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Oxydation avancée in situ du charbon actif : traitement des micropolluants, pesticides et matières organiques

27 février 2019 Paru dans le N°419 à la page 83 ( mots)
Rédigé par : Kader GAID et Philippe SAUVIGNET de Veolia en

L’objectif de cet article est de montrer l’impact d’une oxydation avancée par une transformation in situ de la surface du charbon actif. La capacité d’adsorption des charbons actifs augmente de manière significative après une oxydation avancée à l’aide d‘ozone. En effet, la création ou le renforcement des groupes fonctionnels contenant de l’oxygène sur la surface du charbon actif entraînent une augmentation de la capacité d’adsorption par la création de liaisons entre les substances organiques et ces groupes fonctionnels. De ce fait, on observe une nette amélioration des performances du charbon actif vis-à-vis des micropolluants organiques comme les pesticides, les résidus médicamenteux et substances organiques naturelles.

La présence dans les eaux usées et potentiellement dans les eaux potables de micropolluants (perturbateurs endocriniens, résidus de médicaments, produits industriels etc…) constitue actuellement une préoccupation majeure. Même si une réglementation spécifique n’est pas encore élaborée, il n’en demeure pas moins que les populations à travers les associations et collectivités font part de leurs inquiétudes et alertent constamment les pouvoirs publics. Il deviendra rapidement important de les éliminer avant rejet selon une configuration impliquant très probablement un traitement tertiaire. Ceci est d’ailleurs déjà le cas chez nos voisins européens (Suisse, Allemagne, Danemark, etc...).
Figure 1 : principe de fonctionnement de l’Actiflo®carb (avec CAP en continu)

En effet, il est clairement établi que de nombreux micropolluants ne sont pas suffisamment éliminés lors de leur transit dans les usines de traitement des eaux usées. Ils se retrouvent ensuite dans le milieu naturel et en particulier dans les cours d’eau qui servent de ressources pour les usines de potabilisation.

Selon la réglementation Suisse, un certain nombre de technologies utilisées comme une première barrière à la contamination sont déjà proposées pour être mises en œuvre comme traitement final sur les usines d’eaux usées, considérées comme la « source » de micropolluants vis-à-vis des eaux potables. Divers procédés de traitement sont possibles et sont classés selon le mécanisme d’élimination :
Les procédés d’oxydation chimique comprenant l’ozonation simple ou combinée à une addition de peroxyde d’hydrogène (H202), l’utilisation des rayonnements UV combinés à de l’ozone, ou à une addition de H202 ou d’oxyde de titane (TiO2).
Les procédés d’adsorption sur charbon actif par injection de charbon actif au sein d’un réacteur CAP (Charbon Actif en Poudre ou en micrograins) ou par filtration sur un matériau de charbon actif granulaire.
Les procédés membranaires comme la nanofiltration ou l’osmose inverse fonctionnant comme une barrière physique vis-à-vis de ces molécules.

Les réacteurs CAP (contenant du charbon actif en poudre ou sous forme de micrograins) ont été utilisés ces dix dernières années sur les usines d’eau potable afin de réduire les matières organiques naturelles et les pesticides. C’est donc naturellement que ces réacteurs ont été testés puis mis en œuvre sur les usines d’eaux usées. Les bonnes performances de cette application sont bien décrites dans la littérature. Il apparaît ainsi que le charbon actif permet d’éliminer entre 30 et 95 % des micropolluants selon le type de micropolluant, sa concentration et le dosage en charbon actif. Dans ce type de procédé, le dosage de charbon actif se situe le plus souvent entre 10 et 30 g/m³, pour des temps de contact dans le réacteur de 10 minutes. Les caractéristiques physico-chimiques du charbon actif participent grandement à l’efficacité vis-à-vis des micropolluants.

Cet article rappelle dans un premier temps les performances des réacteurs à charbon actif vis-à-vis de l’élimination des micropolluants. Dans un deuxième temps, sont décrits les moyens mis en œuvre afin d’améliorer les performances du charbon actif grâce à une oxydation chimique de sa surface. A ce titre, les mécanismes chimiques de la combinaison ozone-charbon actif, permettant d’améliorer les performances du charbon actif sont explicités.

