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Réseau de surveillance mésologique et biologique du littoral de Charente-Maritime

30 janvier 1998 Paru dans le N°208 à la page 40 ( mots)

Les données physico-chimiques et bactériologiques accumulées en routine depuis 3 ans par la Cellule Qualité des eaux du littoral de Charente-Maritime ont fait l'objet d'analyses multifactorielles ACP,AFC) qui ont permis de mettre en place une typologie des milieux : "baie continentale", "estuaire", "côtier", "marin" et "baie des îles". Les relevés zoologiques effectués le long de transects déterminés, font apparaître que certaines espèces peuplant les estrans peuvent être considérées comme indicateurs des conditions du milieu. Une systématisation de cette technique devrait conduire à la mise au point d'une méthode de profils biologiques pour le littoral.

[Photo : Élise Perrocheau, Cellule de la qualité des Eaux, DDE de Charente-Maritime]
[Photo : Michel Séguignes, Laboratoire de Biologie et Biochimie Marines]
[Photo : E. Tardy, Laboratoire de Biologie et Biochimie Marines]
[Photo : Gilles Limouzin, Cellule de la qualité des Eaux, DDE de Charente-Maritime]
[Photo : Régis Hardy, Cellule de la qualité des Eaux, DDE de Charente-Maritime]
[Photo : J. Tardy, Laboratoire de Biologie et Biochimie Marines]

Les données physico-chimiques et bactériologiques accumulées en routine depuis 3 ans par la Cellule qualité des eaux du littoral de Charente-Maritime (CQEL - DDE 17) ont fait l'objet d’analyses multifactorielles (ACP, AFC) qui ont permis de mettre en place une typologie des milieux : « baie continentale », « estuaire », « côtier », « marin » et « baie des îles ». Les relevés zoologiques effectués le long de transects déterminés font apparaître que certaines espèces peuplant les estrans peuvent être considérées comme indicateurs des conditions du milieu. Une systématisation de cette technique devrait conduire à la mise au point d’une méthode des profils biologiques pour le littoral.

Les eaux douces ont depuis longtemps une zonation basée sur leur cortège faunistique (Illies et Botosaneanu 1963) ayant permis de proposer une biotypologie des cours d’eau (Verneaux 1977). Chaque méthode a même fait l'objet d’une évaluation de sa pertinence (Malechaux-Ferrand 1996). Il n’en est pas de même du milieu marin et du littoral en particulier. Si la zonation altitudinale des êtres vivants des zones littorales à biodiversité élevée a fait l'objet de nombreuses études (De Beauchamp 1914, Chapman et Trevarthen 1958, Peres 1957, Lewis 1964, Newell 1979), à l’inverse les travaux sont peu nombreux sur les zones littorales à faible biodiversité en relation avec des pressions

Tableau I : Paramètres mesurés dans chaque station

Terrain
Température de l’air : TA
Température de l’eau : TE
Salinité : SL (#)
Oxygène dissous : O2
[...]
Laboratoire
pH (#)
Turbidité : TB (#)
Phosphates : PO4 (#)
Ammoniac : NH4 (#)
Coliformes fécaux : CF (#)
Nitrates : NO3 (#)

Les paramètres marqués d’un (#) sont utilisés dans l’analyse multifactorielle.

anthropiques diverses (Bellan et Coll. 1980). Dans ces zones, les études ont porté sur les modifications biologiques de certaines espèces (imposex, test EROD,...) mais peu sur l'appauvrissement de la biodiversité (Bellan-Santini et Coll. 1994). Cette absence de travaux s’explique par la difficulté d’identification de l'ensemble des espèces présentes sur le littoral (Bouvier 1970, Campbell 1977, Turquier et Loir 1992), mais aussi par la complexité des modifications dues aux dégradations qui n’agissent pas toutes dans le même sens sur l'ensemble de la faune. Ainsi la raréfaction ou la disparition de certaines espèces ouvre le milieu et diminue ainsi la compétition interspécifique. Ce mécanisme est favorable à l’expansion de nouvelles espèces (p. ex. : d’Hemigrapsus penicillatus). Les effets destructeurs sur la faune peuvent être des activités humaines, mais aussi les conditions climatiques excessives (froid en hiver ou chaleur en été). Les actions peuvent aussi être destructrices de façon indirecte en supprimant la proie d'une espèce prédatrice. Cela souligne la difficulté d’analyse de l’écosystème littoral et la complexité de la mise en évidence de son appauvrissement. Ce dernier commence par les maillons les plus fragiles du réseau trophique, entraînant une évolution de l’écosystème tout entier.

