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Mesure de conductivité et de résistivité en ligne

28 février 1994 Paru dans le N°170 à la page 53 ( mots)
Rédigé par : David GRAY

Avec ses 70 années d'expérience dans l'analyse de l'eau, Leeds and Northrup fait état de ses réalisations en matière de mesures précises de conductivité de l'eau pure. Les propriétés de l'eau pure, la conception de la sonde, le traitement du signal et la compensation de température sont les clés d'un traitement fiable de l'eau.

La précision de la mesure de conductivité et de résistivité en ligne a fait des progrès spectaculaires. Les exigences liées à l’eau pure n’ont que récemment été rejointes par une instrumentation capable de prendre en compte ce paramètre difficile à saisir qu’est la qualité de l'eau. Des progrès ayant trait aux propriétés de l'eau pure, à la conception de la sonde de mesure, au traitement du signal et à la compensation de la température ont été réalisés. Viennent s’y ajouter les améliorations concernant les installations et l’expérience des opérateurs qui permettront d’atteindre les pleines possibilités de l’instrumentation. Ces progrès obtenus dans la mesure du paramètre le plus élémentaire qu’est la qualité de l’eau sont les clés d’un traitement fiable de cette dernière.

Lorsque les spécifications demandées pour une eau pure atteignent 17 ou 18 Mégohms pour l’eau de rinçage de composants ou 0,1 microsiemens/cm pour les condensats de centrales, les erreurs sur la mesure peuvent avoir des conséquences onéreuses. Donner de fausses indications d'eau pure risque en effet de nous faire sortir des spécifications et d’aboutir à des pertes de production ou à des problèmes de corrosion. Les erreurs de mesure quelles qu’elles soient sont toujours onéreuses. C’est pourquoi investir dans la recherche de précision se justifie par un rapide retour sur investissement.

Abstract

Les spécifications des appareils ne concernent généralement que la précision de la partie électronique. Cependant les utilisateurs sont intéressés par la précision globale qui inclut également la sonde de mesure ; de fait, c’est la sonde qui contribue à l'erreur la plus grande.

Conception de la sonde

La précision doit donc commencer par la sonde. Les sondes de conductivité/résistivité sont constituées de deux électrodes contenues dans un corps isolant, sous une forme géométrique particulière et connue. La distance séparant les électrodes, divisée par la surface effective de l’échantillon situé entre elles, détermine la constante de cellule. En prenant en compte cette constante de cellule, on obtient une lecture normalisée. Elle représente uniquement une propriété de l'échantillon, non de la sonde. Pour les sondes de laboratoire certifiées, faites de platine et de verre, la constante de cellule est ajustée à l’intérieur de tolérances étriquées, basées sur des solutions étalons de conductivités connues.

Les constantes des sondes industrielles de la nouvelle génération sont testées avec la même précision que celles de laboratoire. Mais plutôt que d’ajuster chaque cellule, la valeur exacte est certifiée sur la sonde par le constructeur. Elle est ensuite entrée comme donnée dans l’appareil de mesure au moment de l’installation, pour être appliquée aux mesures ultérieures. Cette correction peut améliorer de plusieurs pour-cent la mesure.

Le meilleur moyen pour tester une sonde en ligne est d’utiliser une sonde de référence, dont la constante a été vérifiée par rapport à une solution étalon primaire. Des précautions dignes d'un laboratoire et un pont AC à échelle étendue ou un ohmmètre de précision sont nécessaires. La sonde de référence ainsi étalonnée peut être alors utilisée avec un appareil portable pour comparer les autres sondes montées sur les lignes d’échantillonnage d’eau de haute pureté installées dans l’usine. Une compensation de température précise doit être faite sur chaque mesure. Le but de tout ceci est d’obtenir une sonde de précision fiable, testée à partir d’une source étalon réputée comme telle.

La sonde et ses électrodes

Pour que la vérification des sondes industrielles sur des applications en eau pure soit faite correctement, la sonde de référence ne doit pas être platinée. En fait il y a une autre possibilité permettant d’utiliser comme étalon, une sonde de type industriel certifiée : il existe des sondes industrielles de faible constante, constituées de tubes de titane rigides et concentriques ayant subi un traitement de surface spécial, lequel offre une surface suffisamment active et sans porosité. Elles ont prouvé leur efficacité et possèdent un temps de réponse plus rapide. Elles renferment également un capteur de température permettant une compensation de température précise. Les nouveaux appareils de mesure de dimensions réduites permettent des compensations de température plus précises. Ils conviennent également très bien en utilisation portable avec les sondes-étalons.

