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Optimisation de la déshydratation des boues biologiques : Deshydrix®

29 decembre 2000 Paru dans le N°237 à la page 52 ( mots)
Rédigé par : Ludovic HUITOREL et Yvette PESCHER

L?augmentation significative des volumes de boues issus des stations d'épuration prévue pour les années à venir rend cruciale en Europe la question de leur élimination. Ces boues étant constituées majoritairement d'eau, Rhodia Eco Services a travaillé sur l'optimisation des mécanismes intervenant dans le processus de conditionnement chimique pour favoriser l'extraction maximale de l'eau initialement contenue dans les boues. Le fruit de cette recherche s'appelle Deshydrix®, une gamme de produits permettant d'aller plus loin dans la déshydratation des boues et, par là même, de réduire la facture environnementale.

[Photo : Les volumes de boues urbaines en France devraient atteindre 1,3 million de tonnes de matière sèche d'ici 5 ans, soit une progression de 50 %]

La qualité en constante amélioration du traitement de l'eau et des effluents en Europe a pour corollaire l’augmentation du volume de boue à traiter.

Contexte et enjeux

En effet, les directives européennes imposent à la fois l'amélioration du taux de collecte des eaux usées et des taux d’abattement de pollution. Or, un meilleur traitement de la pollution se traduit par l’augmentation des quantités de boues, les sous-produits de dégradation de cette pollution, dont l'élimination pose des problèmes de plus en plus aigus.

Quelques chiffres

Aujourd’hui, la quantité de boues issues de l'épuration urbaine est estimée à 0,85 million de tonnes de matière sèche en France (source : Direction de l'Eau du Ministère de l’Environnement). À ceci il convient d’ajouter les boues issues de l’épuration industrielle, dont le volume est estimé à 0,5-

[Photo : Les voies d'exutoire en Europe (1997 - source Union Européenne - DG XII)]

0,6 million de tonnes de matière sèche, en l'absence de données officielles. Avec des perspectives d’évolution, dans les années à venir, tout à fait impressionnantes. Le volume de boues urbaines en France devrait ainsi atteindre 1,3 million de tonnes de matière sèche d'ici cinq ans, soit une progression de 50 %. Ceci alors que la France, où la qualité du traitement atteint déjà un niveau honorable, sera l’un des pays où la croissance des volumes de boues sera la plus faible ! Certains pays afficheront en effet une augmentation du volume de boues à traiter allant jusqu’à 300 %, ce qui portera la quantité de boues issues de l’épuration urbaine en Europe de 7,5 millions de tonnes de matière sèche aujourd’hui à 15-20 millions de tonnes en 2005, pour un coût de plus de 6 milliards d’euros par an.

Les exutoires possibles : valorisation, stockage, élimination...

Ces chiffres permettent de mesurer toute l'importance que prend la filière boues dans la facture environnementale. Ainsi, on estime aujourd’hui que les boues « pèsent » entre 30 et 50 % des coûts d’exploitation d'une station d’épuration, en fonction de l'exutoire possible.

Il existe en effet différentes voies d’évacuation des boues (cf. figure 1) qui, du fait de contraintes réglementaires de plus en plus sévères, sont fréquemment remises en question.

Ainsi, la filière « valorisation agricole » n’est aujourd’hui envisageable qu’à deux conditions : intérêt agronomique, c’est-à-dire teneur en matières fertilisantes, et innocuité vis-à-vis de l'environnement. Sans compter, pour les agriculteurs, l’enjeu que représente l’inquiétude grandissante des consommateurs dans le domaine de la qualité des produits alimentaires. L'accès à cette filière est en particulier de plus en plus difficile pour les boues d'origine industrielle.

La filière « mise en décharge » est, elle, fortement compromise à court terme, les décharges n’acceptant, à compter de 2002, que les déchets dits « ultimes ». Au vu de la part importante de cette filière en Europe, l'application de cette directive devrait être accompagnée de moratoires mais semble cependant inéluctable.

