Le développement de matériels d'analyse des paramètres physico-chimiques mobilise un ensemble de compétences en chimie, électrochimie, optique, électronique, informatique, traitement du signal, traitement des données' Aujourd'hui, les appareils de terrain profitent des avancées technologiques de ces techniques. Ils deviennent plus compacts et se durcissent pour s'installer sur le site.
« La mesure et le contrôle des paramètres physico-chimiques dans les eaux interviennent au niveau de la production d'eau potable, du traitement des eaux usées industrielles ou urbaines, dans la pisciculture ou l'aquaculture, sur les nappes phréatiques, les étangs, les rivières et fleuves... », rappelle Séverine Goulette, Responsable produit Ponsel chez Neotek. De nombreux paramètres sont ainsi surveillés quotidiennement comme le pH, l'oxygène dissous et le potentiel Redox. Ainsi, sur un procédé aérobie, il est possible d'optimiser le travail des bactéries par l’asservissement de l'aération à une mesure de l’oxygène dissous et à celle du potentiel Redox. Quant au pH, on le retrouve surtout pour la surveillance des rejets industriels, là où il faut faire une neutralisation avant de traiter l'effluent, comme
en chimie par exemple.
L'oxygène est une des substances dont la détermination est particulièrement utile aussi bien à l'ingénieur contrôlant les eaux de chaudières qu'au biologiste. Sa présence dans les eaux de surface joue un rôle prépondérant dans l'autoépuration des charges polluantes et par-là, dans le maintien de la vie aquatique. Pour mesurer l'oxygène dissous, deux technologies sont utilisées.
Oxygène dissous : deux techniques
L'ampérométrie est un principe connu et éprouvé pour mesurer l'oxygène dissous. Les concentrations en oxygène sont converties en courants électriques par la réaction d'oxydo-réduction. À la cathode, les molécules d'oxygène sont consommées par réduction pour former des ions hydroxydes. Cette réaction nécessite des électrons qui sont fournis par la réaction d’oxydation des atomes de l’anode. Les cations ainsi créés à l’anode passent en solution. Ce principe traditionnel est très courant sur le marché ; ces sondes sont commercialisées par ABB, Endress+Hauser, Hach Lange, Aquacontrol, Hanna Instruments, Heito, Swan, Systems C Industrie, Awa Instruments, Jumo régulation, OTT, TMR, etc. La technique est éprouvée et stable (voir dossier EIN n° 274). Seules quelques évolutions destinées à rendre l’électrode plus robuste pour les mesures en milieu agressif arrivent sur le marché. Ainsi, pour la mesure de l'oxygène dissous dans l'eau, Mettler Toledo a développé la sonde InPro6050 adaptée pour les mesures où les conditions d’encrassement sont élevées. La sonde est réalisée en polymère très résistant aux produits chimiques. Sa connexion Vario-Pin (IP68) déconnectable simplifie l'installation des câbles. La membrane est revêtue d'une couche de Téflon pour empêcher l'encrassement.
Autre innovation, le capteur Néoxy de NéoSENS utilise lui aussi un principe classique d'ampérométrie, mais résout les contraintes liées à l’agressivité de l'environnement en étant jetable : conçu en technologies microsystèmes, le capteur devient une simple puce interchangeable. L'opération de maintenance se résume à un simple remplacement, pouvant être réalisé en quelques minutes par une personne non qualifiée. De son côté, Züllig propose avec sa sonde S-14 une solution originale et robuste d’électrode autonettoyante sans membrane : les électrodes sont érodées en permanence par une pierre abrasive rotative, ce qui permet une maintenance quasiment nulle et un fonctionnement dans des milieux très encrassés.
La seconde technique est optique. C'est la grande évolution de ces derniers mois. Les premières optodes de mesure ont été présentées par Hach Lange avec le lancement de la sonde LDO conçue sur le principe optique de la luminescence et de la commercialisation de la sonde Aanderaa proposée par Nereides. La mesure est effectuée à partir d'un élément sensible qui est stimulé par une lumière en provenance d’une source lumineuse. En présence d’oxygène, une lumière rouge est alors émise. Elle est directement proportionnelle à la concentration en oxygène. « Aucun étalonnage n'est nécessaire et, contrairement aux capteurs habituels, la sonde FL3 ne nécessite aucun changement de membrane ou d’électrolyte », souligne Jean-Pierre Molinier, Hach Lange, « Le capteur, qui ne peut être détruit par des gaz toxiques comme l'H₂S, est ainsi garanti trois ans dans des applications difficiles comme les stations d’épuration. » Aqualyse commercialise de son côté un nouveau capteur optique d’oxygène dissous, le RDO : plus de membrane, plus d'électrolyte, plus d'influence de la température, plus d'autoconsommation d’oxygène, le RDO est insensible à l’H₂S et à l’encrassement. Les matériaux utilisés (Delrin ou Titane pour le corps du capteur, saphir pour la fenêtre, Téflon pour le film protecteur) apportent un temps de réponse et un confort d'utilisation accrus.
