Le recyclage d'eau dans les procédés industriels est une réalité et se met en place progressivement dans un souci de productivité et d'économies d'énergie, dans une logique de circuit court sur une machine ou un procédé. Sous la pression administrative, du prix de l'eau et de la rareté de la ressource, l'industrie passe à la réutilisation des eaux dans une logique plus environnementale avec un circuit plus long et des débits d'eau traités plus importants. La réutilisation se pratique au niveau d'un site, voire d'un parc industriel.
Réalisé par , Technoscope
Le recyclage d’eau dans les procédés industriels est une réalité et se met en place progressivement dans un souci de productivité et d’économies d’énergie, dans une logique de circuit court sur une machine ou un procédé.
Sous la pression administrative, du prix de l'eau et de la rareté de la ressource, l'industrie passe à la réutilisation des eaux dans une logique plus environnementale avec un circuit plus long et des débits d'eau traités plus importants. La réutilisation se pratique au niveau d’un site, voire d’un parc industriel.
Toutes les industries sont consommatrices d'eau à des degrés divers et susceptibles de rejeter des eaux polluées. Chaque site industriel a ses contraintes vis-à-vis des ressources disponibles (réseau ou captages) et des possibilités de rejets dont le traitement est plus ou moins poussé selon les exigences générales et locales. Les municipalités acceptent de moins en moins les effluents industriels, sinon après un prétraitement.
Avec les exigences de la DCE (Directive cadre) relative au bon état des masses d'eau, celles de la directive IPPC 2008/1/CE relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution, et les pénuries annoncées sur la ressource en eau, les industriels doivent mettre en œuvre des solutions efficaces. À l'intérieur d’un site industriel, les utilisations de l'eau sont diverses, et il faut distinguer les différentes qualités d’eau nécessaires et leur degré de pollution après usage pour décider de la pertinence de tel ou tel traitement de recyclage qui conduira à une deuxième utilisation de l'eau.
L'eau peut faire partie du produit comme dans l’industrie des boissons (bière, boissons aux fruits etc.) et se trouve exportée du site ; plus généralement, elle sert de solvant, de support pour des matières en suspension, d’agent de chauffage ou de refroidissement et très communément aux rinçages des produits fabriqués ou des installations de production, sans oublier la production de
vapeur. Chaque usage nécessite une qualité particulière, de la plus ordinaire pour le nettoyage de sols et d’aires de stationnement, à la plus élevée en microélectronique, en pharmacie ou en agroalimentaire.
Distinguer recyclage et récupération
On distingue deux grandes pratiques dans le multi-usage de l'eau : le recyclage et la réutilisation. Le recyclage est un circuit court, l'eau reste au niveau d'une machine ou d’un procédé et subit un traitement local. La réutilisation se pratique sur un flux d’eaux mélangées issues des différents ateliers de l'usine, fréquemment au sortir de la station de traitement du site ; ce flux s'apparente donc à une nouvelle ressource disponible, au même titre qu’un nouveau forage. « En pratique le terme réutilisation est souvent utilisé pour qualifier les deux notions » remarque Sylvie Baig, responsable scientifique innovation chez Degrémont et en charge de la coordination de la plateforme Recherche et Innovation pour l'Industrie R2I dirigée par Ondeo Industrial Solutions pour Suez Environnement. Sur le plan général du bilan en eau du site, l'économie est évidente : la ressource locale est moins sollicitée et les rejets sont réduits. Pour l'industriel, l'économie est double : moindre consommation et moindre taxation vis-à-vis des eaux polluées rejetées. « Dans les années 2000 émerge la notion de “rejet zéro” (Zero Liquid Discharge) basée sur un recyclage extrême grâce à des filières de traitement. Un concept marketing qui n’a connu que quelques vraies réalisations » affirme Sylvie Baig. Une situation parfaite avec un impact nul sur la ressource et sur le milieu. Certaines installations de traitement de surface des métaux ont adopté de telles méthodes (notamment en utilisant des techniques d’évaporation) et ces entreprises en tirent une image positive sur le plan environnemental et c’est un moteur réel. « La réutilisation, en réduisant l’impact des installations industrielles, procède plus d’une démarche environnementale des entreprises » souligne Frédéric Jeannot, chef des ventes France et Afrique du Nord de Pall traitement des eaux. En pratique, les débits concernés en recyclage sur un procédé sont de fait inférieurs aux débits de réutilisation formés par mélange d'eaux de différentes provenances.