Élimination des micropolluants avec les réacteurs à charbon actif

Les réacteurs à charbon actif sont de plus en plus utilisés dans le traitement des eaux potables pour l’élimination de la matière organique naturelle, des pesticides, des substances responsables du goût et des odeurs. Veolia a mis au point et exploite de nombreux procédés basés sur ce principe. Ainsi, l’Actiflo®Carb combine la technologie de décantation à flocs lestés à l’aide de microsable, incluant une recirculation continue du CAP afin de maintenir une concentration constante au sein du réacteur. Le Multiflo®carb est un décanteur à lit de boues de charbon actif disposant d’une recirculation du charbon actif en tête afin de maintenir en permanence, dans la zone d’adsorption, une concentration toujours élevée en charbon et donc en sites actifs d’adsorption. D’autres procédés sont également proposés comme l’Opacarb®MF qui se décrit comme une complémentarité entre une cuve de contact de CAP associée avec une barrière physique représentée par un tamis filtrant (# 3 µm) destiné à retenir les particules de charbon actif en poudre issues de la cuve de contact. Plus récemment, le Filtraflo®carb et l’Opacarb® FL utilisent un charbon actif en micro-grain dans un réacteur en filtration ascendante pour le premier ou en lit expansé pour le second.
Figure 2 : performances du réacteur CAP (Actiflo® Carb) vis-à-vis de l’élimination de quelques micropolluants présents dans les eaux usées traitées selon les types de CAP utilisés

Les performances de l’Actiflo®carb (fonctionnant à 40 à 60 m/h) ont été évaluées sur divers sites d’usines d’eaux usées au sein desquelles le réacteur à charbon actif est installé comme un traitement tertiaire et/ou quaternaire. Le schéma ci-après (figure 1) présente le principe de fonctionnement de l’Actiflo®Carb.

A titre d’exemple, lors d’essais menés en Suisse sur la STEP de Cham (Lucerne), trois types de CAP ont été testés comme le présente la figure 2. Il s’agit de produits ayant pour origine de la houille (SAE Super de Norit), de la noix de coco (AFP 21 de Jacobi/Pica) ou bien du bois (HPC de CSC). Les différents charbons actifs en poudre ont été utilisés lors de tests selon un dosage variable entre 10 et 20 g/m³, ceci pour des temps de contact de 10 minutes [5, 6].
Les performances d’élimination par le réacteur CAP dépassent les 75 % pour l’Atenolol, le Benzotriazole, l’Hydrochlorothiazide. Elles atteignent les 80 - 90 % pour Benzafibrate, Carbamazépine, Clarithromycine, Trimethoprime, Venla-faxine, Métoprolol, Methyl-Benzotriazol, Acide Méfénamique, Primidone. Le rendement d’élimination est cependant inférieur à 30 % pour Gabapentine, il varie autour de 40-50 % pour Acide énolique, Sulfaméthoxazole, Valsartan.
Les charbons actifs en poudre (Norit et CSC) présentent des performances très similaires vis-à-vis de l’élimination des micropolluants. Le charbon Jacobi (ex Pica) présente souvent des performances plus faibles qui peuvent s’expliquer par sa granulométrie plus élevée.

Intérêts de la combinaison O3 in situ/charbon actif

Caractéristiques physiques et chimiques des charbons actifs
Les charbons actifs sont considérés comme un ensemble de couches de carbone hexagonales se réticulant en groupes aliphatiques dans lesquels des hétéroatomes sont incorporés. Il est connu que le charbon actif est caractérisé par ses propriétés texturales et chimiques (surface spécifique dotée de grands volumes de micropores et de mésopores) et de différents groupes fonctionnels de surface [3,4].
Les charbons actifs ont à la fois des groupes fonctionnels hydrophiles de surface, qui agissent comme des centres d’adsorption primaires (pour la vapeur d’eau par exemple), et des couches de graphène hydrophobes sur lesquelles les espèces non polaires sont principalement adsorbées [7].
Figure  3 : CAP sous un microscope

Ces diverses fonctions de surface jouent un rôle très important lors de l’adsorption, particulièrement pendant la chimisorption car selon leur nature et leur nombre, elles déterminent les aspects qualitatif et quantitatif de l’adsorption [8,9]. Elles peuvent être de quatre types : acides, basiques, neutres ou polaires. Les méthodes de caractérisation des charbons actifs sont diverses ; on peut citer entre autres : la titration directe, les méthodes polarographiques, la méthylation, les analyses élémentaires, l’infrarouge (IR) les réactions acido-basiques, les décompositions thermiques, les rayons X, la transformée de Fourier et Infra rouge (FTIR), la colorimétrie, etc. [9, 10, 11].

