Partout en France, le long des bassins versants, des cours d'eau, sont installées des stations hydrométriques dotées d'une technologie homogène (un protocole de communication standard dit PLQ ainsi que plusieurs fonctionnalités ?métier?). Grâce à ces stations, les services déconcentrés de l'État surveillent les crues et les risques d'inondation. En parallèle, de plus en plus de collectivités territoriales investissent dans leurs propres systèmes d'alerte de crues, pour mieux connaître et prévoir les inondations sur leurs propres territoires.
Une crue correspond à la montée du niveau d’un cours d'eau, d'une rivière, ou d'un fleuve, lors de la fonte de neiges ou lorsque de fortes quantités de pluies tombent.
Elle est plus ou moins rapide en fonction de l'intensité de la pluie, de son étendue géographique, de sa durée mais aussi en fonction de l'état de saturation des sols.
Une crue n’implique pas forcément une inondation.
On parle d’inondation uniquement si les niveaux d'eau de l'affluent ou du fleuve dépassent les hauteurs des berges.
Si les crues sont nécessaires à la vie des cours d'eau (auto-curage des lits, régénération des espèces végétales et animales),
Elles sont aussi de plus en plus fréquentes.
À cela, deux raisons : l’urbanisation au fil du temps des bassins, mais aussi la reconfiguration des paysages agricoles avec le développement de cultures céréalières au détriment des prairies fourragères comportant des haies et taillis qui avaient pour effet de ralentir et laminer les crues. Le réchauffement climatique est également mis en cause.
Ainsi, les risques d’inondation n’ont cessé d’augmenter ces dix dernières années avec celui des crues. Aujourd’hui, ils représentent le premier risque naturel en France : plus de 8 000 communes et de deux millions de personnes y sont potentiellement exposés.
Les événements tragiques du delta du Rhône en 2003, du Gard en 2002, ou de l’Aude en 1999 ont souligné les lourds enjeux de sécurité publique associés à ce risque. Si les dommages liés aux inondations atteignent rapidement des coûts considérables, les effets indirects affectent encore plus durablement l’économie locale, notamment à proximité des plus grands fleuves. À titre d’exemple, une crue identique à celle de 1910 sur la Seine, aujourd’hui coûterait à la collectivité nationale de l’ordre de 10 milliards d’euros de dommages directs ! Une certitude : en dépit des travaux de protection entrepris avec succès dans de nombreuses régions (construction de digues, barrages, aménagement de zones d’expansion de crues, etc.), les inondations ne disparaîtront pas. « Près d’un tiers de la population française vivant en zone côtière inondable continuera à vivre avec ce risque », estime Alix Roumagnac, directeur de Predict Services, société créée en 2004 filiale de Météo France, du groupe BRL et de Infoterra. « Il faut vivre avec. L’enjeu pour le citoyen est donc d’adopter les bons réflexes en cas d’alerte pour préserver sa sécurité, celles de ses proches et de ses biens ».