C'est avec cette réflexion qu’il a été mis en place un réseau de surveillance du littoral à la CQEL 17 en étroite coopération avec le Laboratoire de Biologie et Biochimie Marines de l’université de La Rochelle.

Méthodologie

Acquisition des données

Les données environnementales brutes ont été recueillies sur le logiciel « Tirane 2 » et exportées vers un système de gestion de base de données relationnelles. Le premier travail a consisté à vérifier toutes les données des prélèvements en Charente-Maritime à partir des Procès-Verbaux afin de corriger les oublis et les erreurs de saisie. Ces données proviennent de prélèvements effectués et analysés par la CQEL dans les eaux marines, saumâtres et portuaires de la Charente-Maritime suivant un protocole défini (Groupe de travail des eaux littorales, 1993).

Descripteurs physico-chimiques des eaux littorales de Charente-Maritime

La présente étude prend en compte 78 sites régulièrement prélevés (Perrocheau 1996). L’analyse en composantes principales porte sur 8 des 10 paramètres mesurés au cours des années 1993, 1994 et 1995. C’est au total sur 927 prélèvements (soit en moyenne 12 mesures par paramètre et par site) qu’ont été effectuées les moyennes servant de support à l’analyse multifactorielle.

Ces 10 paramètres initiaux sont obtenus pour partie sur le terrain ou au laboratoire (tableau I).

Identification des sites de prélèvement

Chaque site de prélèvement est repéré par un code de deux signes, une lettre majuscule et un chiffre, se référant au secteur (et sous-secteur) maritime dans lequel il se trouve, et au lieu précis de prélèvement.

La DDE a divisé le littoral de la Charente-Maritime en secteurs maritimes. Ces différents secteurs ont été déterminés en fonction de leur géographie, hydrographie...

Mise en forme et traitement des données

La première opération a consisté à exprimer chaque paramètre par un nombre de dimension à peu près équivalente dans chaque colonne. Aussi, les sels minéraux ont été exprimés en µmole ·l⁻¹, le nombre de coliformes fécaux estimé pour 100 millilitres a été exprimé en logarithme à base 10, les valeurs du pH et la turbidité ont été gardées telles quelles.

La seconde opération a consisté à tester que l’on pouvait, pour chaque site de prélèvement, remplacer l'ensemble des valeurs d'un paramètre par sa moyenne sur les trois années d’observations. L’analyse restait pertinente après cette opération (Perrocheau 1996).

Les huit paramètres physico-chimiques qui ont été retenus sont les suivants : le pH (pH), la turbidité (TB), la salinité (SL), les phosphates (PO4), l’ammoniac (NH4), les coliformes fécaux (CF), l’oxygène dissous (O2) et les nitrates (NO3). L’analyse en composantes principales (ACP) a permis d'exploiter au mieux l'ensemble des données retenues pour les 73 stations.

L’analyse en composantes principales (ACP) a été réalisée sur des données centrées réduites. Cette opération diminue la dispersion des variables dont l’écart-type est important et l’augmente lorsque l’écart-type est réduit.

