Le laboratoire du Ministère danois de l'Environnement a dû se rendre à l'évidence récemment : l'état général des cours d'eau danois ne s'est pas amélioré durant ces quinze dernières années. Une exception notoire est, cependant, le Gudena, le plus important réseau fluvial du Danemark dont le chapelet de lacs qu'il comporte en fait l'un des plus beaux lieux de villégiature du pays.
Il y a de 13 à 14 ans de cela le fleuve et ses lacs semblaient sur le point de s'éteindre… Mais une énergique épuration a déjà renversé la vapeur. Un grand nombre de truites de mer, qui à un moment donné avaient quasiment disparu, ont retrouvé le chemin des frayères. La visibilité dans l'eau s'est accrue et le nombre des colibacilles a beaucoup baissé.
Coopération
Mais comment se fait-il que l'épuration du Gudena soit un véritable succès, alors que le traitement des eaux usées en beaucoup d'autres endroits semble n'avoir aucun effet mesurable ou entraîne même de graves problèmes ? Nous avons posé la question à certains des responsables de l'installation de traitement des eaux usées de Søholt qui est la plus grande installation communale déchargeant ses eaux usées épurées dans le Gudena. L'installation de traitement de Søholt, qui a été conçue et édifiée en 1976, est située dans la ville de Silkeborg et traite aujourd'hui mécaniquement, biologiquement et chimiquement les eaux usées de 65 000 équivalents-habitants.
M. Jens Erik Jørgensen, qui est le politicien responsable en la matière et président du comité technique de la municipalité de Silkeborg nous a dit : « C'est bien simple : il suffit d’engager un chef d’exploitation ayant les trois qualités suivantes : il doit penser comme une installation de traitement, avoir le traitement des eaux usées comme hobby et le sens des contacts. C’est ce que nous avons fait et si les autres font pareil ils auront aussi des installations qui fonctionnent bien. »
M. Hans Jørgen Jensen, chef d'exploitation, ajoute : « C’est une question de coopération. Notre installation de traitement entretient de bonnes relations avec les responsables de la mairie. Et le conseil municipal et le comité technique sont prêts à débourser les sommes nécessaires. Nous entretenons également d'excellentes relations avec le constructeur Krüger. Contrairement à ce qui est le cas pour de nombreuses autres installations, nous faisons des contrôles journaliers des affluents et effluents. Et nous effectuons avec Krüger un certain nombre d’autres mesures qui ne sont pas non plus fort courantes. »
De son côté, M. Søren Dall, ingénieur en chef, précise : « La réussite exige une étroite collaboration entre les fournisseurs, l’équipe d’exploitation, l’administration et les politiciens locaux. Il suffit qu'un seul maillon de la chaîne soit défaillant pour que les résultats laissent à désirer. » Pour M. Finn Kjelstrøm, directeur des travaux publics : « Il faut aussi que les responsables de la pollution, c'est-à-dire les entreprises industrielles, coopèrent. S'ils ne nous informent pas immédiatement des décharges accidentelles cela peut anéantir notre processus tout entier et cela peut nous prendre énormément de temps pour relancer le processus biologique. Mais jusqu'à présent les entreprises de notre région nous ont informés de façon à nous permettre d'intervenir à temps. »
Une analyse approfondie
L'histoire de l'installation de traitement des eaux usées de Søholt commence déjà en 1972-74 quand les autorités de l'environnement chargées de la Grande Étude sur le Gudena prirent conscience de l'évolution catastrophique du fleuve et de ses lacs. Les habitants et le conseil municipal de Silkeborg s’accordèrent rapidement sur la nécessité de la construction d'une installation centrale efficace de traitement des eaux usées couvrant la zone urbaine. De nombreux efforts furent déployés dans la phase de l'étude et au départ il y avait de 10 à 12 firmes en compétition pour le meilleur projet. Finalement c'est Krüger qui l’a emporté parce qu'elle offrait, pour le même prix que ses concurrents,
une solution très avancée comprenant, outre le traitement mécanique et biologique, l’enlèvement du phosphore et de l’azote. M. Søren Dall nous a déclaré : « Le fait que la décision ait pris de deux à trois ans a profité à la ville de Silkeborg d’un point de vue opérationnel et économique. Nous avons de tristes exemples où certains se sont décidés trop rapidement, ce qui leur vaut aujourd'hui d'immenses problèmes et leur coûte beaucoup d’argent. »
À la pointe du progrès
Comment l’installation fonctionne-t-elle aujourd’hui, 10 ans après sa construction ?
[Photo : sans légende]
M. Finn Kjelstrøm : « Nous avons une installation qui est non seulement adaptée aux besoins actuels mais aussi très perfectionnée. » M. Søren Dall dit : « Nous avons une installation d’une qualité et d'un standing dont la commune ne peut être que fière ; et l'on nous rend visite des quatre coins du monde. Bien que la masse à épurer soit passée, en un an, de 50 000 PE à 65 000 PE, l’installation a traité l'eau avec une efficacité sans pareille cet été. Je doute que vous trouviez beaucoup d’autres installations, ici au Danemark, ayant d’aussi bonnes valeurs que celles que nous avons obtenues depuis qu'il a commencé à faire un peu plus chaud. »
[Photo : sans légende]
Un nouveau type de contrat
L’une des choses qui rend l'installation de Silkeborg remarquable est que sa construction a été assortie d’un type de contrat comprenant des garanties de processus pour l’enlèvement du phosphore, de l’azote, des matières biologiques, des solides en suspension dans l’eau ainsi que pour la valeur du pH, éléments qui sont tous mesurés comme valeurs statiques durant une période déterminée.
« Il s'avéra que l'installation avait eu des difficultés à éliminer l’ammoniaque de l’eau durant l’hiver. Mais l’installateur ne se limita pas au point de vue économique mais s’attacha à faire des tests pour améliorer le fonctionnement de l’installation », dit M. Søren Dall. Et maintenant que l'installation a été mise en service, son chef d’exploitation, M. Hans Jørgen Jensen, peut continuer à demander de tels conseils aux gens de Krüger en contrepartie d’observations sur l’exploitation de l’installation. Cela permet un formidable échange de connaissances. M. Finn Kjelstrøm dit que cette expérience devrait permettre de trouver le moyen de mettre sur pied une organisation visant à exporter le système en question, car d’autres pourraient ainsi profiter de notre savoir.
L’azote
N’avez-vous plus aucun problème ?
M. Søren Dall : « Nous avons encore toujours des problèmes pour l’enlèvement de l’azote en hiver et nous devons résoudre ce problème d’une façon ou d'une autre afin de satisfaire aux nouvelles exigences du gouvernement contenues dans les nouvelles réglementations sur l’élimination totale de l’azote. Mais nous ne savons pas encore exactement comment ces exigences se présenteront. Nous avons prévu de traiter cette question à l’occasion de l’extension et de la rénovation de l’installation en 1988-89 ; elle a heureusement été conçue dès le départ pour être agrandie. L'année dernière l’installation de traitement élimina 1364 t de BOD, et 54 t de phosphore, et traita plus de 7 millions de t d’eau. Le prix était de 0,65 de DKK par PE. »
* Extrait d’Environnement news, janvier 1989.
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