« Les paramètres qui orientent la réutilisation d'eau sont d'une part locaux comme le prix d’achat de l'eau et les coûts de traitement des eaux résiduaires et d'autre part techniques comme les opportunités de recyclage dans le procédé (en rapport avec le niveau d’impact sur ce procédé) et le niveau de connaissance des pollutions générées par ce procédé » explique Sylvie Baig. Le besoin d’épuration de cette eau usée se traduit par une unité de traitement supplémentaire (investissement, place au sol) et une consommation énergétique. La directive-cadre européenne sur la restauration d'une bonne qualité des masses d'eau et les législations locales, partout en Europe, vont dans le sens d’une augmentation des coûts, et poussent aux économies d'eau et à la réduction des émissions polluantes. Concernant les conditions techniques, l'industriel doit évaluer finement l’impact d'un recyclage sur sa production. Une installation de recyclage introduit un
Le risque supplémentaire, celui de rupture de production par défaut d’approvisionnement en eau de l'installation. Sylvie Baig relate dans l'industrie pétrolière un cas de recyclage d'eau de refroidissement apportant une économie de 100 k€/an, face au coût de rupture du refroidissement qui se chiffre à 150 k€/h en raison de l’arrêt d'installation. Toutes les installations ne sont pas à ce niveau, mais le risque existe et doit être maîtrisé.
Aussi, avant de se lancer dans une opération de recyclage – réutilisation d’eau, il faut adopter une démarche systématique d’analyse de la circulation des eaux dans un procédé, un atelier, le site complet (différents périmètres) pour parvenir à une gestion raisonnée de l'eau et s’orienter vers telle ou telle technique. Connaître et comprendre les mécanismes du procédé conduisant aux différents flux de pollution (qualité et quantités), penser à séparer des flux selon leur origine, mettre en œuvre d’abord les solutions les plus simples comme la chasse aux fuites et le contrôle des débits, etc. « Tout ceci implique une collaboration étroite entre l’industriel et la société qui définira le ou les procédés à mettre en œuvre. Il est donc essentiel que celle-ci soit multi-technologies pour définir le schéma de recyclage spécifique à chaque site industriel et au contexte local », précise Sylvie Baig.
qu’un problème d’eau. L’opération de recyclage est bien souvent l’occasion de récupérer un réactif donc de faire des économies de matières. Dans l’agroalimentaire qui génère beaucoup d’eaux de rinçage, le nettoyage en place, CIP (Clean in place), consomme de la soude ou de la potasse pour éliminer toute matière organique et organismes pathogènes. Le processus global de nettoyage est donc très consommateur à la fois de réactifs et d’eau. Les membranes viennent à point pour traiter ces différents effluents, d’autant plus que les membranes céramiques sont capables de résister à des pH extrêmes et des solutions chaudes. Pall cite des exemples dans les jus d’agrumes dans lesquels des membranes minérales Membralox servent à recycler la soude caustique à hauteur de 40 % de la consommation, ce qui réduit à la fois la consommation d’eau pour la dilution et la quantité d’effluents. Le temps de retour est estimé à deux ans. Dans certains cas, des effluents peuvent servir à en neutraliser d’autres, évitant ainsi le recours à des réactifs spécifiques. Autre alternative, le nettoyage en place à l’ozone. L’application de l’ozone permet de réduire de 50 % la consommation d’eau par cycle et élimine la moitié de la charge organique produite tout en conservant la même efficacité de lavage et de désinfection que pour les techniques de lavage chimiques conventionnelles (voir la démonstration faite dans le cadre du projet Life 05 ENV/E/000251).
