La réhabilitation d'un site implique un examen très précis des différentes solutions de traitement qu'il est possible de mettre en oeuvre dans le cadre du plan de gestion. Les solutions retenues doivent offrir le meilleur compromis sur la base de considérations environnementales, sanitaires, techniques et économiques. Longtemps négligées, les considérations environnementales progressent grâce au bilan « coûts-avantages » prévu par la nouvelle méthodologie de gestion des sites et sols pollués.
Lorsque les études de diagnostics préalables montrent qu’un tènement ou un terrain réputé « à passif » est pollué et qu’il n’est pas compatible avec son usage futur, le choix d'une technique de dépollution d'un site ou d'une nappe plutôt qu'une autre dépend de nombreux paramètres. La caractérisation du ou des polluants à traiter, leur concentration, la nature des sols et la profondeur de la zone à traiter, les volumes concernés, la localisation du tènement, son devenir ainsi que le délai imparti aux opérations de dépollutions, sont les principaux critères qui déterminent la faisabilité et la réussite de tout projet de réhabilitation. Ils vont permettre d’opter pour un traitement in situ, sur site ou hors site en présélectionnant les procédés de traitement a priori les plus adaptés et en ne retenant au final que ceux dont le bilan coûts/avantages est le plus positif aux plans sanitaire, social, économique et environnemental, sur la base des résultats attendus des techniques ou modes de gestion envisagés. Le plan de gestion retenu pour un site considéré correspondra donc au bilan coûts-avantages le plus favorable, en veillant à privilégier les options qui permettent d’éliminer autant que faire se peut la source de pollution considérée mais aussi à désactiver les éventuelles voies de transfert, le risque sanitaire restant primordial.
Requise par l'article 34-3-1 du décret du
Aux 300 000 tonnes de terres polluées susceptibles d’être réceptionnées par le biocentre de Biogénie à Écharcon (91), s’ajouteront donc désormais 100 000 tonnes supplémentaires qui pourront être traitées sur la nouvelle plateforme de 50 000 m² de Château-Gaillard, certifiées ISO 14001 et MASE.
Arrêté du 21 septembre 1977 modifié, l’approche coûts-avantages ne consiste pas à produire une étude détaillée. Elle doit fournir des éléments factuels de comparaison de chacune des solutions pertinentes retenues. Problème : justifier des choix techniques sur des critères explicites, argumentés et transparents qui prennent en compte les volets sanitaires, environnementaux et économiques n’est pas toujours chose facile, certaines contraintes étant incompatibles entre elles. Par ailleurs, concilier des exigences de délais, de coûts, d’efficacité et d’espace implique bien souvent d’associer différentes techniques de dépollution. Dès lors, comment, face à chaque problématique rencontrée sur un même site, arriver à combiner – tout en préservant en premier lieu la sécurité et la santé des intervenants et du voisinage – rapidité de traitement, faible consommation d’énergie, limitation du transport de terres polluées, production et gestion de déchets ou encore limitation des risques résiduels ? Le plus souvent, le choix d’une filière de traitement dépendra des caractéristiques intrinsèques des techniques mises en œuvre mais aussi des contraintes spécifiques au site considéré. Certaines catégories de traitement répondent parfaitement à des contraintes spécifiques comme, par exemple, au manque de temps. C’est le cas des traitements hors site ou ex-situ qui ont fortement progressé ces dernières années en proposant aux aménageurs une solution rapide.
Les traitements hors site : en forte progression
Dekra est un cabinet indépendant d’expertise qui intervient à la demande des maîtres d’ouvrage à tous les stades de la nouvelle méthodologie des sites et sols pollués, du diagnostic jusqu’à la préconisation de solutions dans le cadre du plan de gestion le plus adapté aux caractéristiques du site considéré et à son devenir.
Damien Faisan, responsable technique national Sites et Sols Pollués chez Dekra, note un intérêt toujours soutenu pour les valorisations des terres polluées : des filières complémentaires à celles existantes en France.
Les traitements hors sites qui reposent sur une excavation/extraction du milieu pollué et son évacuation vers l’un des 18 centres de traitement implantés en France. « Parmi les avantages du traitement hors site, l’assurance que le projet sera réalisé dans les délais impartis séduit les promoteurs autant que les industriels de même que le transfert de responsabilité à la société chargée du traitement qui permet au maître d’ouvrage de se décharger au plan juridique du problème de pollution auquel il est confronté, explique-t-il. Pour de faibles volumes, c’est aussi la solution la plus économique et la plus rapide. » La formule séduit puisque 54 % des tonnages traités en 2006 l’ont été en hors site (+ 300 000 tonnes en 4 ans), selon l’étude réalisée en 2009 par le cabinet Ernst & Young pour le compte de l’Ademe. Trente pour cent de ce volume a fait l’objet d’un traitement biologique sur des plateformes adaptées à l’image des biocentres exploités par Biogénie qui vient d’ouvrir une deuxième plateforme à Château-Gaillard dans l’Ain d’une capacité de 100 000 tonnes/an.
