Les travaux de confinement des terrains pollués de l'ancienne usine à gaz de Griftpark à Utrecht (Pays-Bas) ont commencé, et l'ensemble du projet devrait se terminer en mars 1999. A la fin des travaux, il est prévu une surveillance à long terme. Après exécution de la paroi moulée, du confinement horizontal, de la couche de protection et du système d'extraction situé dans la zone confinée, le traitement des eaux ainsi isolées pourra commencer.
En 1990, le Ministère Néerlandais de l'Habitat, du Développement régional et de l'Environnement (VROM) a décidé du confinement et de la surveillance des sols pollués de l'ancienne usine à gaz d'Utrecht. Les terrains pollués situés en dehors de la zone confinée doivent être décontaminés.
Après de nombreuses études, une réhabilitation par confinement est apparue comme la solution la plus réaliste et la plus efficace, après des comparaisons avec des solutions alternatives de décontamination totale. Les coûts totaux de la solution retenue, y compris le traitement des zones non confinées, sont estimés à 900 millions de francs.
Le principe de base du confinement a pour objet d'éviter la diffusion des polluants du fait de la présence d'eau souterraine, ce qui peut être réalisé en orientant l'écoulement de ces eaux vers la source de pollution (zone à confiner) et ceci par pompage. Cependant, dans le cas de Griftpark, les polluants se trouvant dans une couche sableuse très perméable à l'eau, il aurait fallu pomper un volume important.
Afin d'éviter non seulement le pompage mais surtout le traitement de cet important volume d'eau contaminée, les eaux souterraines situées dans la zone à confiner sont arrêtées par une paroi moulée verticale ancrée dans une couche d'argile à faible perméabilité, à environ 50 mètres de profondeur.
La surface de la zone confinée sera traitée par confinement horizontal et mise en place d'une couche saine, afin d'éviter tout contact avec la pollution.
Aspects géologiques
Les couches supérieures de Griftpark sont constituées de dépôts de tourbe et d'argile de l'Holocène (niveau du sol : 2 m au-dessus du niveau de référence d'Amsterdam ‑ NAP), dont l'épaisseur peut atteindre cinq mètres. En certains points, cette couche disparaît, et le sable du Pléistocène y fait surface ; son épaisseur atteint 50 m NAP et son niveau de perméabilité (Kd) est de 2 500 m² par jour. On y trouve différentes couches distinctes : du sable très fin à moyennement fin, avec parfois une mince couche de graviers (de 10 à 15 m NAP), des couches de sable moyennement grossier et de graviers (de 30 à 45 m NAP) et des couches distinctes de sable moyennement fin contenant de fines couches d'argile (de 45 à 50 m NAP).
La première zone de séparation, qui se situe à 50 – 60 m NAP, est constituée de couches d'argile du Kedichem d'une résistance (c) de 2 000 jours, qui, en certains points, sont moins développées, et dont la résistance est moindre (c = 25-100 jours).
La seconde région perméable à l'eau, avec un Kd de 2 000 m² par jour, se situe de 60 à 100 mètres NAP. Il existe des infiltrations naturelles d'eau souterraine de la première à la seconde nappe, à travers l'argile du Kedichem. L'écoulement des eaux s'effectue dans une direction nord-ouest.
Du fait de la composition non homogène du sol et de la diffusion irrégulière des polluants provenant de la surface, la répartition de la pollution des eaux souterraines est très imprévisible et des variations importantes de la situation géologique des couches profondes se rencontrent sur de faibles distances. Le sol est ainsi pollué sur une profondeur minimum de 2,5 m, avec des dépôts industriels de l'ancienne usine à gaz, principalement des couches de déchets de charbon et de cendres, ceci sur pratiquement toute la surface du parc. Il s'agit essentiellement d'une pollution par des hydrocarbures polycycliques aromatiques et par des métaux lourds, plomb et zinc.
*Cet article a fait l'objet d'une parution anglaise dans la revue « Land and Water ».
Des concentrations extrêmement élevées en cyanures ont également été décelées.
Au-dessous de 2,5 mètres, et principalement entre 6 et 10 m, on trouve des pollutions variables, incluant des hydrocarbures polycycliques aromatiques et des huiles minérales. En deux emplacements, une importante pollution du sol par des huiles minérales et des HAP a été décelée à une profondeur atteignant 20 m.
Jusqu'à une profondeur maximale de 35 m sur toute la surface du parc, les eaux souterraines sont polluées par des cyanures, des hydrocarbures aromatiques (dont du benzène), des hydrocarbures polycycliques aromatiques (en particulier du naphtalène) et des phénols. Les polluants ont diffusé jusqu'à 400 m au-delà des limites du parc, en direction nord-ouest (aval). Cette diffusion a essentiellement eu lieu dans la couche de sable graveleux située de 25 à 30 m. Ces polluants comprennent des métabolites de produits aromatiques et proches du phénol, des cyanures, des huiles minérales (composant mobile) et du benzène. À l'heure actuelle, aucun effet négatif sur la qualité de l'eau de la seconde nappe n'a été détecté.
Mur de Confinement
Le confinement de la pollution est effectué par pompage de l'eau à partir de la source de pollution, ce qui crée un écoulement de l'eau souterraine en direction de la zone à confiner. Afin de retenir l'eau dans la zone polluée, et de limiter ainsi le volume d'eau à extraire, une paroi à faible perméabilité a été construite autour du cœur de la zone polluée. L'extraction de l'eau à l'intérieur des limites de cette paroi permettra de rabattre la nappe au niveau requis pour que l'écoulement des eaux souterraines soit dirigé vers la zone à confiner. Le débit d'extraction nécessaire est ainsi minimal. La paroi de protection est ancrée dans la couche d'argile de faible perméabilité à 50 m de profondeur en moyenne.
