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Prélèvement des légionelles dans les aérosols : étude de la viabilité avec deux préleveurs du marché

31 mars 2009 Paru dans le N°320 à la page 53 ( mots)
Rédigé par : Sandrine OBERTI, Nelsie BERTHELOT, Anthony PINON et 5 autres personnes

Cette article s'attache à étudier la viabilité des légionelles dans les aérosols et compare l'efficacité de deux biocollecteurs du marché sur le taux de récupération des légionelles. Il met en évidence des performances assez proches pour les deux appareils.

Nelsie Berthelot, Sandrine Oberti, Centre de Recherche sur l’Eau, Veolia Environnement

Anthony Pinon, Anne-Marie Jandos, Sandra Decherf, Virginie Alexandre et Michèle Vialette, Unité de Sécurité Microbiologique, Institut Pasteur de Lille

Franck Laurent, Centre d'Analyses Environnementales, Veolia Environnement

Cet article s’attache à étudier la viabilité des légionelles dans les aérosols et compare l’efficacité de deux biocollecteurs du marché sur le taux de récupération des légionelles. Il met en évidence des performances assez proches pour les deux appareils.

Présentant un risque pour la population, c’est pourquoi Veolia, en collaboration avec l’Institut Pasteur de Lille, étudie la survie des légionelles dans les aérosols et s’attache à évaluer les préleveurs du marché pour statuer sur leur efficacité et leur rendement.

Objectifs de l'étude

Cette étude s’attache à obtenir des informations sur la viabilité des légionelles dans les aérosols et à comparer l’efficacité de deux biocollecteurs du marché sur le taux de récupération des légionelles. Les deux préleveurs permettent un recueil.

Tableau 1 : Caractéristiques des préleveurs

Préleveur 1
Débit de prélèvement : 10 L/min
Nature échantillon : liquide (3 mL)
Utilisation : système portatif, pour durée de prélèvement limitée (évaporation)
[Photo : Préleveur 1]
Préleveur 2
Débit de prélèvement : 50 à 300 L/min
Nature échantillon : liquide (15 mL)
Utilisation : prélèvement de volumes importants possible, débit et durée variables
[Photo : Préleveur 2]
[Photo : Figure 1 : Schéma de la chambre d’aérosolisation.]

d’échantillon en phase liquide. Cela permet de réaliser plus d’analyses que les impacteurs sur gélose, classiquement utilisés pour l’analyse des bioaérosols. En effet, l’échantillon en milieu liquide permet non seulement de mesurer les microorganismes cultivables, mais également les viables non-cultivables et même les non-viables. Cela peut donner une information intéressante sur le risque infectieux potentiel des aérosols.

Les caractéristiques des deux appareils utilisés dans cette étude sont rassemblées dans le tableau 1.

Méthodologie

Pour comparer les performances des deux appareils, des essais ont été menés à l’échelle du laboratoire. Une chambre d’aérosolisation permet, grâce à un nébuliseur médical (Portaneb-lite Sidestream), de mettre en suspension une quantité connue de Legionella pneumophila. La solution de nébulisation est composée d’eau du robinet filtrée pour éliminer tout micro-organisme et dopée en légionelles. Ensuite, l’air de la chambre est prélevé et l’échantillon liquide recueilli est analysé. Pour des raisons de sécurité, tous les essais ont été menés dans un laboratoire de sécurité microbiologique de niveau 3 (P3).

[Photo : Figure 2 : Photographie de la chambre d’aérosolisation.]

Les essais ont été menés avec la souche épidémique de Lens de Legionella pneumophila sérogroupe 1, référencée CIP 108286.

Les échantillons sont caractérisés selon trois méthodes qui donnent les renseignements suivants :

– le nombre total de bactéries récupérées (vivantes ou mortes) B : comptage direct des cellules après marquage au DAPI (4',6-diamidino-2-phénylindole).

Le nombre de bactéries viables apparaît comme inférieur au nombre de bactéries cultivables, car les résultats ne sont pas exprimés selon la même unité (UFC/mL pour les bactéries cultivables et n/mL pour les bactéries viables). Néanmoins, les différences observées sont très faibles et il n’y a donc pas de différence significative entre les deux résultats.

Le volume de la chambre d’aérosolisation est de 75,3 L et les concentrations initiales de légionelles sont comprises entre 10⁵ et 10⁷ UFC/m³.

Un plan d’expériences a été réalisé afin de comparer les deux appareils de prélèvement. Les facteurs qui ont été évalués sont : la concentration initiale dans la chambre et l’âge des aérosols.

La comparaison des performances des deux préleveurs a été effectuée selon trois critères : le pourcentage de récupération, le nombre de bactéries viables et le nombre de bactéries cultivables.

[Photo : Figure 3 : Composition de la solution de nébulisation.]

– le nombre de bactéries viables BV : mesure par fluorescence (à l’aide d’un appareil ChemScan RDI). Cette mesure est basée à la fois sur l’intégrité membranaire des cellules et l’activité enzymatique ;

– le nombre de bactéries cultivables BVC : dénombrement des légionelles cultivables sur géloses BCYE.

La figure 3 présente les concentrations dans les deux solutions de nébulisation utilisées pour les essais.

