Après avoir présenté différents types de pompes utilisées dans les bâtiments, le problème de leur rayonnement acoustique sur site tel qu'il se pose à leur constructeur est succinctement évoqué. Les principales sources de bruits et vibrations d'un groupe électrogène sont décrites, ainsi que les moyens d'essais correspondants mis en ?uvre par Salmson. Un exemple d'étude expérimentale est résumé.
Les différents types de pompes utilisées dans le bâtiment
L’évolution des besoins des utilisateurs conduit les architectes à intégrer de plus en plus de fonctions dans les bâtiments, en particulier celles qui concernent la circulation des fluides. La mise en mouvement de ces fluides est réalisée par l’utilisation de pompes très diverses, que l’on peut classer en fonction du besoin à satisfaire :
- les pompes de circulation : elles servent à faire circuler en permanence un fluide dans un circuit fermé et fonctionnent généralement en continu ; ce sont des pompes centrifuges monocellulaires qui alimentent différents types de réseaux :
- circuits de chauffage central ou de climatisation : le fluide sert à véhiculer des calories entre des sources (froides ou chaudes) situées dans des locaux de service et des récepteurs placés dans les locaux d’usage ;
[Photo : Spectre du bruit hydraulique d’un circulateur de chaudière murale.]- circuit d’eau chaude sanitaire : l'eau chaude y circule en permanence, de façon à être disponible à chaque robinet sans que l'utilisateur ait à attendre qu’un volume tampon d'eau froide s’écoule ;
- les pompes de surpression : alimentées en amont par une source pressurisée (réseau public) ou non (bâche de disconnexion, puits), leur rôle est de maintenir une pression minimum dans le circuit aval, malgré les puisages répétés et variables des utilisateurs ; elles fonctionnent en général suivant des cycles répétés marche/arrêt commandés par la pression variable : ce sont souvent des pompes centrifuges multicellulaires ;
- les pompes de relevage : dans le cas où l’écoulement gravitaire n’est pas utilisable, elles servent à évacuer, d'une cuve ou d'une fosse, les effluents (eaux-vannes, de vaisselle...) ou les eaux pluviales ; elles fonctionnent par intermittence et sont commandées habituellement par des détecteurs de niveau ; leur circuit aval étant le plus souvent à l'extérieur des bâtiments, elles ne sont pas, en général, cause de nuisances sonores.
Prise en compte des nuisances acoustiques dans la construction des pompes de bâtiment
L’utilisateur final n’a conscience de la présence de pompes dans un bâtiment que si la fonction n’est plus assurée ou s’il y a apparition d’une gêne, telle que l’absence de chauffage ou la présence de bruit.
Dans ce dernier cas, il se plaint de sifflements dans les radiateurs, de vibrations dans les tuyauteries, ou tout simplement de bruits générés par la pompe elle-même. Le constructeur se doit donc de concevoir une pompe « silencieuse », c’est-à-dire une pompe qui ne soit pas une source de nuisances acoustiques susceptibles de se propager suivant les différents modes de transmission possibles dans un bâtiment :
- par voie hydraulique : les pulsations de pression générées par la pompe se transmettent par le fluide et rayonnent une énergie acoustique en excitant les structures environnantes du circuit ;
- par voie solidienne : les vibrations (principalement du corps et de la carcasse moteur) du groupe électro-pompe se transmettent, par contact direct, aux structures adjacentes (support, tuyauterie) et de proche en proche à l’ensemble du bâtiment ;
- par voie aérienne : le rayonnement acoustique du groupe se propage dans l’air des locaux environnants.
L'installation d'une pompe dans un bâtiment pour assurer la mise en mouvement d'un fluide implique presque toujours de facto la fourniture du moteur d'entraînement par le constructeur de la pompe. Celui-ci, vis-à-vis de l'utilisateur, doit donc prendre en considération les bruits et vibrations générés par l'ensemble électropompe et non par la pompe seule.
C'est l'une des raisons qui expliquent le choix stratégique de certains constructeurs de pompes pour le bâtiment d'y intégrer la conception et la fabrication du moteur, afin de maîtriser la qualité de l'ensemble. L'optimisation des performances du groupe électropompe doit impérativement s'effectuer dans le contexte des différents modes de transmission des nuisances acoustiques dans un bâtiment.
