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Phytoremédiation de sols pollués par de la créosote : étude expérimentale de biodégradation et de phytorestauration

29 octobre 1999 Paru dans le N°225 à la page 57 ( mots)
Rédigé par : Claude-henri CHAîNEAU et Stéphane LEGAY

Les produits tels que la créosote utilisés pour la préservation du bois peuvent persister dans l'environnement pendant de longues périodes. Aussi, des opérations de décontamination doivent être effectuées dans le cas de pertes chroniques liées aux procédés et produits ou par pertes accidentelles liées à des accidents d'exploitations (fuite ou rupture de cuve de stockage). La créosote constitue un risque pour l'environnement et la santé humaine due à la présence de composés cancérigènes et mutagènes. Or dans l'environnement, des microorganismes résistants à la créosote vont se développer en utilisant les composés (HAP, N-, S-, O- hétérocycles) de la créosote comme sources de carbone et d'énergie. Le CTBA associé avec TVD ont entrepris des études en laboratoire pour sélectionner une communauté bactérienne et fongique capables de croître en présence de créosote. Des essais en laboratoire ont aussi été réalisés afin d'évaluer la toxicité de la créosote vis à vis des plantes et d'étudier la biodégradation de la créosote en absence et présence de plantes. Les résultats montrent que la créosote exerce une toxicité sur la germination et de la croissance des végétaux. Dans le sol, la majorité (PAH, N-, S-, O- Héterocycles) de la créosote est dégradée. Aucun transfert de composés de la créosote n?a été observé dans les parties aériennes de la plante. Au cours de la biodégradation, un suivi écotoxicologique a montré une forte diminution de la toxicité. Des applications de décontamination in situ des sols contaminés par de la créosote ou par des polluants organiques grâce à l'utilisation de végétaux pourraient apporter un élément complémentaire dans les techniques de réhabilitation.

Dans toute construction ou aménagement en bois, la notion de durée de service est essentielle et conditionne le choix de certaines essences de bois et de dispositions constructives propres à garantir une durabilité satisfaisante. Ceci est lié au fait que les conditions dans lesquelles ces bois sont mis en œuvre, autrement dits leurs emplois, génèrent des risques biologiques (insectes, pourritures, termites) et que face à ces risques les diverses essences présentent des résistances naturelles plus ou moins importantes. En tant que matière première d'origine biologique, le bois est vulnérable à l'attaque des agents biologiques nécessitant selon son usage et les caractéristiques liées à son essence un traitement chimique ou physique permettant de lutter contre ces agents de détérioration.

[Photo : Test d’inhibition de germination des semences]

Cette préservation fait appel à des substances biocides qui sont nécessairement toxiques pour certains organismes vivants, pour que la protection conférée soit efficace. La créosote fait partie des produits de préservation utilisés pour le traitement des bois à usage extérieur. Toutefois, il n’est pas impossible que par le passé, des pratiques moins rigoureuses ou des accidents aient pu accumuler sur le site des pollutions significatives. Le CTBA associé avec TVD ont entrepris des études pour sélectionner le moyen de traiter biologiquement ces terrains pollués. Des applications de décontamination in situ des sols contaminés par de la créosote ou par des polluants organiques grâce à l'utilisation des végétaux pourraient apporter un élément complémentaire biologique dans les techniques de réhabilitation.

Caractérisation de la créosote

La créosote est constituée par un mélange de produits de spécification donnée provenant de la distillation de la houille. Leur composition chimique dépend donc de la nature de la houille utilisée et du mode de distillation de celle-ci.

La composition moyenne qualitative de ces créosotes montre qu’elles renferment les différentes fractions suivantes :

  • * des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP),
  • * des dérivés oxygénés (O-hétérocycles),
  • * des dérivés azotés (N-hétérocycles),
  • * des dérivés sulfurés (S-hétérocycles),
  • * biphényls.

Certains hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) sont considérés comme substances dangereuses pour l'environnement et pour la santé humaine en tant que substances mutagènes et cancérigènes.

Identification de souches bactériennes et fongiques issues d’un sol très pollué par de la créosote

Dans des échantillons de sols pollués par de la créosote collectés sur des sites ont été recherchées les populations microbiennes : en particulier, celles assimilant les molécules polluantes. Les dénombrements ont montré que la terre contient naturellement une microflore fongique. Cette microflore totale est à une concentration de 1,2 10⁷ bactéries/g de sol et de 1,4 10⁶ champignons/g de sol. Il existe parmi ces bactéries une population de microorganismes à une concentration de 1,4 10⁶ bactéries/g de sol capable de métaboliser la créosote. De nombreuses souches bactériennes et fongiques ayant la capacité d'utiliser la créosote comme sources de carbone et d’énergie ont été isolées et identifiées.

Protocole expérimental

Étude de bioremédiation et de phytoremédiation de la créosote dans un sol

Au laboratoire, l'influence des végétaux sur la biodépollution des sols pollués a été mesurée. Plusieurs paramètres ont été étudiés afin d’évaluer l’effet rhizosphère (type de plantes, tolérance aux polluants, croissance adaptée, stimulation microbienne...). La phytotoxicité de la créosote a été spécifiquement évaluée pour sélectionner la plante la plus tolérante à partir de tests d'inhibition de germination des semences et de croissance des végétaux (Figure 1 et Figure 2). L’étude de l'influence des plantes sur la dégradation de la créosote a aussi été étudiée en conditions contrôlées. Les conditions bactérienne aérobie...

[Photo : Test d’inhibition de croissance des végétaux]

Les conditions de culture de la plante ont été les suivantes : alternance d'une période d’éclairement et d’obscurité à 22 °C. Un suivi analytique (GC/FID et GC/MS) et écotoxicologique (vers de terre et plantes supérieures) a été effectué au cours du biotraitement. Une cinétique de dégradation de la créosote et des 22 composés majoritaires (HAP, hétérocycles) de la créosote a été réalisée.

Conclusion

Cette étude a montré que les composés N-, S-, O-hétérocycles et hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) issus de la créosote peuvent être biodégradés par les micro-organismes du sol dans des conditions favorables. La créosote est un produit toxique pour l'environnement et pour la santé humaine. La créosote perturbe la germination des semences et la croissance des végétaux. En effet, les fractions légères riches en composés volatils sont les composés les plus toxiques et leur évaporation diminue leur toxicité envers les végétaux.

Dans les sols, la créosote peut être soumise à des processus d’évolution et de dégradation de nature physico-chimique et biologique. Si les conditions de l'environnement le permettent, les micro-organismes possédant les capacités métaboliques pour assimiler la créosote vont l'utiliser comme source de carbone et d’énergie. Ce travail mené en partenariat CTBA et TVD a permis d'isoler et d'identifier des micro-organismes métabolisant la créosote. La sélection de végétaux tolérant à ce type de pollution a permis d’accélérer le processus de biodégradation de la créosote. La microflore rhizosphérique permet une diminution plus rapide de la concentration dans la rhizosphère par rapport à un sol nu. Aucun transfert de composés de la créosote du sol vers la plante n'a été trouvé.

En fin de biotraitement, une évaluation écotoxicologique de la toxicité résiduelle a été effectuée, montrant une faible ou une absence de toxicité résiduelle envers les vers de terre et une céréale très sensible à la créosote. L'utilisation des végétaux pour la décontamination in situ des sols pollués par de la créosote ou par d’autres polluants organiques pourrait être un élément complémentaire biologique dans les techniques de réhabilitation.

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