Surveillance nationale :
Le choix d’un outil standard
Pour mieux répondre à la menace que constituent les inondations, le système français d’alerte des crues a été réorganisé en 2003. Ainsi l’État a décidé la création d’un nouvel organisme qui dépend à la fois de la Direction des Eaux, Météo France et la Direction de la défense et de la sécurité civile (DDSC) : le Schapi (service central d’hydrométéorologie et d’appui à la prévision des inondations). Cet organisme, basé à Toulouse, propose un service de veille hydrométéorologique 24 h sur 24, avec l’appui du réseau des services de prévision des crues (SPC). Fait notoire, les SPC sont regroupés par bassin-versant et non par région administrative comme anciennement les services d’annonce des crues. L’une des particularités des SPC, qui réalisent actuellement des mesures continues en différents points des cours d’eau, est leur interopérabilité, la non-compatibilité des stations étant jusqu’alors courante. Pour cela, le Schapi a imposé, pour la fourniture de ces stations, l’utilisation d’un protocole de communication spécifique (PLQ) (Pluviométrie – Limnimétrie – Qualité) ainsi que plusieurs caractéristiques fonctionnelles et matérielles, toutes décrites dans un cahier des charges. Un premier appel d’offres a été lancé en 2004 et attribué à Paratronic. « Suite à une première station OP@I que nous avions développée à la fin des années 1990, nous avons mis au point une centrale d’acquisition, appelée CPL et comprenant le protocole PLQ et les fonctionnalités demandées mais aussi d’autres caractéristiques non exigées dans le cahier des charges que nous savions appréciées par l’utilisa-
Un nouveau marché national a été lancé en 2007 avec un cahier des charges technique imposant cette fois-ci la mise en œuvre de la transmission des données par encapsulation du protocole PLQ2000 dans des trames TCP/IP. De nouveau, le marché a été attribué à Paratronic pour la fourniture des stations d’acquisition à l'ensemble des services déconcentrés d’hydrométrie (DDT, SN, DREAL et SPC). « Nous avons proposé pour cet appel d'offres, CPL+ qui est une nouvelle version de la station CPL comprenant les fonctionnalités métier et le protocole PLQ, avec en outre un système de communication Bluetooth et un PDA au niveau de son interface au lieu d’un PC. Autre spécificité, sa consommation énergétique a été revue à la baisse, un site complet (capteurs et modems) consommant 1,3 mA versus 3 mA pour la version CPL ».
Deux marchés, deux succès donc. Paratronic occupe ainsi depuis 2004 une situation privilégiée pour la fourniture des services déconcentrés. Une situation différente à l'international, même si « En Italie et au Maroc, quelques réseaux de stations CPL+ ont également été vendus », précise Jérôme Wattelet. Mais le standard franco-français PLQ n’a pas séduit l'Allemagne qui a opté pour une autre technologie utilisant des logiciels multiprotocoles pour régler le problème de l'interopérabilité. Solution souple également employée par certaines stations hydrométriques françaises n’appartenant pas au réseau du Schapi.
Parmi les constructeurs non sélectionnés qui avaient travaillé sur le standard PLQ pour répondre à l’appel d'offres, certains commencent à s'interroger sur le bien-fondé de leur choix, contraints de ne pas vendre leurs produits développés finalement à fonds perdus. D’autres acteurs, notamment dans le monde de la télégestion et de l'hydrométrie, ont quant à eux refusé de développer un produit pour une centaine de pièces par an, trop spécifique pour répondre à une demande d’un autre client que les services déconcentrés. « Dans le cadre d’une démarche industrielle, nous développons un produit pour un ensemble de clients et non pour un seul. C'est notre ligne de conduite », souligne ainsi Jean-Marie Laurendeau, chef de marché Télégestion Eau chez Lacroix Sofrel. « Certes, certains de nos appareils peuvent être implantés par des exploitants au sein d’applications liées à la surveillance de crues, mais ce sont des démarches ponctuelles. »
En attendant le prochain appel d’offres prévu en 2011, certains acteurs imaginent que le protocole PLQ pourrait évoluer. De fait, d’autres solutions techniques existent qui permettraient de résoudre le problème de l'interopérabilité tout en ouvrant le marché. Comme les technologies IP permettant de connecter les stations par Internet et les interroger par des commandes de type XML. La connexion GSM 3G.
est permanente : elle permet de disposer des informations en temps réel sans problème de saturation du réseau ou de retard comme c'est le cas avec le réseau GSM. Une approche de surcroît moins coûteuse...
La surveillance locale : un marché ouvert
L'État ayant désormais mis en place la plus grande partie de son réseau prédictif des crues, les ventes de stations PLQ commencent évidemment à s’essouffler. « La durée de vie du matériel des stations PLQ étant plus longue (10 à 15 ans) que la durée de vie des marchés (4 ans), nous ne pouvons pas parler de cycle de renouvellement du matériel, mais de cycle d’extension du réseau de quelques stations », indique Jérôme Wattelet. « Le marché n'est plus en phase de forte croissance ». Reste que les services déconcentrés de l'État ne
représentent pas la totalité du marché de la surveillance des crues. EDF, VNF, la CNR, mais surtout les collectivités territoriales, les syndicats de communes ou encore les départements investissent de plus en plus dans des outils locaux de surveillance des rivières ou des fleuves.
