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Prévalence de Legionella dans les réseaux de distribution d'eau chaude sanitaire

30 juillet 1997 Paru dans le N°203 à la page 44 ( mots)
Rédigé par : Dominique DERANGèRE, Sylvie DUBROU et Pierre-andré CABANES

Les legionelloses sont des infections respiratoires plus ou moins graves, provoquées par l'inhalation d'aérosols émis par des sites hydriques artificiels colonisés par des bactéries du genre Legionella. Les études environnementales rapportent la présence de Legionella dans le réseau de distribution d'eau chaude, les tours de refroidissement et divers équipements contenant de l'eau. Les réseaux intérieurs individuels de production et de distribution d'eau non jamais fait l'objet d'expertise en France. Il en résulte un manque de connaissances concernant la prévalence écologique des Legionella dans ces dispositifs. Le rôle des facteurs de conception, de fonctionnement et de maintenance de ces réseaux intérieurs dans la colonisation par les Legionella reste donc à évaluer.

[Photo : La Legionella pneumophila prise au microscope à balayage et grossie 10000 fois]

Les Legionella sont des bactéries d'origine hydrique, pouvant entraîner des infections respiratoires plus ou moins graves ou légionelloses, qui, selon les études épidémiologiques, seraient provoquées par l’inhalation d’aérosols contaminés. Les réseaux intérieurs de distribution d'eau des immeubles peuvent contribuer à favoriser la prolifération des Legionella grâce à des facteurs physico-chimiques, bio-

logiques et techniques dont l'implication respective est à préciser. En termes de prévalence écologique et de risque pour la santé, les données actuelles disponibles proviennent essentiellement des investigations menées au niveau des installations de type collectif équipant les bâtiments recevant du public. Par contre, les équipements de type individuel installés, le plus souvent, dans l'habitat, sont très rarement expertisés. Cette revue bibliographique cherche à faire le point des connaissances sur la prévalence des Legionella dans les installations de production et de distribution des eaux chaudes sanitaires de l’habitat individuel.

Les Legionella : un risque pathogène

Les Legionella sont des bacilles à gram négatif, dont la température optimale de croissance est de l’ordre de 35 à 40 °C. Aux alentours de 45 °C, leur multiplication se ralentit, mais il faut atteindre une température avoisinant 60 °C pour les détruire. Jusqu’à présent, plus de 39 espèces et 50 sérogroupes de Legionella ont été identifiés. Dix-huit espèces ont été à l’origine d’infections chez l'homme, mais toutes les espèces doivent être considérées potentiellement pathogènes.

Ces bactéries peuvent être responsables de légionelloses, qui sont des infections respiratoires se manifestant sous deux formes cliniques distinctes : la maladie des légionnaires (pneumopathie aiguë grave) et la fièvre de Pontiac (infection pseudo-grippale bénigne). Dans la plupart des cas, la forme pneumopathique nécessite une hospitalisation et un traitement antibiotique adapté. Un retard de diagnostic peut entraîner un syndrome de détresse respiratoire aiguë, notamment chez les personnes immunodéprimées. Le taux de décès varie de 5 à 10 % selon les études. Les facteurs prédisposants à une atteinte par les Legionella sont l’immunodéficience, l'âge, les comportements alcooliques et tabagiques, les maladies pulmonaires chroniques, le sexe masculin.

Les études épidémiologiques suggèrent que ces pathologies sont dues à l'inhalation d’aérosols provenant de sites hydriques colonisés par les Legionella. Il n’a pas été mis en évidence de contamination interhumaine et la contamination par ingestion n’a pas été démontrée.

Les milieux hydriques naturels sont très rarement à l’origine de maladies, à la différence des eaux « domestiquées » qui constituent des sites de prolifération et de dissémination. Dans l'environnement naturel, elles ont été détectées essentiellement dans les milieux hydriques (rivières, étangs, fleuves, estuaires…) mais également dans le sol. La présence de protozoaires, hôtes banaux des milieux hydriques, favorise la prolifération des Legionella. Les bactéries phagocytées pourraient ainsi être protégées et résister aux conditions défavorables.

Les systèmes de traitement de l’air et les tours aéro-réfrigérantes qui leur sont associées ont été les premiers équipements mis en cause dans la multiplication et/ou le transport de ces bactéries. D’autres dispositifs, tels des appareils individuels d’humidification de l'air peuvent également être colonisés par des Legionella, ainsi que les bains bouillonnants, les fontaines décoratives et les équipements de thérapie respiratoire.