« Le biocentre est un outil que nous avons développé pour répondre à un besoin dicté par les pressions foncières, notamment dans les grandes agglomérations, explique Hervé Montaclair, Biogénie. Il permet de répondre à une demande de libération rapide d’emprise foncière. De plus, sur les grandes agglomérations, il y a désormais de façon quasi systématique obligation de créer des places de parking en sous-sol avec, comme conséquence, un excédent de sol à gérer hors site. L’outil biocentre répond à cette contrainte tout en offrant une valorisation des terres traitées et un transfert de responsabilité entre le maître d’ouvrage et le gestionnaire du biocentre contrairement aux centres d’enfouissements techniques qui ne permettent pas ce transfert. »
Sita Remediation, GRS Valtech, Extract Ecoterres, Séché Environnement, Ikos Sol Meix ou 3L Normandie exploitent également des plateformes multimodales offrant une large palette de traitements. Revers de la médaille : le coût, en moyenne de 30 % plus élevé qu’un traitement comparable in situ ou sur site, et l’empreinte environnementale de la filière du fait du transport des terres excavées et du devenir des terres traitées, encore en attente d’un statut définitif. Car une fois excavés, les sols pollués sont considérés comme des déchets. Les débouchés sont donc limités à la couverture d’Installations de Stockage de Déchets ou à la valorisation en technique routière. Certaines sociétés, à l’image d’Envisan France qui exploite plusieurs centres de traitement de sédiments et de terres polluées en France et en Europe, recourent presque systématiquement aux transports alternatifs et notamment fluvial, afin de réduire les effets nuisibles du transport routier sur l’environnement (émissions de CO₂), ainsi que sur l’usage des réseaux urbains (saturation, risques d’accident). Mais limiter les volumes de terres sortis d’un site en les triant ou optimiser les distances de transport ne suffiront pas à réduire l’impact environnemental de la filière. Les professionnels attendent donc que le statut des terres excavées fasse l’objet d’une réglementation pour permettre une réutilisation au moins partielle. Cette question résolue, il est probable que la filière poursuivra son essor sous le double effet de la pression du marché de l’immobilier et de la rareté du foncier.
Lorsque le temps n’est pas compté, on pourra avoir recours à des traitements moins coûteux comme par exemple la phytoremédiation (de 2 à 20 ans de traitement pour un coût de 18 à 40 €/m² selon l'étude publiée par le BRGM en juin 2010). Elle consiste à utiliser des plantes pour traiter les sols par dégradation, transformation, volatilisation ou stabilisation.
Traitements in situ : la phytoremédiation dopée par le Grenelle ?
Le plus souvent, les composés inorganiques seront immobilisés ou extraits alors que les composés organiques seront dégradés. La technique, éprouvée, compétitive économiquement, a fait la preuve de
Sites et sols pollués : vers un référentiel de certification
Face à la nécessité de devoir gérer des problématiques de pollution de sols, notamment des remblais « anciens ou divers » et des terres excavées, et/ou de nappes contaminées, notamment lors de chaque projet d’aménagement et donc de terrassements en zone urbaine à périurbaine, ou lors de projets de reconversion d’anciens terrains industriels, il est apparu nécessaire, tant à l’administration et au ministère en charge de ces problématiques (DREAL - DGPR-MEEDDM) qu’à l'ensemble des prestataires spécialisés représentés par les associations professionnelles (UPDS dont le label Qualipol a servi de base à la construction de la norme et du référentiel, et UCIE) de mettre en place un système de certification nationale des métiers de la gestion des sites et sols pollués. Cette certification a été confiée par la DGPR-MEEDDM à un organisme national reconnu : le Laboratoire National de Métrologie et d’Essais (LNE). Elle sera attribuée, après audit des prestataires impétrants, sous la marque « LNE Services ».
Pour les donneurs d'ordres, cette certification permettra d'identifier les intervenants pouvant réaliser une prestation de qualité, conforme en premier lieu à leurs exigences et aux réglementations et méthodologies nationales existantes, ainsi qu’à l'état de l'art pour « faire et bien faire » : qui un diagnostic de pollution, qui une surveillance ou une dépollution de nappe, qui une opération de remise en état d'un site ou d'un terrain, qui la gestion des terres excavées et évacuées hors site lors de projets d'aménagements, etc.
Cette certification, actuellement en phase finale d’élaboration et de validation au sein d’un groupe de travail ad hoc présidé par la DGPR-MEEDDM, sera basée sur une nouvelle norme de service AFNOR NF X31-620 « Qualité du sol. - Prestations de services relatives aux sites et sols pollués », déclinée en quatre parties. Cette norme AFNOR a été rédigée et validée en janvier 2011 au sein d’une commission AFNOR ad hoc, mise en place depuis l’automne 2009, notamment suite à l'enquête publique réalisée par l’AFNOR au second semestre 2010. Elle définira notamment une codification précise et relativement exhaustive de l'ensemble des prestations possibles en matière de caractérisation et de gestion/réhabilitation de sites et sols (potentiellement) pollués.
Ceci sera non seulement très utile aux prestataires, afin de détailler et d’adapter au mieux leurs offres de prestations, mais également aux donneurs d’ordres, car cette codification leur permettra de mieux préciser et cadrer tant leurs besoins que les demandes d’offres et dossiers de consultation afférents…
Afin d’être applicable, reconnue et équitable, la future certification nationale des prestataires spécialisés en caractérisation et/ou en gestion et réhabilitation de sites et sols pollués doit mettre notamment en avant les besoins et les exigences suivantes :
- La certification doit garantir un réel savoir-faire opérationnel, basé en premier lieu sur la formation et l'expérience des intervenants, ainsi que la qualité des prestations réalisées et proposées pour la caractérisation et/ou la gestion de sites et sols pollués. Le processus de certification des prestataires qui en feront la demande restera néanmoins proportionné aux structures concernées. Il privilégiera l'accès direct aux documents et le contrôle du savoir-faire « de terrain », attestant de la conformité aux exigences requises par l'organisme certificateur, plutôt que l’application stricte de procédures administratives et « théoriques » ;
- La certification sera accessible aux prestataires qui le souhaitent, le critère déterminant n’étant pas le nom, la taille ou le chiffre d'affaires du consultant, du bureau d’études ou de l’entreprise impétrante, ni sa nationalité, mais sa capacité réelle à faire et à réaliser, en France, des prestations conformes aux réglementations et méthodologies existantes, applicables en matière de gestion de sites et sols pollués, ainsi qu’aux règles de l'art.