Analyse des données

C’est sur ces données, ainsi traitées, que nous avons réalisé une matrice des corrélations (tableau II). L’on constate que les

Tableau II : Matrice des corrélations

pH TB SL PO4 NH4 CF O2 NO3
pH 1
TB 0,23 1
SL 0,74 0,24 1
PO4 0,57 0,47 0,61 1
NH4 0,41 0,12 0,07 0,65 1
CF 0,82 0,14 0,68 0,35 0,33 1
O2 0,07 0,16 0,28 0,12 0,01 0,08 1
NO3 0,74 0,22 0,90 0,55 0,15 0,73 0,25 1

Tableau III : Variance

axe 3

valeurs ne sont pas trop fortement corrélées entre elles et que par conséquent nous pouvons toutes les garder pour le traitement de l'ACP (Benzecri et al., 1973).

L'ACP permet d’obtenir des axes indépendants et une représentation des stations dans un espace de dimension réduite par rapport aux 8 dimensions d'origine. Il s’agit de savoir combien d’axes retenir pour une perte d'informations minimale.

Dans notre étude, avec 8 variables actives, les pourcentages de variance extraite par les 5 premiers axes sont les suivants (Tableau III) :

Les trois premiers axes expriment près de 80 % du problème, aussi nous nous limiterons à leur étude dans les plans 1-2 et 1-3. Les composantes étant indépendantes, nous pouvons déduire la part d'information expliquée par chaque plan (tableau IV) :

Tableau IV : Pourcentage de représentativité

Plan 1-2
Plan 1-3

Analyse du cercle de corrélations

Contribution des facteurs à la construction des axes

Nous constatons que le pH, la salinité, les phosphates, les coliformes fécaux et les nitrates contribuent à la construction de l'axe 1. L’oxygène dissous et l'ammoniaque contribuent à la construction de l’axe 2. Enfin, l’ammoniaque et la turbidité participent à la construction du troisième axe (tableau V).

Tableau V : Vecteurs propres

axe 4

Interprétation de la signification des axes 1 et 2 (figure 1)

Analyse de l’axe 1 :

Cet axe exprime l’opposition entre milieu marin recevant des eaux continentales caractérisées par leur richesse en phosphates, en nitrates et en coliformes fécaux, et le milieu marin océanique caractérisé par une salinité et un pH stables et élevés.

Analyse de l’axe 2 :

Cet axe exprime une opposition entre l’oxygène dissous et la richesse en ammoniaque. La formation d’ammonium résulte en effet du processus de dégradation anaérobie de la matière organique, au niveau des sédiments vaseux notamment, ou de l'action réductrice des micro-organismes sur les nitrates (fermentation et dénitrification).

L’axe 2 peut être considéré comme un axe qui exprime le brassage de l'eau (riche en oxygène dissous) ou un relatif confinement.

Quand la turbidité est faible, les bactéries du milieu peuvent produire de l’ammoniaque (Ravail-Legrand et Coll. 1993).

La turbidité augmente lorsque le substrat est brassé par l'eau. De ce fait, les bactéries du fond se trouvent expulsées dans un milieu oxygéné, ce qui a pour effet de réduire leur activité de dénitrification.

Cet axe peut exprimer l'activité des bactéries naturelles du substrat.

Distribution des stations

Les individus « stations » ont été projetés sur le plan principal. Nous constatons des regroupements entre les types de milieu.

Analyse dans le plan 1-2 (figure 2)

Le plan 1-2 (figure 2) apparaît comme un plan de définition des types écologiques. L’axe 1 assure la ségrégation entre les stations recevant des apports d’eaux continentales et les stations soumises à l'influence du milieu marin océanique. Ainsi l’on distingue le type « estuaire », le type « baie continentale », le type « étier », le type « marin » et le type « baie des îles ».

L’axe 2 discrimine les milieux fermés des milieux brassés. Cet axe sépare nettement les types : « baie continentale », « estuaire », « étier » et « marin ». Le type « baie des îles » est très proche du type « marin ». Le type « étier » est imbriqué avec le type « marin » ; il mériterait une meilleure description paramétrique.

Analyse dans le plan 1-3 (figure 2b)

Dans le plan 1-3, nous retrouvons les 5 types précédemment définis. Le type

Interprétation de la signification des axes 1 et 3 (figures 2 et 2b)

Analyse de l’axe 3 :

L’ammoniaque et la turbidité s'opposent sur cet axe.

