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Prélèvements, extraction et analyse par chromatographie en phase gazeuse de produits pétroliers dans des sols contaminés

30 novembre 1998 Paru dans le N°216 à la page 52 ( mots)
Rédigé par : Diana JUC, Jean CARRE, Jean-marie BLANCHARD et 1 autres personnes

Ayant du analyser des sols provenant de dépôts pétroliers pollués par des hydrocarbures divers, nous avons défini les conditions de prélèvement et de stockage des échantillons. L'extraction a été effectuée par sonication avec du dichlorométhane ou du chloroforme chaud selon les polluants. Les modes opératoires d'analyse par chromatographie en phase gzaeuse ont été mis au point pour chaque polluant: essence, kérosène, gas oil, huile.

Diana Juc, Laboratoire de Chimie Industrielle et Écologique

Jean Carre, UPRESA 5079, Laboratoire de Thermodynamique Appliquée

Jean-Marie Blanchard, Laboratoire d’Analyse Environnementale des Procédés et Systèmes Industriels

Gheorghe Duca, Laboratoire de Chimie Industrielle et Écologique

Ayant dû analyser des sols provenant de dépôts pétroliers pollués par des hydrocarbures divers, nous avons défini les conditions de prélèvement et de stockage des échantillons. L’extraction a été effectuée par sonication avec du dichlorométhane ou du chloroforme chaud selon les polluants. Les modes opératoires d’analyse par chromatographie en phase gazeuse ont été mis au point pour chaque polluant (essence, kérosène, gas oil, huile).

Nous avons entrepris, dans le cadre de la coopération entre l'INSA de Lyon et l'Université d’État de Moldavie, l'étude de l'impact environnemental des dépôts pétroliers moldaves sur le sol. Les hydrocarbures sont différents : essence, kérosène, gas oil et huile. Nous avons dû tenir compte de leur spécificité dans la détermination des conditions de prélèvement, de transport, de conservation des échantillons, d’extraction des polluants et d'analyse.

Conditions de prélèvement, de transport et de conservation des échantillons

Les échantillons sont prélevés sur les terrains pollués en Moldavie et les analyses ont été effectuées en France à l’INSA de Lyon, ce qui nous oblige à définir soigneusement les campagnes de prélèvement et d'analyse, étant donné l'éloignement entre les deux laboratoires partenaires qui limite le nombre de campagnes.

Une étude préalable est effectuée sur chaque site, à partir de l’historique du dépôt, de ses conditions d'utilisation, d'un examen sur le terrain. Ceci permet d’orienter les prélèvements vers des lieux très, moyennement ou peu pollués. Il est également important de définir un lieu a priori non pollué pour prélever un sol témoin vierge.

Cette tendance peut être contrôlée par l'uti-

[Photo : Réseau de conduites d’essence et de gazole sur le site de dépôt de produits pétroliers]

Utilisation d’un coffret Merck Clévenot DTECH BTEX (nombre d’analyses restreintes à cause du coût des réactifs).

Les moyens de forage étant limités, nous avons, dans un premier temps, effectué une étude de surface (jusqu’à environ 1,80 mètre de profondeur), sans moyens mécanisés, afin de définir les lieux de forage plus profonds, jusqu’à la nappe phréatique.

Nous avons choisi de présenter cette étude préliminaire, car elle offre une très grande variété et, par là, pose de nombreux problèmes analytiques.

Il n’existe pas de définition rigoureuse des normes de prélèvement. C’est d’ailleurs pourquoi cinq normes ISO (ISO 381.1 à 381.5) sont actuellement en préparation sur l’échantillonnage des sols pollués.

Le forage est effectué manuellement, à l’aide d’une tarière.

Le prélèvement d’une faible quantité (quelques grammes) est fait le plus rapidement possible, pour éviter l’évaporation des hydrocarbures légers, dans une zone proche de la tête de la tarière pour définir la profondeur du prélèvement et éviter au maximum le remaniement de la terre. Cet échantillon est introduit dans un tube en verre muni d’une fermeture avec joint en téflon (PTFE) et les tubes sont immédiatement rangés dans une glacière. Ils sont ensuite stockés en congélateur à -18 °C dans les deux laboratoires. Le transport entre les deux, d’une durée moyenne de six heures, est effectué dans une glacière. Ces tubes étant totalement étanches, le maintien au froid limite surtout la désorption des hydrocarbures volatils et leur dépôt sur les parois internes du tube. Le respect de ces conditions rigoureuses permet un stockage pendant plusieurs semaines avant analyse.