La certification sera mise en œuvre à partir d’un référentiel rédigé par le LNE – sur la base de la norme actualisée AFNOR NF X31-620 « Qualité du sol. - Prestations de services relatives aux sites et sols pollués » – après validation et contrôle d'un comité d’experts présidé par la DGPR-MEEDDM.
Il est important de préciser que la rédaction de ce référentiel de certification « LNE Services », intitulé « Certification de service des prestataires dans le domaine des sites et sols pollués », a été réalisée conformément aux exigences de la loi du 4 août 2008 et du décret du 19 décembre 2008, régissant la certification des produits et des services.
Ce référentiel de certification est actuellement en cours d’achèvement et de validation, et les premiers prestataires qui seront officiellement certifiés « LNE Services » – pour les spécialités demandées et après audit préalable et délibération en commission de certification ad hoc présidée par la DGPR-MEEDDM – devraient ainsi apparaître vers mi-2011.
Son efficacité dès lors que les conditions optimales sont réunies. Problème : elles ne le sont pas toujours et l’hétérogénéité de la répartition des polluants pèse sur l’efficacité du traitement qui se limite par ailleurs à la zone racinaire. Elle a pourtant été mise en œuvre à grande échelle sur l’ancien site Metaleurop à Noyelles-Godault ou encore sur le site minier de Salsigne dans l’Aude : 50 hectares traités pour partie par phytostabilisation, une première en France à cette échelle, et réalisé avec deux programmes de recherche : Difpolmine (programme européen) et Phytoperf sous l’égide de l’Ademe, à l’initiative et réalisé par le Groupe IRH Environnement. Elle reste cependant considérée comme expérimentale en France où certains professionnels la jugent encore mal maîtrisée. Une situation que déplore Thierry Blondel, directeur du Cabinet Blondel et président de l’Ucie (Union des consultants et ingénieurs en environnement) : « Les techniques “légères” qui marchent très bien à l’étranger, notamment aux États-Unis, sont trop souvent bannies en France au profit des techniques traditionnelles “pompes et tuyaux” plus rémunératrices », explique-t-il. Un consensus se dégage cependant sur sa pertinence lorsque de grandes surfaces doivent être traitées.
Dans le cadre de la loi Grenelle II qui encourage l’utilisation des plantes pour la rémédiation des sols pollués, l’Ineris a récemment évalué les performances des phytotechnologies et plus particulièrement de la phytostabilisation. Le projet Phytostab, coordonné entre 2007 et 2009, a montré la pertinence de la phytostabilisation assistée pour la rémédiation d’un sol pollué par des éléments traces métalliques (ETM). Cette technique consiste à immobiliser, grâce à l’utilisation de plantes et d’amendements, les ETM pour éviter une dissémination de la pollution dans l’environnement (on élimine la voie de transfert possible par ruissellement, infiltration, envol de poussières) et rendre possible la reconversion d’un site. Soutenu par l’Ademe et réalisé avec le concours de l’École des mines de Douai, ce projet a évalué l’intérêt de deux plantes, la fétuque rouge et la canche cespiteuse, avec adjonction de deux types d’amendements, amendement sidérurgique et hydroxyapatite. Le dispositif expérimental, constitué de neuf parcelles de sédiments pollués issus du canal de la Scarpe, situées à Lallaing près de Douai (Nord), a montré que, sur le long terme, la couverture végétale se maintient grâce à la croissance d’espèces spontanées, ce qui contribue à limiter la dispersion des polluants par lessivage ou érosion. En matière d’immobilisation, le couplage canche/amendement sidérurgique s’est révélé efficace pour stabiliser le cadmium et le zinc, et réduire ainsi les possibilités de transfert dans le sol, vers les eaux souterraines par exemple. Par ailleurs, les graminées, dont font partie la canche et la fétuque, sont les espèces qui accumulent le moins le cadmium et le zinc dans leurs parties aériennes, diminuant ainsi les risques de contamination de la chaîne alimentaire.
L’ensemencement des sols par un écosystème de micro-organismes qui produit rapidement de l’humus lequel adsorbe les polluants et réduit leur lessivage et leur érosion s’avère également intéressant en matière de sols pollués. L’application de cette technique, développée depuis plus de vingt ans par la SARL Sobac pour le développement de la fertilité des sols agricoles, est envisagée en Hongrie pour la dépollution des sols pollués par les boues rouges de l’industrie de l’aluminium l’été dernier : « Bactériosol » permet de traiter hors site la terre de surface la plus polluée et permet de traiter in situ la dépollution et surtout la revégétalisation des horizons inférieurs. Cette technique peut donc s’utiliser seule en permettant de réduire de 30 à 50 % le
lessivage, mais aussi être associée à la phytoremédiation où elle permet de décupler le développement des plantes dépolluantes et surtout leur développement racinaire pour une meilleure exploration des sols. La technologie développée par Sobac fait que les polluants, notamment les ETM, sont fixés dans les sols et les restitutions aux plantes sont réduites, ce qui évite la recontamination de l’environnement. L’association de la technologie mise au point par Marcel Mézy avec une autre technique classique de dépollution permet de réduire d’un facteur 2 le temps de dépollution pour un coût à la tonne modique (à partir de 10 €/t) et une simplicité d'utilisation puisqu’il suffit d’épandre le produit en surface du sol à traiter in situ.