Des études ont permis de déterminer la méthode de construction de la paroi moulée la plus appropriée, ainsi que la composition des matériaux utilisés. Le matériau choisi est la bentonite-ciment. La réalisation d'un tel mur est relativement simple sur le plan technique. La paroi moulée qui fait fonction de barrage est construite en suivant les méthodes habituelles de réalisation des parois moulées. À cet effet, une tranchée d'environ 50 m de profondeur est excavée, par panneaux successifs, sur une épaisseur de 0,8 m et une longueur de 2,8 m. La tranchée est remblayée provisoirement par de la bentonite au fur et à mesure de son ouverture, afin d'éviter des effondrements en cours de travaux ; la profondeur requise atteinte, la bentonite est remplacée par un mélange de bentonite, de ciment et de sable ; ce béton permet d'atteindre la résistance nécessaire.
La paroi de protection circonscrit la source des polluants, sur une surface totale de 8 hectares. Sa longueur est de 1 225 mètres et sa perméabilité maximale est de 5 × 10-9 m/s pour une paroi d'épaisseur de 0,8 m.
Des pompes sont installées dans la zone confinée afin de rabaisser le niveau de la nappe.
Il existe en principe deux solutions pour équilibrer le niveau de l'eau avec celui des nappes environnantes, la première en fonction d'un niveau d'eau souterraine fixe, la seconde fondée sur un niveau d'eau variable, étant précisé qu'un rabattement de 0,8 m (niveau fixe) ou de 0,3 m (niveau variable) suffit à maîtriser l'écoulement des eaux souterraines dans la zone confinée. La différence entre ces deux niveaux est le résultat des variations saisonnières maximales. L'écoulement des eaux dans la première nappe est alors dirigé de l'extérieur vers l'intérieur de la zone confinée. À l'intérieur de celle-ci, l'eau de la nappe profonde remonte vers la nappe superficielle, ce qui évite la diffusion des polluants à travers la paroi et à travers la couche d'argile située à 50 m de profondeur.
Du fait du coût élevé du traitement de l'eau, il est préférable d'extraire une quantité minimale d'eau souterraine. Dans cet esprit, la mise en place d’un
niveau d’eau variable à l’intérieur de la paroi apparaît a priori comme la meilleure solution, ce qui reste à confirmer.
La zone confinée sera recouverte d’une couche isolante et de sol sain adaptés aux différentes fonctions d’un parc. La couche isolante située directement sous le sol sain permettra d’éviter la diffusion de la pollution vers celui-ci, en évitant que la pollution puisse remonter du fait de l’action des forces de capillarité sur les eaux souterraines polluées. La couche isolante interdit également aux racines de se développer dans le sol pollué, et fournit une barrière visible entre la pollution et le sol sain.
La couche isolante offre également une fonction de signalisation au cours des travaux de mise en place de la couche saine, dont la structure dépend du niveau de l’eau, des caractéristiques et de la concentration des polluants. En particulier, la composition de la couche isolante, située dans les parties élevées de la zone à confiner, devra être différente de celle des zones situées sous ou à proximité des cours d’eau de surface. La composition exacte de cette couche est à l’étude.
Les limites de l’opération
Le périmètre de la paroi a été défini d’une part en fonction de la situation de Griftpark par rapport aux infrastructures proches (routes, canalisations, câbles), des bâtiments voisins, ainsi que des limites de l’ancienne usine à gaz, et d’autre part de façon à ce que la paroi circonscrive les zones où la pollution se trouve à une profondeur supérieure à 5 ou 6 m.
La pollution des eaux souterraines superficielles et des eaux plus profondes situées en dehors de la zone confinée doit également être traitée. Le sol contaminé y sera également excavé et décontaminé partout où ce sera possible, et l’eau souterraine polluée, pompée et purifiée. Le sol pollué, situé directement contre la paroi doit être excavé et la paroi maintenue par des palplanches, le mur lui-même ne retenant pas la terre. Les palplanches sont placées au fur et à mesure de la réalisation du mur avant que le coulis bentonite-ciment n’ait fait prise. Au cours des travaux, elles sont sorties ou ancrées à chaque fois que cela sera nécessaire.
Purification des eaux
Les eaux extraites subiront un traitement préliminaire avant d’être envoyées dans le système régional de purification de l’eau (RWZI) d’Utrecht Nord. La capacité de l’installation de ce traitement préliminaire, situé sur un terrain RWZI distant de 1,5 km du parc, est de 200 m³/h.
Une unité pilote de purification (50 m³/h) permettra de tester l’efficacité de différentes techniques de traitement des niveaux de pollution, de façon à permettre de sélectionner la technique la plus efficace en fonction de la composition spécifique des eaux souterraines polluées de Griftpark, dans une installation dont la capacité atteindra 200 m³/h.
Les travaux de réalisation de la paroi moulée elle-même, qui ont débuté à la fin de 1993, sont en cours d’achèvement. Des essais ont été pratiqués sur toute la longueur de la paroi, contrôlés par la société Grondmechanica, afin de vérifier l’étanchéité conformément aux prescriptions du cahier des charges. Après réalisation des équipements concernant la gestion de l’eau (prévue en 1996), le confinement par pompage et les autres phases du projet seront mis en route (finitions en surface et décontamination des terres en limites de confinement).
Le maître d’ouvrage est le Projectbureau Sanering Griftpark de la province d’Utrecht. Le groupement Heijmans Milieutechniek/Soletanche s’est vu chargé de la construction de la paroi, pour un montant d’environ 110 millions de francs. Groundmechanic Delft et Haskoning sont les Maîtres d’Oeuvre du projet.