Installation des sondes

Après avoir considéré la géométrie des sondes, la surface des électrodes et les temps de réponse, la prise en compte des précautions d’installation est au moins aussi importante. Les chambres de circulation doivent obliger toute bulle d’air présente à sortir. Toute bulle d’air qui adhère à l’électrode réduira la surface efficace et conduira à l’affichage d’une valeur de conductivité basse (haute résistivité) fausse. Ceci est susceptible de se produire dans les unités où l'eau arrive froide et se réchauffe lorsqu’elle passe au travers des filtres et des déioniseurs. Les gaz sont moins solubles à haute tem-

pérature et basse pression et forment inévitablement des bulles. Des vitesses de circulation élevées à travers la chambre favorisent l’extraction des bulles d’air. Installer les sondes avec la sortie vers le haut est donc une nécessité.

Un autre facteur important concernant l’installation est l’emplacement de la sonde. Celle-ci doit être placée dans une partie de la conduite où le fluide circule correctement. Un montage en T, comme sur la figure 2a convient parfaitement. Si le diamètre de la conduite est plus grand que le diamètre du raccord de fixation de la sonde, l’utilisation d’un réducteur est à proscrire. Ces réducteurs créent un bras mort, comme on peut le voir sur la figure 2b. La sonde ne verra pas un échantillon représentatif et un temps de rinçage plus grand sera nécessaire pour régénérer ce volume mort. Une meilleure solution consiste à installer la sonde dans un coude ou sur le piquage d’une conduite de grand diamètre avec un raccord de la même dimension que la sonde comme indiqué sur la figure 2c.

Capacitance des fils

Les conductivimètres/résistivimètres sont comparables à des ohmmètres AC ; ils appliquent une tension à la sonde et mesurent le courant qui en résulte. Ils doivent utiliser un courant alternatif de fréquence suffisante pour minimiser les réactions chimiques de type électrolytiques à la surface des électrodes. L’une des difficultés rencontrée avec le courant alternatif est l’interférence capacitive. Dans de nombreuses unités, les sondes sont situées à de grandes distances des appareils de mesure. Les câbles mis ainsi en parallèle ont une capacitance qui produira un courant alternatif donnant des erreurs de conductivité positives : voir le haut de la figure 3, dans laquelle les condensateurs en pointillés représentent la capacitance des câbles. Le phénomène est aggravé dans le cas de l’eau de haute pureté, parce que la résistance mesurée est élevée et même une légère valeur de capacitance due aux câbles peut abaisser la valeur de la résistance à mesurer.

Autrefois, les effets de capacitance étaient supprimés en n’utilisant que des fréquences AC relativement basses, des longueurs de câbles réduites, des fils ayant un isolement diélectrique élevé, et en tenant compte des variations de phase au niveau du circuit de l’appareil. Une autre amélioration apparue avec l’avènement des appareils à technique numérique est l’utilisation de signaux carrés. On pourra éviter une dégradation modérée du signal carré due à la capacitance, laquelle pourrait affecter l’affichage, par des méthodes de mesures appropriées. La technique du signal carré peut également fournir des informations comme des diagnostics sur l’état de la sonde et du câble.

Un progrès important a été obtenu en isolant un des fils de l’électrode à l’intérieur d’un câble coaxial dont le blindage permet de supprimer l’effet de capacitance (les câbles isolés ne peuvent être utilisés qu’avec des appareils spécialement étudiés car cela pourrait à l’inverse augmenter la capacitance des câbles et, par la même, créer des erreurs). Cette caractéristique unique permet d’utiliser des sondes situées à une distance de plus de 300 mètres sans effectuer de calibration spéciale, tout en gardant la précision énoncée. La figure 3 inférieure indique le mode de câblage utilisé.

Plage de mesure

Dans la plupart des centrales électriques il est important d’avoir une grande plage de mesure. La conductivité peut descendre jusqu’à 0,055 microsiemens/cm mais des mesures allant jusqu’à 10 ou 20 microsiemens/cm sont souhaitables lors de conditions particulières comme les opérations de rinçage. Si l’on fait subir des variations de température importantes à des mesures non compensées, le rapport d’échelle dans ce cas est supérieur à 1000/1.