Reste qu’en France, bien des professionnels considèrent la phytoremédiation comme étant encore au stade de la recherche et du développement et ne considèrent cette technique végétale que comme un complément aux filières traditionnelles. Pour Thierry Blondel, gérant du Cabinet-Conseil Blondel et Président de l'Union des Consultants et Ingénieurs en Environnement, « la France est très en retard, par rapport à d'autres pays européens ou aux États-Unis, sur l’utilisation effective de ces techniques dites légères ». Phytoremédiation, mais également traitement en andains ou biotertres sur site, atténuation naturelle contrôlée ou renforcée, etc., notamment à cause du fait d’un manque de volonté certains des entreprises de dépollution pour les proposer à leurs clients et les utiliser.
« Les entreprises de dépollution préfèrent en premier lieu proposer et vendre à leurs clients des techniques “éprouvées”, dites “dures”, de type “excavation” ou de type “pompes et tuyaux”, qui font appel à un savoir-faire technique certain et reconnu, bien entendu, souvent d’ailleurs pour des raisons d’efficacité et de réalisation au court-moyen terme : aménagements urbains, promotions immobilières, reconversion pour un usage résidentiel de friches industrielles, etc. » explique-t-il. Pour Thierry Blondel, la non-utilisation quasi systématique des techniques de dépollution dites “légères” en France alors que sur de nombreuses friches industrielles elles pourraient être utilisées, vient principalement d’une certaine condescendance et d’une méfiance systématique des ingénieurs ou techniciens spécialisés travaillant dans les entreprises de dépollution, souvent issus du génie civil d’ailleurs, vis-à-vis de toutes les spécialités et tous les métiers dits “naturalistes”, comme par exemple l’écophysiologie végétale, l'agronomie et le génie biologique.
« Il n'est ainsi pas rare, en France, d’assister lors d’appels d’offres à un lobbying forcené de certaines entreprises pour promouvoir telle ou telle technique de dépollution, issue de procédés chimiques et/ou physiques spécifiques, souvent déposés et protégés par ailleurs et qui certes sont efficaces et éprouvées la plupart du temps, mais surtout qui rapportent beaucoup plus d’un point de vue financier sur le “court-moyen terme” que l'éventuel emploi de techniques “légères”, peu coûteuses et parfois tout aussi efficaces » explique Thierry Blondel.
« Il faut en effet comparer des coûts de dépollution s’élevant à plusieurs dizaines à centaines d’euros la tonne de sol traité, lors de l'emploi de techniques “dures” sur site ou hors site, par rapport à quelques euros la tonne pour un traitement par des techniques “légères” telles la phytoremédiation ou autres. Mais il est également vrai, et c'est un de leurs gros défauts, que ces techniques dites légères sont parfois longues pour être efficaces, voire inadaptées à certains contextes de pollution, notamment dans le cas de pollutions mixtes, organiques et minérales, et/ou de pollutions profondes ».
« À l’heure actuelle, la phytoremédiation n’est pas considérée, en France, comme
« Une technique classique de dépollution » confirme Damien Faisan, Dekra. In situ, venting et bio-venting restent largement prépondérants.
Venting et bio-venting restent largement prépondérants
Les filières de traitement in situ ou sur site représentaient 46 % des tonnages traités en 2006 selon l'étude Ernst & Young publiée en 2010. Ces techniques bénéficient des faveurs de nombreux professionnels de la dépollution. « Notre philosophie, en tant que conseil, consiste à favoriser ces techniques tout en prenant en compte les paramètres de responsabilité juridique et d'aménagement du site » explique Damien Faisan, Dekra. Les techniques les plus fréquemment mises en œuvre restent le venting-bioventing avec 20,6 % des tonnages traités en 2006, suivis par la biodégradation (9 %), l'oxydation chimique (3,5 %), la désorption thermique (2,9 %), puis le lavage des terres (2,8 %).
Envisan France développe le lavage des terres, également appelé traitement physico-chimique sur le site pollué lui-même, pour les pollutions mixtes métaux/organique. Pour ce faire, Envisan France recoure à ses propres installations mobiles de traitement qui circulent sur les chantiers et sur ses centres de traitement, dans le cadre de campagnes de traitement de terres, pour des tarifs inférieurs à 50 € HT/t.
Le venting-bioventing est aussi l'un des traitements les moins coûteux : entre 15 et 50 €/t de sols traités avec un temps de traitement variant de 6 mois à 5 ans.
Un coût relativement modeste qui peut s’expliquer par un contexte très concurrentiel qui contribue à tirer les prix vers le bas. Apinor, Arcadis, ATI Services, Brezillon, Cap Environnement, Colas Environnement, Biobasic, GRS Valtech, ICF Environnement, Serpol, Sita Remediation, Sol Environment, nombreux sont les acteurs qui mettent en œuvre cette technique pour ses avantages : applicable à de nombreux polluants, sur de grandes profondeurs en zone non saturée, elle est éprouvée, économique, et souvent associée à la biodégradation sur site. HUB-Environnement essaie de convaincre les maîtres d’ouvrage et les architectes d’aller dans ce sens et de faire l’effort d'intégrer ces procédés dans les projets d'aménagements. Ainsi, pour la première fois, un projet de dépollution par venting a été intégré dans le réaménagement d'une friche industrielle transformée en partie en parc urbain (Saint-Étienne, 2010). HUB-Environnement a ainsi travaillé avec les architectes urbanistes de la ville pour intégrer le process de dépollution in situ, en le fondant dans le mobilier urbain. La dépollution se fait ainsi de manière continue à moindre coût, sans geler ni ralentir la mise à disposition de l’espace urbain impacté par l’activité industrielle passée, et surtout en préservant l'environnement et le cadre de vie des citadins. « Pas besoin d’équipements lourds, ni de structures d’ingénierie élaborées et certifiées : le simple bon sens de consultants indépendants et expérimentés permet parfois l'émergence de solutions simples et particulièrement écocompatibles » souligne Hubert Bonin, gérant de HUB-Environnement et président de la commission « sites et sols pollués » de l’AFITE.