Cette optimisation nécessite :
- — la connaissance des principales sources de bruits et vibrations d'un groupe électropompe ;
- — des moyens d'essais, pour mesurer, comparer les solutions envisagées et optimiser les nouveaux matériels.
Les principales sources de bruits et de vibrations d'un groupe électropompe
Les phénomènes de génération de bruits et de vibrations par un groupe électropompe sont très complexes mais peuvent être globalement classés en quatre groupes suivant leur origine : hydraulique, électromagnétique, mécanique ou aéraulique.
Origine hydraulique
Quatre mécanismes de production de bruits et vibrations se manifestent au plan hydraulique :
Effet de sirène
Ce bruit hydraulique est dû à l'interaction du sillage du bord de fuite des aubes de la roue avec des parties fixes (becs de volute ou de diffuseur). Cet effet se caractérise par un spectre de raies discrètes, dont la plus fondamentale correspond à la fréquence de passage des aubes devant la partie fixe, très critique pour les applications dans le bâtiment, car c'est un son « pur », dans une zone de fréquences très audibles.
Bruit de cavitation
Ce phénomène, bien connu des hydrauliciens, et qui est fonction notamment des facteurs pression, température et des propriétés physiques du liquide véhiculé, apparaît en particulier dans l'œillard de la roue lorsque la pression absolue à l'aspiration (NPSH disponible) devient insuffisante. Il se caractérise par un spectre à large bande, à haut contenu énergétique, qui se transmet aux structures environnantes, et par une amplitude [1,2] qui augmente de façon progressive et significative bien avant que le NPSH disponible soit diminué jusqu'au NPSH 3 % requis ; son amplitude est maximum dans la zone du NPSH 3 % et en dessous. Pour éliminer ce bruit caractéristique, qui n'est pas admissible dans un bâtiment, la pompe doit donc fonctionner bien avant l'apparition de la « cavitation naissante » : c'est généralement le cas des pompes de circulation qui fonctionnent le plus souvent dans des circuits fermés et pressurisés, et cela nécessite pour les pompes de surpression une bonne caractéristique d'aspiration (obtenue par une entrée de roue étudiée).
Bruit de turbulence
Il est provoqué par de brusques variations de la vitesse du fluide en grandeur et/ou en direction (s'accompagnant en général de décollements), qui sont la conséquence « d'accidents » de tracé (discontinuité, angle de divergent/convergent trop important…). Il est très aléatoire, à large bande de fréquence et haut contenu énergétique ; il peut exciter les structures environnantes et générer des vibrations très gênantes. Un tracé soigné des parties actives hydrauliques permet de l'éviter.
Bruit d'écoulement
Il est généré par les forces de frottement qui naissent au contact des parois dans les couches limites. C'est un bruit hydraulique à large bande, caractérisé par une intensité qui dépend essentiellement de la vitesse d'écoulement, dont la vitesse maximale recommandée [3] dans les tuyauteries des bâtiments (fonction du diamètre, des configurations, des matériaux) est de 1,5 m/s. Cette valeur peut être notablement dépassée (3 à 4 fois) dans les parties fixes d'une pompe, car le bruit d'écoulement qui en résulte reste très localisé et faible devant les autres sources.
Les bruits de turbulence et d'écoulement sont en général accentués par la présence d'air dans le fluide véhiculé ; c'est l'inverse pour le bruit de cavitation.
Origine électromagnétique
Le bruit d'origine électromagnétique est aussi souvent appelé « ronflement du moteur ». Il est créé [4] par le champ magnétique d'entrefer qui, par l'intermédiaire de forces alternatives radiales (prépondérantes), tangentielles ou longitudinales, génère des vibrations qui se transmettent aux structures environnantes (tôlerie et carcasse moteur, corps de pompe, tuyauteries…). Il se caractérise par des raies discrètes dans une large gamme de fréquences.
Son intensité dépend principalement :
- — du jeu de l'entrefer,
- — de la saturation du moteur,
- — de la qualité de la conception (dessin et matériaux utilisés) et de la réalisation mécanique du moteur ; tous les défauts géométriques créant une distorsion de la répartition du champ magnétique dans l'entrefer ont tendance à l'augmenter.