Outre la matière à récupérer, il y a aussi de l’énergie car l’eau est bien souvent chaude. La calorie n’a pas la même valeur selon le niveau de température mais même à basse température, les possibilités existent, il suffit d’élargir le périmètre de valorisation. Ainsi Evonik-Degussa, sur le site de production de noir de carbone de Kalscheuren en Allemagne, disposait d’eau à 35 °C, refroidie dans une tour spécifique. Une température trop faible pour l’industrie mais que les producteurs d’asperges alentour apprécient depuis deux ans : 230 000 m² de culture sont ainsi réchauffés par 220 000 m de tuyaux. Pour les agriculteurs, la saison est avancée d’environ six semaines, ce qui leur redonne de la compétitivité face aux productions importées. Seule une partie du flux est détournée sur quatre mois, mais le bilan est conséquent : 29 TWh/an, soit l’équivalent de 2 400 m³ de fioul et 6 500 t de CO₂ évités pour les agriculteurs et, pour l'industriel, une économie de 14 m³/h, soit 40 000 m³ d’eau de puits.
Il faut donc élargir le champ de réflexion de la réutilisation d’eau. On peut s’interroger sur les coûts de ces installations et opérations de recyclage et de réutilisation dont on peut penser qu’elles vont grever la rentabilité des sociétés. La notion de temps de retour sur investissement est trop courte car elle ne considère trop souvent que des coûts directement évaluables, le prix du mètre cube d’eau et les redevances. Une étude Degrémont sur une dizaine d’installations industrielles (3 centrales, 2 papeteries, du textile, de l’agroalimentaire et de l'automobile) indique des temps de retour sur investissement compris entre cinq ans pour les installations les plus complexes et huit mois pour les mesures les plus simples. Mais comment chiffrer la meilleure connaissance du procédé
qui conduira à moins d’incidents de production (voire à productivité accrue), à la maîtrise de la corrosion et de l’entartrage d’installations, etc.? La réflexion sur l’utilisation d’eau participe d’une amélioration générale de la production, et peut servir aussi l’image de marque d’un site et d’une entreprise, ce qui n’est pas négligeable aujourd’hui. Un autre paramètre à long terme doit être considéré : réutiliser l’eau, c’est se garantir une source d’approvisionnement et respecter l’accès prioritaire de la population aux ressources naturelles (voir encadré pénurie).
Une offre technologique très large
Recyclage et réutilisation d’eau sont possibles au travers d’une large panoplie de procédés qui ont tous progressé depuis une dizaine d’années. Procédés physiques comme la décantation, la centrifugation, la filtration, l’évaporation, et tous les procédés membranaires, et procédés physico-chimiques comme la floculation, l’échange d’ions, l’ozonation, etc. Utilisés isolément ou combinés, ils sont proposés par de nombreux prestataires tels qu’Actibio, Afig Foessel, Atys Sobek, Biome, Corelec, Labono, Proserpol, Serep, TIA, Tecnofil ou Vivlo.
Certains, tels Veolia Eau Solution et Technologies, Ondeo Industrial Solutions, Degrémont ou Stereau disposent d’un large portefeuille de technologies propriétaires, rustiques à innovantes, qui leur permet de disposer aujourd’hui de nombreuses références dans le monde pour des applications dédiées à chaque secteur industriel : papeterie, métallurgie, automobile, traitement de surfaces… Ils associent au cas par cas des technologies conventionnelles à des techniques plus avancées avec, comme principaux critères de choix, les performances attendues, les coûts d’investissement et d’exploitation, la facilité de conduite et les contraintes d’exploitation. C’est le cas de Hytec Industrie, par exemple, qui met en œuvre de façon indé-
Eau pure
Depuis 1975, Proserpol s’est spécialisé dans la conception et la réalisation d’installations de traitement et de recyclage d’effluents liquides. Proserpol s’appuie selon les cas sur une combinaison de procédés physico-chimiques, biologiques, thermiques et membranaires. Corelec Environnement, spécialiste des process de type zéro rejet liquide sur site, s’appuie principalement sur les technologies de recyclage par évaporation et concentration sous vide (pompe à chaleur, recompression mécanique de vapeur, eau chaude/eau froide, surconcentration) qu’elle met en œuvre soit directement, soit en aval de systèmes de pré-conditionnement (station physico-chimique, technologie membranaire).
