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Quelques techniques de gestion à terre des boues de dragage

30 decembre 2004 Paru dans le N°277 à la page 45 ( mots)
Rédigé par : Olivier BURTON

Pour des raisons d'ordres économique, touristique, environnemental, voire de sécurité, personne ne conteste aujourd'hui le principe du dragage. Cependant, force est de constater que les sédiments qui encombrent nos ports, nos cours et plans d'eau voire encore nos canaux, sont aujourd'hui considérés par la législation européenne comme un déchet. Dans l'abondant catalogue européen des déchets, des codes leur sont même attribués : 17 05 05 et 17 05 06 (suivant que le matériau comporte ou non des substances dangereuses). Dans ce contexte, les gestionnaires des cours d'eau navigables et des zones portuaires se voient confrontés à la délicate question de la gestion à terre des produits résultant des opérations de dragage ou de curage. Mais qu'en est-il en fait de ces modes de gestion ?

Un rapide tour d’horizon des techniques éprouvées et opérationnelles, souvent héritées de l’industrie et du traitement des sols pollués, permet d’identifier, en opérations « post-dragage », trois étapes majeures :

  • • déshydratation ;
  • • traitement (dans le cas des sédiments contaminés) ;
  • • valorisation ou élimination.
[Photo : Sans légende]

Déshydratation

Préalable indispensable à toute gestion ultérieure, la déshydratation permet, avec de

[Photo : Déshydratation par lagunage en centre de regroupement.]

faibles impacts environnementaux :

  • la réduction des volumes à gérer ;
  • l'obtention d'un produit pelletable ;
  • l'amélioration des propriétés géomécaniques des matériaux.

On distingue ici traditionnellement deux voies possibles : la déshydratation par lagunage en centre de regroupement et la déshydratation mécanique. Ces deux techniques ont été appliquées avec succès sur le terrain par Ecoterres dans le cadre de marchés lancés par des opérateurs publics. La notion de centre de regroupement implique que les boues n'y séjournent qu'un temps limité et défini.

L'alimentation d'un tel centre s’effectue (par voie hydraulique ou mécanique) dans des bassins ou lagunes où les boues se ressuyent et se dessèchent sous l'action combinée du soleil et du vent. Tant les digues que les fonds, pour des raisons évidentes de protection du milieu naturel et en particulier des eaux souterraines, sont, suivant le type de produits accueillis, pourvues de systèmes d'étanchéité et/ou de drainage.

Le temps de séjour des matières peut être raccourci par la mise en œuvre d'une intervention mécanique (on parle de lagunage dynamique) qui, par retournement et mise en andains de ces matières, accroît leur cinétique de séchage.

La récupération des eaux s’effectue via le système de drainage équipant le fond voire les talus de la zone de lagunage. Si après monitoring, ces eaux ne répondent pas aux normes de rejet, elles sont acheminées vers une station d'épuration.

Les avantages de cette technique sont des coûts d’exploitation relativement faibles, une technique très simple et fiable, et un process continu.

À Tubize (20 km au sud de Bruxelles), Ecoterres a procédé entre fin 2001 et fin 2004 à la déshydratation d’environ 300 000 m³ de produits issus du canal Charleroi-Bruxelles. À côté du lagunage, la déshydratation mécanique (filtre-presse ou filtre à bandes) permet la production de gâteaux, moyennant mise en place d’une chaîne de pré-traitement (criblage, conditionnement et homogénéisation de la boue) et dosage adéquat de produits augmentant la filtrabilité de la boue (chaux, polyélectrolytes).

Ce système présente l'avantage de traiter les produits dans un laps de temps très réduit (de l'ordre de quelques dizaines de minutes), mais à débit très faible, d’où difficulté potentielle de s'adapter au rythme du dragage et besoin d’aménagement d’une zone tampon en amont de la chaîne de traitement. Il est par contre peu consommateur d’espace.