Origine mécanique
Les bruits mécaniques prennent naissance dans les contacts entre deux pièces en mouvement relatif l'une par rapport à l'autre.
principaux éléments concernés dans un groupe électro-pompe sont :
• la garniture mécanique : dans la mesure où elle est adaptée au fluide véhiculé et où elle fonctionne dans les conditions requises, elle n'introduit pas généralement de bruits et vibrations détectables ;
• les paliers : l’origine de leur bruit interne réside essentiellement dans les chocs des éléments roulants et glissants sur les défauts de forme des surfaces en contact. On sait [4] que le frottement régulier et les déformations élastiques ne jouent pratiquement pas de rôle ; c'est l'une des raisons du « silence » des coussinets lisses lubrifiés par un fluide, par rapport aux roulements qui, par construction, sont plus complexes. Néanmoins, on peut limiter le niveau sonore des paliers à roulements par un choix judicieux du type de roulement et de sa graisse de lubrification, ainsi que par la qualité de la réalisation de son logement et des conditions de montage.
Par ailleurs, les paliers transmettent les sollicitations dynamiques de la ligne d’arbre :
• le balourd (défaut d’équilibrage du mobile), qui se caractérise par des raies à la fréquence de rotation N (tr/s) de l’arbre et à ses harmoniques,
• le désalignement de deux arbres (cas des groupes où un arbre moteur est accouplé à un arbre pompe), qui se caractérise par une raie à la fréquence N/2.
Origine aéraulique
Ce bruit aéraulique (ou aérodynamique) est dû à l'écoulement de l’air nécessaire pour refroidir le moteur : il peut être, dans certains cas, la source de bruits la plus importante d’un groupe électro-pompe même de faible puissance. Ses deux principales composantes sont :
• le bruit lié à la rotation du ventilateur du moteur ; il est responsable de l’essentiel du bruit d'origine aéraulique généré par une pompe ; sa réduction passe par la diminution de son diamètre extérieur, c’est-à-dire, à débit de refroidissement identique, par un tracé optimisé des pales (profil, inclinaison),
• le bruit lié à la présence d’obstacles dans l’écoulement de l’air principalement (mais pas seulement) au voisinage du ventilateur (grille d’aspiration, ailettes de refroidissement de la carcasse, etc.) ; il se manifeste en général par des sons purs qu'il y a lieu de limiter en augmentant les distances entre partie mobile et partie fixe.
Le bruit d’écoulement de l’air sur les parois du groupe est négligeable devant les autres sources.
Conséquences sur la conception
Les considérations précédentes sur les différentes sources de bruit dans une pompe mettent en évidence les avantages, sur le plan du comportement sonore et vibratoire, des électro-pompes équipées d'un moteur à rotor noyé de par :
— l'absence totale de bruit d'origine aérodynamique (en raison de l'absence de ventilation du moteur),
— une réduction au minimum des bruits et vibrations d’origine électro-mécanique par la présence de paliers à coussinets lisses lubrifiés par le fluide véhiculé, et l’absence d’étanchéité d’arbre par garniture mécanique.
Cette construction caractérise les circulateurs Salmson pour circuits de chauffage et de distribution d’eau sanitaire.
Moyens d’essais utilisés
Le rayonnement acoustique et vibratoire d’un groupe électro-pompe se propageant dans un bâtiment suivant trois modes de transmission possibles, il est nécessaire d'utiliser des moyens d’essais spécifiques à chacun de ces modes pour le caractériser, ce qui a été réalisé au centre industriel de Laval.
Caractérisation du bruit hydraulique
Le banc de test (figure 1) utilisé a été mis au point conformément aux spécifications définies par les constructeurs et les utilisateurs, avec l'aide du CETIM [5], en vue de caractériser les bruits d’origine hydraulique.
Caractérisation du bruit solidien
La méthode classique est la mesure des niveaux vibratoires par l’intermédiaire de capteurs d’accélération placés en différents points des groupes électro-pompes. Une nouvelle méthode étudiée par le CETIM [6] à la demande de la profession est utilisée, dans laquelle le bruit solidien généré par le groupe est transmis à une plaque de réception possédant un grand nombre de modes de vibrations ; cette méthode est particulièrement recommandée pour tester les groupes de faible dimension.
Caractérisation du bruit aérien
Pour la mesure du rayonnement acoustique des groupes électro-pompes de débit maximum de 70 m³/h environ (une grande partie des applications des pompes dans le bâtiment), une chambre sourde semi-anéchoïque est utilisée, présentant les caractéristiques suivantes :
• volume utile : 22,5 m³ (3 x 3 x 2,5 m) • niveau de bruit de fond : 15 à 16 dBA
Une boucle hydraulique dont les équipements de réglage et de mesure sont situés à l’extérieur de la chambre est utilisée. La mesure du rayonnement acoustique des groupes de plus grand débit se fait directement sur la plateforme d’essai. Une chaîne de mesure d’intensimétrie acoustique permet de s’affranchir de l'influence de l’environnement.