La contamination via un aérosol généré au cours de l'utilisation d’eau chaude sanitaire est également incriminée. Les systèmes de production et de distribution d’eau chaude constituent des réservoirs de prolifération des Legionella. Des aérosols dont la taille est suffisamment petite (1 à 5 µm) pour pénétrer dans le poumon profond, peuvent être générés par des têtes de robinets ou des pommes de douche (Bollin et al., 1985).

La contamination des équipements

Des enquêtes environnementales, réalisées essentiellement dans le domaine collectif, ont montré la présence de Legionella à différents niveaux dans les systèmes de distribution d’eau chaude intérieurs d’hôpitaux, d'hôtels, de bâtiments tertiaires et dans les tours de refroidissement.

La prévalence des Legionella dans les réseaux collectifs de distribution d’eau chaude a été évaluée à 37 % dans une étude australienne (Hedges et al., 1991). Des enquêtes écologiques menées en région parisienne ont permis de montrer que près de 70 % des équipements collectifs de distribution d’eau chaude contenaient des Legionella (Desplaces et al., 1984 ; Dubrou et al., 1992 ; Nahapetian et al., 1986). En Angleterre, la fréquence d’isolement de Legionella dans les réservoirs d'eau froide des immeubles est de 11 % (Colbourne et al., 1989).

La prévalence écologique des Legionella dans les installations individuelles de pro-

[Photo : Chauffe eau électrique : la capacité des chauffe-eau varie de 50 litres à 300 litres en moyenne, dans l'habitat individuel.]

La production et de distribution d’eau chaude sanitaire varie selon les études, de 6 à 37 % (Alary & al., 1991, Dewailly & al., 1991, Hedges & al., 1991, Joly & al., 1985, Lee & al., 1988, Stout & al., 1992). Cette prévalence n’est pas systématiquement associée à un épisode sporadique, endémique ou épidémique de légionellose (WHO, 1985). Si cette contamination est toujours corrélée à la température de l'eau, aucune autre corrélation significative n’a été systématiquement établie avec d'autres paramètres physico-chimiques.

Des études canadiennes (Alary & al., 1991, Dewailly & al., 1991) mettent fortement en cause les chauffe-eau électriques dans la prévalence des Legionella dans les installations, mais cette relation n’a pas été recherchée en France, où leur conception est différente.

Il semble que les plus fortes concentrations en Legionella sont retrouvées, en installations collectives, lorsqu'il existe des tuyauteries et des eaux stagnantes et/ou des circuits d’eau chaude en boucle. Les réseaux de distribution collectifs sont fréquemment contaminés à la faveur de circuits complexes présentant des zones de stagnation d'eau et des températures tièdes.

Les données épidémiologiques

En Angleterre, les services de santé ont estimé à 300 le nombre de cas annuels de légionellose, à comparer aux 180 000 cas estimés de pneumonies. Certains auteurs soutiennent que ces chiffres sont largement sous-estimés et avancent, sur la base des résultats de tests sanguins, qu’1 % de la population a été exposée ou a été en contact avec des Legionella (citation dans Ellis, 1993).

En France, la légionellose est une maladie à déclaration obligatoire depuis 1988 (décret n° 87-1012 du 11 décembre 1987). Ce dispositif permet de recenser plus d'une soixantaine de cas par an. De son côté, pendant la même période, le Centre National de Référence (CNR) identifie près de 400 cas (Tchakamian & al., 1995). Une étude conjointe du Réseau National de Santé Publique et du CNR a estimé à 528 le nombre de cas de légionellose en 1995 (RNSP et CNR, 1996). Ces chiffres sont probablement sous-estimés en raison de la difficulté liée à la confirmation du diagnostic. Plusieurs équipes ont montré que 5 à 10 % des pneumonies nécessitant une hospitalisation sont liées à l’infection par des Legionella (Falco & al., 1991, Fang & al., 1990).

Les légionelloses se manifestent, le plus souvent, sous la forme de cas sporadiques, mais peuvent évoluer également sous forme d’épidémie ou d’endémie en collectivité, notamment en milieu hospitalier.