Extraction des polluants

La norme AFNOR X31.410 parue en 1996 sur l’analyse des huiles minérales dans les sols (1) préconise les analyses à la fois par spectroscopie infrarouge et par chromatographie en phase gazeuse.

L’extraction selon cette norme est faite avec du Fréon 113, inactif en infrarouge, puis une nouvelle extraction à l’hexane (à partir de la solution précédente) pour chromatographie est effectuée par agitation des deux solutions organiques. Pour simplifier cette procédure lourde, nous avons voulu utiliser une technique simple, facile à mettre en œuvre et efficace.

La présence des hydrocarbures lourds de l’huile nécessite l’utilisation d’une méthode avec solvant et la présence des hydrocarbures légers de l’essence nous fait rejeter les techniques de type Soxhlet. La sonication est donc la meilleure solution. Son efficacité dépend du choix du solvant. Ce dernier doit permettre une extraction totale et ne pas interférer en chromatographie avec les produits analysés.

Le dichlorométhane et le tétrahydrofurane répondaient à la première condition. Mais les solutions de dichlorométhane sont délicates à manipuler à cause de leur volatilité et le tétrahydrofurane interfère avec les hydrocarbures de l’essence et du gas oil.

Nous avons donc retenu le dichlorométhane lorsque la présence d’essence était détectée par une première analyse. L’extraction n’étant pas totale à la température ambiante avec le chloroforme, des essais de sonication à chaud ont donné des résultats équivalents au THF. Le chloroforme a donc été retenu, dans ces conditions opératoires, pour l’extraction des gas oil, kérosène et huile.

Ces essais ont été conduits sur des sols pollués, une pollution réelle étant plus difficile à extraire qu’une pollution synthétique fraîchement effectuée au laboratoire. Une extraction complète est caractérisée par l’absence d’hydrocarbures dans une deuxième extraction au THF.

La sonication est effectuée pendant 15 minutes à la température ambiante pour le dichlorométhane et à 50 °C pour le chloroforme, avec addition d’environ 10 grammes de solvant sur 3 grammes de terre polluée, ce conditionnement étant effectué dès le dégel de la terre.

Des essais préliminaires nous ont montré que le dichlorométhane et le

[Photo : Forage sur le site de dépôt de produits pétroliers en Moldavie]
[Photo : Forage sur le site de dépôt d’huile en Moldavie. Un échantillon compact peut être fragmenté par des cycles gel-dégel.]

Analyses chromatographiques

1- Conditions opératoires

La solution obtenue est séchée par addition de sulfate de sodium, puis filtrée.

Nous ne pouvons pas doser par une seule analyse chromatographique la totalité des hydrocarbures allant de l’essence à l’huile. Nous avons donc défini des protocoles différents, l'historique du terrain et une première analyse conduisant au choix du produit pétrolier à analyser, donc au protocole opératoire retenu. Des échantillons de même provenance peuvent être analysés en parallèle avec des protocoles différents dans le cas d'une pollution par plusieurs produits pétroliers (exemple : gas oil et essence).

Le matériel disponible au laboratoire ne nous permettant pas de respecter scrupuleusement la norme AFNOR X31.410 (en particulier pas de possibilité de programmation de plusieurs paliers de température sur le four chromatographique), nous nous en sommes inspirés pour définir les conditions d'analyse.

Toutes les analyses ont été effectuées avec un chromatographe Packard 438A équipé de colonnes capillaires (colonne de 10 mètres de long, de diamètre 0,25 mm avec 0,2 μm de poly(diméthylsiloxane) pour l'analyse de l’huile ; colonne de 30 mètres de long, diamètre 0,25 mm avec 1 μm de poly(diméthylsiloxane) pour l'analyse des autres produits pétroliers). Les conditions analytiques sont citées dans le tableau 1.