Sur une friche industrielle d’un ancien industriel de l’automobile, Soleo Services l'a également mise en place en Île-de-France pour traiter quatre zones de pollution localisées : une zone de pollution des sols en HCT jusqu’à 7,5 m de profondeur, deux zones distinctes de pollution des sols par des solvants chlorés (TCE, TCA…) jusqu’à 7,5 m. Les terres contaminées par des huiles lourdes (teneurs moyennes en HCT de 5 000 mg/kg et maximale de 10 000 mg/kg) ont été traitées par bioventing.
10000 mg/kg) ont été excavées et traitées sur site par biopile ventilée avec injection d'air chaud. Les sols contaminés par des solvants (une zone de 800 m² et une zone de 500 m²) ont été traités par traitement in-situ (venting avec injection d’air chaud). Au total, 28 aiguilles d’extraction et 10 aiguilles d’injection ont été mises en œuvre.
Les teneurs dans les gaz du sol atteignaient 750 mg/m³ en TCE et 1500 mg/m³ en TCA. L'objectif de 2000 mg/kg en HCT a été atteint en 6 mois sur les terres traitées en biopile ventilée. Les objectifs de 50 mg/m³ pour chaque composé ont été atteints en 9 mois par venting. Apinor a notamment mis en œuvre un traitement par venting au niveau des sols couplé à un traitement par stripping au niveau des eaux souterraines lors de la réhabilitation d’un site d'ennoblissement textile à Roubaix. Ces traitements ont ainsi permis de faire baisser la teneur en solvants chlorés sous les limites de détection en 4 mois.
Malgré son antériorité, la technique continue à évoluer : Sita Remediation a présenté à Pollutec 2010 le système VPA (Venting Passif) qui utilise, pour chaque puits d’extraction, des systèmes de pompage et de traitement des vapeurs autonomes, alimentés par des panneaux solaires. Le VPA constitue donc une variante du venting classique dans laquelle tout a été miniaturisé et optimisé en termes de consommation énergétique (un seul panneau solaire peut suffire à garantir le fonctionnement du dispositif). Ainsi, des sites à faible valeur foncière peuvent être traités à long terme en utilisant des énergies renouvelables, ce qui améliore encore l’empreinte environnementale de la filière.
En progression également, l'oxydation chimique (voir EIN n° 320) qui consiste à injecter un oxydant dans les sols en place, encore émergente en France, même si ICF Environnement a été la première société française à la mettre en œuvre en 2003. « Elle commence à se banaliser et profite de bons retours d’expériences » note Damien Faisan, Dekra. Quoique relativement coûteuse (entre 40 à 95 €/t de sols traités et 30 à 115 €/m³ d'eau traités), elle présente les avantages de s’appliquer aussi bien à la zone insaturée qu’à la zone saturée et concerne un large spectre de polluants parmi lesquels les BTEX, les HAP, les PCB, les COHV, les alcools aromatiques et les pesticides organiques. Elle est couramment proposée par Arcadis, Colas Environnement, GRS Valtech, Sita Remédiation, ICF Environnement ou Brézillon.
Le succès de la technique repose sur une bonne caractérisation du site et sur un choix judicieux de l’oxydant en fonction du ou des contaminants à traiter. Plusieurs oxydants peuvent en effet être mis en œuvre parmi lesquels le permanganate, le persulfate et le peroxyde d’hydrogène/réactif de Fenton. Ces oxydants permettent une dégradation des polluants en dioxyde de carbone, eau et chlorures. Pour Véronique Croze, Responsable du département travaux de dépollution chez ICF Environnement, l'oxydation chimique est une technique rapide et efficace pour les très fortes concentrations : « Son facteur d'abattement peut être de 100 à 1000 : de 10000 μg/ℓ de trichloroéthylène dans les eaux, on peut facilement descendre à 100 μg/ℓ sur une année, ce qu'un pompage ne pourra réussir que sur plusieurs années, voire une décennie. Dans ce cas, l'oxydation chimique sera moins coûteuse et, en termes de bilan coûts/avantages, permettra de résorber et donc stopper beaucoup plus tôt la progression du panache et donc de traiter des zones moins étendues, ce qui également coûtera moins cher au final ».
Dans le cadre d’un projet de traitement pilote, il peut s’avérer nécessaire de mettre en œuvre une station de traitement permettant une grande flexibilité à toutes les étapes : au pompage, à l'injection, sur les concentrations et même sur les différents types de produits. Züblin Umwelttechnik Gmbh a donc présenté à Pollutec 2010 une station d’essai qui offre la possibilité d'effectuer rapidement et de manière ciblée des essais pilote d’oxydation chimique in-situ pour déterminer quel sera l’oxydant le plus adapté à la problématique considérée. La station d’essai est composée de 2 containers de 10 pieds équipés de tous les dispositifs de sécurité requis. Le premier est utilisé pour le stockage et la préparation des produits et réactifs, le deuxième pour le dosage et l’injection sur un ou plusieurs puits avec régulation automatique des niveaux, débits et pressions.