[Photo : Cercle de corrélations axes 1-2]
[Photo : Distribution des stations dans le plan 1-2]
[Photo : Distribution des stations dans le plan 1-3]

« estuaire », bien qu’étendu, apparaît homogène dans ses caractéristiques. Il en est de même du type « baie continentale ». Le type « côtier » se clive en trois entités distinctes : la zone de La Rochelle, celle du pertuis Breton et une entité plus hétérogène correspondant au pertuis d’Antioche et au bassin de Marennes Oléron. Les types « marin » et « baie des îles » sont très proches et les paramètres turbidité et ammoniaque ne sont pas discriminants.

[Photo : Résultat de l’analyse des correspondances ; projection des groupes d’espèces et des radiales dans les plans factoriels 1-2]

Remarques sur quelques stations particulières

Dans le type « baie » (plan 1-2), la station « Vieux port » (B10) a les mêmes caractéristiques qu’un estuaire. Cela est à mettre en relation avec la vidange du canal Maubec qui s’effectue dans le fond du Vieux port. Toutefois, dans le plan 1-3, les caractéristiques du type « baie » se retrouvent.

Le port du Pavé (B2) situé en sortie de la Sèvre Niortaise (Baie de l’Aiguillon) à Charron est totalement à part dans le plan 1-3. L’identité particulière de cette zone devrait faire l’objet d’une typologie nouvelle après étude.

Le type « estuaire » présente une particularité au niveau de la Seudre où les stations Embouchure de la Seudre (E14), Grève à Duret (E15) et Pont de la Seudre (E16) ont des caractéristiques de type « côtier » et même « marin ». Une analyse des conditions de ces trois sites devra être faite ultérieurement.

La zone de Hiers-Brouage (E17, E18) présente un confinement de ses eaux qui explique la position dans le plan 1-2. Elle retrouve cependant le type « estuaire » dans le plan 1-3.

Nous rappelons que les baies de l’île de Ré (Fiers d’Ars et Baie de Loix) ont été placées dans un type à part du fait des faibles arrivées d’eau provenant des zones terrestres. Ces baies sont directement sous l’influence des zones marines proches.

Analyse des profils biologiques

Présentation du concept

La méthode des profils biologiques consiste en l’inventaire aussi précis que possible des espèces animales et végétales vivantes présentes au niveau des estrans, et inféodées au milieu rocheux. Ce type de substrat a l’avantage de présenter un revêtement faunistique et floristique beaucoup plus important que les substrats meubles. Ceci n’engage pas à négliger l’endobenthos des enclaves rocheuses et sableuses pouvant se présenter sur les transects d’échantillonnage. Seules les espèces de taille macroscopique vont présenter un intérêt pour notre étude. La détermination s’effectue à vue, sur place ou postérieurement au laboratoire en cas de

Tableau VI : Caractéristiques des radiales

Profil biologiqueSituation géographiqueSources de pollutionEnjeux
Chef de BaieExtrémité Nord de la Baie de La RochelleRejets industriels et urbains à proximité immédiate (800 m) ; dépôt de produits de dragage (site du Lauvardin)Baignade ; pêche à pied ; dragage
Port NeufBaie de La Rochelle, à 800 m à l’est de Chef de BaieRejets industriels et urbains directsBaignade ; pêche à pied ; dragage
CasinoFond de BaieVieux port de plaisance de La Rochelle ; apport du canal MaubecBaignade ; dragage
Les MinimesExtrémité Sud de la Baie de La RochellePort des Minimes (3 000 bateaux) ; môle d’escale ; dépôt de produits de dragage (site du Lauvardin)Baignade ; dragage
La RepentieNord de la Baie de La Rochelle, pointe de QuéillePort de commerce de La Pallice ; môle d’escaleOstréiculture
Saint-Martin de RéFaçade Est de l’île de RéPort de plaisance (260 bateaux)Pêche à pied

Doutes ou d’espèces inconnues. La richesse spécifique des sites est alors précisée. Des indices d’abondance et de recouvrement sont mis en évidence pour chaque espèce.