Les groupes fonctionnels conduisent, selon la prédominance de leur structure, à des charbons acides (fonctions comportant O2) ou basiques (fonctions comportant N). Les groupes fonctionnels avec O2 augmentent la polarité de la surface du charbon. Les charbons actifs présentant des surfaces acides sont des charbons actifs dits de type-L. Ces charbons possèdent en majorité les fonctions phénoliques, n-lactone, f-lactone et groupements acides carboxyliques [12] (figure 5). Les charbons actifs présentant des surfaces basiques sont des charbons actifs de type – H. La plupart du temps, les surfaces basiques sont obtenues en gazéifiant les surfaces acides à des températures comprises entre 800 et 1.000 °C, puis en les refroidissant sous atmosphère inerte et en les exposant ensuite à l’oxygène à la température ambiante, d’où l’apparition des groupements basiques tels que NH ou NH2 [12]. La polarité des charbons actifs s’explique par la présence à leurs surfaces des complexes carbone-oxygène très polaires [14], des carbones ayant des valences libres (carbones non tétravalents) [14] comme l’indique la figure 4.
Il apparaît donc ici que ce ne sont pas seulement la porosité et la surface spécifique qui représentent les caractéristiques importantes des charbons actifs, mais il faut aussi tenir compte des propriétés de surface. Le phénomène d’adsorption a été considéré depuis longtemps comme étant régi tant par les atomes internes [12]. Mais diverses études ont montré que les mécanismes impliquent également les atomes et groupes de surface [15,16,17]. Dans cette perspective, l’adsorption d’une substance organique par exemple ne consiste pas seulement en l’introduction de l’adsorbant dans les pores, ces pores sont aussi le lieu d’une réaction chimique entre cette substance et les groupes de surface du charbon actif. Le mécanisme réactionnel peut donc être étudié au travers de la formation des liaisons chimiques entre la substance organique et les groupes de surface du charbon actif. L’adsorption des acides organiques augmente avec la présence des groupements OH et NH2 présents à la surface des charbons [15].
Les groupes fonctionnels de surface participent donc au processus d’adsorption. L’introduction de nouveaux groupes fonctionnels de surface, conduirait à une augmentation de la capacité d’adsorption car ils renforcent les interactions électrostatiques et de dispersion. Les groupes carboxyliques ainsi que des groupes basiques contenant de l’oxygène (par exemple, du type chromène et pyrone) favoriseraient l’adsorption.
Figure  4 : fonctions de surface sur un charbon actif

L’utilisation d’agent oxydant fort comme l’ozone participe à l’augmentation de ces groupes fonctionnels et notamment des composés carbonylés. Ils sont en effet, issus de l’oxydation des cycles aromatiques substitués après formation de phénols, de diphénols ou de quinones et ouverture du cycle aromatique. Les procédés d’oxydation avancée avec l’ozone sont inclus dans les traitements tertiaires en vue de l’élimination des micropolluants prioritaires (pesticides, hydrocarbures aromatiques polycycliques, etc.) L’utilisation de l’ozone disposée en amont d’une filtration sur charbon actif en grain est actuellement appliquée comme traitement tertiaire sous couvert d’un mécanisme biologique développé sur le charbon actif.