Depuis, d'autres optodes sont proposées à la vente.
Les optodes arrivent en force
Ainsi, avec le lancement en septembre 2005 d'Oxymax W COS61, Endress+Hauser commercialise désormais son optode dont la gamme de mesure va de 0 à 20 mg/l. Des molécules appelées « marqueurs », sensibles à l'oxygène, sont fixées sur une pellicule avec des propriétés fluorescentes. Cette couche, en contact avec le milieu, est excitée par une lumière verte provenant du système optique placé à l’arrière de la membrane. L’oxygène dissous dans le milieu et la couche fluorescente va être rapidement en
contact et atteindre l’équilibre. Les marqueurs, excités par la lumière verte incidente, vont répondre en lumière rouge. L’amplitude et la durée de la réponse dépendent directement de la quantité d’oxygène. Avec une quantité élevée d’oxygène, l’amplitude et la durée de réponse sont faibles et, au contraire, avec une quantité faible, l’amplitude et la durée deviennent plus importantes. En sortie de sonde, le signal est directement proportionnel à la concentration en oxygène. Quant à Aqualyse, elle propose aussi une optode qu’elle met en œuvre sur ses analyseurs portables multiparamètres.
Ces développements technologiques importants ont concerné les sondes à oxygène dissous. D’autres concernent les capteurs de pH et de Redox appliqués au domaine de l’eau. Ainsi, avec Memosens, Endress+Hauser commercialise les premiers capteurs permettant de stocker des données importantes concernant le process, directement dans le capteur. Le transfert de données inductif et bidirectionnel entre le capteur et le transmetteur garantit des signaux de mesure sans interférence et permet une manipulation facile du capteur. La technologie Memosens digitalise la mesure dans la tête de l’électrode et la communique au transmetteur via un connecteur sans contact électrique. De ce fait, l’humidité n’est plus un risque pour la mesure. Par ailleurs, les données d’étalonnage et autres informations, comme le nombre d’heures de fonctionnement et les valeurs mini et maxi, sont sauvegardées dans le capteur. Cette technologie est une première car elle donne la possibilité à l’utilisateur de faire le nettoyage et l’étalonnage de son électrode dans les conditions optimales du laboratoire. Pour l’opérateur, l’étalonnage sur site n’est plus nécessaire et se réduit à un simple changement d’électrode.
D’autres avancées concernent les électrodes pour les rendre plus solides. C’est le cas de l’InPro4501VP de Mettler Toledo. Cette électrode de pH à corps en PVDF est robuste. Elle intègre un électrolyte en polymère solide Xerolyt’Plus qui ne nécessite pas de remplissage régulier, ni de pressurisation. Cet électrolyte est en contact direct avec le milieu via une jonction annulaire ouverte. Cette électrode est adaptée aux milieux difficiles rencontrés en traitement des eaux, exemples : solutions hautement contaminées, émulsions et suspensions, milieux contenant des sulfures ou mesures dans les milieux à fort débit. La masse liquide garantit des mesures précises et permet des diagnostics approfondis de l’électrode. De plus, ce capteur possède une membrane plane et est idéalement recommandé pour les milieux contenant un haut niveau de fibres, particules abrasives.
À signaler également les électrodes pH/Redox Dynaprobe de System C Industrie, largement utilisées aujourd’hui pour les applications très polluantes : grâce à leur système interne à « piégeage d’ions », il n’y a à l’intérieur aucun électrolyte liquide visible. L’intérieur de l’électrode est composé d’un bois à capillaires unidirectionnels dans lequel viennent s’intercaler des chicanes inclinées solidaires du corps de l’électrode et qui vont avoir pour effet de canaliser et piéger les ions contaminants polluant la référence interne (80 % des cas de fin de vie d’électrode). « La référence se trouvant protégée, le capteur va durer beaucoup plus longtemps qu’un capteur à gel classique (même à double jonction liquide) mais aussi l’électrode va pouvoir travailler jusqu’à 140 °C et 21 bar de pression en continu, ce que personne d’autre ne fait aujourd’hui », souligne Yannick Carfantan de System C Industrie. Ces électrodes sont toutes montées avec des câbles moulés fabriqués à la longueur désirée par le client et avec la connectique de son choix ; une sonde de température peut également être intégrée dans l’électrode de pH selon les besoins.