La majorité des épisodes de légionellose ont été décrits dans les collectivités et ce, pour plusieurs raisons : sensibilisation des acteurs de santé et des responsables des bâtiments, regroupement de sujets fragilisés, mise en œuvre d'une démarche d’analyse des expositions, existence de moyens de diagnostic bactériologique et sérologique. Ces cas groupés ne sont pas liés à une contamination interhumaine, mais sont

[Encart : Conception des systèmes de production d’eau chaude sanitaire Il existe trois catégories de systèmes de production d'eau chaude sanitaire en France : par accumulation, instantané, par semi-accumulation ou semi-instantané (HILAIRE, 1996). Les exigences actuelles du Code de la construction et de l’habitat fixent à 60 °C la température maximale de l’eau au point de puisage (Arrêté du 22 août 1976). La production par accumulation Ce type de production est le plus répandu. Il peut fonctionner avec tous les types d’énergie. C'est la solution majoritaire pour l’énergie électrique. L’eau chaude sanitaire est produite puis stockée en vue d’une utilisation ultérieure. L’organe de chauffe peut être constitué par une résistance électrique ou par un échangeur sous forme tubulaire. Cette conception entraîne un phénomène de stratification, c’est-à-dire que l'on trouve à l'intérieur du ballon à la fois de l'eau chaude, de l'eau froide et de l’eau tiède dans une « zone de mélange ». Si la taille du ballon est adaptée aux besoins journaliers, la zone de mélange ne sera pas distribuée. En revanche, lors de puisages importants, il y a risque de distribuer une eau qui a été stockée à une température très inférieure à celle fixée pour la production.
[Photo : La production par accumulation]
La production instantanée Les énergies utilisées sont de nature électrique ou combustible (fioul, gaz). Ce type de production est adapté aux besoins fréquents mais peu importants car ne nécessitant pas de stockage. En revanche, elle demande une puissance plus élevée. La température est régulée par action sur le débit de l'eau ou par action sur la puissance de chauffe.
[Photo : La production instantanée] La production par semi-accumulation ou semi-instantané Cette méthode couple une production instantanée avec un ballon de stockage destiné à écrêter les pointes de consommation lors de puisages importants. ]

Tous issus d’une même source contaminante. Le taux d’attaque, en cas « d’épidémie », est en général inférieur à 5 %, exception faite de la fièvre de Pontiac, où il est proche de 95 %. Les cas groupés et/ou nosocomiaux de maladie des légionnaires ont fait l'objet de nombreux travaux visant à déterminer la source de contamination (Meenhorst et al., 1985, Ruf et al., 1988, Swann et al., 1982). Dans ces situations, la maladie est le plus souvent en relation avec l'utilisation de l'eau chaude sanitaire.

En revanche, les cas sporadiques ont été moins étudiés jusqu’à présent alors qu'ils représentent, en se basant sur les données de déclarations aux États-Unis, de 65 % à 80 % de la totalité des cas. Ce chiffre est vraisemblablement inférieur à la réalité, car les cas sporadiques sont moins bien déclarés que les cas groupés, surtout lorsqu’il s’agit de cas non nosocomiaux. Un travail épidémiologique récent (Stout et al., 1992) portant sur des cas sporadiques a consisté à rechercher les Legionella dans les installations de production et de distribution d’eau chaude sanitaire de personnes hospitalisées pour maladie des légionnaires. Dans 8 cas sur 20, un même sous-type a été identifié chez le malade et dans un des prélèvements environnementaux effectués. Le fait de détecter des Legionella dans une eau n’est pas, bien évidemment, une condition suffisante pour qu'il y ait systématiquement contamination humaine : il faut que la concentration bactérienne soit suffisamment élevée, mais cette valeur, qui n’est pas connue de façon précise, peut varier en fonction de la susceptibilité des personnes exposées, de la virulence des souches, et du dispositif impliqué, qu'il s’agisse du réservoir d'eau ou de la production d'aérosols. Reprenant les recommandations de l’OMS, la Direction Générale de la Santé considère qu’en deçà de 10³ UFC/l (Unités Formant Colonies par litre d’eau) le risque d'apparition de cas de légionellose serait très faible, voire nul (Circulaire DGS/PGE 1C n° 238 du 28 mars 1989). Certains auteurs (Pietsch et al., 1991) proposent même des limites de 10² UFC/l voire 10³ UFC/l, mais en différenciant les risques selon l’état immunitaire des sujets exposés.

Les chaînons manquants

Le comportement biologique et écologique des Legionella dans les réseaux d'eau n'est pas suffisamment exploré. Ainsi, aucune étude répertoriée ne prend en compte l’influence de l’intégralité des systèmes de plomberie des habitations sur le développement des Legionella : type de production

