prix.
Le débitmètre Octave mesure les volumes d’eau et débits circulant dans les canalisations. Il est complété par le boîtier Dialog3G Cellular qui permet de transmettre par GPRS les données de 1 à 4 compteurs ou débitmètres. En bout de chaîne, les informations de sectorisation sont accessibles par Internet grâce à la plateforme de gestion CityMind.
« La solution Octave + Dialog3G Cellular est très simple d’installation et d'utilisation, souligne Loïc Charron, Directeur Général Polier Water. Comme tous les paramètres sont configurés en usine, la pose du système se fait sans paramétrage sur le terrain ».
À l'occasion d'un vaste plan de télégestion de l'ensemble des compteurs et débitmètres installés sur son réseau, Mekorot, principale société publique de distribution d'eau en Israël, a choisi d'équiper son parc avec 12 000 Dialog3G Cellular. Le boîtier Dialog3G Cellular permet de relever à distance de un à quatre équipements en passant par le réseau de téléphonie mobile.
Qui aboutit à une intervention pour réparation (changement d’un tronçon, d’une vanne, réparation ponctuelle) ne s’arrête pas là ! « Il faut impérativement repasser sur le secteur réparé pour connaître le gain réel de l'intervention (recherche de fuite et réparation). Après réparation, on peut tout à fait découvrir d'autres fuites non détectées lors de la première campagne ou révélées ou provoquées par la remontée en pression du réseau suite aux réparations. Il est donc essentiel de refaire des mesures de débit pour voir leur évolution ».
L'amélioration du rendement des réseaux rejoint le mythe de Sisyphe. C'est surtout une affaire de méthode et de régularité.
Le coût de mise en œuvre des techniques acoustiques augmentant avec l'amélioration des rendements de réseaux, une autre méthode consiste à travailler sur la modulation de pression de manière à adapter le niveau de pression en temps réel au besoin et ainsi diminuer les débits des fuites existantes et à moins solliciter les réseaux (diminution des casses).
Hydreka propose aujourd'hui une gamme complète de modulateurs de pression s'adaptant à chaque situation : la famille ControlMate qui s'installe sur les vannes de réduction de pression (PRV) de toutes marques du marché. Il est alors possible de moduler la pression sur un secteur en fonction de plages horaires, de tables débit/pression mises à jour automatiquement dans la version ControlMate SiClops 2, par contrôle continu de la pression requise au point critique du secteur.
Le grand avantage de cette gamme ControlMate est d'être totalement autonome, tant sur le plan énergétique que du traitement des données de pilotage des PRV. En effet, ces produits ne nécessitent aucune liaison vers des serveurs de traitement de données, pour plus de sécurité.
Mios développe de son côté une solution intégrée pouvant gérer plusieurs capteurs de pression et communiquant en GPRS avec une interface métier full web. Le produit, baptisé MiosFlow, se présentera sous la forme d'un boîtier autonome et disposera d'une autonomie de quatre années. Il sera commercialisé avant la fin de l'année 2012.