L’Eau Pure propose de son côté le procédé Oxymem en vue d’une réutilisation des eaux usées traitées pour une valorisation en irrigation ou en vue d’un rejet en zones sensibles. Vivlo installe des évaporateurs sous vide ou à compression mécanique de vapeur pour permettre le recyclage des eaux de process. Les évaporateurs peuvent être complétés par des prétraitements, comme une déchromatation pour transformer des chromes hexavalents en chromes trivalents, et également des post-traitements comme une filtration du distillat de l’évaporateur sur un osmoseur, pour assurer la qualité de l’eau recyclée. Fort de vingt ans d’expérience dans ce type de procédé, Vivlo possède des solutions et des références dans tous les secteurs industriels ; la plus vieille machine toujours en fonctionnement a dix-huit ans d’âge, installée dans l’industrie mécanique. La cosmétique, le traitement de surface, la mécanique, l’agroalimentaire peuvent tous recycler leurs eaux de process à des coûts de fonctionnement inférieurs à un traitement classique. « L’évolution des normes de rejets et la volonté industrielle de produire propre amènent les industriels à imposer des systèmes de traitement permettant le recyclage des eaux de process », explique Julien Brochier, responsable commercial de Vivlo. Le recyclage des eaux de process impose souvent la combinaison de plusieurs techniques de traitement des eaux classiques, « tout l’art de ce métier est de monter une solution technique qui conjugue performances et rentabilités ».
Serep, spécialisée dans le traitement des eaux industrielles, conçoit et commercialise des unités compactes de traitement par des procédés traditionnels (physico-chimique, évaporateur sous vide, …) et innovants (électrocoagulateur à anode creuse cylindrique Solvin, ozonation catalytique). Le procédé d’ozonation catalytique permet d’abattre la DCO dure même récalcitrante à toute oxydation (Fenton, ozone seule, …) sans générer de boues. La première installation en France sera mise prochainement en service pour accroître la biodégradabilité d’un effluent entre deux étages d’un traitement biologique.
Ovive, par le biais de sa technologie Biomembrat Plus, permet de recycler 200 m³/h d’effluents en sortie de station d’épuration conventionnelle par une simple combinaison de filtre à sable et de nanofiltration. « Ces technologies sont bien adaptées aux effluents contenant une pollution azotée et de la DCO dure », souligne Amaury Bierent, Ovive.
Pall conçoit, fabrique et installe des unités de traitement des effluents reposant sur les technologies membranaires telles que la micro, l’ultra, la nanofiltration et l’osmose inverse. « Au niveau de la réutilisation d’eau, les procédés membranaires sont une solution de choix y compris dans les bioréacteurs à membrane », explique Frédéric Jeannot. « Les technologies mises en œuvre en réutilisation sont plus complètes que pour le recyclage car elles nécessitent le plus souvent une élimination des contaminants particulaires et dissous ». En traitement d’eau issue d’une station d’épuration industrielle, l’étape de préfiltration est particulièrement importante.
[Encart : Les biotechnologies au secours de la réutilisation des eaux usées La barrière psychologique qui pèse sur la réutilisation des eaux usées doit être franchie dans certaines régions pauvres en ressources d’eau. Dans cette perspective, les outils biotechnologiques pourraient permettre de garantir la qualité de l’eau. Les nouvelles générations d’organismes vigies possèdent des caractéristiques physiologiques suffisamment proches de la santé humaine.Consommer moins en respectant l’environnement
Watercycle met en œuvre des solutions économiques pour le traitement de tous types d’effluents, le recyclage des ressources en eau et la réutilisation des eaux de lavage, de process ou des eaux usées : transporteurs, transports en commun, stations de lavage, papeteries, textiles, abattoirs, blanchisseries, verriers, chimie, piscines, aquariums, capitaineries, hôtels, flottes d’entreprises, etc.