Seule la filière « incinération », ou plus largement les voies thermiques d’élimination, devrait croître fortement en Europe dans les années à venir, mais avec un coût qui reste important. L’Europe présente de plus des disparités importantes : l’épandage agricole, très largement majoritaire en France (60 %), est quasiment interdit aux Pays-Bas ou en Flandres... Cependant, à terme, deux voies d’exutoire devraient l'emporter : l’épandage et l'incinération. Et, ce qui est certain, c’est que le coût moyen de l’exutoire ira en augmentant.

[Photo : Les différentes étapes de la déshydratation des boues]

La déshydratation, un levier formidable

Les volumes de boues annoncés précédemment peuvent sembler impressionnants. Ils le sont encore davantage si l'on prend en compte le volume réel occupé par ces boues. En effet, si la notion de matière sèche est l’unité de mesure de référence, dans la réalité, ces boues contiennent beaucoup d’eau. Leur teneur en eau est de 97 % lorsqu’elles sont extraites du traitement d’effluents et de 83 % encore en moyenne après déshydratation, opération dont le but est

[Encart : Siccité : comparaison des performances DeshydriX / Produit de référence (cas réels) Types de boues biologiques : Boues industrielles (agroalimentaires) – Outil : Filtre à bandes – Siccité : Pct référence 14 % / DeshydriX* 20 % – Production de boues déshydratées/an : 2 571 tonnes (Pct référence) / 1 800 tonnes (DeshydriX*) Boues urbaines (aération prolongée) – Outil : Filtre presse – Siccité : Pct référence 35 % / DeshydriX* 37 % sans chaux – Production de boues déshydratées/an : 5 720 tonnes (Pct référence) / 31 130 tonnes (DeshydriX*)]
[Photo : La déshydratation représente une part mineure du coût global – Figure 2 : La déshydratation : un formidable levier]

pourtant de réduire les volumes à éliminer. Les 15 à 20 millions de tonnes de matière sèche citées représentent en fait 90 à 120 millions de tonnes de boues à évacuer par an !

On comprend donc le formidable effet de levier que représente la déshydratation, étape obligatoire de la filière de traitement des boues. La figure 2 montre la part du coût de la déshydratation dans l'ensemble de la filière boues. Cette part, quoique faible (de 15 à 25 %), a pourtant une incidence directe sur l'ensemble des coûts de la filière. Gagner quelques points de siccité* sur les boues entraîne une réduction de leur volume et donc de leur coût d’élimination. Rhodia Eco Services a estimé que le gain d'un point de siccité engendre une économie de 40 à 150 F par tonne de matière sèche, selon l'exutoire considéré. Or, actuellement, les couples traditionnels produit de conditionnement/outil de déshydratation, assez variés, semblent être arrivés à leur limite de fonctionnement (cf. encart 1).

* siccité : % de matière sèche dans la boue

nue dans la boue à traiter. Celui-ci est atteint par :

  • - modification des interactions dans lesquelles l'eau entre en jeu,
  • - structuration des flocs formés, en adéquation avec les contraintes mécaniques et hydromécaniques appliquées dans l’étape de déshydratation.

Deshydrix® est un système multifonctionnel conçu de telle sorte qu'il contienne les précurseurs des réactifs ou matières actives.

Technologies de déshydratation

[Photo : Tableau : couples usuels Produits de conditionnement / Technologies de déshydratation]

Filtre à bandes Filtre-presse Centrifugation Polyelectrolyte Fécial : 3-10 % — Polyelectrolyte Bitume Coagulant 1-5 €/tonne de matière sèche 10-22 % 25-32 % 10-28 %

[Photo : Graphique : parts respectives des technologies de déshydratation – France – Boues urbaines]

Encart 1 : La déshydratation : des pratiques variées

La genèse de Deshydrix®

Rhodia Eco Services s'est appuyé sur ses compétences de chimiste pour chercher à comprendre la structure de la boue afin d'agir sur elle et obtenir des boues plus aptes à la déshydratation.