Fiabilité des mesures
Elle est attestée par la certification ISO 9001 ; parmi les moyens mis en œuvre pour la garantir, on peut citer :
— le contrôle de chaque élément des chaînes de mesure effectué chaque année par le Service Qualité, l'étalonnage de certains capteurs étant relié au B.N.M. (Bureau National de Métrologie) ; — le fait que les procédures d’essai sont formalisées et font partie intégrante du Manuel de conception ;
Tableau I
Fréquence de la raie (Hz) | Hauteur de la raie (dB réf = 1 µbar) | Observations sur les fréquences caractéristiques |
---|---|---|
41,8 | 60 | N = fréquence de rotation de la roue (tr/s) |
100 | 64 | 2 x 50 Hz : bruit magnétique |
200 | 47 | 4 x 50 Hz : bruit magnétique |
293 | 52 | 7 x N = fréquence de passage des aubées : bruit hydraulique |
585 | 41 | 14 x N : harmonique du précédent |
les audits réalisés régulièrement sur le laboratoire d’essais par les organismes de contrôle (AFAQ, BSI).
Exemple d’étude : circulateur pour chaudière murale
La mise au point, vis-à-vis du comportement sonore et vibratoire en particulier, d’un circulateur destiné à être incorporé dans une chaudière (marché OEM) nécessite de travailler en partenariat avec le constructeur de la chaudière pour tenir compte de la réponse dynamique de celle-ci. Des moyens d’essais spécifiques ont été étudiés et réalisés chez Salmson dans ce but.
La figure 1 représente le spectre 0-1000 Hz du bruit hydraulique généré par un circulateur de chaudière murale composé d’une roue A dans un corps à volute cylindrique.
Les mesures sont effectuées sur la boucle de mesure hydrophonique équipée de deux terminaisons anéchoïques pour liquides ; on remarque les raies caractéristiques figurant sur le tableau 1.
On peut donc classer comme suit, par ordre d’importance décroissante, l’origine des pulsations de pression du fluide véhiculé : magnétique, mécanique, hydraulique.
Le niveau de bruit aérien (pression sonore à 1 m — référence = 20 µPa) s’établit à 33 dBA.
Conclusion
En mettant en œuvre une stratégie industrielle adaptée, Salmson a étudié des gammes de pompes pour le bâtiment ainsi que des accessoires qui permettent de répondre aux exigences de confort acoustique.
Il en est ainsi notamment de l’utilisation, dans la mesure du possible, de la conception du moteur à rotor noyé, éliminant les bruits d’origine aérodynamique et mécanique. L’intégration dans le savoir-faire de la société de la conception et des procédés de fabrication des moteurs (à rotor noyé depuis le début des années 1950 — à rotor sec depuis la fin des années 1980) assure la maîtrise de la qualité de l’ensemble des fabrications, avec pour objectif d’assurer les meilleures réalisations dans le cadre de l’ensemble des fonctions de mise en mouvement des fluides.
Les plus récents moyens de recherches et d’essais tels que la CAO 3D et l’intensimétrie acoustique sont mis au service de cette politique.
BIBLIOGRAPHIE
[1] Courbière P., Panni S., Defaucheux J., Caractérisation de la cavitation par méthode acoustique, Journée d’étude du 15 décembre 1981 « Hydraulique et Bruit » organisée par la S.H.F. et le G.A.L.F.
[2] Tourret J., Le bruit des installations hydrauliques industrielles, CETIM, Informations n° 48.
[3] Clain F., Le bruit des équipements, Ref-clim 382, Sedit Éditeur 1974.
[4] François P., La machine électrique, source de bruit, Techniques de l’ingénieur, D 565 ; Bruit des matériels électriques – Techniques de l’ingénieur D 566.
[5] Bernard G., Badie-Cassagnet A., Test rig for circulator noise measurement, Internoise 83.
[6] Lu J., Caractérisation du bruit solidien produit par les petites pompes de circulation à l’aide de la méthode de la plaque de réception, Rapport du CETIM.