Le système d’épuration et de recyclage fonctionne selon le cycle suivant : dégrillage statique à maille fine et relevage, accélération de séparation des corps lourds, séparation des hydrocarbures dans un bassin de décantation primaire, traitement anaérobie via un système innovateur constitué par un filtre mixte (mousse & coalescence), traitement aérobie d'affinage des eaux usées en sortie du réacteur anaérobie après floculation, filtration finale sous pression à travers trois filtres à lits mélangés.
Le concept Watercycle est autonome, modulable et traite des capacités de 1 m3/h à 12 m3/h. Son intégration est facile car son encombrement au sol est réduit (4 à 6 m), sa mise en place est simple pour un bon fonctionnement des membranes d’osmose. Contrairement à ce que l'on rencontre classiquement dans la production d’eau ultrapure sur de l’eau potable, les étapes de microfiltration et d’ultrafiltration sont indispensables pour la pérennité des procédés d’osmose.
Cela dit, avant d’adopter des procédés complexes, les solutions simples doivent être épuisées. Dans l’industrie du traitement de surface, le rinçage des pièces en cascade, la réutilisation d’eaux de rinçage pour compenser l’évaporation ou préparer des bains ont apporté des économies substantielles. « En chimie, en pharmacie, les réacteurs sont nettoyés par des têtes rotatives avec jets d'eau haute pression et les dernières eaux de rinçage sont utilisées comme premières eaux de lavage ce qui réduit la consommation d’eau par rapport à des remplissages complets » explique Eric Marcellin, responsable pharmacie et biotech de Boccard.
Toutes les branches industrielles développent des solutions. Dans le transport aussi on recycle de l'eau : une installation exemplaire dans sa conception réalisée par Proserpol permet le recyclage des eaux de lavage des rames de TGV en associant préfiltration, nanofiltration et évapoconcentration. En matière de valorisation de la biomasse, Proserpol a développé un procédé permettant de produire du biogaz et de l’électricité sans rejet d'eau. Il associe ultrafiltration, osmose inverse et évapoconcentration. Les solutions concentrées sont valorisées sous forme d’engrais liquide. Dans la chimie, l’action “Responsible Care” est l’engagement de l'industrie chimique pour le développement durable et les questions de sécurité et d’environnement. Chaque année un concours est organisé qui inclut les problèmes d’eau. En 2007 le site de Terneuzen (Pays-Bas) de la société Dow a été récompensé. Il utilise les eaux usées municipales de la localité comme source d’approvisionnement. En fait cet effluent est traité par la société Evides pour préparer de l'eau déminéralisée livrée à Dow pour ses besoins de production de vapeur. 7 500 m3 d’effluents ne sont plus rejetés dans l’estuaire de la Scheldt, et cette eau remplace l'eau de mer utilisée précédemment pour produire l'eau pour la vapeur avec une dépense importante d’énergie et de réactifs chimiques. Le site a une tradition d’économie d’eau puisque la moitié de ses besoins (60 000 m3 au total) sont déjà issus du recyclage et de la récupération d'eau de pluie.
Sur un autre site produisant du polyéthylène à Tessenderlo (Belgique), Dow a développé d'autres solutions qui ont conduit à diviser par deux ses rejets d’eaux usées mais aussi à réduire sa consommation spécifique d’eau. Les eaux de pluie collectées sur le site sont dirigées dans un bassin qui accueille aussi de l’eau de procédé chaude et basique (90 °C et pH 12, près de 40 000 m3/an) ; ces conditions évitent les proliférations de microorganismes. Mais cette eau sert aussi à déferriser de l'eau de forage apportant une double économie : pas besoin d'acide chlorhydrique pour neutraliser l’effluent (moins de charge en chlorure) et précipitation “naturelle” du fer sur une consommation moindre d’eau de forage. L’économie d’eau atteint près de 100 000 m3 par an.