Seuls quelques groupes zoologiques ont été retenus pour l’étude des résultats. Une analyse statistique, analyse factorielle des correspondances (AFC), permettra le traitement des données.

Présentation des sites

Les premières expériences, menées en Baie de La Rochelle, se sont étendues sur une bonne partie du littoral charentais. Neuf sites sont actuellement suivis. Ces sites ont été choisis en fonction de leur exposition à des polluants divers tels les apports portuaires, les rejets industriels ou urbains. Les caractéristiques de ces profils sont indiquées dans le tableau VI.

  • La Baie de La Rochelle fait l’objet de quatre zones d’observation :
    • Chef de Baie
    • Port Neuf
    • Casino
    • Les Minimes
  • Au nord de la Baie, la radiale de la Repentie.
  • Trois radiales ont été effectuées au niveau de l’île de Ré :
    • Saint-Martin de Ré
    • Sainte-Marie de Ré
    • La Lasse
  • La radiale témoin se trouve sur l’île d’Oléron, à la Pointe de Chassiron.

Descripteurs biologiques du littoral de Charente-Maritime

Les radiales s’effectuent lors des grandes marées (80 à 110). L’inventaire débute lorsque la mer est au plus bas (infralittoral découvert) et se poursuit vers le haut de l’estran (supralittoral) dans une direction donnée, en général perpendiculairement à la côte. Il s’effectue donc sur une longueur équivalente à celle de l’estran et sur une largeur d’environ 10 mètres de chaque côté du transect choisi.

L’analyse des résultats pour la détermination de la qualité des sites étudiés portera sur l’étage médiolittoral. Seul cet étage, qui correspond à la majeure partie de l’estran soumis à l’alternance immersion-émersion selon un rythme immuable, est utilisable pour une analyse objective. La biocénose de cette zone de contact, comprenant des animaux marins adaptés à une exondation tempo-

Tableau VII : Espèces indicatrices de milieux salubres (indice 0) et de milieux fortement dégradés (indice 5)

Genre espèceGroupe zoologiqueIndice
Audouina tentaculataAnnélides polychètes5
Anthopleura balliCnidaires anthozoaires0
Diadumene lineataCnidaires anthozoaires5
Berthella plumulaGastéropodes opisthobranches tectibranches0
Trivia monachaGastéropodes prosobranches0
Diodora aperturaGastéropodes prosobranches5
Galathea squamiferaCrustacés décapodes5
Marthasterias glacialisÉchinodermes astérides0
Asterina gibbosaÉchinodermes astérides5

raire, est très diversifiée. Le médiolittoral est également l'étage maritime le plus exposé aux rejets polluants (contrairement au supralittoral et à l'infralittoral trop éloigné). C’est de plus une zone très accessible, ce qui n’est pas toujours le cas pour l’infralittoral, soumis à un envasement dans certaines zones.

Les profils biologiques

Au cours des trois années de relevés biologiques du littoral de Charente Maritime, 336 espèces ont été recensées, pour 16 embranchements différents.

Les résultats globaux ont montré une richesse spécifique élevée au niveau des îles, notamment la radiale de La Lasse, à l’entrée du Fier d’Ars. Les radiales de La Baie de La Rochelle se sont avérées assez pauvres en espèces, surtout au niveau des zones de rejets industriels et urbains (profil de Port Neuf).

Après saisie informatique des résultats biologiques, les données ont été traitées par analyse factorielle des correspondances (AFC), en utilisant un codage en présence / absence sur certains groupes zoologiques.