Méthode analytique de détermination des groupes fonctionnels
La méthode de Boehm permet de déterminer les quantités de fonctions acides (1, 2). Elle est basée sur la force acido-basique des fonctions de surface. L’échantillon à étudier est mis en contact avec l’une des solutions basiques suivantes, de forces différentes : NaHCO3 (pKa = 6,37), Na2CO3 (pKa = 10,25) et NaOH (pKa = 15,74). Après filtration, on dose en retour l’excès de base utilisée par une solution d’acide chlorhydrique. Les groupes de fonctions de surface, identifiés par cette méthode, sont les suivants :
  • (I) groupes acides carboxyliques fortement acides (neutralisés par NaHCO3).
  • (II) groupes acides carboxyliques faiblement acides et lactones (neutralisés par NaHCO3 et Na2CO3)
  • (III) groupes phénols & hydroxyles (titrés avec NaOH et Na2CO3)
  • (IV) groupes carbonyles et quinones (titrés avec C2H5ONa et NaOH)
Les groupes de fonctions de surface obtenus sont situés sur les arêtes des couches de carbone, entraînant une structure de surface plus hydrophile. Ils réagissent à la surface du charbon actif, soit comme des acides faibles (par exemple, acide carboxylique) ou comme des bases (par exemple, groupe hydroxyle). Les fonctions de surface fournissent également des sites de chimisorption pour les composés polaires en fonction de leur comportement amphotère, tandis qu’une surface de charbon actif non modifiée est généralement hydrophobe.
Figure 5 : exemple d’interactions des fonctions de surface (Groupes I & IV) avec les substances humiques

En milieu aqueux, les fonctions de surface sont responsables du caractère amphotère des charbons actifs, car la surface peut développer, soit des charges positives, soit des charges négatives en fonction du pH [14,15,16,17].

La zétamétrie permet de déterminer le pH au point de charge nulle (PhPZC : Point of Zéro Charge ou PZC) d’un charbon actif placé en solution aqueuse. C’est le pH correspondant à une interface solide/solution dont le potentiel électrique à la double couche présente une charge totale de surface nulle. Une diminution du PZC est observée lorsque la teneur en oxygène des charbons augmente, ce qui tend à confirmer que la basicité des charbons est plutôt liée aux sites riches en électrons π plus qu’à des fonctions oxygénées de surface. Même si le pka des fonctions acides et bases intervient également [13].
Couplage O3 in situ & charbon actif - Dosage des fonctions de surface
Les fonctions de surface sont donc obtenues selon la méthode de Boehm (1,2). La valeur de l’indice d’iode est obtenue selon la méthode ASTM D4607 – 94. (2006).
Le PhPZC (point Zéro of Charge) est obtenu selon la méthode de Noh et Schwarz [13]. Il en ainsi été obtenu un pHPZC de l’eau contenant le charbon actif de 8.05 à l’état neuf et 8.28 après dix minutes d’ozonation. Il est connu que la surface du charbon actif est chargée négativement lorsque le pH est supérieur au pH PZC. Alors que la surface du charbon actif est chargée positivement lorsque le pH est inférieur au pH PZC. Dans ce dernier cas, le charbon actif aura une grande affinité pour les composées anioniques. Le pH de l’eau contenant le charbon actif testé se situe entre 7.4 et 7.9 signifiant ainsi qu’il est adapté pour les substances organiques chargées négativement. Les essais en laboratoire d’ozonation (2 g/m³) directe dans une cuve de contact contenant du charbon actif en poudre (concentration à 1,2 g/l) pendant 10 minutes, conduisent aux résultats figurant dans le tableau 1.

Il apparaît (tableau 1) que le charbon actif Pulsorb RD 90 de Chemviron présente en son état d’activation initiale, des fonctions de surface assez intéressantes avec des fonctions carboxyles forts (Groupe I) à 2.58 meq/g, des fonctions hydroxyles et phénols (Groupe III) à 2.36 meq/g et surtout celles des groupes carbonyles & quinones (Groupe IV) à 3.24 meq/g qui sont largement supérieures à celles observées habituellement. Ces fortes valeurs sont associées aux conditions d’activation et de fabrication du charbon actif. Dans de nombreux cas, les valeurs des groupes de fonctions de surface se situent autour de 0.3- 0.6 meq/g pour le Groupe I, et 0.10-0.35 meq/g pour le Groupe II, 0.5-1.5 meq/g pour le Groupe III et < 0.2 meq/g pour le Groupe IV. Les fortes valeurs des fonctions de surface tendent à augmenter la capacité d’adsorption des charbons actifs et notamment vis-à-vis des substances organiques de types humiques et fulviques. L’ozonation in situ du charbon actif agit de façon directe sur la surface du matériau en créant ou en augmentant les groupements de surface. Ainsi selon les résultats d’ozonation directe du charbon actif au sein du réacteur, le tableau  1 montre une augmentation des groupements de surface. Le Groupe I passe de 2.58 meq/g à 4.30 meq/g signifiant une nette augmentation des fonctions carboxyles forts, le Groupe III baisse de 2.36 meq/g à 0 meq/qui s’explique par une oxydation des groupes hydroxyles et phénols en carbonyles et carboxyles, et le Groupe IV passe de 3.24 meq/g à 9.28 meq/g. Ce sont les groupes I et IV qui vont intervenir vis-à-vis de l’adsorption des substances organiques. Notamment par des interactions CO et OH (substance organique - fonctions de surface).