Veolia Eau Solutions et Technologies réalise à Honolulu une réutilisation d’eaux usées municipales. Les eaux issues d’un traitement biologique sont épurées par microfiltration puis osmose inverse et alimentent une raffinerie et une centrale électrique. L’installation traite 45 000 m3/j. Un exemple parmi d'autres de réalisations utilisant les eaux municipales vers l'industrie. Ondeo IS cite l’exemple de réutilisation d'eau usée dans la raffinerie de Tarente (Italie). Les eaux issues de la station d’épuration biologique mélangées aux eaux de pluie forment un flux maximum de 550 m3/h traité par ultrafiltration en prétraitement.
Gagner de l’argent avec ses effluents ?
Traiter 200 ou 300 m³ d'effluents peut coûter plusieurs dizaines de milliers d’euros. Ridel Environnement vient donc de présenter au Salon technologique de Hanovre une machine révolutionnaire : un évaporateur à compression mécanique de vapeur qui permet non seulement des sources d’économies mais également de rentabilité : coût réduit du traitement des effluents, moins de consommation d'eau et moins d'entretien, économies d’énergie... La consommation énergétique est, en effet, divisée par dix, la vapeur récupérée étant compressée mécaniquement pour ensuite chauffer et distiller l'effluent à traiter.
Son atout majeur est la circulation forcée obtenue grâce à une pompe de circulation. Celle-ci garantit une vitesse élevée de l'effluent à travers l'échangeur, ce qui autonettoie les tubes et limite les dépôts. De même, cette pompe permet d’extraire le concentrat 24 heures sur 24, dès lors l’installation fonctionne en continu.
Autre avantage important, cet évaporateur agit en synergie avec un autre mode de traitement qui peut remplacer l’osmose inverse et produire de l’eau déminéralisée pour la préparation d'eau de chaudière. La partie ultrafiltration utilise des membranes Zeewed500d pour une surface totale de 22 400 m². Le perméat alimente l'osmose inverse qui utilise des membranes de type SW (eau de mer) dans un premier étage et de type BW (eau saumâtre) dans un second étage. L'installation tourne depuis mi-2006 et alimente en totalité le besoin en eau de la production d’énergie. Résultats : le rejet d’effluent a été réduit de 70 % et le coût d’approvisionnement en eau déminéralisée a fortement diminué.
La raffinerie de Grandpuits (77) économise 500 000 m³ d'eau de forage en utilisant comme appoint d'un circuit de refroidissement des eaux huileuses épurées selon une conception Degrémont. Au passage, ce recyclage a entraîné un meilleur contrôle de la vitesse de corrosion de l’acier dans l’installation sans perte d’échange thermique.
Au Mexique, Pemex a développé, avec Degrémont, sur sa plus grosse raffinerie un programme depuis 1999 qui a réduit le prélèvement d’eau de barrage de près de 7 100 m³/h à moins de 12 000, en recyclant ses eaux résiduaires urbaines ainsi qu'un recyclage poussé des eaux des circuits de réfrigération.
Le secteur agroalimentaire est tout aussi intéressé par la réutilisation de l'eau mais avec précautions car les industriels redoutent le contact de cette eau réutilisée avec les produits élaborés. Pas de problème lorsqu’il s’agit de recycler l’eau de lavage de betteraves à sucre dans cet usage, ou de réutiliser de l'eau d’un abattoir de porcs comme pratiqué à la Cooperl à Lamballe (bioréacteur Biosep de Veolia Eau sur 16 000 m³/semaine et recyclage partiel) dans les Côtes-d’Armor.
Mais il reste une barrière psychologique vis-à-vis du grand public lorsqu’il s’agit de l'eau en contact avec de futurs aliments. Et pourtant, en matière de pureté, l’industrie électronique, sans doute la plus exigeante sur la qualité de l'eau, n’hésite pas à utiliser de l’eau issue d'un traitement biologique comme le montre, entre autres, la réalisation de Veolia Water à Singapour avec une capacité de production de 60 000 m³/j.