L'approche géostatistique : une clé indispensable pour une réhabilitation des sites au meilleur coût
Les coûts de dépollution d'un site sont tels qu'une caractérisation fine de la pollution en place se révèle une étape préliminaire incontournable pour mieux dimensionner les opérations de dépollution. La mise en œuvre de la géostatistique dans cette phase de caractérisation a de nombreux avantages. Elle permet tout d’abord l'optimisation des coûts de campagnes d’échantillonnage en permettant l'identification de zones problématiques, sous-échantillonnées ou avec un niveau de pollution fortement variable. Elle fournit ensuite un support fiable au processus de décision en proposant un cadre probabiliste à l'étude de la contamination. Elle permet enfin l'optimisation des quantités de sol à excaver ou à traiter en offrant les outils nécessaires à une évaluation des risques de dépassement de seuil réglementaire. L'intégration de l'approche géostatistique dans le processus de décision se révèle capitale afin de garantir l'efficacité de la dépollution.
Une lance d'injection spécialement conçue permet d’ajuster avec précision la profondeur d'injection. Les paramètres physico-chimiques importants sont mesurés, enregistrés et contrôlés dans les puits d'injection et de surveillance à l'aide de sondes et/ou de prélèvements.
La désorption thermique progresse également
In situ ou sur site, la désorption thermique (entre 65 et 155 €/t de sols traités) progresse également, même si, comme l'observe Damien Faisan, « Certains polluants comme par exemple les HAP, qui étaient auparavant systématiquement traités par désorption thermique sont aujourd'hui plus fréquemment traités par des procédés biologiques dès lors qu’ils ne sont pas associés à d'autres polluants incompatibles ». Jean-Michel Brun, Directeur Général Délégué de GRS Valtech, cite également un élargissement vers certains PCB : « Les techniques biologiques peuvent répondre à un spectre de polluants assez large mais elles restent limitées à des concentrations assez faibles » explique-t-il.
Hors site, et pour certains professionnels cependant, cette technique des années 80-90 serait condamnée par les contraintes liées aux dépenses énergétiques et aux rejets en atmosphère. C’est en tout cas l'avis d’Hubert Bonin, qui a lui-même contribué à introduire cette technique en France (Chantier Akzo-Nobel à Ollainville), à une époque où l’énergie et les rejets atmosphériques n’étaient pas encore d’actualité. « Depuis les choses ont changé et la désorption thermique est une technique du passé à oublier de nos jours... La pratique thermique in situ est encore plus dommageable pour l'environnement. Sous nos climats, le sol contient au moins 20 à 30 % d’eau et cette eau est vaporisée par la désorption thermique in situ, induisant un surcoût énergétique particulièrement important et totalement inutile. Par ailleurs, le séchage intempestif du sol induit une forte dessiccation du sol avec des désordres géotechniques pouvant être très importants en milieu urbain. En milieu naturel, c’est la vie (faune et flore du sol) qui va être détruite, et cet aspect est plutôt navrant à une époque où nous essayons de développer des indices biotiques du sol pour caractériser son degré de pollution... ».
Pour Jean-Michel Brun, Directeur Général Délégué de GRS Valtech : « L’empreinte environnementale de la désorption thermique est parfaitement maîtrisée. La désorption thermique est encadrée par l'arrêté du 20 septembre 2002 aux contraintes drastiques en termes de contrôles et d’analyses sur les rejets. Nous savons et maîtrisons donc parfaitement ce que nous rejetons ce qui n’est pas forcément le cas pour bien d’autres techniques de traitement. La désorption thermique permet par ailleurs d’obtenir des résultats homogènes et de valoriser les terres directement sur le chantier. Nous travaillons par exemple sur une très grosse réhabilitation de site industriel en Serbie sur laquelle plus de 200 000 tonnes de terres seront traitées et valorisées sur le chantier. Ce traitement garde donc sa pleine légitimité, particulièrement sur les problématiques lourdes ».
Un point de vue partagé par Hervé Montaclair, Biogénie, « Elle reste, malgré son caractère énergivore, un outil incontournable lorsqu’il faut faire face à des problématiques lourdes telles que de fortes concentrations en HAP, par exemple, avec des volumes conséquents ».
La technique continue d’ailleurs à évoluer. GRS Valtech, qui privilégie les traitements in situ lorsque ceux-ci restent compatibles avec les délais de traitement et les usages futurs envisagés pour le site, propose depuis peu un traitement des terres par désorption thermique in situ utilisant des pointes chauffantes électriques appelé SVTE (Soil Venting Thermal Extraction). Ce procédé, qui a été spécialement dimensionné pour répondre aux problématiques de pollutions organiques en centre-ville, répond bien aux contraintes inhérentes à un traitement en milieu urbain : problèmes de stockage des terres, transport des matériaux impactés, etc. Le traitement par Soil Venting Thermal Extraction consiste à chauffer le sol en place au droit des zones contaminées à une température permettant d’augmenter suffisamment la tension de vapeur des polluants afin de faciliter leur extraction par venting. Sous l’effet de la chaleur, les polluants se trouvent à l'état gazeux puis sont captés par une série de puits d’extraction intermédiaires pour être traités par différents procédés (condensation, catalyse, photo-oxydation, lavage, charbon actif, etc.) suivant leur nature. Contrairement à d'autres techniques, le procédé utilise des pointes chauffantes électriques et exploite donc uniquement la conductivité thermique du sol. Comme ce paramètre est constant quelle que soit la nature des terres, [...]
Évacuer des déchets de marée noire : une mission d’experts
Amoco Cadiz et Torrey Canyon réveillent en chacun des images de catastrophes environnementales comme peu en avaient vu auparavant en France. Trente années sont passées et aujourd'hui l'île d'Er, située sur la commune de Plougrescant dans les Côtes d’Armor, est concernée par la réhabilitation de fosses qui abritent des déchets d'hydrocarbures issus des opérations de nettoyage. Burgeap a été mandatée par l'ADEME en tant que maître d’œuvre pour la conception des travaux d’évacuation de ces déchets de marée noire et pour réhabiliter les fosses. Cette mission de maîtrise d’œuvre de travaux de réhabilitation du site de l'île d'Er est le cas pratique par excellence pour illustrer un bilan coût-impact environnemental.