Signalons enfin l’arrivée d’une nouvelle technologie avec l’électrode REFEX, commercialisée en France par PA Trading. Cette technologie possède une électrode de référence à haute impédance. Ceci confère à la mesure de pH/Redox une résistance accrue vis-à-vis de l’encrassement et aux pollutions que les électrodes traditionnelles à gel ou à écoulement de KCl qui possèdent des impédances de jonction faibles. Elle est disponible soit en version « électrode combinée » soit en version « électrode séparée ».
Les grandes avancées sont surtout réalisées au niveau de l’électronique qui se dote de fonction et diminue en taille.
Une électronique de mesure performante
Pour la conduite des procédés de traitement des eaux, les industriels proposent des électroniques industrielles pour accompagner leurs capteurs. Bamo commercialise un régulateur PID pilotant le procédé à partir
Des mesures physico-chimiques. Il en est de même pour Jumo Régulation qui propose pour le marché de l'eau des convertisseurs de mesure et des régulateurs pour accompagner ses capteurs de pH/Redox et l'oxygène dissous.
Avec son transmetteur PH450, Yokogawa repousse les limites de la précision en combinant la mesure de pH avec des fonctions de compensation de température avancées, des fonctions de calibration intégrées ainsi que des diagnostics poussés de stabilité. Transmetteur multifonctions, le PH450 dispose de différentes fonctions de sortie pour la mesure de pH, de température et Redox : 2 sorties courant mA, 4 sorties contact unipolaires SPDT indépendantes, communication Hart. Les deux fichiers DD et DTM peuvent être lus directement par un terminal Hart, sur un moniteur HIM ou par un configurateur PC Pactware. Le PH450 dispose d'une fonction de régulation PID sur n’importe laquelle des sorties mA ou sur les sorties contact et d’une fonction de nettoyage intégrée. En matière d’analyse physico-chimique, les deux premières qualités d’un analyseur sont la fiabilité et la répétabilité. Avec le PH450, ces caractéristiques sont assurées par la surveillance continue de l'impédance du capteur de pH et du capteur de référence. De plus, une vérification dynamique du capteur associée à la fonction de nettoyage assure une analyse précise et sans souci, avec un minimum de maintenance.
Quant à Neotek, son Acteon 2000 dans sa version poste fixe de process peut mesurer un paramètre (pH, Redox ou oxygène dissous) et la température. Doté d'un large écran graphique, il offre la possibilité de visionner les mesures en instantanées, la courbe de tendance, l'état des relais et de l'étalonnage, « ce qui est pratique sur les sites où il n'y a pas de supervision », explique Séverine Goulette. La programmation des gammes de mesure, la configuration des sorties 4-20 mA et des relais, la réalisation des étalonnages (avec un contrôle de plausibilité) peuvent être réalisées simplement à l'aide d'un menu contextuel.
Plus récemment, Hach Lange s'est doté de la plateforme SC 1000, un transmetteur universel conçu pour l'ensemble de ses sondes. Cet équipement communique via bus de terrain Profibus DP ou Modbus. La transmission des données est transparente à l'utilisateur et aucune programmation n'est nécessaire, l'appareil est contrôlé à distance via le bus de terrain. Chaque point de mesure est ainsi équipé d'une adresse distincte permettant de les assigner point à point. Chaque sonde peut ainsi accéder via le module de sonde aux courbes d'étalonnage, de paramétrage et aux nouvelles informations nécessaires aux nouvelles techniques de maintenance de l'équipement. Une approche similaire est retenue également par Swan sur son transducteur de mesure pour tableau PAM Oxysafe. Celui-ci se connecte aux bus de terrain Profibus DP et Modbus via son interface RS485. Quant à Endress+Hauser, la gestion de ses points de mesure par Fieldgate lui permet de simplifier et d'optimiser la mise en œuvre et l'exploitation de ses capteurs. Cette solution logicielle qui supporte les protocoles standards des bus de terrain Hart, Profibus, et bientôt Foundation Fieldbus, sauvegarde les paramètres du capteur, facilite le diagnostic, l'étalonnage et la configuration du point de mesure.
De son côté, depuis 2001, NéoSENS intègre dans son électrode jetable Néoxy une électronique de proximité permettant de stocker des informations telles que l'identification et les coefficients d’étalonnage du capteur. L’électronique de traitement du signal est située au plus près du capteur, de manière à s'affranchir des parasites lors de la transmission du signal. D’autre part, NéoSENS lance en 2006 le NéoLINE Multi, permettant de connecter jusqu'à 4 sondes d’oxygène dissous sur un seul transmetteur. Autre nouveauté, l'Amotex, doté de la même capacité multi-sondes, est certifié pour une utilisation en zone ATEX.