En particulier, les élus de communes, soumises à des pluies rapides de type cévenoles, ont un besoin accru d'informations très locales pour surveiller par exemple un cours d’eau dans une zone à risques pas forcément sous contrôle du Schapi et être alertés directement.
Même si le standard PLQ 2000 n'est pas obligatoire, certains utilisateurs se tournent vers des enregistreurs conformes au PLQ avec les fonctionnalités définies dans le cahier des charges technologique pour que leurs stations soient compatibles avec celles des services de l'État.
Dans cet esprit, la station d’acquisition OTT LogoSens répond à la compatibilité PLQ 2000 pour la collecte de données par un superviseur utilisant ce protocole.
D'autres ne
voient pas de problème particulier à travailler avec un protocole propriétaire. De fait, il existe des alternatives techniques présentées par plusieurs acteurs tels que Hydrologic, Serosi, Hitec, Vega, Centralp, Schneider Electric ou encore Anhydre. La société Alcyr a par exemple développé un logiciel multi-protocoles permettant de connecter des stations équipées par différents constructeurs. OTT France, acteur spécialisé de l’hydrométrie, propose également un logiciel de concentration permettant d’interroger un parc d’enregistreurs en protocole PLQ2000. Le marché est ouvert également pour les autres éléments des stations que sont les capteurs, les systèmes d’alimentation et les dispositifs de transmission (RTC, GSM, satellite, etc.).
OTT France propose en particulier un nouveau capteur radar (SDI-12 et 4-20 mA, 2 fils), dit OTT RSL (Radar Level Sensor) de dernière génération, plus compact et dont la consommation électrique a été réduite.
La gamme TBR(S) de Paratronic est constituée d’émetteurs/récepteurs radio basse consommation, destinés à la transmission et au report d’informations logiques, analogiques et numériques. Leur faible consommation permet une utilisation sur des sites isolés.
Ils ne nécessitent ni licence ni paramétrage spécifique et sont utilisables sur des liaisons supérieures à 5 km. Le module de base permet de transmettre jusqu’à 2 voies analogiques 4/20 mA, 2 entrées comptage, 2 entrées alarmes, 5 entrées TOR et 2 sorties TOR en retour.
« Il peut être utilisé sans problème pour les stations autonomes », souligne François Laurent chez OTT France. Outre sa très faible consommation de courant (actif : < 12 mA pour 12 V), la large plage de tension d’alimentation et ses interfaces standards en font un appareil flexible susceptible d’être raccordé sans problème à divers enregistreurs de données et systèmes de télétransmission. Son importante plage de distance élevée.
Lorsque la couverture par le GSM est insuffisante ou lorsqu’une fiabilité ou une interactivité plus grande sont nécessaires, la nouvelle solution satellite proposée par Satmos offre simplicité d’utilisation et performances à des coûts abordables. Ses avantages sont les suivants :
- La collecte d’informations est fonctionnelle quel que soit le site (pas de zones blanches) ;
- Fiabilité (99,9 %, délais de transmission de moins d’une seconde) sans problème de saturation du réseau ni de défaillance du réseau en cas de catastrophe ;
- La solution peut être alimentée par panneaux solaires pour la rendre complètement autonome ;
- Une plus grande capacité et interactivité est possible du fait du lien bidirectionnel, ce qui permet de collecter les données mais aussi d’interagir et de commander les équipements sur site (accès aux synoptiques de commandes des sites distants) ;
- Elle fonctionne sous IP, ce qui la rend compatible avec n’importe quel capteur (y compris vidéo) ou automate supportant ce protocole. Satmos travaille aujourd’hui avec de nombreux acteurs tels que Wit, Perax, Sofrel, Siemens, Schneider, Napac, Rockwell, ABB, etc.