Réhabiliter un site naturel d’exception et le préserver : mise en œuvre d’un bilan coût-impact environnemental
Les contraintes environnementales ont été identifiées dans les études précédentes et prises en compte dans le choix de réhabilitation retenu : un impact visuel et environnemental évident sur un milieu naturel d’exception classé Natura 2000 avec des espèces protégées sur l'île ; un risque de chute sur site ; une prise en compte spécifique des modalités de transport des personnes, du matériel et des déchets ; l'enjeu sociétal fort entre les « gains environnementaux attendus » par rapport aux moyens à mobiliser, aux dépenses énergétiques, et à la perception par les parties prenantes des différentes options de gestion et leurs incidences potentielles sur les paysages et le milieu naturel, la définition de mesures particulières adaptées, en prenant en compte la présence d'espèces protégées.
Le Ministre retient alors le scénario de démantèlement des stockages et traitement hors site des déchets. La prise en compte des spécificités environnementales a été considérée dans les critères d’appréciation. Ainsi, le critère « incidence environnementale » a été retenu comme étant le critère prépondérant et associé à des mesures particulières. Il n'est pas limité à l'emprise de l'île d’Er. Il est également lié à la sécurité et à la gestion de la pollution accidentelle potentielle à prendre en compte jusqu’au lieu de stockage définitif des déchets. Ce dernier critère est lui-même lié au transport considéré à part entière dans le processus de traitement.
Solution de réhabilitation retenue
La solution globale proposée par Burgeap comporte des atouts non négligeables : l'intervention en dehors de la période estivale touristique et de la période de nidification des oiseaux sans déplacement ou destruction d’espèce protégée ; une gestion maîtrisée des transports de matériel et des équipes intervenantes ; un transport rapide des déchets vers le continent peu sujet aux aléas climatiques de la période hivernale ; des opérations éprouvées de purge de déchets simples minimisant les incidences environnementales sur l'île ; de très bonnes conditions de sécurité sur le parcours des déchets et les lieux de travail ; le choix d'un lieu de stockage intermédiaire à l'écart des habitations afin d'optimiser les nuisances envers les riverains ; une maîtrise du risque de pollution accidentelle pendant les travaux, notamment vis-à-vis des parcs ostréicoles présents à proximité de l'île.
Cette réhabilitation redonnera à l'île une physionomie proche de son état initial en privilégiant la restauration d’habitats naturels remarquables sans altération du patrimoine existant.
La performance du traitement n’est pas affectée par les hétérogénéités comme c’est le cas pour la plupart des autres techniques in situ qui sont tributaires de la conductivité hydraulique des sols. Suivant le type de polluant, les puits chauffants sont portés à une température comprise entre 400 et 800 °C. L’intérêt de la technique réside dans l’affranchissement des travaux d’excavation, tout en conservant des rendements de dépollution élevés (99 % d’abattement sur les composés organiques), notamment sur des terrains argileux ou marneux. Le traitement est uniforme, indépendamment des hétérogénéités du sol et des disparités de distribution des pollutions et la durée du traitement est plus courte que pour des techniques in situ classiques. « Ce procédé est actuellement mis en œuvre en France sur une ancienne usine de recyclage de solvants et en Suisse sur une usine en activité. Les résultats en termes d'efficacité du traitement sont satisfaisants et démontrent également une amélioration du bilan environnemental de la filière » indique Jean-Michel Brun. GRS Valtech étant producteur d’énergie verte grâce à son activité de valorisation électrique du biogaz, le bilan carbone lié à l'utilisation de l’énergie électrique pour le traitement in situ par Soil Venting Thermal Extraction est neutre aux bornes de GRS Valtech.
Deep Green, société belge spécialisée en traitement des sols par désorption thermique depuis 1999, a également développé un nouveau procédé baptisé Thermopile® avec lequel elle a réalisé plusieurs chantiers in situ en milieu urbain. Le procédé consiste d’abord à placer, selon un maillage préétabli, un réseau d’éléments chauffants dans la masse de terres polluées à traiter. Ces éléments chauffants sont constitués de deux tubes coaxiaux en acier, dont le tube extérieur est muni de perforations. Lors du fonctionnement de l'installation, ces éléments chauffants sont parcourus par des gaz à haute température (700-800 °C) en provenance de la chambre de combustion. Lors de leur circulation dans les tubes, ces gaz vont chauffer la terre par conduction et provoquer l’évaporation et la désorption des contaminants. Les polluants désorbés grâce à la montée progressive en température de la masse de terres polluées migrent vers les tubes d’où ils sont acheminés, par diffusion et convection, vers les tubes de circulation des gaz. Ils y pénètrent par les perforations pratiquées dans les parois latérales de ceux-ci, en raison de la dépression générée par la vitesse de circulation des gaz (effet Venturi). Une fois au sein des tubes, les gaz désorbés (vapeur d’eau et polluants) sont véhiculés par les gaz de chauffe vers la chambre de combustion. Ces gaz vont alimenter, en partie, le brûleur de la chambre de combustion. Cette utilisation du pouvoir calorifique des polluants comme source d’énergie pour le chauffage des terres réduit bien évidemment la consommation énergétique. « Cette technique allie les avantages du traitement in-situ (pas d’excavation, pas de transport, possibilité d’intervenir en milieu urbain, sous les bâtiments), sans présenter l’inconvénient de la lenteur des procédés in situ classiques » explique Michel Rodaer, directeur général de Deep Green. « Un chantier a pu ainsi être bouclé en moins de deux mois au centre de Bruxelles ».