L’appareil à base de microprocesseur n’est pas concerné par ce problème car le niveau du signal délivré est fiable, couvrant toute la plage de mesure, en utilisant une technique maison. Ainsi, une grande précision est obtenue sur toute l’étendue de mesure affichée, grâce à un signal d’entrée qui ne peut être mis en doute.

Mesure de la température

La compensation de la température, en conductivité et en résistivité, est très importante dans le cas de l’eau de haute pureté, car la mesure est très affectée par les variations de température. Une précision au dixième de degré Celsius est nécessaire. Encore une fois, la précision commence avec la sonde. C’est pourquoi le capteur de température est monté à l’intérieur de la sonde pour permettre d’effectuer les deux mesures simultanément au même endroit, ce qui empêche l’échantillon d’être affecté par la différence de température ambiante qui pourrait exister si les capteurs étaient situés à deux endroits différents.

Le choix du compensateur de température fait par le fabricant peut être très important dans la pratique. Lorsque les distances entre la sonde et l’appareil de mesure sont importantes, des précautions doivent être prises afin d’éviter que le signal de mesure de température soit dégradé par la résistance des câbles. Mais si dans la sonde on intègre comme capteur de température une thermistance de précision ayant un coefficient de 365 ohms/°C à 25 °C, la résistance de ligne du câble devient négligeable. Elle donne une précision typique de 0,1 °C sans aucun réétalonnage même sur des distances de plus de 300 mètres.

La compensation de la température

La conductivité et la résistivité sont utilisées pour mesurer la pureté de l’eau et comme telles sont compensées à une température de référence de 25 °C. Ceci élimine les effets importants dus à la température dans le but de donner une mesure significative de la qualité de l’eau. Cependant, la précision de la compensation qui avait été obtenue jusqu’à présent laisse quelque peu à désirer.

Le besoin d’une plus grande précision de la compensation de température en conductivité et en résistivité dans le cas de l’eau de haute pureté, et la conscience que l’on en a eu, a changé de manière importante ces dernières années. Dans de nombreux pays, l’eau utilisée qui n’a pas la même température selon les saisons arrive au système de traitement et affecte la température du polisseur. Dans les centrales électriques les échantillons sont systématiquement conditionnés en température, mais la tolérance n’est souvent que d’une paire de degrés quand le système fonctionne correctement. Une précision de la compensation de température approchant ±0,1 °C peut même sauver la mesure si le conditionneur de température venait à faire défaut.

La difficulté de la compensation réside dans la conjugaison de deux effets différents : la relation qui existe entre la température et la conductivité/résistivité de l’eau de haute pureté avec les impuretés qui y sont dissoutes. Les essais consistant à combiner ces facteurs ou à ignorer l’un d’entre eux ont restreint la plage de la conductivité et/ou de la température afin de rester dans des précisions acceptables. La prise en compte d’une véritable compensation intégrant ces effets, avec des plages de variations importantes, est devenue possible avec l’apparition des appareils programmables à base de microprocesseurs.

Un travail considérable a été nécessaire pour établir une relation entre la conductivité de l’eau de haute pureté, sa

[Photo : légende : Cellules de mesure de laboratoire et industrielles.]
[Photo : légende : Installation de la cellule : a) T Ø 3/4'' ; b) dans un T 2'' avec un raccord de réduction (incorrect) ; c) dans un coude Ø 2''. ]
[Photo : Fig. 3 : Branchements de la cellule (Suppression de l’effet de capacitance)]

température et sa compensation. La relation a été décrite mathématiquement par un certain nombre d’équations. Celles développées par Light ont été largement utilisées car elles étaient en accord avec d'autres études et ont été vérifiées expérimentalement sur la plage de température de 15 à 67 °C avec une précision de ± 1 %. Elles ont été reconfirmées plus tard à partir d’expériences différentes. Quelques ajustements ont été apportés récemment, principalement dans le cas de température élevée.

Compensation de la température d’un sel comparée à celle d’un acide ou d’une base

Prendre en considération le type de trace de contaminant présent dans l'eau pure a conduit à prendre en compte un autre paramètre. Les effets dus à la température, sur des types de contaminants différents ont été étudiés. Des traces d’acide ou de base dans l’eau pure ont des propriétés totalement différentes de celles dues à l’impureté saline. Tous impliquent des bases et des acides. Cependant, en pratique, toutes les compensations de température en conductivité ou résistivité de haute pureté négligent le fait que le contaminant n’est pas toujours un sel.