Le cycle d’analyse s'étend sur 30 minutes dans tous les cas, de nombreux échantillons étant à analyser. Une mauvaise séparation des composants due à une montée rapide en température (cas de l’huile) ne nuit pas à la qualité de l’analyse quantitative si les mêmes conditions opératoires sont toujours respectées.

La variété et surtout le mélange des polluants interdisent l'utilisation d’un étalon interne, des pics pouvant être présents sur toute l’étendue des spectres chromatographiques. Toutes les injections sont faites avec la même quantité introduite (0,3 μL) avec la même seringue pour limiter les risques d'erreur sur le volume effectivement introduit.

2- Étalonnage et traitement des résultats

La surface de l'ensemble des pics (hormis le solvant) est prise en compte lors d'une mesure, une correction pouvant être apportée par soustraction de l’aire obtenue par injection de 0,3 μL de solvant pur.

Les étalonnages externes ont été effectués par :

  • dilution au dichlorométhane d’une solution d'essence à 20 mg·mL⁻¹ dans du méthanol (référence Supelco 4-7592) ;
  • dilution à l’hexane d'une solution de kérosène à 50 mg·mL⁻¹ dans de l’hexane (référence Supelco 4-7597) ;
  • dilution au chloroforme d’un gas oil ASTM D2887 ;
  • dilution au chloroforme des huiles AX00 et AB00, standards de l'Institut Français du Pétrole™.

Ces étalons ont été retenus à cause de la ressemblance de leur spectre chromatographique avec ceux des polluants détectés. De plus, la validité de ces étalonnages a été également contrôlée par injections de solutions de produits pétroliers moldaves (gas oil et huile moteur).

Les droites d’étalonnage sont obtenues avec un coefficient de corrélation compris entre 0,98 et 1 et une répétabilité comprise entre 1 et 6 %.

Les seuils de détection varient entre 1 et 30.

[Photo : Figure 1 – Étalonnage externe du chromatographe pour le dosage d’huile.]
[Photo : Figure 2 – Analyse chromatographique d’un mélange essence-gas oil.]

Tableau 1 : Conditions analytiques

essence kérosène gas oil huile
Température injecteur 200 °C 200 °C 200 °C 265 °C
Température détecteur 280 °C 280 °C 280 °C 325 °C
1° palier
durée (mn) 8 8 8 5
Température 30 °C 30 °C 45 °C 50 °C
rampe (°C/mn) 10 10 25 35
2° palier
durée (mn) 0,5 0,5 12 15
Température 275 °C 275 °C 275 °C 320 °C

ppm. Leur fiabilité dépend beaucoup de l'effet « mémoire » sur la colonne chromatographique, particulièrement sensible lorsque les analyses successives sont nombreuses et concernent des composés lourds (huiles).

Nous reportons à titre d’exemple, dans la figure 1 les résultats obtenus sur l’huile moteur. L’exploitation quantitative d’un spectre de pollution ne pose pas de problème lorsqu’il s’agit d’un produit pétrolier pur. Par contre, nous avons rencontré dans l'étude d’un dépôt polyvalent des pollutions multiples, la plus fréquente étant un mélange d'essence et de gas oil. Les compositions se recoupant, nous avons décidé d'attribuer le décane à l’essence et le undécane au gas oil (voir figure 2), bien que ces deux produits contiennent ces deux hydrocarbures.

Conclusion

Nous avons mis au point les conditions de prélèvement, transport et conservation des échantillons de sols pollués par des hydrocarbures. Les conditions originales d’extraction et d'analyse sont également décrites. Ces processus opératoires peuvent constituer une contribution à la définition des projets de normes AFNOR.

Références bibliographiques

1 Qualité des Sols. 3ᵉ édition. Environnement AFNOR 1996

2 Blanchard J. M., Carre J., Popescu M., Déchets 5, 1997, 464

3 J. C. Hipeaux, M. Borin, J. P. Durand, P. Claudy, J. M. Létoffé Lubrication Engineering, à paraître.

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