Traitement des nappes : les techniques in situ dominent
Près de 6 millions de m³ d’eaux souterraines sont traitées chaque année en France selon l'étude Ernst & Young. 65 % font l’objet d’un traitement via des techniques in situ contre 35 % sur site après pompage. Les techniques dites “légères”, telles que l'atténuation naturelle contrôlée ou ren-
forcée, sont hélas encore peu utilisées en France alors qu’elles sont éprouvées et largement utilisées dans d’autres pays européens et américains.
Parmi les techniques utilisées en France par les entreprises de dépollution, le Sparging-Biosparging, la technique in situ la plus largement utilisée, représente près de 25 % du volume total traité. Parmi les avantages de cette technique, son empreinte environnementale limitée grâce à sa faible utilisation de consommables. Son coût moyen de 15 €/m³ traité est moins élevé que l’oxydation chimique in situ (35 €/m³) mais nettement plus élevé que le confinement hydraulique (5 €/m³) ou les barrières perméables réactives (10 €/m³). LISOC®, procédé distribué en France par PLM Equipements, appartient à cette famille de traitement. Ce procédé permet de traiter in situ la pollution des nappes en les saturant d’oxygène dissous. De faibles dimensions, il s’introduit dans des piézomètres de 50 mm de diamètre ou plus, et permet d’obtenir des teneurs de 40 à 200 ppm d’oxygène dissous en fonction de la profondeur, favorisant ainsi le développement des bactéries et la biodégradation des polluants. Le dispositif de transfert de masse repose sur un ensemble de microfibres hydrophobes poreuses qui fournissent une surface d’échange supérieure à 7000 m²/m³. Au niveau de l’ouvrage, la colonne d’eau est saturée en oxygène dissous de façon uniforme sur toute sa hauteur grâce à un courant de convection naturel. L’oxygène dissous diffuse autour du puits et favorise la mise en place des conditions de biodégradation des composés organiques. Le maintien de la pression de gaz à un niveau légèrement inférieur à la pression du liquide environnant garantit un transfert de masse efficace sans formation de bulles. D’autres gaz que l’oxygène peuvent être utilisés : il est par exemple possible d’utiliser de l’hydrogène, du méthane ou du propane pour biodégrader des solvants chlorés. LISOC® transfère ces gaz dans la nappe de la même manière que l’oxygène.
Sur site, la technique la plus utilisée reste le pompage suivi d’un traitement sur charbon actif. C’est aussi la technique la moins chère, avec le stripping sur site, avec un coût moyen de 5 €/m³ traité. Par contre, son empreinte environnementale est moins favorable du fait de la consommation énergétique et de l’utilisation de réactifs chimiques. Biogénie a mis en place un traitement de ce type sur un ancien dépôt pétrolier situé à proximité de Thionville (57) contaminé au cours de son exploitation par des hydrocarbures, BTEX et HAP (voir EIN n° 336). Le traitement de la nappe contaminée a été assuré par un pompage en fond de fouille suivi d’un traitement des effluents par filtration sur charbon actif et réinjection séquencée des eaux sur des tranchées afin d’assurer une recirculation des eaux sur le site. Alimenté par 6 pompes d’épuisement de 10 m³/h chacune, le traitement des eaux a été assuré par une installation de grosse capacité (60 m³/h, 24/24 h et 7 j/7) composée de deux bacs tampons pour décantation des fines et par 2 filtres à charbon actif à gros débits. Afin de sécuriser le process de traitement, Biogénie a mis en place un système de télégestion sur l’ensemble des installations permettant de détecter les anomalies potentielles et intervenir sur le schéma de pompage et de réinjection éventuel.
Colas Environnement, spécialisé depuis plus de 30 ans en dépollution, met en œuvre l’ensemble des solutions in situ. L’entreprise propose d’optimiser le taux de fonctionnement de ses unités par l’intermédiaire de systèmes éprouvés et d’un suivi à distance du fonctionnement de l’unité. Tout défaut, saturation des médias filtrants (charbon actif, sable...) sont signalés par mail ou sms ; ainsi, Colas Environnement s’engage à obtenir un taux de fonctionnement de 90 à 95 %, soit 24 h/24, 7 j/7, 335/365, la maîtrise des délais étant une des priorités des clients.
Toutes ces technologies, bien connues, ont fait leurs preuves. Elles sont sélectionnées puis mises en œuvre en fonction de critères techniques et économiques et la plupart des professionnels de la dépollution reconnaissent que les critères environnementaux, même s’ils progressent, sont rarement décisifs. « La crise économique de 2008 a nettement renforcé la primauté du critère économique », indique Jean-Michel Brun, GRS Valtech. Un point de vue partagé par Damien Faisan, Dekra, pour qui « Le critère économique reste prépondérant, même si certains maîtres d’ouvrage commencent à développer une vraie politique environnementale qui les conduit à explorer systématiquement les solutions susceptibles de limiter l’empreinte carbone sur les chantiers ». Mais les mentalités évoluent. Les assistants à maîtrise d’ouvrage incitent de plus en plus souvent les donneurs d’ordres à intégrer de façon systématique la dimension environnementale ne serait-ce que pour se prémunir d’éventuels coûts indirects. « On observe une sensibilité accrue des donneurs d’ordres et des maîtres d’ouvrages aux problématiques environnementales » indique Hervé Montaclair, Biogénie. « Les technologies douces et valorisantes sont mises en avant et favorisées à prix équivalent ». À plus long terme, la réflexion sur les impacts environnementaux des chantiers pourrait provoquer un glissement des critères de choix des techniques et filières et amener les maîtres d’ouvrage à modifier leurs priorités en faveur d’une meilleure prise en compte du critère environnemental face au critère économique.