[Encart : texte : Références bibliographiques – Alary M., Joly J-R. – Risk factors for contamination of domestic hot water systems by legionellae, Appl. Environ. Microbiol. 1991 ; 57 (8) : 2360-2367. – BEH – Guide d'investigation d'un ou plusieurs cas de Légionellose – BEH n° 20-22/1997 – 20 mai 1997, 83-405. – Bej A.K., Mahbubani M.H., Atlas R.M. – Detection of viable Legionella pneumophila in water by polymerase reaction and gene probe methods. Appl. Environ. Microbiol. 1991 ; 57 : 597-600. – Bolin G., Plouffe J.F., Para M.F., Hackman B. – Aerosols containing Legionella pneumophila generated by shower heads and hot water faucets. Appl. Environ. Microbiol. 1985 ; 50 : 1128-1131. – Cabanes P.A., Dubrou S., Larguier M., Saude I., Festy B. – Les Legionella dans l'environnement hydrique sanitaire. Données préliminaires pour une évaluation du risque en France, Med. Mal. Infect. 1995 ; 25 : 850-857. – Colbourne J.S., Dennis P.J. – The ecology and survival of Legionella pneumophila, J. Iwem, août 1989 ; 3 : 345-350. – Desplaces N., Nahapetian K., Dournon E. – Inventaire des Legionella dans l'environnement parisien. Presse Med. 1984 ; 13 : 1875-1879. – Dewailly E., Joly J-R. – Contamination of domestic water heaters with Legionella pneumophila : impact of water temperature on growth and dissemination of the bacterium. Environ. Toxicol. Water Qual. 1991 ; 6 : 249-257. – Dubrou S., Nahapetian K., Challemel O., Festy B. – Protozoaires et prolifération des Legionella dans les réseaux privés de distribution d'eau. J. Fr. Hydrol. 1992 ; 23 : 251-259. – Ellis K.V. – Legionellosis : a concise review, J. Iwem, août 1993 ; 7 : 418-430. – Falco V., Fernandez de Sevilla T., Alegre J., Ferrer A., Martinez Vazquez J-M. – Legionella pneumophila. A cause of severe community-acquired pneumonia, Chest. 1991 ; 100 : 1007-11. – Fang G.D., Fine M., Orloff J., Arsumi D., Yu V.L., Kapoor W., Grayston J.T., Wang S.P., Kohler R., Muder R.R., Yee Y.C., Rihs J-D., Vickers R.M. – New and emerging etiologies for community-acquired pneumonia with implications for therapy. Medicine (Baltimore). 1990 ; 69 : 307-316. – Hedges L.J., Roser D.J. – Incidence of Legionella in the urban environment in Australia, Wat. Res. 1991 ; 25 (4) : 393-399. – Hilaire B. – Programme d’actions destinées à réduire les risques de brûlures dues aux eaux chaudes sanitaires. Aspects techniques. Rapport à la demande de la DGS/VRA n° 236, avril 1996, 18 p. – Hussong D., Colwell R.R., O’Brien M., Weiss E., Pearson A.D., Wiever R.M., Burge W.D. – Viable Legionella pneumophila not detectable by culture on agar media. Bio-Technology. 1987 ; 5 : 947-950. – Joly J-R., Dewailly E., Bernard L., Ramsay D., Brisson J. – Legionella and domestic water heaters in the Quebec City area. Can. Med. Ass. J. 1985 ; 132 : 705. – Lee T.C., Stout J.E., Yu V.L. – Factors predisposing to Legionella pneumophila colonization in residential water systems. Arch. Environ. Health. 1988 ; 43 : 59-62. – Meenhorst P.L., Reingold A.L., Groothuis D.G., Gorman G.W., Wilkinson H.W., McKinney R.M., Feeley J.C., Brenner D.J., Van Furth R. – Water-related nosocomial pneumonia caused by Legionella pneumophila serogroups 1 and 10. J. Infect. Dis. 1985 ; 152 (2) : 356-364. – Nahapetian K., Challemel O., Beurtin D., Dubrou S., Gounon P., Squinazi F. – The intracellular multiplication of Legionella pneumophila in protozoa from hospital plumbing systems. Res. Microbiol. 1991 ; 142 : 677-685. – Nahapetian K., Collignon A., Festy B. – Bilan d’une recherche systématique de Legionella sp. dans l'habitat et les piscines. Rev. Fr. Santé Publ. 1986 ; 34 : 40-44. – Palmer C.J., Bonilla G.F., Roll B., Pasco-Kolva C., Sangermano L.R., Fujioka R.S. – Detection of Legionella species in reclaimed water and air with the EnviroAmp Legionella PCR kit and direct fluorescent antibody staining. Appl. Environ. Microbiol. 1995 ; 61 : 407-412. – Pietsch M., Werner H.P. – Bewertung positiver Legionellen-Befunde in Leitungswasser. Hyg. Med. 1991 ; 16 : 353-356. – Réseau National de Santé Publique et Centre National de Référence des Legionella – Legionellose en France en 1995 : diagnostic microbiologique et surveillance épidémiologique. RNS, Saint-Maurice, France, décembre 1996. – Ruf B., Schirmann D., Horbach I., Seidel K., Pohle H.D. – Nosocomial Legionella pneumonia : demonstration of potable water as the source of infection. Epidemiol. Infect. 1988 ; 101 : 647-654. – Stout J.E., Yu V.L., Yee Y.C., Vaccarello S., Diven W., Lee T.C. – Legionella pneumophila in residential water supplies : environmental surveillance with clinical assessment for Legionnaires’ disease. Epidemiol. Infect. 1992 ; 109 : 49-57. – Swann R.A., Peel M.M., Rouch G.J. – Isolation of Legionella pneumophila from hospital water systems in Victoria, Med. J. Aust. 1982 ; 2 : 226-227. – Tehakamian S., Capek I. – Les cas de légionelloses déclarés en France en 1993 et 1994. BEH 1995 ; (44) : 181-2]