Un contaminant, tel un sel neutre, permet, tout simplement, de mettre en jeu deux facteurs de compensation de température comme décrit plus haut, parce qu’un sel ionise indépendamment du degré d'ionisation de l'eau. Par conséquent, la contribution de l’eau sur la conductivité est indépendante de celle due à la présence de sel, même sur une grande plage de température. Les deux éléments sont à séparer et à compenser individuellement.

Une situation plus complexe peut se présenter lorsqu’il y a présence d’un acide ou d’une base dans l’eau. Leur contribution sur l'ion hydrogène ou hydroxyle supprime l’ionisation de l'eau. La part de la conductivité due à l’eau ne peut plus être décrite par les équations de l’eau de haute pureté énoncées plus haut, étant donné qu’il y a moins d’ions présents, provenant de l'eau. La concentration de tous les ions peut conduire à une relation plus complexe, laquelle dépend de la température. Une relation encore plus complexe existe dans une solution d'hydroxyde d’ammonium qui n’est que partiellement ionisée et qui, comme l'eau, change d’ionisation avec la température. En plus, sa contribution en ions hydroxyles supprime l’ionisation de l’eau. Cette relation est fondée sur la résolution des équations d’équilibres utilisant les données aux températures applicables.

[Photo : Electrode Durafet.]

Ces relations peuvent être vérifiées sur la figure 4, qui représente les courbes de conductivités / résistivités de contaminants représentatifs rencontrés dans les échantillons des centrales électriques et une approximation d’acides rencontrés dans les unités de rinçage de composants, par rapport à la température. Chaque groupe de trois courbes qui se coupent représente les concentrations de contaminants qui produisent des conductivités identiques à 25 °C (par exemple, le groupe de courbes se coupant à 0,25 µS/cm ou 4 MΩ cm représente 91 ppb de chlorure de sodium, 21 ppb d'acide chlorhydrique et 16 ppb d’ammoniac). Ceci permet de mettre en évidence l’influence de la température. La divergence de ces courbes au-delà de 25 °C montre que le choix du bon algorithme de compensation de température est essentiel.

Dans une centrale électrique, un échantillon traité à l’ammoniaque/amine suivra les courbes de l’ammoniaque. Les échantillons à conductivité cationique et les effluents des procédés à échangeur de cations suivront les courbes d'acide. Les bains de rinçage des composants suivront les courbes d’acide. L’effluent-type d’un déioniseur tendra à suivre les courbes des sels, en fonctionnement normal. Il est évident que lorsque les concentrations de contaminants sont voisines de zéro, toutes coïncident avec la courbe de l'eau pure, en bas de la figure 4.

L’eau de haute pureté et la technique de compensation des sels ont été largement décrites et introduites avec succès dans plusieurs appareils présents sur le marché. Une compensation ayant les caractéristiques de l'acide et de l'ammoniaque utilise cependant un algorithme breveté, unique, qui tient compte de la baisse d’ionisation de l'eau et également des différentes relations des acides et des bases avec la température.

Les courbes concernant l'acide et l’ammoniaque sont si proches l'une de l'autre dans la plage de température utilisée habituellement dans les procédés qu'une seule configuration de compensation pour cation/ammoniaque et rinçage de composants a été installée dans les appareils. La compensation des sels est l'autre sélection conventionnelle. Les deux algorithmes de la figure 4 sont inclus dans l’appareil pour permettre une sélection, après avoir terminé l’installation et donner des possibilités de comparaison.

[Photo : Fig. 4 : Conductivité/Résistivité de l'eau en fonction des contaminants usuels]

Conclusion

À la vue des grandes évolutions qui viennent d’être décrites, la modernisation des vieux équipements de conductivité/résistivité et la remise au top niveau des appareils peuvent diminuer de façon appréciable les coûts de l’eau purifiée. Dans une centrale électrique, ceci permet un plus grand contrôle du traitement chimique de l'eau et une réduction de la corrosion.

Remerciements

Adressés à E. W. Shaffer, qui a été à l’origine du développement innovant d’un grand nombre des améliorations décrites ici.

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