La solution Micro-VSAT est simple d’installation et d’utilisation (aucune compétence
particulière n’est nécessaire) et s’intègre de manière transparente dans un système de télégestion ou toute solution M2M. Elle est modulable et s’accommode d’un déploiement progressif avec des coûts d’exploitation compatibles avec les applications de télégestion des collectivités locales.
De son côté, Paratronic lance un capteur radar (4-20 mA) appelé CR 420 de consommation extrêmement faible, avec un temps de chauffe de seulement 2 secondes, soit 10 fois moins que pour les autres capteurs du marché. Un point fort pour les stations isolées dépourvues de source d’énergie ou pour les stations disposant d’une source d’énergie électrique mais susceptibles d’être interrompue lors des épisodes de crues.
Autre nouveauté 2010, Paratronic propose par ailleurs un système radio autonome très basse consommation. « Il s’agit d’un petit boîtier avec un panneau solaire de quelques cm² qui permet de transmettre des informations jusqu’à la centrale d’acquisition. La portée de la transmission peut aller jusqu’à 5-6 km », souligne Jérôme Wattelet. « Ainsi notre système offre la possibilité de placer la station dans un endroit facile d’accès tandis que le capteur peut être à distance au bord du cours d’eau. Ce qui évite de tirer des câbles électriques et de faire une tranchée. D’où des coûts d’installation et de matériel moindres. »
Stellon France propose un système de récupération des données SIGMA II permettant la gestion d’un système d’alerte de crues, dont la particularité est d’être modulaire. « Différentes briques logiciel peuvent être utilisées selon les besoins des réseaux. Les collectivités disposant de 3, 4… ou 10 stations peuvent ainsi disposer à leur échelle d’un logiciel véritablement professionnel ». Un produit phare. À titre d’exemple, SIGMA II est installé au Maroc pour la surveillance des crues de la Chaouia et du Bouregreg dans la région de Rabat et Casablanca.
AnHydre propose de son côté le logiciel Aquarius, une plate-forme flexible de traitement et d’analyse de données. Composée de modules, cette plate-forme permet de dialoguer avec des sondes et des centrales d’acquisition au travers d’un choix de pilotes (formats internationaux ou locaux comme WaterML, WDTF, NWIS, etc., sans oublier bien sûr le basique CSV).
Des plans de sauvegarde pour minimiser les dégâts
Reste que si les autorités disposent désormais de dispositifs fiables et précis de systèmes d’alerte de crues, pour les décideurs publics la problématique des inondations reste en partie non résolue. De fait, une fois prévenue, le défi majeur pour une collectivité consiste à déclencher une série d’opérations appropriées permettant de limiter les dégâts d’un phénomène météorologique.
Or, décider d’un plan d’action efficace pour protéger les biens et les personnes requiert un certain savoir-faire. Predict Services regroupant des spécialistes de la gestion du risque et des hydrologues est la seule…
société en France et à l'international qui aujourd'hui propose aux collectivités un service d'aide à la gestion des inondations. « Sur une zone à risque définie, grâce aux retours d'expériences, aux images satellites et aux données hydrométriques dont nous pouvons disposer actuellement nous savons par exemple précisément quand le seuil d'alerte sera atteint dans un cours d’eau ou un quartier », indique Alix Roumagnac, président de Predict Services.
« Nous invitons alors la commune à engager un plan de sauvegarde défini en fonction du contexte. Au cas par cas, l'évacuation d'un camping peut être décidée ou le barrage d’une route, l'ouverture d'un centre d'accueil, etc. » Créée en 2004, Predict Services s’est ainsi positionnée en complémentarité des activités de veille du Schapi pour répondre aux besoins des collectivités. « Notre objectif est de rendre les résultats des technologies, opérationnels et utilisables pour la sauvegarde des citoyens », souligne Alix Roumagnac. Un service novateur adopté actuellement par 200 communes en France, telles que Cogolin, Sainte-Maxime ou Grimaud dans le Var, qui ont su se protéger des orages survenus début juin 2010, alors que Draguignan a connu des dégâts considérables. La ville de Narbonne, le 11 octobre dernier, a également activé un plan de sauvegarde défini par Predict Services.