d'eau chaude, conception des réservoirs, configuration des réseaux, mode de circulation de l’eau, nature des matériaux, type de robinetterie, qualité et température de l'eau, traitements associés, entretien, maintenance, usage... Il est essentiel d’évaluer l'influence de ces différents paramètres sur le développement des Legionella pour établir une évaluation du risque et proposer des mesures préventives adaptées. Une étude préliminaire, menée en France par Cabanes & al. (1995) pour une évaluation du risque, a souligné la grande diversité et la complexité des installations individuelles de production et de distribution d'eau chaude.

Par ailleurs, il subsiste des difficultés techniques pour l'identification et le dénombrement des Legionella. Les méthodes habituelles de détection et de recherche de Legionella dans l'environnement, par culture sur milieu semi-sélectif BCYE, peuvent être limitées par la présence d'une flore microbienne inhibitrice, et ne permettent pas la détection des Legionella viables mais non cultivables (Hussong & al., 1987). Des techniques de biologie moléculaire qui assurent l'amplification d’une partie du génome bactérien par méthode PCR (Bej & al., 1990 ; Palmer & al., 1995) permettent la détection des bactéries vivantes et mortes dès lors que les substances inhibitrices présentes dans l'eau sont éliminées. Des études sont à mener pour évaluer l'intérêt respectif de ces deux méthodes dans l’efficacité de détection et de quantification des Legionella.

Conclusion

Les données bibliographiques mettent en évidence la sous-estimation de déclaration des cas de légionellose en France. L’incidence de la fièvre de Pontiac reste, quant à elle, inconnue. Un guide pratique d'investigation d’un ou plusieurs légionelloses (BEH, 1996) a récemment été édité en France. Ce guide fait le point sur les connaissances actuelles sur les légionelloses, et préconise certaines actions pour améliorer la prévention de cette maladie. L’évaluation de la surveillance de légionellose en France a été renforcée par la circulaire DGS n° 97/3211 du 24 avril 1997.

En termes de prévalence écologique et de risques pour la santé, la colonisation par les Legionella des systèmes « d’eaux domestiquées » est un phénomène largement commenté par la littérature en ce qui concerne les installations collectives, notamment les systèmes de traitement d'air, les tours aéroréfrigérées qui leur sont associées, et les réseaux d’eaux chaudes collectifs. Les réseaux intérieurs individuels de production et de distribution d’eaux sanitaires n’ont jamais fait l’objet d’aucune étude en France. Il en résulte un manque de connaissances concernant la prévalence écologique des Legionella dans ces dispositifs et du rôle des facteurs de conception des réseaux, de fonctionnement et de maintenance de ces systèmes dans la colonisation par les Legionella.

Les programmes d’actions sanitaires actuels visent à réduire le risque de brûlure en fixant la température de l'eau au point de puisage à 50 °C avec une température minimale de production d'eau chaude sanitaire à 60 °C. En l'état actuel des connaissances, ce compromis vise à réduire les risques de brûlures au point de puisage et d’éviter de créer des conditions favorables au développement des Legionella. Parmi les solutions possibles pour atteindre ces exigences figure la mise en place de mitigeurs thermostatiques en sortie de production. Dans le collectif, cette solution impliquerait une modification plus ou moins importante des circuits de bouclage existants, selon les possibilités d’emplacement du régulateur. La partie privative des réseaux ne serait pas maintenue en température.

La connaissance de la prévalence des Legionella dans les réseaux individuels de distribution d'eau est nécessaire compte tenu des implications épidémiologiques potentielles. Le recours à des compétences techniques multiples est indispensable pour mieux comprendre les rôles respectifs de facteurs aussi variés que les facteurs analytiques, conceptuels, fonctionnels et environnementaux, dans la prévalence des Legionella dans les systèmes de production et de distribution d’eau.

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