Cette technique est particulièrement adaptée à la déshydratation de petites quantités.

[Photo : Déshydratation par voie mécanique : le filtre-presse, une solution complémentaire au lagunage.]

Traitement

En fonction de la nature et de l’intensité de la contamination qui peut les affecter, ainsi que de leurs caractéristiques intrinsèques, les sédiments peuvent être traités, comme les sols, par diverses voies (physique, chimique, biologique). Diverses solutions existent, plus ou moins intensément testées et éprouvées, basées sur des techniques d’inertage, de lavage, de traitement thermique ou biologique.

Parmi les solutions bien maîtrisées en la matière et effectivement mises en œuvre par Ecoterres dans le cadre de chantiers, citons la bio-remédiation qui conduit, par la création de conditions idéales à la dégradation de polluants organiques, à l’obtention d’un matériau comparable à un sol, recyclable et valorisable.

La bio-remédiation, ou décontamination par voie biologique, s'appuie sur un phénomène naturel. Elle est le résultat de la dégradation de molécules organiques carbonées ou minérales par des micro-organismes déjà présents dans les sédiments (bactéries, champignons, …) dont la croissance s'effectue par l'oxydation du carbone qui est utilisé comme source d'énergie et par l'utilisation de « nutriments » (azote, phosphore).

Le processus se développe selon une réaction par laquelle les composés carbonés sont transformés, par cassures successives, en molécules de moins en moins complexes, jusqu’à l'obtention de sous-produits simples, généralement le CO₂ et l’H₂O.

La décontamination par voie biologique

consiste à stimuler ce phénomène naturel pour en augmenter l'efficacité.

En matière de traitement et particulièrement d'inertage, Ecoterres, en tant que partenaire de Solvay, œuvre actuellement en Belgique francophone, au travers d'une filiale appelée Sedisol, au développement industriel du procédé Novosol® appliqué aux produits de dragage contaminés. Le procédé Novosol®, breveté par Solvay, véritable exemple de l’apport de la chimie à la résolution de problèmes environnementaux, comporte deux étapes totalement dissociables dans le temps et dans l'espace :

  • une étape de phosphatation-déshydratation, destinée à stabiliser les métaux lourds par leur fixation dans un réseau d’apatite de calcium ;
  • une étape de calcination destinée à détruire, si nécessaire, les composés organiques de type HAP, PCB, dioxines, ...

Une large série d’essais sont actuellement menés sur un pilote industriel accueillant des produits de dragage contaminés. Ils consistent à valider le procédé d’un point de vue technique (degré d'inertage, cinétique de déshydratation, filières de valorisation, aspects sanitaires, ...) et économique (coût du traitement). En cas de conclusions positives de ces essais, le projet de construction et d’exploitation d’une unité industrielle pourrait voir le jour en 2006.

Valorisation & élimination

Dans le cas de produits non contaminés ou traités, des essais également menés par Ecoterres ont montré qu'il était possible de les valoriser par reconstitution d'un substrat meuble comparable à un sol, végétalisable et adapté à toute une série d’applications de travaux publics, telles que la création de zonings industriels, les aménagements paysagers, l’édification d’écrans anti-bruit, la réhabilitation de sites d’activité économique, de terrils, de CET,...

Pour ce qui concerne les sédiments contaminés, dans certains cas, lorsque toutes les solutions de traitement ont été épuisées, il reste toujours une solution ultime consistant à l’élimination en CET des produits déshydratés.

Nous terminerons ce rapide tour d’horizon en évoquant un point essentiel qu'il ne nous paraît pas inutile de rappeler : les opérations de dragage, de déshydratation et de traitement ne peuvent être réalisées que si des

[Photo : Exemple concret de valorisation de boues de dragage : la couverture finale d'un ancien site industriel.]

filières de valorisation ou d’élimination sont clairement identifiées.

Pas aussi évident qu'il n'y paraît à première vue...

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