La gamme Deshydrix® résulte d’un travail d'optimisation des mécanismes intervenant dans le processus de conditionnement chimique des boues, avec pour objectif d’extraire le maximum de l'eau initialement contenue dans la boue à traiter.

Lors de sa mise en œuvre, les flocs et les MVS sont modifiés chimiquement pour :

  • • libérer l'eau de façon maximale,
  • • conférer aux flocs la taille et la résistance à la compression et/ou aux cisaillements nécessaires à l’élimination optimale de l'eau dans l’outil de déshydratation.

La maîtrise de la siccité finale revient à maîtriser les interactions physico-chimiques eau-solide au sein de la boue. La déshydratation des boues représente un cas particulier où le challenge technique consiste à exacerber l’exsudation de l'eau dans un système complexe (matrice minérale et organique¹), où s'exercent des forces de natures diverses (hydrophobe-hydrophile, liaison hydrogène, électrostatique) sous l’action de contraintes hydrodynamiques.

Libérer l’eau de façon maximale

[Photo : Evolution du volume occupé par 1 m³ de boues initialement à 5 % de M.S. – Figure 3 : l’objectif de la déshydratation des boues : mieux gérer le départ d’eau]

¹ Nellenschulte, R.; Kayser. Wat. Sci. Tech. 36 (4) 293-306 (1997) D. Snidaro, F. Zartarian, F. Jovand, L.Y. Bottero, J.C. Block, J. Manem. Wat. Sci. Tech. 36 (4) 313-320 (1997).

[Photo : Figure 4 « L’effet » Deshydrix : siccité pouvant aller jusqu’à 15 %*.]

théoriques correspondant à l’élimination de l’eau d’adhésion, soit un gain d’au moins 5 points de siccité.

Résultats industriels : une avancée technique transformée en avantage économique

Une fois maîtrisée l’optimisation du conditionnement chimique des boues, il restait encore à démontrer que la nouvelle génération de produits issue de la Recherche de Rhodia Eco Services donnait satisfaction sur les points permettant de juger de l’efficacité de la déshydratation, soit :

  • - la siccité évidemment ;
  • mais aussi :
  • - la productivité des outils de déshydratation ;
  • - la texture de la boue (aptitude à la manipulation et à la tenue en tas) ;
  • - la qualité des retours en tête (phase « eau » issue de la déshydratation et retournant sur la station d’épuration).

Les résultats présentés ci-après proviennent d’essais réalisés dans les laboratoires de l’Office international de l’eau (OIE), au Centre national de Formation aux métiers de l’Eau à Limoges, et de nombreux essais industriels réalisés par les équipes techniques.

Conférer aux flocs la taille et la résistance nécessaires à l’élimination optimale de l’eau (cf. encart 2)

La structuration des agglomérats formés lors de l’ajout du réactif de conditionnement peut être assurée par le contrôle des mécanismes de coagulation ou hétérocoagulation et de floculation pour conférer à la boue conditionnée les propriétés recherchées.

Cette approche très innovante permet, selon les couples « type de boue/technologie de déshydratation » l’extraction de la quasi-totalité de l’eau libre et d’approcher les siccités théoriques.

On réalise la texturation de la boue au moyen d’une phase organominérale organisée. L’action de cette phase consiste à :