On note ainsi une augmentation des différents groupes fonctionnels qui devraient assurer une meilleure capacité d’adsorption du charbon actif.
Efficacité accrue de l’Actiflo®Carb avec injection d’ozone dans la cuve de contact charbon
Le procédé Actiflo®Carb utilisant une injection d’O3 (1 à 2,5 g/m³) dans la cuve de contact charbon, a été testé sur un pilote, en traitement tertiaire des eaux usées de deux STEU (figure 6). Le temps de contact du CAP dans la cuve de réaction est de 10 min et les dosages en CAP varient entre 10 mg/L et 20 mg/L. Les essais ont été menés à des vitesses de clarification de 40 à 60 m/h.
Les résultats obtenus sur les deux sites illustrent bien l’efficacité élevée de l’oxydation chimique à l’ozone dans les conditions opératoires décrites ci-dessus. Il apparaît ainsi, sur le premier site, un gain de l’ordre de 10 à 15 % de la performance moyenne d’élimination des divers micropolluants portant les rendements d’élimination entre 85 % et 92 %. Il en va de même sur le second site, où mis à part le Benzotriazole (77.6 %), toutes les autres molécules sont éliminées à plus de 80 % avec ozonation du charbon actif, avec des rendements atteignant les 99 % pour la Carbamazépine, Diclofénac, Hydrochlorothiazide et Sulfaméthoxazole (98 %).
Figure 6 : schéma de fonctionnement de la combinaison O3 in situ + réacteur CAP

Une élimination optimale des micropolluants (Figure 7) est ainsi obtenue selon cette combinaison O3 in situ/réacteur CAP sans libérer de sous-produits dans le milieu récepteur. On note que des composés peu ou moyennement éliminés par le CAP seul (en raison notamment des faibles doses de charbon actif) comme la Gabapentine (10 %), l’Aténolol (40 %) et le Valsartan (40 %) voient leur rendement d’élimination s’élever à plus de 80 % en présence d’O3 in situ.

Ce rendement peut être nettement amélioré en intervenant sur les dosages des deux réactifs tout en maîtrisant le dosage d’ozone afin éviter la formation de sous-produits.
  • L’abattement massique de l’ensemble des molécules analysées passe à plus de 91 % (contre 75 % sans ozone).
  • La moyenne des abattements de l’ensemble des molécules analysées passe à 89 % (contre 77 % sans ozone).
Figure 7 : Élimination des micropolluants avec la combinaison O3 in situ/CAP (O3 : 2 g/m3, CAP : 10 g/m3)

Les doses d’O3 situées entre 2 et 2,5 g/m³ sont trop faibles pour oxyder les micropolluants d’autant plus que le COT de l’eau traitée (< 12 mg/l) peut induire une demande immédiate en O3 qui ne laisse pas suffisamment de résiduel pour permettre une oxydation des micropolluants. Les dosages habituels pour l’ozonation des micropolluants d’une eau usée traitée se situent entre 8 et 10 g/m³. De plus l’ozone étant injecté directement dans la cuve de contact du CAP dont la concentration se situe entre 1.5 – 2 g/l, il y a une réaction directe entre l’oxydant (O3) et le réducteur (CAP) au détriment des matières organiques et des micropolluants. C’est la raison pour laquelle, la réaction d’ozonation ne modifie pas les micropolluants car les cinétiques de réaction O33-CAP sont beaucoup plus rapides. De surcroît, la concentration de l’ozone résiduel s’est toujours avérée nulle dans l’eau interstitielle.