Seuls les groupes cités ci-dessous ont été sélectionnés afin d’effectuer une analyse objective :

  • - Cnidaires anthozoaires (ANT)
  • - Annélides (ANN)
  • - Mollusques gastéropodes prosobranches (PRO)
  • - Mollusques gastéropodes opisthobranches (OPI)
  • - Mollusques bivalves (BIV)
  • - Arthropodes crustacés décapodes (DEC)
  • - Arthropodes crustacés cirripèdes (CIR)
  • - Echinodermes astérides (AST) / échinides (ECH) / holothurides (HOL) / ophiurides (OPH)

La Figure 3 montre que les radiales de la Baie de La Rochelle sont bien différenciées biologiquement des radiales des îles. Les résultats de l’analyse statistique multifactorielle, basée sur l’interprétation des graphiques de représentation suivant les axes 1-2 (Figure 3) et les axes 1-3, indiquent que les estrans littoraux de la Baie de La Rochelle sont caractérisés par les Annélides, les Bivalves, les Prosobranches et les Cirripèdes. Les îles, quant à elles, très riches en individus, sont caractérisées essentiellement par la présence des Anthozoaires, mais surtout des Echinodermes et des Opisthobranches, devenus caractéristiques des milieux insulaires de Charente Maritime, malgré leur minorité spécifique (par rapport aux Prosobranches par exemple).

Détermination d’espèces bioindicatrices

Une étude approfondie, non pas au niveau des groupes zoologiques, mais des espèces qui les composent, a permis de dresser une première liste d’espèces indicatrices, qui méritera d’être complétée et affinée par la suite. Ces bioindicateurs, présentés dans le tableau VII, sont accompagnés d’un indice caractérisant le milieu dans lequel ils se trouvent : indice 0 pour les milieux de bonne qualité, indice 5 pour les milieux dégradés.

Conclusion

Ces études, réalisées dans le but d’étudier à longue échéance l’évolution de milieux littoraux soumis à des apports exogènes, ont apporté des résultats intéressants. Elles ont notamment permis l’identification biologique de milieux.

L’intérêt final de ces deux analyses s’est porté sur la similitude de leur représentation graphique.

L’ACP a révélé le caractère physico-chimique spécifique de la Baie de La Rochelle, individualisé clairement sur le graphique illustré en Figure 3. Parallèlement, l’AFC démontre la particularité du site au niveau biologique.

La Baie est un milieu fortement touché par la pollution anthropique, représentée par les coliformes fécaux, les nitrates, les phosphates et l’ammoniaque. C’est en effet une zone littorale soumise à une pollution importante et diversifiée (rejets de stations, rejets industriels, apports portuaires).

À ce type de milieu dégradé correspond une représentation graphique qui symbolise la réponse biologique des écosystèmes associés.

Résumé extrait de l'article

Plusieurs études ont été menées pour évaluer l’impact des perturbations anthropiques sur les écosystèmes littoraux. Les analyses des données biologiques et physico-chimiques ont permis d'identifier les principales caractéristiques qui différencient les zones touchées et non touchées. Les résultats montrent une corrélation claire entre la présence de certains groupes zoologiques et le niveau de pollution.

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Le résultat analytique fait ressortir la médiocrité du milieu dont les espèces appartiennent aux embranchements des Annélides, Bivalves et Prosobranches essentiellement. À l'opposé, les zones insulaires font ressortir des résultats physico-chimiques faiblement contaminés en apports terrestres et présentent des caractéristiques biologiques intéressantes telle la richesse spécifique des groupes zoologiques déjà signalés, mais aussi de nouveaux groupes zoologiques qui se développent dans ces milieux : anthozoaires, opisthobranches et échinodermes principalement.

La corrélation entre la physico-chimie d'un milieu et ses caractéristiques biologiques est une nouvelle fois établie. À partir de ce constat, la liste des bioindicateurs précitée (Tableau VII) pourra servir de première référence. À l'avenir et afin de confirmer ces résultats, l'approche mise en place par la CQEL 17 devra s'appuyer sur la nouvelle typologie des zones côtières mise en place et s'étoffer des résultats complémentaires au niveau des radiales. Ainsi développée, la méthode de surveillance mésologique et biologique pourra être généralisée à l'ensemble des milieux littoraux. ■

[Photo : E Tardy lors du dénombrement des espèces sur Radiales]
[Publicité : ÉDITIONS JOHANET]
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