Globalement, dans la solution de nébulisation, il y a peu de bactéries viables non cultivables. Nous voyons que les bactéries totales (B) sont plus nombreuses que les bactéries cultivables (BVC) ou les bactéries viables (BV).

Résultats et discussion

Vingt-quatre essais ont été réalisés avec chacun des deux préleveurs. À chaque fois, les légionelles cultivables, viables et totales ont été dénombrées dans la solution de nébulisation et dans l’échantillon recueilli par le préleveur. Cela a permis d’évaluer le taux de récupération des légionelles en unités logarithmiques. La formule suivante donne le taux de récupération en pourcentage (TR) :

TR (%) = (1 − [log(Co) − log(Ct)] / log(Co)) × 100
[Photo : Pourcentage de récupération des légionelles avec les deux préleveurs.]

La figure 4 montre les résultats obtenus sous la forme de moyennes des 24 expériences réalisées. Elle montre que plus de 70 % des légionelles totales (vivantes et mortes) sont récupérées avec les deux préleveurs. Cela signifie que 30 % des légionelles (en unités logarithmiques) ne sont pas récupérées. Cela peut être dû à des phénomènes de dépôt dans la chambre d’aérosolisation (sur les parois) ou à de la perte dans le filtre au moment de la nébulisation. Néanmoins, ce résultat est plutôt satisfaisant car cela montre que les capacités de récupération des préleveurs sont du même ordre de grandeur.

En ce qui concerne le taux de récupération des légionelles viables, les résultats obtenus sont d’environ 60 % pour le préleveur 1 et 80 % pour le préleveur 2. Nous pouvons noter que, dans le cas du préleveur 2, le taux de récupération des bactéries viables est équivalent à celui des bactéries totales. Il est donc possible avec ces deux préleveurs de récupérer des bactéries viables. Cela nous donne donc une information importante sur l’impact de l’aérosolisation des légionelles : elles sont capables de rester viables, donc potentiellement infectieuses, comme le confortent les observations épidémiologiques.

Enfin, pour les légionelles cultivables, seuls 10 % sont récupérés avec le préleveur 1 et 30 % avec le préleveur 2.

Pour évaluer l’impact de l’aérosolisation sur l’état des légionelles, il est possible de regarder les ratios suivants dans la solution initiale (solution de nébulisation) et dans l’échantillon prélevé :

  • ➔ BV/B : rapport des bactéries viables sur les bactéries totales ;
  • ➔ BVC/B : rapport des bactéries cultivables sur les bactéries totales.

La figure suivante présente les résultats obtenus pour les deux préleveurs.

Dans la solution initiale, environ 70 % des bactéries sont viables et, dans les échantillons de prélèvement, ce pourcentage est d’environ 65 %. Ceci nous confirme que l’aérosolisation et le prélèvement n’altèrent quasiment pas la viabilité des légionelles. En ce qui concerne la cultivabilité, le ratio passe de 75 % dans la solution initiale à environ 15 % pour l’échantillon prélevé par le préleveur 1 et 25 % pour l’échantillon prélevé par le préleveur 2.

Ceci indique que l’aérosolisation induit une altération de la cultivabilité des légionelles en leur imposant un stress. De plus, nous pouvons déduire de ces résultats que le préleveur 2 permet une meilleure récupération des légionelles cultivables. Cela indique que le mode de prélèvement est probablement moins stressant pour les légionelles que dans le cas du préleveur 1. Ainsi, ces résultats nous permettent de tirer les conclusions suivantes :

  • ➔ Les légionelles sont stressées par le phénomène de l’aérosolisation ;
  • ➔ Les légionelles sont également stressées par l’étape de prélèvement ;
  • ➔ Néanmoins, la viabilité des légionelles est peu atteinte par ces deux étapes ;
  • ➔ La cultivabilité des légionelles est fortement atteinte par ces étapes ;
  • ➔ Le préleveur 2 semble donner des rendements de récupérations meilleurs que le préleveur 1.
[Photo : ratios BV/B et BVC/B dans la solution initiale et dans les échantillons récupérés.]

Conclusions

Ces essais ont donc montré que les légionelles étaient affectées par l’aérosolisation et le prélèvement d’air. En effet, la cultivabilité est fortement diminuée dans les échantillons recueillis. Néanmoins, les légionelles testées (Legionella pneumophila souche Lens) restent majoritairement viables après aérosolisation. Ceci signifie qu’elles restent potentiellement infectieuses pour l’homme. Des essais sont actuellement en cours pour mesurer l’effet de l’âge des aérosols sur la viabilité des légionelles.

Par ailleurs, la comparaison de deux préleveurs du marché qui permettent un recueil d’échantillon en milieu liquide a permis de mettre en évidence les performances assez proches des deux appareils. Néanmoins, pour les prélèvements d’aérosols de légionelles, le préleveur 2 apparaît comme plus intéressant. Par ailleurs, pour une application en tours aéroréfrigérantes, les débits de prélèvement sont plus adaptés. Le préleveur 1 permet quant à lui des prélèvements pour mesurer des expositions de personnes, ce qui peut également présenter un intérêt pour des applications spécifiques.

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