  • - rendre la boue moins compressible en établissant des interactions à courte distance orientation contrôlée en maintenant une mésoporosité (voir figure 4) ;
  • - permettre une meilleure percolation de l’eau au sein de la structure créée conduisant par là même à une siccité optimale. En effet, on évite ainsi la formation des poches d’eau qui se forment à l’heure actuelle dans le gâteau de filtration pendant la phase d’élimination de l’eau libre ;
  • - éviter la formation de macrofissures sous l’action plastifiante du réactif.
[Encart : CST : Temps de Succion Capillaire Coagulation / floculation optimisée : DESHYDRIX Larges flocs résistants et perméables < Dose optimale > Dose optimale Effet de l’augmentation de la DOSE * Bleu : Chlorure ferrique / chaux + Noir : Polyélectrolyte seul ou en association avec un polymère + Rouge : Deshydrix®, cinétiques de coagulation et floculation optimisées Encart 2 : modélisation du phénomène de coagulation/floculation d’une boue biologique avec les réactifs conventionnels et avec Deshydrix®]

L’expertise de Rhodia dans ce domaine a mis en évidence l’intérêt d’utiliser pour le conditionnement des boues un réactif multifonctionnel Deshydrix®, dont l’action consiste à maîtriser les cinétiques respectives des mécanismes de coagulation/hétéro-coagulation/floculation. La figure ci-dessus donne les différents modes de comportement des réactifs usuels et de Deshydrix® en corrélation avec la structure de flocs générés.

Productivité : résultats obtenus pour trois types de boues et trois technologies de déshydratation

Filtre à bande : 5 à 40 %
Centrifugeuse : 5 à 40 %
Filtre presse : 10 à 200 %*

* résultats obtenus par rapport à un référent FeCl₃ + chaux. Deshydrix® ne nécessite pas d’apport en chaux.

2 « Handbook on Water Treatment », Kemira Kemi AB Bit Termotet AB, Viken (1990).

P. Aarne Vesitind, Hazard. Ind. Wastes 27 395-404 (1995).

[Photo : Figure 5 – exemples de tenue en tas : Centrifugation et filtre-presse]

Les équipes techniques de Rhodia Eco Services, en particulier avec les grandes compagnies du traitement de l’eau, travaillent depuis un an sur toutes les typologies de boues et l’ensemble des technologies de déshydratation.

Augmentation de la siccité

Dans la plupart des combinaisons type de boues/technologie de déshydratation, un gain notable de siccité a été observé. Ce gain de siccité, de 2 à 10 points selon les cas, est bien entendu obtenu sans ajout de matière sèche et se traduit donc directement par une diminution des volumes de boues à éliminer.

Amélioration de la productivité des outils de déshydratation

Le conditionnement des boues avec Deshydrix® conduit systématiquement à un gain de productivité.

Le tableau de la productivité montre des résultats obtenus pour trois types de boues et trois technologies de déshydratation.

Amélioration de la texture de la boue

La figure 5 montre que l’effet structurant obtenu lors du conditionnement de la boue est maintenu après déshydratation ; la manipulation et la tenue en tas, paramètres essentiels pour faciliter l’épandage ou le compostage, sont fortement améliorées.

Amélioration de la qualité des retours en tête

L’emploi de Deshydrix® permet d’obtenir des filtrats de meilleure qualité :

  • – faible concentration en matières en suspension ;
  • – réduction importante de la charge en phosphore.

De plus, le phosphore retenu dans la boue déshydratée ajoute de la valeur agronomique à la boue.

Conclusion

En conclusion, Deshydrix® permet une amélioration globale de la déshydratation et, surtout, si l’on raisonne sur l’ensemble de la filière boues, une économie notable (cf. encart 3). Plus largement, les performances de ce produit se traduisent par une meilleure maîtrise de la facture environnementale du traitement des effluents.

[Encart : texte – Filtre Bande – 50 000 eq. Hab – Station (VIVENDI water) PARAMÈTRE  REFERENT  DESHYDRIX Produits (type/tonnes)  Polymère  Chaux  Deshydrix  Chaux Production de boues / Coût de l’exutoire  Stocké hors chau 17,50 %  27 %  Siccité avec chaux 23 %  30 %  Exutoire Épandage  Épandage  Production de boues 4 050 t/an  3 010 t/an Autres avantages  Productivité  + ? %  Valeur énergétique  ? BILAN Économie globale sur la filière : 8 %]
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