En complément des analyses sur les micropolluants, nous avons comparé les chromatogrammes SEC-UVD selon les deux cas de figures avec et sans ozone injecté dans le réacteur charbon. Les analyses d’échantillons prélevés en entrée/sortie de l’Actiflo®Carb montrent (figure 8) qu’il y a bien une élimination des substances humiques due à l’addition de charbon actif. L’injection d’O3 dans la cuve de réaction du CAP se traduit par une réduction systématique des pics des substances humiques par rapport à ceux obtenus avec l’Actiflo® Carb (sans O3). L’échantillon ainsi traité contient une concentration plus faible en carbone organique. Ceci peut s’expliquer par la meilleure efficacité d’adsorption du CAP oxydé in situ par l’ozone, sans toutefois générer l’apparition de nouveaux pics qui auraient été assimilés à des sous-produits d’oxydation.

Formation de bromates ?

Il est bien connu que l’ozonation d’une eau contenant des bromures conduit à la formation de bromates, dans des conditions opératoires déterminées. Afin de déterminer si tel est le cas dans une configuration d’ozonation au sein du réacteur à charbon actif, des essais ont été effectués sur une eau usée tertiaire contenant environ 6.5-7 mg/l de bromures. Les résultats obtenus sont résumés sur le tableau 2. Des concentrations en bromates < 10 µg/l ont été analysées. Par contre, la même eau clarifiée directement ozonée a conduit à la formation de 137 µg/l de bromates pour une dose d’O3 de mg/l et un temps de contact de 10 min.
Ceci confirme que les mécanismes traditionnels de l’ozonation ne sont pas mis en œuvre dans un tel cas car la présence de charbon actif qui est en contact direct avec l’oxydant, ne conduit à aucune concentration résiduelle en O3 qui pourrait donner lieu à des réactions secondaires (sous-produits organiques d’oxydation & bromates).
Figure 8 : LC COD d’échantillons traités par l’Actiflo®Carb avec et sans ozonation du charbon actif

Conclusion

Le procédé combinant de façon judicieuse un réacteur de charbon actif en poudre (CAP) à de l’ozonation injecté in situ dans la cuve contact permet d’obtenir des taux d’abattement de la grande majorité des micropolluants supérieurs à 90 %. Mis en œuvre dans le procédé Actiflo®Carb, ce réacteur CAP associe les performances de floculation et décantation rapide de l’Actiflo® aux capacités d’adsorption du charbon actif en poudre et à une oxydation avancée à l’ozone. Les micropolluants présents dans les eaux usées vont ainsi se fixer sur les sites d’adsorption du CAP et sur les fonctions de surface développés sur la surface du charbon actif. La modification de la surface du charbon actif se traduit par une augmentation des fonctions de surface qui participent à une meilleure capacité d’adsorption. Il en résulte une bien meilleure élimination des micropolluants à dose égale de charbon actif mise en œuvre. De la même manière, il est possible de réduire significativement les doses de CAP grâce à la mise en œuvre de l’ozone tout en maintenant les performances du procédé à l’identique. Nous avons pu aussi mettre en évidence qu’il n’y a pas de formation de bromates malgré les fortes concentrations en bromures présentes dans l’eau usée tertiaire. Cette vraie complémentarité, qui est également applicable aux eaux à potabiliser, permet de proposer des solutions à usages multiples pour le traitement des eaux mais aussi permet d’optimiser au mieux les coûts d’exploitation des installations industrielles de ce type. En effet, un équilibre économique est possible entre la dose d’O3 et une réduction des doses de charbon actif à injecter. La combinaison O3/réacteur CAP conçue selon notre dispositif opératoire présente l’avantage de traiter la majorité des micropolluants présents dans l’eau sans pour autant conduire à la formation de sous-produits. Il s’agit ainsi de poursuivre dans la voie d’une amélioration constante de la qualité des rejets des stations de traitement biologique afin de protéger de manière efficace les milieux récepteurs. Et d’augmenter l’élimination des paramètres COD, pesticides et micropolluants sur les usines d’eau potable. 
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